Manufacture de draps des Saptes
La manufacture de draps des Saptes à Carcassonne[1], créée au XVIe siècle, est relancée en 1667 par Colbert pour développer l'industrie du drap, notamment à l'exportation.
Localisation
Les Saptes se trouve sur la commune de Conques-sur-Orbiel à environ 6,5 km au nord-est du cœur de Carcassonne, et à moins de 250 m de l'Orbiel[2].
Historique
Les frères Saptes, venus de Tuchan, s'installent au XVIe siècle près de Conques sur Orbiel et Carcassonne où ils concentrent en un même lieu toutes les opérations nécessaires à la fabrication des tissus. La famille propère est la troisième génération abandonne la fabrique pour la magistrature. L'entreprise, bien qu'ils l'aient vendue en 1620, continue à porter leur nom et devient en 1666 la première manufacture royale du Languedoc, avec à la clé le soutien de l'État[3].
En 1667, Colbert échange des courriers avec le financier Pierre Louis Reich de Pennautier au moment de la création de la compagnie. Ce dernier se montre optimiste sur les perspectives commerciales[4]. Colbert ne débloque cependant que la moitié du prêt d'État prévu en 1669. Il s'assure d'abord qu'il parvient à faire venir des ouvriers des Pays-Bas pour importer une technologie efficace, même si une activité drapière existe dans la région de Carcassonne depuis 1508.
D'autres manufactures royales sont créées : La Grange des Prés à Pézenas, La Trivalle[n 1], La Terrasse près de Rieux[n 2] puis Auterive[n 3], Aubenas en Ardèche[n 4], et, près de Carcassonne, Cuxac[n 5] et Pennautier[n 6], propriété de Pierre Louis Reich de Pennautier, qui tisse des draps à partir de la laine des moutons de la Montagne Noire toute proche et regroupe jusqu'à 2 000 ouvriers au XVIIIe siècle.
Colbert crée en particulier en 1667, un an après, la manufacture des draps de Villeneuvette[5], bénéficiant de la rivière Dourbie, à trois kilomètres de la ville de Clermont-l'Hérault. Ce projet concurrent, dans une zone rurale éloignée des métropoles, est considéré comme insensé par ses détracteurs mais devient rapidement un des joyaux de la Couronne, profitant aussi du nouveau port de Sète créé à la même époque par Colbert et relié également à Carcassonne par le canal du Midi, qui ouvre à la même époque[6].
La manufacture de draps des Saptes reçoit en 1669 de l'État la somme de 20 000 livres, soit la première moitié d'un prêt de 40 000 livres, pour son développement[4]. En 1670 est créé, à nouveau à la demande de Colbert[7], la Compagnie du Levant chargée de vendre les draps languedociens à Constantinople, Smyrne, Alexandrie. Le projet ne fut cependant concrétisé qu'en 1682, avec pour actionnaire Pierre Louis Reich de Pennautier, déjà actionnaire de la Manufacture de draps des Saptes.
Il est alors décidé de former une nouvelle société libre de tous engagements, qui prend à sa charge l'exploitation des deux manufactures de Clermont-l'Hérault et Saptes. L'intendant reçoit l'ordre d'inviter les États du Languedoc à prêter leur concours pécuniaire. À la fin de 1682, la nouvelle société est fondée sous la raison sociale Hindrel, Thomé, Frédian et Varennes pour exploiter les deux fabriques et produire une quantité fixée de draps fins pour le Levant. En retour, le roi promet de lui payer la prime de la pistole pour chaque pièce fabriquée.
Les résultats restent longtemps modestes : dans les années 1690, les exportations au Levant de deux manufactures dépassent à peine 1 000 pièces de drap par an[8].
L'entreprise de draps emploie en 200 ouvriers en 1689 et le renom des draps des Saptes est mondialement reconnu. Mais à la mort du directeur, Noël de Varennes, en 1699, (Noël de Varennes n'est pas mort en 1699 mais plus tôt, puisque certain texte historique évoque Jaqueline de Trotereau sa femme, déjà veuve en 1697) le travail cesse[9], le site de la manufacture des draps de Villeneuvette étant plus approprié grâce à la présence d'une rivière[10].
Notes et références
- Notes
- La manufacture d'État de la Trivalle se trouve à Carcassonne. Elle est créée par Guillaume Castanier en 1694. En 1696, elle devient manufacture royale. Peu à peu délaissée, elle décline et disparaît avec la mort de François Castanier vers 1750. En 1949 une tentative de reprise est marquée par un décret du président de la République autorisant la société anonyme dite Compagnie de la Manufacture de la Trivalle. Mais l'industrie drapière est remplacée dans la région par le commerce des chiffons en gros. (Voir « Manufacture de la Trivalle », sur monumentum.fr (consulté en ).)
La Trivalle
Elle fait faillite en mars 1789 (voir Minovez 2000, p. 37). - La manufacture d'État de la Terrasse est créée par le hollandais David Gurssc le 5 janvier 1698 au lieu-dit la Terrasse (voir Minovez 2000, p. 22 et carte p. 24) sur l'actuelle commune de Carbonne, au sud du bourg du côté de Rieux-Volvestre (voir « La Terrasse, hameau sur la commune de Carbonne, carte interactive » sur Géoportail. Couches « Cartes IGN classiques » et « Hydrographie » activées).
Voir aussi :- « Fonds Potier de la Terrasse », Notice descriptive, sur archives.haute-garonne.fr ;
- « Fonds Potier de la Terrasse », Inventaire, sur archives.haute-garonne.fr.
