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Luce d'Eramo

Luce d’Eramo, nom de plume de Lucette Mangione (Reims, - Rome, ), est une écrivaine italienne.

Luce d'Eramo
Biographie
Naissance
Décès
(Ă  75 ans)
Rome
SĂ©pulture
Nationalité
Formation
Activités
Autres informations
Lieu de détention

Biographie

Née en 1925, à Reims (France), de parents italiens[1] - [2], Luce d’Eramo, nom marital de Lucette Mangione[3], qu’elle conserve même après son divorce avec son mari Pacifico d’Eramo, vit jusqu’à l’âge de quatorze ans à Paris. Son père Publio Mangione, illustrateur et peintre, a vécu à Paris entre 1912 et 1915 : puis il a combattu durant la Première Guerre mondiale, en 1918 est devenu pilote d’avions, ensuite il s’est établi de nouveau en France où il devient entrepreneur. La mère de Lucette, Maria Concetta Straccamore Mangione, a la charge de secrétaire du parti fasciste à Paris et s’occupait d’assister les travailleurs italiens émigrés. En 1939, Luce D'Eramo retourne dans son pays avec sa famille[1]

Par la suite, son père est rappelé en service actif comme pilote, puis passe au service de presse de l’Armée de l’Air. La famille se transfère à Rome où Lucette (c’est ainsi qu’on l’appelle en famille) fait sa dernière année de secondaire, puis s’inscrit à la faculté des Lettres de l’Université et aux GUF (Groupes Universitaires Fascistes) comme il est naturel pour une jeune fille qui a grandi dans une famille fasciste telle que la sienne.

Au lendemain du , après la chute du rĂ©gime de Mussolini, elle suit pour un temps sa famille Ă  Bassano Del Grappa, oĂą son père est nommĂ© Sous-SecrĂ©taire Ă  l’aviation dans la RĂ©publique de Salò ; après quelques mois, Ă©tant informĂ©e de bruits, toujours plus insistants, sur les dĂ©portations et les sĂ©vices perpĂ©trĂ©s dans les camps nazis, gagnĂ©e par le doute, dĂ©sorientĂ©e, mais encore rĂ©ticente Ă  abandonner  son idĂ©alisme de jeune fasciste, en , elle dĂ©cide d’aller vĂ©rifier par elle-mĂŞme ; et elle se sauve de chez elle pour aller travailler comme ouvrière volontaire dans les camps de travail allemands[4].

Sur le terrain, Luce D'Eramo s’aperçoit vite de la réalité : de l’oppression, de l’exploitation ; elle se révolte, et se solidarisant avec les prisonniers russes, elle participe à l’organisation d’une grève décidée par la résistance française et elle est emprisonnée. Après une tentative de suicide, rapatriée par égard pour sa famille, se retrouvant à Vérone, au lieu de retourner chez elle, elle s’intègre délibérément à un convoi de déportés, et finit dans le camp de Dachau. De là, elle parvient à s’enfuir et mène une existence vagabonde de clandestine, exécutant les travaux les plus humbles, dans une Allemagne bouleversée par les bombardements, jusqu’à ce que, à Mayence, le , tandis qu’elle apporte son aide pour extraire des décombres des blessés, un mur s’écroule sur elle, la réduisant à l’état de mourante. Elle survit, paralysée des jambes. Toutes ces vicissitudes, survenues en moins d’une année, sont racontées dans Le Détour, roman autobiographique, commencé peu d’années après son retour en Italie, mais terminé à plus de trente ans de distance, en 1979[4].

De retour en Italie à la fin de la guerre, Luce D'Eramo passe une période de soins à Bologne, chez l’Institut Rizzoli, où elle fait la connaissance et épouse Pacifico d’Eramo, de retour de l’expédition de Russie – où il a été blessé – et futur professeur de philosophie. Tous deux se transfèrent à Rome. De leur union, qui avec le temps se révèle malheureuse, (après de fortes dissensions, ils finissent par se séparer), naît en 1947 leur fils Marco d’Eramo.

Ayant repris ses Ă©tudes universitaires, Luce D'Eramo passe une licence de lettres en 1951, avec une thèse sur la poĂ©tique de Giacomo Leopardi, puis en histoire et philosophie, en 1954, avec une thèse sur la Critique de la facultĂ© de juger de Kant. Après avoir publiĂ©, auprès d’une petite maison d’édition, Idilli in coro, en 1951, elle fait la connaissance de Alberto Moravia, qui l’apprĂ©cie comme Ă©crivain et fait publier, dans Nuovi argomenti, son rĂ©cit Thomasbräu,  ensuite fondu dans Deviazione. Par la suite, elle Ă©crira le premier de ses essais fortement anti-conventionnels : Raskolnikof et le marxisme[1] (1960, republiĂ© en 1997), dans lequel elle discute les opinions de Moravia, sur l’URSS. Dans FinchĂ© la testa vive (1964), roman qui, lui aussi, se fondra dans Deviazione, elle affronte le traumatisme de se retrouver en fauteuil roulant Ă  19 ans, et de recommencer Ă  vivre dans une Europe qui sort en cendres de la guerre.

