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Les Trois Grâces (Canova)

La statue des Trois Grâces d'Antonio Canova est une sculpture nĂ©oclassique, en marbre, des trois Charites de la mythologie, filles de Zeus – identifiĂ©es sur certaines gravures de la statue comme, de gauche Ă  droite, Euphrosine, AglaĂ©e et Thalie, incarnant respectivement la joie, le charme et la beautĂ©. Les Grâces prĂ©sidaient les banquets et les rĂ©unions. Comme telles, elles ont Ă©tĂ© reprĂ©sentĂ©es par des artistes tels que Sandro Botticelli et Bertel Thorvaldsen.

Les Trois Grâces, première version de Canova, conservĂ©e au musĂ©e de l'Ermitage, 182 cm.
Les Trois Grâces dans la « version du duc de Bedford », Victoria and Albert Museum.

Une première version de la sculpture, dite « de l’impĂ©ratrice[alpha 1] », est conservĂ©e au musĂ©e de l'Ermitage ; une seconde version, dite « du duc de Bedford[alpha 2] », est la propriĂ©tĂ© conjointe du Victoria and Albert Museum et de la Galerie nationale d'Écosse oĂą elle est alternativement exposĂ©e.

Les versions de l'Ĺ“uvre

Image de l'esquisse en terre cuite du musée des Beaux-Arts de Lyon
L'esquisse en terre cuite de 1810 du musĂ©e des Beaux-Arts de Lyon, 42 Ă— 25 cm.

En 1810, Canova rĂ©alise dans la maison de ThĂ©rèse County Tambroni Ă  Frascati une esquisse en terre cuite qu'il offre, probablement en 1813, Ă  Juliette RĂ©camier[1] qui la lègue en 1849 au musĂ©e des Beaux-Arts de Lyon, oĂą elle est conservĂ©e et exposĂ©e depuis.

En , Joséphine de Beauharnais lui commande une œuvre sur ce sujet.

John Russell, le 6e duc de Bedford, lors d'une visite de l'atelier de Canova Ă  Rome en 1814, est extrĂŞmement impressionnĂ© par la sculpture des Grâces que Canova fait pour JosĂ©phine. Quand l'impĂ©ratrice meurt au mois de mai de la mĂŞme annĂ©e, il offre d'acheter la pièce finie, mais sans succès car Eugène de Beauharnais, le fils de JosĂ©phine, la rĂ©clame. Maximilien de Leuchtenberg, le fils d’Eugène qui s'est installĂ© Ă  partir de 1839 en Russie[alpha 3], la fait ultĂ©rieurement transporter Ă  Saint-PĂ©tersbourg oĂą elle se trouve toujours : elle est maintenant exposĂ©e au musĂ©e de l'Ermitage.

Loin de se décourager, le duc de Bedford en commande une autre version pour lui-même. Le travail sur la seconde sculpture commence en 1814 et s'achève en 1817. En 1819, on l’installe dans la résidence du duc à l'abbaye de Woburn. Canova est lui-même en Angleterre pour superviser cette installation : il choisit un piédestal réalisé à partir d'un socle de marbre avec sommet rotatif. Cette œuvre est maintenant détenue conjointement par le Victoria and Albert Museum et la Galerie nationale d'Écosse, où la sculpture est exposée alternativement[2].

La première version, celle de l'Ermitage, est sculptĂ©e en marbre veinĂ© et dispose d’une colonne carrĂ©e derrière le personnage de gauche (Euphrosine). La « version du duc de Bedford » est sculptĂ©e en marbre blanc, dispose d’une colonne ronde, et la figure centrale (AglaĂ©e) est lĂ©gèrement plus large Ă  la taille.

La « version du duc de Bedford » s'est appuyĂ©e sur les reprĂ©sentations des Grâces que Canova avait dĂ©jĂ  rĂ©alisĂ©es, dont une peinture de 1799, d'autres dessins et un bas-relief des Grâces qu'il a exĂ©cutĂ© Ă  la mĂŞme Ă©poque. Mais il est probable que sa version de l'Ermitage et plus tard celle du duc s'inspirent principalement des premiers dessins et d'une esquisse en terre cuite. Nous savons que son modèle est en premier lieu un groupe en plâtre grandeur nature du groupe qui est maintenant conservĂ© au musĂ©e Canova (it) Ă  Possagno[2]. Dans la version du duc de Bedford, les Grâces s'appuient sur un pilier, bien que dans les versions antĂ©rieures ce dĂ©tail soit absent.

