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Massimo Pilotti

Massimo Pilotti (nĂ© le Ă  Rome et mort le dans la mĂȘme ville) est un juriste, un magistrat italien, et un expert juridique de rĂ©putation mondiale. Il a su associer, dans ses diffĂ©rentes fonctions, une loyautĂ© envers son pays et une rectitude dans les relations internationales. Il a contribuĂ© Ă  l'introduction d'un magistĂšre juridique dans le jeu diplomatique, et a Ă©tĂ©, notamment, le premier prĂ©sident de la Cour de justice de l'Union europĂ©enne au Luxembourg.

Biographie

CarriĂšre italienne

Massimo Pilotti commence sa carriÚre en Italie comme juge en 1901. En 1913, il est promu à Rome. Puis, en 1923, il est nommé juge de la cour d'appel, toujours à Rome, et enfin, en 1926, juge de la Cour de cassation. En 1930, il devient premier président de la cour d'appel de Trieste, puis en 1944, procureur général auprÚs de la cour de cassation. En 1949, il devient le premier président honoraire de la cour de cassation italienne[1].

RÎle dans le référendum institutionnel italien de juin 1946

En , un rĂ©fĂ©rendum sur les institutions est organisĂ© en Italie, soumettant au peuple le choix entre un rĂ©gime monarchique et un rĂ©gime rĂ©publicain. Le vote se dĂ©roule les 2 et . Des rĂ©sultats provisoires sont annoncĂ©s le , les rĂ©sultats dĂ©finitifs Ă©tant conditionnĂ©s Ă  la prise en compte de quelques donnĂ©es manquantes et Ă  l'examen des recours. La Cour de Cassation, dont Massimo Pilotti est le procureur gĂ©nĂ©ral, est chargĂ©e de vĂ©rifier la conformitĂ© des opĂ©rations de vote et de dĂ©pouillement, et d'examiner les recours, dans le cadre de la loi Ă©lectorale. Le dĂ©lai d’incertitude entre la fin du vote et la proclamation dĂ©finitive des rĂ©sultats crĂ©e des tensions importantes dans le pays. 21 000 recours sont prĂ©sentĂ©s, mais une grande partie peut ĂȘtre rapidement Ă©liminĂ©e. Une des contestations nĂ©cessite toutefois un rapport du procureur gĂ©nĂ©ral. Cette contestation porte sur l’établissement de la majoritĂ©. Des monarchistes estiment qu’il faut prendre en compte non pas la majoritĂ© des votes exprimĂ©s, mais « la majoritĂ© des votants » comme stipulĂ© dans un article de la loi Ă©lectorale passĂ© un peu inaperçu[2].

Le procureur Pilotti se prononce en faveur de cette contestation, qu'il juge recevable. Dans son rĂ©quisitoire, il estime que l’esprit et la lettre des dĂ©crets ainsi que la jurisprudence prĂ©voient le dĂ©compte des votants, sans exclure les votes blancs ou nuls. Cette interprĂ©tation de la loi est potentiellement lourde de consĂ©quences. L'Ă©cart est si faible entre les partisans de la RĂ©publique et les partisans de la Monarchie que la prise en compte des votes blancs ou nuls pourrait priver les rĂ©publicains de la majoritĂ© absolue. Mais la Cour lui donne tort et balaye l'argumentation de son procureur en trois temps. D’une part, elle considĂšre que le vote, comme acte juridique, manifeste une volontĂ© et que le vote blanc ou nul peut ĂȘtre assimilĂ© Ă  l’absence de manifestation de volontĂ©. D’autre part, elle identifie un dĂ©cret prĂ©cisant l'article mise en avant dans la requĂȘte, et ne retenant dans le dĂ©compte que les votes « validement exprimĂ©s ». Enfin, elle rappelle qu’il n’est nulle part fait mention de la nĂ©cessitĂ© d’une majoritĂ© absolue[3] - [2]. La RĂ©publique italienne est proclamĂ©e dĂ©finitivement le .