- La manufacture d'Auterive est à 23 km est-nord-est de la Terrasse (voir Géoportail dans la note précédente ; les distances à vol d'oiseau se mesurent avec l'outil « Mesurer une distance » dans l'onglet « Outils cartographiques » à droite (symbole de petite clé plate)).
Elle est créée le au plus tard 9 février 1726 par Marcassus, déjà à la tête de la manufacture d'État de la Terrasse depuis 1711 et qu'il a réussi à redresser et à rendre florissante. Elle est érigée en manufacture royale le 12 ou le 30 septembre 1736. (Voir Minovez 2000, p. 27, dont photo des anciens bâtiments de la manufacture d'Auterive ; et carte p. 24.) - Aubenas voit d'abord une manufacture de cadis et serges en 1707, puis la manufacture royale de laine et draps de François Goudard en 1733, la manufacture royale de coton et mouchoirs de François Ruelle en 1735, et vers les années 1750 une ou des manufactures de soie. (Voir « Aubenas, cité industrielle des XVIIIe et XIXe siècles », exposition présentée à Aubenas par Mémoire d'Ardèche et Temps Présent, 11 septembre - 3 octobre 1999, sur memoire-ardeche.com.
La manufacture de draps d'Aubenas devient manufacture royale le 11 juillet 1734 (Voir Jean Charay -responsabilité1= abbé, Développement économique d'Aubenas du XIIIe au XIXe siècle (Texte revu des conférences données par l'auteur à Aubenas en 1956-1957, et publié à l'occasion du bicentenaire du tribunal de commerce d'Aubenas en Vivarais), Aubenas, impr. Liénhart, , 132 p. (présentation en ligne), p. 110. - La manufacture de draps de Cuxac se trouve à la Bonde. Elle est créée en 1694 par Guillaume III Castanier, comme simple succursale de la manufacture royale de la Trivalle à Carcassonne : cette dernière ne produit pas assez pour satisfaire les commandes venant du Levant. la Bonde connaît des difficultés dès le début du XVIIIe siècle et doit fermer ses portes.
En 1715 Guillaume IV, fils de Castanier, relance l'affaire et fait agrandir la manufacture. En 1718 la manufacture de la Bonde devient établissement royal.
Voir « La Manufacture Royale de Cuxac-Cabardès », sur oocities.org (consulté en ). - La manufacture de drap de Pennautier est fondée en 1696 par Pierre Louis de Reich de Pennautier. En 1729 elle devient manufacture royale.
Voir « Page d'histoire de Pennautier », sur pennautier.fr.
- Références
- Thomson 2003, p. 144.
- « les Saptes sur la commune de Conques-sur-Orbiel, carte interactive » sur Géoportail. Couches « Cartes IGN classiques » et « Hydrographie » activées
- Claude Marquie, « La draperie carcassonnaise du Prince Noir à Colbert », sur ladepeche.fr, (consulté en ).
- Thomson 2003, p. 146.
- « Page d'histoire sur Villeneuvette »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), sur pat.hernandez (cliquer sur "Archive.is" pour accéder à la page).
- « À visiter sur la route départementale D906 en direction de Bédarieux »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), sur sports-sante.com.
- [Boissonnade 1902] P. Boissonnade, « Colbert, son système et les entreprises industrielles d'État en Languedoc (1661-1683) », Annales du Midi,‎ 1902, xive année, p. 16 (5-49) (lire en ligne [sur archive.org], consulté en ).
- [Markovitch 1976] Tihomir J. Markovitch, Histoire des Industries Françaises. Les industries lainières de Colbert à la Révolution, Genève / Paris, librairie Droz, , 501 p., sur books.google.fr (ISBN 978-2-600-04075-4, lire en ligne), p. 245.
- Béto., « 1699, décadence de la manufacture des Saptes », sur ladepeche.fr, (consulté en ).
- Minovez 2000, p. 22.
Bibliographie
- [Caliste 2016] Lisa Caliste, « Faire des draps à Lodève, Clermont-l'Hérault et Bédarieux. Apports de l'archéologie industrielle à l'histoire de l’industrie lainière en Languedoc (1650-1900) », Patrimoines du Sud, no 3,‎ (lire en ligne [sur journals.openedition.org], consulté en ).
- [Chaussinand-Nogaret 1970] Guy Chaussinand-Nogaret, Les financiers de Languedoc au XVIIIe siècle (thèse de troisième cycle, École Pratique des Hautes Études — VIe Section, Centre de Recherches Historiques), Paris, S.E.V.P.E.N., coll. « Affaires et gens d'affaires » (no 35), , 8 pl. + 375 (OCLC 287112, BNF 35240046, SUDOC 001924265, résumé).
- [Mathorez & Michel 1919] Jules Mathorez, Histoire de la formation de la population française. Les étrangers en France sous l'Ancien Régime, t. 2 : Les Allemands, las Hollandais, les Scandinaves (2 tomes, dont t. 1 : Les causes de la pénétration des étrangers en France. Les Orientaux et les extra-Européens dans la population française), Paris, librairie ancienne Édouard Champion, éditeur, , 437 p., sur gallica (lire en ligne), 265 et 304.
- [Thomson 2003] (en) J. K. J. Thomson, Clermont de Lodève 1633-1789. Fluctuations in the Prosperity of a Languedocian Cloth-Making Town, , 520 p., sur books.google.fr (ISBN 978-0-521-54109-1, lire en ligne). .
- [Minovez 2000] Jean-Michel Minovez, « Les manufactures royales de draps fins du Midi toulousain et leurs entrepreneurs au XVIIIe siècle », Annales du Midi, vol. 112, no 229 « Société, culture et mentalités à Toulouse, XVIIe – XXe siècle »,‎ , p. 21-40 (lire en ligne [sur persee]). .