Technique artistique

La pièce est sculptĂ©e dans un seul bloc de marbre blanc. Les assistants de Canova ont dĂ©grossi le marbre, laissant Canova effectuer la touche finale et former la pierre pour mettre en valeur la douce peau des Grâces. C'Ă©tait une marque de l'artiste, et l'Ĺ“uvre montre une forte allĂ©geance au mouvement nĂ©o-classique dans la sculpture, dont Canova est le meilleur reprĂ©sentant.

Les trois dĂ©esses sont montrĂ©es nues, se serrant les unes les autres, leurs tĂŞtes se touchant presque, d'une façon telle que certains l'ont considĂ©rĂ©e comme une Ĺ“uvre empreinte d'Ă©rotisme. Elles se tiennent debout, se penchant lĂ©gèrement vers l'intĂ©rieur – peut-ĂŞtre discutant, ou simplement apprĂ©ciant leur proximitĂ©. Leurs styles de coiffures sont similaires, tressĂ©es et retenues au sommet de leur tĂŞte en un nĹ“ud.

Détail des Trois Grâces au Victoria and Albert Museum
Détail des Trois Grâces au Victoria and Albert Museum.

Le style est élégant et suggère le raffinement, une délicate beauté qui est monnaie courante dans la sculpture de Canova. Les historiens de l'art ont souvent évoqué l'équilibre paisible qui semble exister entre les trois têtes. Contrairement aux compositions des Grâces réalisées dans l’Antiquité, où les personnages latéraux se tournent vers le spectateur tandis que le personnage central enlace ses amies en tournant le dos au spectateur, chez Canova les personnages se tiennent côte à côte, se faisant mutuellement face.

Les trois figures fĂ©minines deviennent unes dans leur Ă©treinte, unies par leurs mains et par une Ă©toffe qui les relie. L'unitĂ© des Grâces est l'un des thèmes principaux de l'Ĺ“uvre. Dans la « version de l'impĂ©ratrice JosĂ©phine », les Grâces sont sur un autel ornĂ© de trois couronnes de fleurs et d'une guirlande symbolisant leurs liens Ă©troits.

Le néo-classicisme et le baroque

L'Ĺ“uvre de Canova a interrogĂ© la conception baroque de la beautĂ© opulente : il reprĂ©sente les Grâces en sveltes jeunes femmes.

Ce n'est pas le seul Ă©cart du travail de Canova du travail par rapport Ă  l'Ă©poque baroque. Par exemple, les Ĺ“uvres baroques du sculpteur italien Le Bernin reprĂ©sentent un court moment dans le temps, un instantanĂ©. Son Ĺ“uvre de 1644, L'Extase de sainte ThĂ©rèse, montre le moment oĂą le Saint-Esprit transperce le cĹ“ur de ThĂ©rèse, la laissant en extase de la prĂ©sence divine. C'est une scène poignante capturĂ©e par Le Bernin Ă  l'instant de sa plus grande intensitĂ©.

Le travail de Canova, lui, est diffĂ©rent. Ses Ĺ“uvres ne semblent pas possĂ©der un sens rĂ©el du temps, elles existent simplement Ă  un moment du passĂ©, presque un souvenir fantomatique de scènes mythologiques, ou de personnes mortes depuis longtemps. Dans le cas des Trois Grâces, il invite le spectateur Ă  faire ce qu'il veut de la scène qu'il prĂ©sente théâtralement. C'est typique du mouvement nĂ©o-classique. Ă€ de nombreux Ă©gards, cette Ĺ“uvre a Ă©tĂ© considĂ©rĂ©e comme un Ă©cart mais elle est maintenant admise par beaucoup comme Ă©tant un modèle de la beautĂ©.

Notes et références

Notes

  1. Car elle a été commandée en 1812 par Joséphine de Beauharnais, impératrice de Français de 1804 à 1809.
  2. Car elle a été commandée en 1814 par John Russell, alors duc de Bedford.
  3. À la suite de son mariage avec Marie Nikolaïevna, fille du tsar Nicolas Ier.

Références

Annexes

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Bibliographie

  • (en) James David Draper, Playing With Fire : European Terracottas, 1740-1840, New York, Metropolitan Museum of Art, , 328 p. (ISBN 978-1-58839-099-8, lire en ligne).

Liens externes

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