CarriĂšre internationale

Massimo Pilotti poursuit en parallÚle un parcours plus international. Durant l'entre-deux-guerres, il met son expertise juridique au service du gouvernement italien, dans les relations internationales, et joue tout d'abord un rÎle majeur à la conférence de la paix de Paris, en 1919, en qualité de membre de la délégation italienne. Tout au long des années 1920, il accompagne les délégations de son pays, comme conseiller juridique, dans diverses conférences internationales, notamment la conférence de Spa en 1920, et celle de Locarno en 1925[4]. De 1924 à l932, il est nommé délégué adjoint, pour l'Italie, à la Société des Nations, puis, de 1932 à 1937, secrétaire général adjoint de cette Société des Nations. Il y excelle par son charme et son esprit de conciliation[5]. Le secrétaire général est un Français, Joseph Avenol. Exerçant ces fonctions au moment de guerre italo-éthiopienne, deux pays membres de la Société des Nations, Massimo Pilotti s'emploie à obtenir de l'organisation internationale qu'elle ménage l'Italie[6], bien que celle-ci soit en position d'agresseur, et qu'elle ne décide que de sanctions limitées. Il est aidé par la position de la France et de la Grande-Bretagne, pays dont la préoccupation à l'époque est essentiellement de ne pas pousser Mussolini dans les bras d'Hitler[7].

MĂȘme si l'on peut se montrer critique a posteriori sur les Ă©checs politiques et les insuffisances de cette SociĂ©tĂ© des Nations, cette organisation a transformĂ© le dialogue politique transnational, en mettant en place un ensemble d'outils et de savoir-faire (arbitrages et mĂ©diations, ingĂ©nierie institutionnelle internationale...) qui porteront leurs fruits aprĂšs la Seconde Guerre mondiale[4].

En 1944, il devient prĂ©sident de l'Institut international pour l'unification du droit privĂ©, organisation intergouvernementale indĂ©pendante dont le siĂšge est Ă  Rome, puis membre de la cour permanente d'arbitrage, organisation internationale et juridiction arbitrale permanente dont le siĂšge est Ă  La Haye, aux Pays-Bas. Enfin, de 1952 Ă  1958, il termine ce parcours au sein de institutions internationales en Ă©tant le premier prĂ©sident de la Cour de justice de l'Union europĂ©enne qui se met en place[1] - [note 1]. Jean Monnet estime dans ses MĂ©moires que Massimo Pilotti, « juriste italien de grande rĂ©putation », sut « donner du lustre » Ă  cette juridiction europĂ©enne, calme et discrĂšte, dont les arrĂȘts n'ont jamais Ă©tĂ© contestĂ©s[8].

Publications

Il est Ă©galement l'auteur de plusieurs travaux juridiques, parus notamment dans la Revue de droit international de GenĂšve, dans la Rivista di Diritto Pubblico de Rome et dans la Rivista di Studi Politici Internazionali de Florence[1].

Notes et références

Notes

  1. Cour de justice de la Communauté européenne du charbon et de l'acier, en 1952, qui devient la Cour de justice de la Communauté économique européenne en 1957, puis la Cour de justice de l'Union européenne en 2009.

Références

  1. « Les neuf membres de la Haute AutoritĂ© du pool charbon-acier abandonnent toutes leurs attributions nationales », Le Monde,‎
  2. FrĂ©dĂ©ric Attal, « La naissance de la RĂ©publique italienne (2-18 juin 1946) », Parlement(s) : Revue d'histoire politique, vol. 1/2007, no 7,‎ , p. 141-153 (lire en ligne)
  3. (it) NiccolĂČ Rodolico - Vittorio Prunas Tola, «Libro azzurro sul referendum 1946», Superga editrice, Torino, 1953.
  4. Guillaume Sacriste et Antoine Vauchez, « La ‘guerre hors-la-loi’ (1919-1930). Les origines de la dĂ©finition d’un ordre politique international », Actes de la recherche en sciences sociales, nos 151-152,‎ , p. 91-95 (lire en ligne)
  5. Julien Luchaire, Confession d'un Français moyen, Maison d'édition Leo S. Olschki, , p. 122
  6. (en) John Hathaway Spencer, Ethiopia at Bay : A Personal Account of the Haile Selassie Years, Tsehai Publishers, , 409 p., p. 35-38
  7. Gontran de Juniac, Le dernier Roi des Rois. L'Éthiopie de HaĂŻlĂ© SĂ©lassiĂ©, Paris, L'Harmattan, 1994, p. 143
  8. Jean Monnet, MĂ©moires, Éditions Fayard, , 642 p. (lire en ligne)

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes


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