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Mouvement Misin tapa

Le mouvement Misin tapa (hangeul : ëŻžì‹  타파 욎동 ; RR : Misin tapa undong ; « mouvement pour renverser la superstition Â») est une violente sĂ©rie de vagues de rĂ©pression et de diabolisation du chamanisme corĂ©en et de la religion folklorique qui eut lieu Ă  diffĂ©rentes reprises de la fin du XIXe siĂšcle aux annĂ©es 1980.

Jangseung plantés à l'entrée des villages et censés protéger des esprits maléfiques dans le chamanisme coréen.

Commençant dans les années 1890 avec la montée de l'influence des missionnaires protestants en Corée, il culmine durant le mouvement Saemaul dans les années 1970 et provoque la destruction de la plupart des cultes et sanctuaires indigÚnes, qui sont remplacés en grande partie par le christianisme.

En corĂ©en moderne, misin signifie « illusoire» ou « fausses croyances spirituelles Â», et implique que les dieux et l’esprit des ancĂȘtres n'existent pas. Ce terme est adoptĂ© en japonais Ă  la fin du XIXe siĂšcle, et largement utilisĂ© par les missionnaires chrĂ©tiens pour encourager Ă  rĂ©primer la religion indigĂšne corĂ©enne.

Vagues de répression

Fin de la période Joseon (années 1890)

Le protestantisme s'enracine profondĂ©ment en CorĂ©e dans les annĂ©es 1890, Ă©tablissant un rĂ©seau d'Ă©coles et d'hĂŽpitaux. Les missionnaires protestants qualifient les pratiques religieuses indigĂšnes et les chamans de « culte du diable ». Ils mĂšnent des campagnes d'autodafĂ© d'idoles, de tablettes ancestrales, d'outils et de vĂȘtements de chamans, et de sanctuaires. Selon leurs rapports, tout cela aurait Ă©tĂ© « dĂ©truit comme s'il s'agissait des livres d'ÉphĂšse Â». Les missionnaires font Ă©galement circuler des histoires sur des chamans s'Ă©tant convertis au christianisme, devenant eux-mĂȘmes des dĂ©fenseurs de la destruction de la religion indigĂšne. La lutte religieuse entre le chamanisme et le christianisme est transformĂ©e en un motif littĂ©raire avec la nouvelle de Kim Tong-ni, Portrait d'un chaman.

Les missionnaires se découvrent des alliés parmi les intellectuels coréens dans les derniÚres années de la période Joseon. Ensemble, ils éditent le Tongnip Sinmun, le premier journal en coréen qui fait la promotion de l'iconoclasme et interpelle les fonctionnaires du gouvernement sur la nécessité d'éradiquer la religion indigÚne.

En 1896, la police commence Ă  arrĂȘter les chamans, dĂ©truire les sanctuaires et brĂ»ler les outils rituels. Ces Ă©vĂ©nements sont acclamĂ©s par le Tongnip Sinmun. À un moment donnĂ©, le journal en vient mĂȘme Ă  critiquer les moines bouddhistes.

Occupation japonaise (1910–1945)

Des campagnes contre les traditions religieuses indigĂšnes corĂ©ennes accompagnent Ă©galement l'annexion de la pĂ©ninsule corĂ©enne par le Japon. Les Japonais ont dĂ©jĂ  assimilĂ© la sĂ©cularisation Ă  la modernitĂ© dans leur propre pays. La police coloniale harcĂšle et parfois arrĂȘte les chamans, bien que les politiques officielles contre le chamanisme corĂ©en ne soient ni monolithiques ni cohĂ©rentes.

Comme dans la rhétorique du Tongnip Sinmun de la génération précédente, le gouvernement colonial dépeint la religion indigÚne et les chamans comme irrationnels et gaspilleurs, tout en ajoutant la notion que ces pratiques sont aussi non hygiéniques. Les citadins adoptent cette rhétorique, cherchant à se distinguer de leurs propres origines rurales. Les migrants dans les villes rejettent les rituels gut (en) de guérison et la médecine traditionnelle coréenne.

Ce paradigme est devenu central dans les projets de développement rural promulgués dans la Corée du Sud indépendante.

Gouvernement de Syngman Rhee (1948–1960)

Durant le gouvernement de Syngman Rhee, les chamans sont rĂ©guliĂšrement harcelĂ©s et arrĂȘtĂ©s par la police. Les protestants de l'Ăźle de Jeju mĂšnent une « campagne contre les dieux Â» avec laquelle ils tentent d'exterminer la tradition religieuse de Jeju et son panthĂ©on de 18 000 divinitĂ©s.

Mouvement Saemaul (années 1970)

Dans les années 1970, le président Park Chung-hee initie le mouvement Saemaul, une mobilisation de masse destinée à transformer la société rurale dans la forme et l'esprit, les communautés locales participant à divers travaux publics.

Sous la banniĂšre de cette rĂ©forme, un « mouvement pour renverser la superstition Â» officiel est fondĂ©. Sous les encouragements officiels, la police et les dirigeants locaux rĂ©priment les rites gut et les cultes locaux. Ils versent de l'essence sur les sanctuaires des villages et les incendient, coupent des arbres sacrĂ©s, dĂ©truisent des totems et des cairns, interdisent la pratique des gut et arrĂȘtent les chamans. Les historiens critiquent aujourd'hui le mouvement pour avoir portĂ© atteinte Ă  la tradition religieuse indigĂšne et avoir fait en sorte qu'une grande partie de la population sud-corĂ©enne adopte la religion chrĂ©tienne Ă©trangĂšre.

Postérité

À la suite de ces vagues de « mouvements anti-superstition Â», la religion indigĂšne corĂ©enne se retrouve sĂ©vĂšrement affaiblie. Depuis les annĂ©es 1980, cependant, la religion traditionnelle et le chamanisme connaissent une renaissance en CorĂ©e du Sud. Depuis les annĂ©es 1990, les chamans commencent Ă  ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme des « dĂ©fenseurs de la culture ». Aujourd'hui, le chamanisme corĂ©en est reconnu comme une « religion » lĂ©gitime en CorĂ©e du Sud, et il y a une large reconnaissance que le « muisme » (ou le sindo) — les noms corĂ©ens du chamanisme — est la religion naturelle des CorĂ©ens.

Notes et références

    Voir aussi

    Articles connexes

    Bibliographie

    • (en) Linda Connor et Geoffrey Samuel, Healing powers and modernity : traditional medicine, shamanism, and science in Asian societies, Westport (Conn.), Greenwood Publishing Group, , 279 p. (ISBN 0-89789-715-3, lire en ligne)
    • Laurel Kendall, Shamans, Nostalgias, and the IMF : South Korean Popular Religion in Motion, University of Hawaii Press, (ISBN 978-0-8248-3398-5 et 0-8248-3398-8)
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