Ludu Daw Amar
Ludu Daw Amar (orthographiĂ© aussi Ludu Daw Ah Mar; en birman áá°ááŻáá±á«áșáĄááŹ, Ă prononcer: [lĂčdáč” dÉÌ ÊÉmĂ ]), nĂ©e le et morte le , est une journaliste, femme de lettres et dissidente birmane. Elle est surtout connue comme journaliste, crĂ©atrice avec son mari du premier quotidien en langue birmane, dissidente, opposante tenace aux rĂ©gimes militaires, en plus de son travail sur les arts traditionnels birmans, le thĂ©Ăątre, la danse et la musique, et de ses traductions de l'anglais.
Biographie
NĂ©e dans une vieille famille de Mandalay Ă©tablie dans le nĂ©goce de tabac et de cheroots (cigares manufacturĂ©s), et engagĂ©e dans le monde politique[1] - [2], Amar est la quatriĂšme d'une famille de douze enfants[2]. Elle Ă©tudie Ă la Mission Baptiste Ă©cole amĂ©ricaine, Ă la Haute Ăcole Nationale dirigĂ©e Ă lâĂ©poque proviseur Abdul Razak (qui est devenu ultĂ©rieurement ministre de l'Ăducation dans le cabinet d'Aung San et a Ă©tĂ© assassinĂ© avec lui et d'autres en ), puis Ă lâUniversitĂ© de Rangoun. Une de ses premiĂšres Ćuvres est une traduction de Maurice Collis en 1938[2], mais elle publie aussi des articles, sous les noms de plume de Mya Myint Zu et Khin La Win, dans divers journaux et magazines, dont un pĂ©riodique de Rangoun dirigĂ© par le journaliste U Hla, son futur mari[1].
Lorsquâune grĂšve Ă©tudiante Ă©clate en 1936, Amar et U Hla participent Ă ce mouvement[3] - [4], qui campe notamment sur les terrasses de la pagode Shwedagon. En 1939, elle se marie avec U Hla. Ils implantent ensemble le siĂšge dâun groupe de presse et une imprimerie, la Kyipwa Press, (la presse du progrĂšs) Ă Mandalay[1] - [2] - [4].
Lorsque la Seconde Guerre mondiale se traduit par lâinvasion japonaise du territoire birman, en 1942, la famille fuit vers le nord, mais continue Ă publier son magazine. Daw Amar traduit l'un des trois rĂ©cits de guerre du soldat Ă©crivain japonais Hino Ashihei, éșŠăšć ”é (en français : Les BlĂ©s et les Soldats), publiĂ© en 1938 au Japon[2]. Elle traduit Ă©galement une Ćuvre de l'auteure tchĂ©coslovaque Wanda Wasilewska en 1945. Les deux Ă©poux sont impliquĂ©s dans la rĂ©sistance contre l'occupation japonaise, et crĂ©ent lâorganisation de rĂ©sistance Asha Lu Nge (La jeunesse asiatique) Ă Mandalay[1].
En 1945, Ă la fin de la guerre, U Hla lance un bimensuel appelĂ© Ludu (áá°áᯠáá»áŹáááș), avec Amar comme rĂ©dactrice en chef adjoint. Le Ludu Daily est lancĂ© avec succĂšs l'annĂ©e suivante, et est lu particuliĂšrement par les opposants Ă lâoccupation britannique[5]. Câest le premier quotidien en langue birmane[6]. Le couple est alors surnommĂ© Ludu U Hla et Ludu Daw Amar. Leurs commentaires et analyses politiques participent Ă l'aspiration du pays Ă l'indĂ©pendance[1].
Un matin de , peu aprĂšs lâobtention de lâindĂ©pendance par la Birmanie, lâimprimerie Kyipwa Yay Press Ă Mandalay est dynamitĂ©e par les troupes gouvernementales : le couple Ludu leur semble trop radical et favorable aux communistes alors quâune faction trotskiste du parti communiste birman dirigĂ©e par Thakin Soe, le Parti communiste du drapeau rouge, sâest insurgĂ©e dans la rĂ©gion de Naypyidaw [2][3].
