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Notre agent Ă  La Havane (roman)

Notre agent Ă  La Havane (Our Man in Havana) est un roman de Graham Greene paru en 1958.

Notre agent Ă  La Havane
Auteur Graham Greene
Pays Royaume-Uni
Genre roman d'espionnage
Version originale
Langue Anglais
Titre Our Man in Havana
Éditeur Heinemann
Date de parution 1958
Nombre de pages 273
Version française
Traducteur Marcelle Sibon
Éditeur Robert Laffont
Collection Pavillons
Date de parution 1959

Publié en 1958 chez Heinemann, éditeur habituel de Graham Greene, sous le titre original Our Man in Havana, ce roman d’espionnage parodique a été traduit en français par Marcelle Sibon pour Robert Laffont en 1959.

Il a donnĂ© lieu Ă  de nombreuses adaptations :

Contexte

L’ouvrage est directement inspirĂ© de l’expĂ©rience de l’auteur dans les services secrets britanniques pendant la Seconde Guerre mondiale (expĂ©rience qui a Ă©galement Ă©tĂ© la source d’un autre grand roman, Le Fond du problème). Ayant rejoint le MI6 en 1941, Greene avait eu vent d’une anecdote tirĂ©e de faits rĂ©els qui s’étaient dĂ©roulĂ©s au Portugal : un agent au service de l’Allemagne, dont le code Ă©tait « Garbo Â», avait adressĂ© aux services du Reich de faux rapports exagĂ©rant les initiatives des AlliĂ©s dans la PĂ©ninsule IbĂ©rique, uniquement pour grossir ses primes.

Désireux de tirer un scénario de film de cette histoire, Graham Greene écrivit en 1946 une ébauche, située en Estonie en 1938. Le film ne se faisant pas, il eut l’idée d’écrire un vrai roman, et de transposer l’action à Cuba, où il s’était rendu à de nombreuses reprises, et où la montée de la Guerre froide offrait des perspectives intéressantes pour une telle œuvre[1].

Intrigue

L’action se dĂ©roule Ă  Cuba, principalement Ă  La Havane, Ă  la fin du rĂ©gime de Fulgencio Batista. James Wormold, la quarantaine, est un ressortissant britannique Ă©tabli de longue date dans l’île, oĂą il tient un commerce d’aspirateurs. Sa femme l’a quittĂ© et il peine Ă  Ă©lever sa fille Milly, une adolescente de dix-sept ans aux goĂ»ts de luxe bien que catholique très croyante.

Alors que ses difficultés financières se font criantes, il est approché un jour dans son magasin par un dénommé Hawthorne, qui est un agent du MI6, le service d’espionnage britannique. Celui-ci lui propose de devenir honorable correspondant, et de recruter parmi les Cubains qu’il connaît des agents susceptibles de constituer un réseau au service de la Grande-Bretagne, alors que gronde la révolution castriste et que les menaces sur le régime se renforcent de jour en jour. Un peu effaré au début, Wormold voit dans cette offre l’occasion d’apporter à sa fille le confort dont elle rêve et accepte.

Communiquant avec son officier traitant au moyen d’un code puisĂ© dans Shakespeare, Wormold invente de faux agents (mais qui sont pour la plupart des vraies personnalitĂ©s locales), dont il empoche les salaires, et crĂ©e de toutes pièces des rapports, simulĂ©s, allant jusqu’à faire parvenir au MI6 des schĂ©mas d’une arme nouvelle, prĂ©tendument dĂ©ployĂ©e dans les montagnes, qui sont en fait la reproduction des Ă©lĂ©ments du nouvel aspirateur de sa firme, le bien nommĂ© « Atomic Â». Quoique mĂ©fiant, Londres tombe dans le panneau, et dĂ©cide de renforcer l’équipe en lui dĂ©lĂ©guant un radio et une assistante, la ravissante BĂ©atrice, avec laquelle il noue une relation se muant peu Ă  peu en amour.

Wormold, de plus en plus englué dans se mensonges, éprouve un scrupule et révèle la vérité à un vieil ami, un Allemand âgé qui vit dans le souvenir de sa jeunesse sous Guillaume II, le Docteur Hasselbacher. Il tente de tenir à l’écart un inquiétant officier de la police épris de sa fille, le redoutable et cruel capitaine Segura, mais celui-ci se montre de plus en plus pressant et semble flairer l’imposture.

La comédie bascule dans le drame quand se présente à La Havane un soi-disant concurrent de Wormold dans le commerce des aspirateurs, un nommé Carter. Bien que n’occupant qu’un rang effacé dans la communauté des expatriés, Wormold est curieusement appelé à prononcer un discours devant l’association des négociants. D'abord réticent à y aller, il apprend par Hawthorne que les ennemis veulent profiter du banquet pour l'empoisonner. Hawthorne insiste pour qu'il y aille, malgré le danger, afin de protéger l'informateur qui les a avertis de cette tentative d'assassinat, et Wormold se laisse convaincre car il se rappelle la mise en garde du Docteur Hasselbacher qui lui disait que les ennemis, s'ils n'arrivaient pas à éliminer Wormold, s'en prendraient à ceux qui lui sont chers.