Dans son parcours d’écrivain, demeure fondamentale sa rencontre, en 1966, avec Ignazio Silone, auquel elle reste attachĂ©e sa vie durant par une amitiĂ© humaine et intellectuelle, qui l’amène Ă  publier son essai le plus engagĂ© : une Ă©tude critique et bibliographique sur l'Ĺ“uvre d’Ignazio Silone (1971). Dans cet ouvrage, publiĂ© par Arnoldo Mondadori, elle examine les rĂ©sistances de la culture italienne Ă  l’égard d’un Ă©crivain  considĂ©rĂ© dans le monde entier, mais pas encore en Italie, comme un grand du XXe siècle italien.

Au cours des années dites de la stratégie de la tension, son amitié avec Camilla Cederna la conduit à s’intéresser au cas Giangiacomo Feltrinelli, soulevé par la journaliste milanaise, au sujet de la version officielle de la mort de l’éditeur, qui se serait involontairement fait exploser – selon la police – tandis qu’il posait des mines au pied d’une ligne à haute tension ; dans Cruciverba politico. Come funziona in Italia la strategia della diversione (1974), Luce d’Eramo livre une analyse acérée de la presse quotidienne sur ce sujet.

Sa veine narrative aborde toujours des sujets brĂ»lants et controversĂ©s. Après le nazisme et la guerre, Luce d’Eramo raconte la lutte armĂ©e communiste des « annĂ©es de plomb » dans son roman Nucleo zero (1981)[1]; Partiranno est un roman de science-fiction oĂą des extra-terrestres dĂ©barquĂ©s sur terre sont pourchassĂ©s[1] ; Ultima luna (1993) est consacrĂ© au drame des gens âgĂ©s[1]; l’autisme Ă©motif des jeunes nĂ©o-nazis, dans Si prega di non disturbare (1995), la maladie mentale dans Una strana fortuna (1997) ; et enfin,  dans Un’ estate difficile, sorti de façon posthume en 2001, la psychologie, dans l’Italie des annĂ©es 1950, d’un mari-potentat et l’itinĂ©raire d’une femme vers son autonomie, en dĂ©pit des conditionnements affectifs et sociaux d’un mariage invivable.

Durant toute son activité d’écrivain, Luce d’Eramo collabore en outre avec divers périodiques et revues : Nuovi argomenti, La Fiera letteraria, Studi Cattolici, Nuova Antologia, Tempo presente', et avec plusieurs journaux: notamment Il Manifesto, L'Unità, Avvenire.

Son ouvrage le plus connu, le roman Deviazione, devenu un best-seller, vendu à des centaines de milliers d’exemplaires, parait en même temps, en traduction française, sous le titre Le Détour par Denoël. Ce livre est republié en 2020 en France par Le Tripode[4] - [3] - [5] - [6]. Il est aussi traduit en allemand et en japonais. Du roman Nucleo zero, traduit, lui aussi, en allemand et en espagnol, le metteur en scène Carlo Lizzani a tiré un film homonyme, en 1984.

Elle meurt en 2001 Ă  Rome[1] - [2].

Ĺ’uvres

Romans et contes

  • Idilli in coro, 1951.
  • FinchĂ© la testa vive, Rizzoli, 1964.
  • Deviazione, Mondadori, 1979; Feltrinelli, 2012, traduction française : Le DĂ©tour, Ă©d. Le Tripode, 2020.
  • Nucleo zero, Mondadori, 1981.
  • Partiranno (anche Il sogno dei marziani), Mondadori, 1986.
  • Ultima luna, Mondadori, 1993.
  • Si prega di non disturbare, Rizzoli, 1995.
  • Una strana fortuna, Mondadori, 1997.
  • Racconti quasi di guerra, Mondadori, 1999.
  • Un'estate difficile, 2001, Mondadori, posthume.
  • Il 25 luglio, Elliot Edizioni, 2013.
  • Tutti i racconti (par les soins de Cecilia Bello Minciacchi), Elliot Edizioni, 2013.

Essais

  • Raskolnikov e il marxismo. Note a un libro di Moravia e altri scritti, 1960; Pellicanolibri, 1997.
  • L'opera di Ignazio Silone. Saggio critico e guida bibliografica, Mondadori, 1971.
  • Cruciverba politico, Guaraldi, 1974.
  • (avec Gabriella Sobrino), Europa in versi: la poesia femminile del '900, Il ventaglio, 1989
  • Ignazio Silone, Ed. Riminesi Associati, 1994.
  • Io sono un'aliena, Edizioni Lavoro, 1999.
  • Ignazio Silone, Castelvecchi, 2014 (par les soins de Yukari Saito) recueil dans un seul volume L'opera di Ignazio Silone, les autres essais sur Silone parus chez les Ed. Riminesi Associati en 1994, ainsi que la correspondance entre Luce d'Eramo et l'Ă©crivain.

Notes et références

  1. Francesco Gnerre, « D'Eramo, Luce [Reims 1925 - Rome 2001] », dans Béatrice Didier, Antoinette Fouque et Mireille Calle-Gruber (dir.), Dictionnaire universel des créatrices, Éditions Des femmes, , p. 1212-1213
  2. René de Ceccaty, « Luce D' Eramo », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  3. Frédérique Fanchette, « Luce d’Eramo, fugue allemande », Libération,‎ (lire en ligne)
  4. Florence Bouchy, « Le Détour, de Luce d’Eramo : retour du Lager, retour sur soi », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  5. « Le détour - Luce d’Eramo (ed. Le Tripode) », France Inter,‎ (lire en ligne)
  6. Bruno Corty, « Le Détour, de Luce d’Eramo: volontaire pour l’enfer », Le Figaro, (consulté le )
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