En 1953, Amar voyage Ă l'Ă©tranger Ă la ConfĂ©rence de Copenhague, Ă la ConfĂ©rence mondiale de la paix Ă Budapest, et au 4e Festival mondial de la jeunesse et des Ă©tudiants dĂ©mocratique Ă Bucarest. Au mĂȘme moment, le gouvernement de la Ligue anti-fasciste pour la libertĂ© du peuple (AFPFL) de U Nu arrĂȘte comme prisonnier politique son mari U Hla. Il passe plus de trois ans dans la prison centrale de Rangoun, jusqu'Ă sa libĂ©ration en . Ils ont alors cinq enfants, le plus jeune Ă©tant Nyein Chan (surnommĂ© Nyi Pu Lay, nĂ© en 1952 et futur Ă©crivain)[2]. En , U Hla est arrĂȘtĂ© de nouveau, jusqu'en mai de l'annĂ©e suivante.
En 1962, les militaires prennent le pouvoir. Cette dictature militaire est dirigĂ©e par Ne Win, qui connait personnellement Ludu Daw Amar et son Ă©poux depuis les annĂ©es dâinsurrection contre les britanniques. Ne Win met en place un systĂšme idĂ©ologique oĂč se mĂȘlent nationalisme, marxisme et bouddhisme, sous le nom de « Voie birmane vers le socialisme ». MalgrĂ© les liens passĂ©s avec ce nouvel homme fort, Ludu Daw Amar et son Ă©poux se rangent dans les opposants au rĂ©gime et nâĂ©chappent pas aux reprĂ©sailles[1]. En , le Ludu Daily et sa sociĂ©tĂ© dâĂ©dition sont fermĂ©s. Amar continue Ă Ă©crire, mais prĂ©fĂšre se focaliser sur les chanteurs et acteurs birmans d'avant-guerre[2]. Deux de ses fils passent dans la clandestinitĂ©. Son fils aĂźnĂ©, nĂ© en 1941, est tuĂ© dans une purge sanglante, en 1967, au sein du parti communiste birman, un remous de la rĂ©volution culturelle en cours en Chine. Son deuxiĂšme fils, nĂ© en 1945, est Ă©galement arrĂȘtĂ© pour ses activitĂ©s politiques Ă l'UniversitĂ© de Mandalay en . Il est dĂ©tenu sans inculpation ni jugement jusqu'au mois de . En 1978, Ludu Daw Amar est arrĂȘtĂ©e et emprisonnĂ©e durant plusieurs mois avec son mari et leur plus jeune fils, Nyi Pu Lay. Son mari U Hla meurt en 1982, aprĂšs 43 ans de mariage, cinq enfants et six petits-enfants. Une de leurs imprimeries brĂ»le en 1984, dans un grand incendie qui anĂ©antit le cĆur de Mandalay. Ne Win quitte le pouvoir et laisse la place Ă dâautres gĂ©nĂ©raux. Le plus jeune fils de Ludu Daw Amar, Nyi Pu Lay, est de nouveau arrĂȘtĂ© en , et condamnĂ© Ă 10 ans de prison. Ludu Daw Amar reste pour autant une des opposantes emblĂ©matiques de la junte militaire[2] - [1].
Ă partir de 1985, annĂ©e de ses 70 ans, l'anniversaire de Daw Amar est cĂ©lĂ©brĂ© annuellement par le monde de l'art, de la littĂ©rature et du journalisme en Birmanie. L'Ă©vĂ©nement est devenu une convention non officielle des dissidents suivie par les yeux attentifs des services de renseignement militaire. Les cĂ©lĂ©brations de cet anniversaire ont lieu, plusieurs annĂ©es durant, au monastĂšre de Taung Laylone, Ă Amarapura, Ă 11 km au sud de Mandalay, jusqu'en , oĂč les autoritĂ©s imposent un changement de lieu[7]. Ludu Daw Amar meurt le Ă l'Ăąge de 92 ans[2].
Principales publications
- Thamada Ho Chi Minh, sur le Président Ho Chi Minh) 1950.
- Hsoshalit taingpyi mya tho, sur les pays socialistes, 1963.
- Pyithu chit thaw anupyinnya themya, sur les artistes les plus populaires en Birmanie, 1964; couronnĂ© du Prix national de LittĂ©rature de la Birmanie la mĂȘme annĂ©e.