Dans le hall de l'hôtel où a lieu la réception, Wormold est attendu par le Docteur Hasselbacher qui lui révèle, lui aussi, le projet d'assassinat. Wormold se rend néanmoins au banquet, où il retrouve Carter, qui lui propose un whisky. Il s’arrange pour éviter de le boire, et sème la confusion dans le service des plats, craignant une tentative d’empoisonnement. Cette crainte était fondée car le chien du maître d’hôtel (un Allemand) meurt après avoir absorbé le whisky servi par Carter à Wormold. Pour venger son échec, Carter tue le docteur.

EffrayĂ© et dĂ©sireux de venger son ami, Wormold imagine un piège lui permettant Ă  la fois de neutraliser Carter, dont il soupçonne le double jeu au profit des SoviĂ©tiques, et de liquider en beautĂ© son rĂ©seau fictif. Pour cela, il invite le capitaine Segura, qui est son partenaire habituel au jeu de dames, pour livrer une partie dans laquelle les pièces ont Ă©tĂ© remplacĂ©es par des bouteilles d’échantillons de whiskies et de Bourbons, le jeu consistant Ă  boire les « pions Â» capturĂ©s. Une fois Segura ivre, Wormold lui subtilise son revolver et photographie la liste des agents secrets de l’étranger opĂ©rant Ă  Cuba, que le policier avait l’intention de remettre Ă  ses supĂ©rieurs le lendemain. Ce document permettrait d’adresser au MI6 une dernière vraie information, puis de fermer le poste. ArmĂ© du revolver, Wormold abat Carter, puis il camoufle le microfilm de la liste au dos d’un timbre qu’il va faire parvenir Ă  son neveu pour sa collection.

Rentré chez lui, il avoue tout à Béatrice, et doit faire face à la colère du capitaine Segura, qui lui notifie un ordre d’expulsion. Il vend ses affaires et rentre en Angleterre.

Tournant le dos Ă  la morale, la fin du roman se dĂ©roule Ă  Londres, oĂą BĂ©atrice se voit affecter Ă  Djakarta, et oĂą une commission de discipline doit examiner le cas de Wormold. Un coup de théâtre se  produit alors : pour Ă©viter un scandale, et camoufler le fiasco Cubain Ă  la presse (le clichĂ© de la liste est voilĂ©), Wormold est non seulement blanchi par la commission, mais il est recrutĂ© par le service pour enseigner aux futurs agents la technique de mise en place d’un rĂ©seau, et se voit de plus accorder une dĂ©coration ! BĂ©atrice le rejoint Ă  son hĂ´tel et ils dĂ©cident de se marier, tandis que Milly affiche son contentement de passer une annĂ©e en Suisse dans une institution chic financĂ©e avec l’argent des dĂ©tournements de son père…

Accueil

Bien que l’auteur n’ait prétendu qu’à une œuvre de divertissement, des esprits chagrins ont déploré la caricature des services secrets de Sa Majesté qui sert de trame au roman.

Il en fut de mĂŞme du nouveau gouvernement installĂ© Ă  Cuba après la rĂ©volution, malgrĂ© la sympathie affichĂ©e par Graham Greene, homme de gauche, pour le nouveau pouvoir : sollicitĂ©es d’autoriser le tournage de l’adaptation cinĂ©matographique Ă  Cuba, les nouvelles autoritĂ©s se firent un peu prier, et Fidel Castro dĂ©plora que la peinture du rĂ©gime de Batista fĂ»t trop Ă©dulcorĂ©e.

Graham Greene revint sur ces critiques dans son autobiographie, Ways of Escape (publié en Français sous le titre Les Chemins de l'évasion), en disant que le vrai sujet de l’ouvrage n’était pas la justice et la révolution, mais l’absurdité du travail des agents secrets [2].

Le plus remarquable est la prescience de l’auteur derrière la parodie : le roman annonce la crise des missiles de 1962, en illustrant la panique qui s’empare des diffĂ©rents services devant les prĂ©tendues installations dĂ©couvertes dans les montagnes par le rĂ©seau fictif de Wormold[3].

Notes et références

  1. Voir l'introduction du roman rédigée par Graham Greene
  2. Page 257 de l’édition américaine chez Simon et Schuster de 1980.
  3. Une source très complète est le mémoire universitaire de Peter Hulme du département de littérature de l'Université d'Essex, Graham Greene and Cuba, our man in Havana ? consultable sur le site repository.essex.ac.uk

Liens externes

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