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Lettre d'Ignace aux Romains

La lettre d’Ignace aux Romains (en grec ancien:ጘπÎčÏƒÏ„ÎżÎ»áœŽ πρ᜞ς áżŹÏ‰ÎŒÎ±ÎŻÎżÎčς / Epistolē pros Rhƍmaiois) est un document envoyĂ© par l’évĂȘque Ignace d'Antioche aux chrĂ©tiens de Rome, leur demandant de ne pas intervenir pour empĂȘcher son exĂ©cution Ă  Rome. Par le don de sa vie, il souhaite donner un tĂ©moignage au Christ. Écrite vers 117, la lettre a une grande importance thĂ©ologique quant au sens mystique Ă  donner au martyre pour le Christ et Ă  la place qu’occupe l’Église de Rome dans la chrĂ©tientĂ© des temps postapostoliques.

Cette lettre (en langue grecque) est une des sept lettres attribuĂ©es Ă  Ignace d’Antioche qui sont considĂ©rĂ©es comme authentiques. À partir du Ve siĂšcle d’autres Ă©crits apocryphes furent ajoutĂ©s aux ‘collections’ de lettres.

Contexte et histoire

Il est clair que la lettre aux Romains fut Ă©crite peu de temps avant le martyre d’Ignace, mais on ne sait pas exactement quand ce martyre eut lieu. La tradition le place sous le rĂšgne de Trajan, empereur de Rome de 98 Ă  117 apr. J.-C. Alors que la majoritĂ© des Ă©rudits accepte la datation traditionnelle du martyre d’Ignace sous Trajan, d’autres ont plaidĂ© pour une date plus tardive allant jusqu’aux annĂ©es 135-140. Curieusement Ignace donne cependant le mois et le jour : il Ă©crit (de Smyrne) le « neuf d’avant les calendes de septembre » [24 aoĂ»t]. C’est la seule lettre Ă  ĂȘtre datĂ©e.

Circonstances

AprĂšs son arrestation dans la province de Syrie, Ignace, Ă©vĂȘque d’Antioche et prisonnier, traverse de nombreuses villes en route vers Rome oĂč il doit ĂȘtre exĂ©cutĂ©. Aux Romains a Ă©tĂ© Ă©crit avant son arrivĂ©e Ă  Rome, alors qu’il Ă©tait Ă  Smyrne. Le voyage d’Ignace Ă  Rome est confirmĂ© par l’historien de l’Église du IVe siĂšcle EusĂšbe de CĂ©sarĂ©e. Ignace d’Antioche est un des PĂšres apostoliques de la foi chrĂ©tienne les plus importants, appartenant Ă  la premiĂšre gĂ©nĂ©ration d’auteurs chrĂ©tiens, suivant celle des apĂŽtres et Ă©vangĂ©listes.

Alors que les autres lettres ignaciennes (aux EphĂ©siens, aux MagnĂ©siens, etc.) s’adressent aux communautĂ©s avec lesquelles Ignace avait dĂ©jĂ  eu des contacts (en personne ou par l’intermĂ©diaire de reprĂ©sentants), celle-ci s’adresse aux chrĂ©tiens de Rome avant mĂȘme qu’il arrive dans la ville Ă©ternelle. La lettre a peut-ĂȘtre Ă©tĂ© destinĂ©e Ă  permettre aux chrĂ©tiens romains de se prĂ©parer Ă  son arrivĂ©e. Elle semble avoir un but unique : les dĂ©courager de tenter de lui Ă©viter le martyre, car il souhaite intensĂ©ment ĂȘtre uni au Christ par le don de sa vie.

Contenu

La lettre – qui n’est pas « Ă©pitre » - suit le format Ă©pistolaire traditionnel :

  • Salutation Ă  l’Église de Rome « qui prĂ©side Ă  la charitĂ© » (prĂ©face).
  • Demande aux chrĂ©tiens de Rome de ne pas intervenir pour empĂȘcher son martyre : qu’ils prient plutĂŽt pour qu’il soit un bon chrĂ©tien (1.1-3.3).
  • Explication de sa souffrance en tant qu’union avec Christ : il veut ĂȘtre la « pĂąture des bĂȘtes », le froment de Dieu (4.1-8.1).
  • ClĂŽture et adieu. « Laissez moi mourir » c’est ce qu’il attend de leur bienveillance (8.2-10.3). Avec recommandations et priĂšres.

