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Norme de Dedekind-Hasse

En algĂšbre gĂ©nĂ©rale — une branche des mathĂ©matiques — et plus prĂ©cisĂ©ment en thĂ©orie des anneaux, la notion de norme de Dedekind-Hasse gĂ©nĂ©ralise celle de prĂ©stathme euclidien. Elle a Ă©tĂ© formulĂ©e indĂ©pendamment par Richard Dedekind puis Helmut Hasse ; ils ont dĂ©montrĂ© qu'un anneau intĂšgre R est principal si et seulement s'il existe une telle « norme Â» sur R.

DĂ©finition

Une norme de Dedekind-Hasse[1] sur un anneau intùgre R est une application g de R dans l'ensemble ℕ des entiers naturels telle que (pour tous a et b dans R) :

  • g(a) = 0 si et seulement si a est nul ;
  • si b est non nul, alors
    • ou bien b divise a,
    • ou bien il existe des Ă©lĂ©ments p et q dans R tels que 0 < g(ap – bq) < g(b).

Lorsque p peut toujours ĂȘtre choisi Ă©gal Ă  1, on retrouve la dĂ©finition d'un prĂ©stathme euclidien.

Par restriction, et par dĂ©finition de l'idĂ©al engendrĂ© (a, b), il revient au mĂȘme de se donner une application v de R\{0} dans ℕ*[2] ou (par translation) dans ℕ[3] telle que (pour tous a et b dans R avec b non nul) : ou bien b divise a, ou bien il existe un Ă©lĂ©ment non nul r de (a, b) tel que v(r) < v(b). On appelle encore norme de Dedekind-Hasse une telle application v, et l'anneau R est dit presque euclidien[4] s'il en existe une. Certains auteurs[5] ajoutent dans la dĂ©finition la condition que v soit croissante pour le prĂ©ordre de divisibilitĂ©, c'est-Ă -dire que v(a) ≀ v(ab), mais nous allons voir que s'il existe sur R une norme de Dedekind-Hasse alors il en existe une croissante, et mĂȘme multiplicative (alors que dans le cas euclidien on sait seulement, Ă  partir d'un prĂ©stathme, construire un stathme c'est-Ă -dire un prĂ©stathme croissant).

Équivalence avec la principalitĂ©

Un anneau intĂšgre est principal si et seulement s'il est presque euclidien.

DĂ©monstration
  • Si R possĂšde une norme de Dedekind-Hasse[1] v et si I est un idĂ©al non nul de R, soit b un Ă©lĂ©ment non nul de I pour lequel v atteint sa valeur minimum. Il n'existe donc dans l'idĂ©al I aucun Ă©lĂ©ment non nul r tel que v(r) < v(b). Pour tout Ă©lĂ©ment a de I, il n'existe a fortiori aucun tel r dans le sous-idĂ©al (a, b), donc b divise a. Ceci prouve que I est engendrĂ© par b donc principal.
  • RĂ©ciproquement[2], si R est un anneau principal — donc factoriel — posons, pour tout Ă©lĂ©ment non nul a de R, v(a) = 2n oĂč n est le nombre de facteurs premiers d'une dĂ©composition de a, et vĂ©rifions que v est une norme de Dedekind-Hasse. Soient a et b deux Ă©lĂ©ments de R avec b non nul, et r leur PGCD, Ă©lĂ©ment non nul de (a, b). Si b ne divise pas a, r est un diviseur strict de b donc possĂšde moins de facteurs premiers dans sa dĂ©composition, c'est-Ă -dire que v(r) < v(b), ce qui conclut.

Exemples

D'aprĂšs ce qui prĂ©cĂšde, l'anneau OK des entiers d'un corps de nombres K est principal dĂšs que la valeur absolue de sa norme algĂ©brique NK/ℚ est une norme de Dedekind-Hasse. Cette condition suffisante est Ă©galement nĂ©cessaire[6] (ceci contraste avec l'euclidianitĂ© : l'anneau des entiers de certains corps quadratiques est euclidien sans l'ĂȘtre pour la norme algĂ©brique). En effet, dans OK (supposĂ© principal), soient a et b deux Ă©lĂ©ments non nuls, r leur PGCD et c = b/r. Comme dans la dĂ©monstration ci-dessus, si b ne divise pas a alors c est non inversible donc |NK/ℚ(b)| = |NK/ℚ(c)||NK/ℚ(r)| > |NK/ℚ(r)|.