- Aung Bala, Po Sein, Sein Gadoun, consacré à des artistes du théùtre birman, 1967.
- Shwe Yoe, Ba Galay, idem, 2 volumes, 1969.
- Shweman Tin Maung, consacrĂ© de la mĂȘme façon Ă la biographie dâun artiste birman renommĂ©, 1970.
- Anyeint, spectacles traditionnels birmans en plein air, 2 volumes 1973.
- Gaba akyizoun sa ouk (célÚbres monuments birmans), 1974.
- Sayagyi Thakin Kodaw Hmaing une biographie du poĂšte, Ă©crivain, et homme politique birman Thakin Kodaw Hmaing, 1976.
- Chindwin hma pinle tho Du Chindwin à la Mer : un récit de voyage, 1985.
- Myanma Mahagita, musique classique birmane, 1989.
- Sayleik nÚ Lutha, consacré au tabac, co-écrit avec U Hla, 1990.
- Mandalaythu Mandalaytha mya, 1991.
- Yadanabon Mandalay, Mandalay, Kyama do Mandalay, sur Mandalay, 1993
- Thathana dazaun Sayadaw gyi mya, religieux bouddhistes, 1994.
- Kyama do nge nge ga, « Quand nous étions jeunes », 1994.
- Myanma hkithit bagyi, sur lâart birman moderne, 1997
- Amei shaysaga â « Les vieilles paroles de la mĂšre », 2 volumes en 1997, volume 3 en 2007.
- ShissÚ thoun hnit shissÚ thoun gun, «Quatre-vingt trois ans Quatre-vingt trois mots » 1998
- Taung Asha badinbauk mya, « FenĂȘtre sur lâAsie du sud », 1990
- Nge ga kyun dÚ hkinpunthe tho, « Mon mari, mes jeunes années », 2001
- Lwanthu sa, « Nostalgie », 2003.
- Mya Myint Zu Short Stories, 2006
Principales traductions dâouvrages Ă partir de leur Ă©dition en anglais
- Trials in Burma de Maurice Collis, 2 volumes, 1938.
- Sandamala de Maurice Collis, 1940.
- Wheat and Soldiers de Hino Ashihei, 1945.
- The Rainbow de Wanda Wasilewska, 1945.
- Listen Yankees de C. Wright Mills, 1963.
- The Other Side of the River d'Edgar Snow, 1966.
Notes et références
Notes
- (en) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de lâarticle de WikipĂ©dia en anglais intitulĂ© « Ludu Daw Amar » (voir la liste des auteurs).
Références
- Shwe Demaria 2013, p. 2656.
- Allott 2008, The Guardian.
- Myint 2014, Himal Southasian.
- Allott 2015, p. 1467.
- Shwe Demaria 2013, p. 2656-2657.
- Robert 2005, Radio France internationale.
- RSF 2006.
Voir aussi
Bibliographie
Par date de parution.
- Juliette Robert, « Dans la Birmanie des militaires », Radio France internationale,â (lire en ligne).
- (en) RĂ©daction BurmaNet, « Democratic Voice of Burma: Burmaâs âMotherâ author Ama supports call for prisonersâ release », BurmaNet News,â (lire en ligne).
- RSF, « Lâanniversaire de Ludu Daw Amar sous la surveillance de la Junte », Reporters sans frontiĂšres,â (lire en ligne).
- « Reporters sans frontiĂšres rend hommage Ă Ludu Daw Amar, la "MĂšre des journalistes birmans" », Reporters sans frontiĂšres,â (lire en ligne).
- (en) Anna Allott, « Ludu Daw Amar », The Guardian,â (lire en ligne).
- Sabai Shwe Demaria, « Ludu Daw Amar [Mandalay 1915 â id. 2008] », dans BĂ©atrice Didier, Antoinette Fouque et Mireille Calle-Gruber (dir.), Le dictionnaire universel des crĂ©atrices, Ăditions des femmes, , p. 2656-2657.
- (en) Geoff Myint, « Sourcing critique », Himal Southasian,â (lire en ligne).
- (en) Anna Allott, « Ludu Kyi-Bwa-Yay Press », dans Derek Jones (dir.), Censorship: A World Encyclopedia, Routledge, , 2950 p. (lire en ligne), p. 1467-1468.