Signification et importance

Bien que la 'lettre aux Romains' soit significative surtout en ce qui concerne Ignace lui-mĂȘme, vivant la perspective de son martyre imminent, elle est Ă©galement importante comme dĂ©but de thĂ©ologie chrĂ©tienne du martyre, union intime au Christ dans le don de la vie, union et identification complĂšte avec le sacrifice eucharistique. Cette thĂ©ologie eut une influence considĂ©rable sur les gĂ©nĂ©rations qui suivirent, et tout au long de l’histoire de l’Église.

En effet le langage qu’Ignace utilise pour parler de sa mort est frĂ©quemment eucharistique, se rĂ©fĂ©rant souvent Ă  la consommation de son corps comme pain. La perspective de sa mort, envisagĂ©e avec joie comme union au Christ, informe une grande partie de la lettre. Ce n’est que par la mort qu’il peut atteindre la vraie libertĂ©. Il ne voit plus aucune valeur dans les choses de ce monde.

Ignace compare Ă©galement son voyage vers Rome comme une marche victorieuse vers une bataille gagnĂ©e d’avance. Les diverses mĂ©taphores utilisĂ©es glorifient le martyre. Dans l’ensemble, sa mĂ©ditation sur le martyre reflĂšte les attitudes contre-culturelles du christianisme de cette Ăšre immĂ©diatement postapostolique.

La ‘lettre aux Romains’ diffĂšre sensiblement des six autres lettres d’Ignace. Cette lettre traite du martyre avec une communautĂ© chrĂ©tienne qu’Ignace n’a pas encore personnellement rencontrĂ©e, tandis que les autres lettres - qui sont davantage du genre â€˜Ă©pitre’ - traitent de questions plus doctrinales telles que le contenu de la foi, la hiĂ©rarchie de l’Église et l’affermissement du christianisme. Ignace fait Ă©galement remarquer qu’il ne pouvait pas commander aux chrĂ©tiens de Rome comme les apĂŽtres Pierre et Paul l’ont fait autrefois. Un tel commentaire n’a de sens que si Pierre a effectivement Ă©tĂ© un dirigeant, sinon le chef, de l’Église Ă  Rome. Le dĂ©tail est d’importance.

Enfin, ce texte est Ă©galement important parce qu’il donne une esquisse de la hiĂ©rarchie ecclĂ©siastique Ă©mergente. Nous pouvons voir comment la hiĂ©rarchie de l’Église Ă  trois niveaux (composĂ©e d’évĂȘques, d’anciens/presbytres et de diacres) a vu le jour, et comment les Églises rĂ©gionales ont gagnĂ© en unitĂ© grĂące Ă  elle.

Il y a mĂȘme, de maniĂšre inchoative, une reconnaissance de la primautĂ© du siĂšge de Rome dans l’Église. Ignace, Ă©vĂȘque d’Antioche, un des diocĂšses les plus importants de la chrĂ©tientĂ©, autant en anciennetĂ© qu'en prestige, s’adresse Ă  l’Église de Rome « qui prĂ©side Ă  la charitĂ© » une reconnaissance implicite d’une prĂ©Ă©minence romaine, sans nul doute due au fait que les apĂŽtres Pierre et Paul y subirent le martyre.

Bibliographie

  • Ignace d'Antioche (Polycarpe de Smyrne) : Lettres et Martyre de Polycarpe (trad. et introd par Th. Camelot OP), Paris, Le Cerf (coll. Sources chrĂ©tiennes, no 10), 1958.
  • Th. Preiss: La mystique de l'imitation et de l'unitĂ© chez Ignace d'Antioche, dans Revue d'Hist. et de Philos., vol.18 (1938), pp.197-241.
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