Maurice Bologne
Maurice Bologne (Liège - Nalinnes ) est un homme politique et historien wallon, il est le fils de Joseph Bologne, homme politique socialiste, Bourgmestre de Liège en 1940.
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(Ă 83 ans) Ham-sur-Heure-Nalinnes |
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Biographie
Maurice Bologne défendit en 1928 la thèse du caractère ouvrier de la révolution belge de 1830 sous le titre L'insurrection prolétarienne de 1830 en Belgique.
Pour Maurice Bologne, la révolution de 1830 s'explique avant tout par les difficultés économiques rencontrées dans la partie méridionale du Royaume des Pays-Bas. Son livre a été réédité en 1979 par les éditions Kritak (Leuven), avec une préface de Gale et van Zileghme, en 1981 par la revue Critique Politique et cette année par les éditions Aden.
Maurice Bologne rencontra l'abbé Jacques Mahieu, participa à la fondation de Wallonie libre, devint sénateur du Rassemblement wallon de 1968 à 1974. Il figure parmi les signataires du Manifeste pour la culture wallonne de 1983.
Maurice Bologne est l'un des artisans de l'accord Schreurs-Couvreur qui prend place dans une longue série de contacts directs entre militants flamands et wallons qui seront à l'origine du fédéralisme en Belgique.
Complément :
Fils de Joseph Bologne et de Marie Kaulman, Maurice Bologne naît dans un milieu familial socialiste et est mêlé très jeune à l’activité politique de son père. Sa mère étant décédée en 1904, son père l’emmène régulièrement lors de ses activités, notamment à La Populaire, la maison du peuple de la coopérative liégeoise. Mais il dit avoir découvert la condition ouvrière, en compagnie de sa « gouvernante », originaire de Maastricht (pr. Limbourg, Pays-Bas), dont une parente tient aux Vennes une maison de logement pour ouvriers flamands.
Maurice Bologne poursuit des études à l’Athénée d’Ixelles à Bruxelles (pr. Brabant, arr. Bruxelles ; aujourd’hui Région de Bruxelles-Capitale) et à l’Athénée de Liège, puis des études de philosophie aux universités de Liège et de Bruxelles que son mariage précoce en 1921 et la nécessité de travailler ne lui permettent pas d’achever. Une décision administrative ministérielle de 1931 le dispense du diplôme nécessaire à une activité d’enseignement du latin, entamée de fait en 1922 à l’Athénée d’Aix-la-Chapelle (Allemagne) occupée alors par l’armée belge.
Maurice Bologne, après avoir été bibliothécaire en 1921 à l’Académie des Beaux-Arts de Liège, enseigne en Allemagne de 1921 à 1924, ce qui l’empêche de suivre régulièrement les cours universitaires. En 1925, il fait partie du cabinet de Camille Huysmans*, ministre des Sciences et des Arts, chargé de l’enseignement moyen francophone. Après un passage dans l’administration, Bologne devient professeur de latin et de grec dans des athénées de Laeken et d’Ixelles (pr. Brabant, arr. Bruxelles ; aujourd’hui Région de Bruxelles-Capitale) puis durant la Seconde Guerre mondiale à Charleroi. Sa nomination définitive intervient en 1948, il fait valoir ses droits à la pension en 1953 afin de pouvoir poursuivre ses autres occupations.
Pendant la Première Guerre mondiale, Maurice Bologne aide son père dans ses activités de renseignements et obtient la croix civique. En 1919, il crée un groupe de « scouts » socialistes, puis, en 1920, un groupe d’étudiants socialistes, la Fédération indépendante des étudiants socialistes (FIDES), et publie un organe, L’Avant-Garde. Il participe alors à divers congrès et actions étudiants. Il est également un conférencier actif dans l’arrondissement de Liège pour le compte de la Centrale d’éducation ouvrière du POB (CEO).
Maurice Bologne est d’extrême gauche, très favorable à la Révolution soviétique. Il se heurte vivement à son père à ce propos. Il fait partie au sein de la fédération bruxelloise de la tendance de gauche, représentée par Fernand Brunfaut. En 1927 encore, sa participation au Congrès international contre l’oppression coloniale et l’impérialisme, tenu à Bruxelles, conduit C. Huysmans à se priver de ses services pour éviter une interpellation au Parlement.
En 1932, Paul-Henri Spaak* demande à Maurice Bologne de collaborer au nouvel organe de gauche radicale, L’Action socialiste. De 1930 à la guerre, il est secrétaire de la Ligue ouvrière de Watermael-Boitsfort (pr. Brabant, arr. Bruxelles ; aujourd’hui Région de Bruxelles-Capitale). Membre du Personnel enseignant socialiste depuis 1922, il y est actif dès 1924. Les syndiqués sont surtout des instituteurs communaux, il participe donc à la création d’une section « État » au sein du syndicat, destinée à défendre les régents et professeurs dans une administration toujours dominée par le monde catholique, et ne disposant jusqu’alors comme représentation que d’un syndicat neutre, la Fédération de l’enseignement moyen officiel (FEMO).
Maurice Bologne participe à la création du Front littéraire de gauche en 1934, à l’aide à l’Espagne républicaine en 1936-1938. Il est membre du Comité de vigilance des intellectuels antifascistes (CVIA) en 1937-1938.
