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Leubald

Leubald est une tragédie en cinq actes de Richard Wagner, écrite de 1827 à 1828 et qui porte la référence WWV 1 dans le catalogue de ses œuvres. Bien que Wagner ait indiqué que c'était pour composer Leubald qu'il s'était intéressé pour la première fois à la musique, il n'a rien composé pour en faire un opéra.

Histoire

Écriture

Wagner Ă©crit[1] : « J'avais onze ans Ă  cette Ă©poque. Alors je voulus ĂŞtre poète ; j'esquissai des tragĂ©dies sur le modèle des Grecs, poussĂ© par la connaissance des tragĂ©dies d'Apel : Polydos, les Étoliens, etc. ; cela me fit passer Ă  l'Ă©cole pour un bon Ă©lève in litteris ; en troisième j'avais dĂ©jĂ  traduit les douze premiers livres de l’OdyssĂ©e. J'appris aussi l'anglais, dans le seul but de pouvoir bien connaĂ®tre Shakespeare ; je traduisis mĂ©triquement le monologue de RomĂ©o.

J'abandonnai bientĂ´t l'anglais, mais Shakespeare resta mon prototype ; j'esquissai une grande tragĂ©die, qui rĂ©unissait Ă  peu près Hamlet et Le Roi Lear ; le plan Ă©tait extraordinairement grandiose ; quarante-deux personnes mouraient dans le cours de la pièce, et je me vis dans la nĂ©cessitĂ©, au dĂ©nouement, d'en faire revenir sous forme de fantĂ´mes, car tous mes personnages Ă©taient morts avant le dernier acte. Cette pièce m'occupa deux ans. Â»

Manuscrit

Wagner croyait que son manuscrit avait été perdu. En réalité, on apprit en 1891 que c'était sa femme Minna qui l'avait dans ses papiers. En 1978, les Archives nationales de la Fondation Wagner à Bayreuth l'acquirent dans une vente aux enchères. On put constater des points de divergence avec les souvenirs de Wagner :

  • le titre est bien Leubald et non Leubald et AdelaĂŻde, ainsi que la plupart des auteurs l'Ă©crivaient, suivant en cela Wagner lui-mĂŞme ;
  • il y a 30 personnages ;
  • 18 personnages meurent au cours de la pièce, et non 42.

Édition

  • En 1988, une Ă©dition critique a Ă©tĂ© publiĂ©e dans le programme 1988 des MaĂ®tres chanteurs de Nuremberg.
  • En 1989, une traduction en français a Ă©tĂ© proposĂ©e par Philippe Godefroid (voir section #Sources).

Argument

Wagner Ă©crit[2] : « J'avais donc griffonnĂ© ainsi un drame Ă  la charpente duquel avaient surtout contribuĂ© Shakespeare avec Hamlet et Le Roi Lear, et GĹ“the avec Goetz de Berlichingen. L'action Ă©tait au fond celle d’Hamlet, avec cette variante que mon hĂ©ros devenait finalement la proie de la folie. L'apparition du spectre vengeur de son père dans des circonstances analogues Ă  celles du drame de Shakespeare provoquait chez mon hĂ©ros un tel bouleversement, qu'il commettait une sĂ©rie de meurtres Ă  la suite desquels son esprit se troublait. Leubald, dont le caractère Ă©tait un mĂ©lange d’Hamlet et de Percy (Hotspur), avait jurĂ© au spectre de son père de purger la terre de toute la race des Roderich (c'Ă©tait le nom du scĂ©lĂ©rat qui avait assassinĂ© le meilleur des pères). Donc, après avoir exterminĂ© ce Roderich, ainsi que ses fils et toute sa parentĂ©, Leubald n'aurait plus aspirĂ© qu'Ă  mourir et Ă  rejoindre l'ombre paternelle, s'il n'avait appris qu'un dernier rejeton de Roderich vivait encore. Ce rejeton, c'Ă©tait la fille du malfaiteur. Pendant qu'on assaillait son château, elle avait Ă©tĂ© enlevĂ©e et sauvĂ©e par un prĂ©tendant qu'elle abhorrait, malgrĂ© sa fidĂ©litĂ©. [...]

AdĂ©laĂŻde avait Ă©tĂ© enlevĂ©e Ă  son sauveur dĂ©testĂ© par un brigand qui l'avait cachĂ©e dans un château fort. Ayant, au prĂ©alable, occis le prĂ©tendant et toute sa famille, Leubald s'Ă©lance Ă  l'attaque du repaire de brigands moins pour se venger que pour mourir. Aussi regrette-t-il de ne pouvoir monter tout de suite Ă  l'assaut du château, trop bien gardĂ©. La nuit Ă©tant venue, il est forcĂ© de dresser sa tente, et, pour la première fois, sa rage frĂ©nĂ©tique aurait fait place Ă  la lassitude, si le spectre du père n'Ă©tait venu, comme dans Hamlet, lui rappeler son serment de vengeance. Cependant, une surprise le fait tomber aux mains de l'ennemi. On l'enferme dans les souterrains du château, et c'est lĂ  qu'il rencontre enfin la fille de Roderich, Ă©galement prisonnière. Elle lui fait l'impression d'une apparition cĂ©leste ; ils s'aiment et, ayant rĂ©ussi Ă  s'Ă©vader par ruse, ils s'enfuient dans une contrĂ©e sauvage. LĂ  seulement, ils s'aperçoivent qu'ils sont ennemis mortels. Ă€ partir de cet instant, le germe de la folie que porte Leubald en lui se manifeste et grandit ; l'esprit du père, qui sans cesse s'interpose entre les deux amants, contribue puissamment Ă  dĂ©velopper la dĂ©mence du fils. Et cet esprit n'est pas le seul qui trouble les amours des deux infortunĂ©s : le spectre de Roderich apparaĂ®t aussi et, d'après la mĂ©thode de Shakespeare dans Richard III, avec lui, le spectre de tous les membres de la famille tuĂ©s par Leubald. Afin de se soustraire aux incessantes importunitĂ©s de ces revenants, Leubald a recours Ă  la magie d'un misĂ©rable traĂ®tre nommĂ© Flamming. Une des sorcières de Macbeth est appelĂ©e pour bannir les esprits, mais elle ne rĂ©ussit pas Ă  les chasser, et Leubald furieux, l'abat comme les autres. En expirant, la sorcière excite contre lui toute la meute des dĂ©mons qui lui obĂ©issent. PersĂ©cutĂ©, fou de terreur, Leubald se tourne contre sa bien-aimĂ©e, qu'il croit ĂŞtre cause de tout le mal. Dans le paroxysme de sa rage, il lui plonge un poignard dans le cĹ“ur ; puis calmĂ© subitement, il tombe, la tĂŞte sur les genoux d'AdĂ©laĂŻde, et reçoit, en expirant, la dernière caresse de son amante, dont le sang ruisselle sur lui. Â»

Sources

  • Richard Wagner, Les OpĂ©ras imaginaires, traduction et analyses de Philippe Godefroid, avant-propos d'Alain SatgĂ©, Librairie SĂ©guier, 1987, (ISBN 2-87736-008-3)
  • Richard Wagner, Ma Vie, traduction de N. Valentin et A. Schenk, I 1813-1842, Plon, 1911.

Notes et références

  1. R. Wagner, Esquisse autobiographique, in Ĺ’uvres en prose, tome 1, p. 21.
  2. R. Wagner, Ma Vie, p. 42-44.


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