L'anneau des entiers du corps quadratique imaginaire ℚ[i√n] n'est euclidien que pour les cinq premiers des neuf nombres de Heegner n = 1, 2, 3, 7, 11, 19, 43, 67 et 163. Pour les quatre derniers, il est cependant presque euclidien[1]. Pour ces quatre valeurs de n, comme –n est congru Ă  1 modulo 4, cet anneau est â„€[(1 + i√n)/2]. La norme, comme dans tout corps quadratique imaginaire, est simplement le carrĂ© du module.

DĂ©taillons le premier de ces quatre cas : n = 19. Soit ω = (1 + i√19)/2.

â„€[ω] est presque euclidien[7]

Soient dans cet anneau deux Ă©lĂ©ments non nuls α et ÎČ tels que ÎČ ne divise pas α. Il s'agit de trouver deux Ă©lĂ©ments Îł et ÎŽ de l'anneau tels que 0 < |γα/ÎČ â€“ ÎŽ| < 1. Pour cela, Ă©crivons α/ÎČ sous la forme (a + bω)/c avec c > 1 et a, b, c entiers premiers entre eux et posons Îł = d – e – dω et ÎŽ = q + fω, oĂč les entiers d, e, f, q, r sont choisis tels que ad + be + cf = 1, a(d – e) + 5bd = cq + r et 0 ≀ r < c. Alors, γα/ÎČ â€“ ÎŽ = (r – ω)/c est non nul et |γα/ÎČ â€“ ÎŽ|2 = (r2 – r + 5)/c2 < 1 dĂšs que c ≄ 3. Dans le cas restant c = 2 (et r = 0 ou 1), les nombres Îł' = (r – ω)Îł et ÎŽ' = (r – ω)ÎŽ + 2 conviennent car Îł'α/ÎČ â€“ ÎŽ' = 1/2.

â„€[ω] n'est pas euclidien[8]

Supposons qu'il existe sur cet anneau un stathme euclidien N et soit, parmi les Ă©lĂ©ments de â„€[ω] diffĂ©rents de 0 et des deux seules unitĂ©s 1 et –1, un Ă©lĂ©ment z pour lequel N atteint sa valeur minimum. Par division euclidienne de 2 et de ω par z relativement Ă  N (avec reste Ă©gal Ă  0, 1 ou –1), l'Ă©lĂ©ment z doit ĂȘtre Ă  la fois un diviseur dans â„€[ω] de 2 ou 3 et de ω, ω – 1 ou ω + 1, ce qui est absurde car l'entier |z|2 > 1 ne peut pas diviser dans â„€, Ă  la fois, 4 ou 9, et |ω|2 = |ω – 1|2 = 5 ou |ω + 1|2 = 7.

Notes et références

(en) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de l’article de WikipĂ©dia en anglais intitulĂ© « Dedekind–Hasse norm » (voir la liste des auteurs).
  1. (en) Michiel Hazewinkel, Nadiya Mikhaĭlovna Gubareni et Vladimir Vasil'evič Kiričenko, Algebras, Rings and Modules, vol. 1, Springer, coll. « Mathematics and its applications », (lire en ligne), p. 170.
  2. (en) « Dedekind-Hasse valuation », sur PlanetMath.
  3. (en) Ray Mines, Fred Richman et Wim Ruitenburg, A Course in Constructive Algebra, Springer, (lire en ligne), p. 119.
  4. (en) R. Sivaramakrishnan, Certain Number-Theoretic Episodes in Algebra, CRC Press, (lire en ligne), chap. 3, § 4 (« Almost Euclidean domains »).
  5. (en) John Greene, « Principal Ideal Domains are Almost Euclidean », Amer. Math. Month., vol. 104, no 2,‎ , p. 154-156 (lire en ligne).
  6. (en) WƂadysƂaw Narkiewicz, Elementary and Analytic Theory of Algebraic Numbers, Springer, , 3e Ă©d. (lire en ligne), p. 119.
  7. InspirĂ© des articles de Rabinowitch citĂ©s dans Nombre chanceux d'Euler. Voir aussi (en) Jack C. Wilson, « A principal ring that is not a Euclidean ring », Math. Mag., vol. 46,‎ , p. 34-38 (lire en ligne) et (en) Oscar A. Campoli, « A principal ideal domain that is not a euclidean domain », Amer. Math. Month., vol. 95,‎ , p. 868-871 (lire en ligne), transcrit dans Sivaramakrishnan 2006.
  8. InspirĂ© de (en) Kenneth S. Williams, « Note on non-Euclidean principal ideal domains », Math. Mag., vol. 48, no 3,‎ , p. 176-177 (lire en ligne), qui dĂ©montre cette propriĂ©tĂ© simultanĂ©ment pour n = 19, 43, 67 et 163. Campoli 1988 applique la mĂ©thode de Williams pour n = 19.
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