L’élément le plus caractéristique de l’activité de militant de base de Maurice Bologne est ailleurs, dans la rédaction en 1929, pour les Cahiers de l’Églantine, d’une forte brochure intitulée L’insurrection prolétarienne de 1830 en Belgique offerte « aux travailleurs de Flandre et de Wallonie, résultat d’une étude objective basée sur la conception marxiste de l’histoire appelée communément matérialisme historique. » Bien documentée, cette brochure met l’accent sur l’évolution économique, les conséquences de l’industrialisation, la crise économique et sociale de la fin des années 1820, la participation des classes populaires à l’émeute (24-25 août à Bruxelles 1830) et à la résistance à l’armée hollandaise (septembre 1830), l’opération de maintien de l’ordre social de la bourgeoisie en armes et sur la « récupération » du mouvement révolutionnaire par la bourgeoisie.
Sans entraîner vraiment le lecteur à partager la conviction annoncée qu’il y avait eu insurrection prolétarienne en 1830 en Belgique, Maurice Bologne souligne néanmoins avec vigueur les causes économiques et sociales de la révolte, l’aspect des contradictions entre classes sociales au cours des événements. Ce que reconnaît sans difficulté Henri Pirenne qui le remercie, dans une lettre du 1er décembre 1929, de son ouvrage. « ... il y a là certainement un phénomène très important et dont on n’a pas toujours tenu assez compte. Je crois que cela provient de ce que l’on n’étudie pas assez l’histoire comme elle doit l’être, c’est-à -dire comme une science d’observation analogue aux sciences sociales... »
En 1945, Maurice Bologne réaffirme son intérêt pour le matérialisme historique qu’il propose de faire figurer au programme des élèves de dernière année du secondaire, « eu égard à son influence considérable puisque les partis socialistes et communistes s’en réclament et qu’un état de l’importance de l’URSS en fait la base de ses conceptions. »
Militant socialiste, c’est pourtant la cause wallonne qui peu à peu attire toute l’attention de Maurice Bologne. Violemment hostile à la politique d’indépendance en 1936, francophile, il se heurte dans sa section locale à un groupe de militants flamands, partisans de Henri De Man, et du Plan de travail comme Bijtebier*, Tommelyn* qui exigent de lui, bilingue par ailleurs, de fonctionner dans les deux langues alors que, selon Bologne, la ligue ouvrière est essentiellement francophone et que les flamands originaires de Watermael-Boitsfort n’y participent pas.
« Wallon acharné », Maurice Bologne l’est depuis sa jeunesse. En 1918, il participe à la création de la Ligue des lycéens wallons à Liège avec G. Truffaut*, L.-E. Troclet*, M. Florkin, F. Schreurs. En janvier 1938, il est au Congrès des socialistes wallons. En février 1938, il fait la connaissance de l’abbé Mahieu qui l’entraine définitivement dans le combat wallon. Il est également cofondateur de la Société historique pour la défense et l’illustration de la Wallonie dont il devient le secrétaire général, société réactivée en 1960 sous le nom d’Institut Jules Destrée.
Durant la Seconde Guerre mondiale, Maurice Bologne et son épouse, Aimée Lemaire, professeure de langue ancienne, participent clandestinement à de nombreuses activités wallonnes, à Bruxelles d’abord puis à Charleroi. Il est l’un des animateurs du mouvement, Wallonie libre, et de son organe qui porte le même nom, du Conseil économique wallon, de la section de Charleroi dès 1943, de l’Association pour le progrès intellectuel et artistique de la Wallonie en 1943. Il est l’auteur du manifeste, Wallons toujours.
Maurice Bologne adhère au Front de l’indépendance. Reconnu résistant armé pour la période allant du 1er septembre 1941 au 3 septembre 1944, résistant par la presse clandestine du 1er septembre 1940 au 3 septembre 1944, il obtient la médaille de la résistance et la médaille commémorative de la guerre 1940-1945 avec deux sabres croisés.
Maurice Bologne, devenu secrétaire général de Wallonie libre après la guerre, participe à tous les congrès wallons et collabore au Gaulois de 1945-1954. La lutte contre le retour sur le trône de Léopold III retient toute son attention et confirme ses convictions fédéralistes et favorables à un fédéralisme européen. Il se heurte régulièrement au Parti socialiste belge (PSB), à la Fédération générale du travail de Belgique (FGTB), à la Gauche, au Parti communiste, qui privilégient toujours l’unité de la classe ouvrière face au capitalisme national.
La tournure prise par la grande grève de l’hiver 1960-1961, principalement wallonne, l’engagement définitivement fédéraliste d’André Renard, la création du Mouvement populaire wallon (MPW), les difficultés « communautaires » croissantes, relancent l’activisme wallon. En mars 1961, Maurice Bologne adhère au MPW, devient membre du Conseil général et vice-président de la régionale de Charleroi. En 1964, il participe à la fondation du Front wallon pour l’unité et la liberté de la Wallonie dont il devient président en 1965. C’est la rupture définitive avec le PSB.
Avec deux autres formations, ce mouvement constitue en 1965 le Rassemblement wallon. De 1968 à 1974, Bologne est sénateur de ce parti représentant l’arrondissement de Charleroi-Thuin.
De son passé socialiste, Maurice Bologne conserve deux références précieuses, celle de Proudhon quand il défend et explique les formes du fédéralisme qu’il prône, celle de Jules Destrée* comme éveilleur de la conscience wallonne et défenseur de sa culture. Il contribue, de ce point de vue, de l’extérieur et avec difficulté, à l’orientation adoptée aujourd’hui par le PS sous la direction de Guy Spitaels*. « Qui dit liberté dit fédération ou ne dit rien. Qui dit république, dit fédération ou ne dit rien. Qui dit socialisme, dit fédération ou ne dit rien. »
POUR CITER CET ARTICLE :
https://maitron.fr/spip.php?article139781, notice BOLOGNE Maurice. par Jean Puissant, version mise en ligne le 1er mars 2012, dernière modification le 16 décembre 2021.