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Leda Rafanelli

Leda Rafanelli, dite la « Gitane anarchiste »[N 1] (Pistoia, , Gênes, ), est une femme de lettres italienne, militante anarchiste individualiste, féministe et antimilitariste.

Leda Rafanelli
Description de l'image Leda Rafanelli 1916 crop.jpg.
Alias
Diali
Naissance
Pistoia
Décès
Gênes
Nationalité Drapeau de l'Italie Italie
Profession
Journaliste, romancière et éditrice
Autres activités
Famille
Augusto, Elettra Gaetani

Biographie

Vie familiale

Leda Rafanelli grandit dans une famille pauvre de la Livourne. En 1903, elle suit sa famille en Égypte, dans un séjour qui dure 3 mois, suite à l'incarcération de son père pour des déboires mineurs. Là elle fait la connaissance de réfugiés politiques anarchistes italiens[2] qui sont nombreux à Alexandrie et au Caire et embrasse la cause libertaire et féministe. Dès son arrivée, Rafanelli collabore dans la revue Il Domani.

Elle se marie avec un militant anarchiste, Luigi Polli qu'elle rencontre autour de la Baracca Rossa. De retour en Italie, ils fondent ensemble une maison d'édition, « Edizioni Rafanelli-Polli ». Puis après quelques années de mariage, elle rencontre Giuseppe Monnani. Ils ouvrent à Milan en 1910 la Libreria Editrice Sociale, qui est pendant quelques années la plus grande édition anarchiste italienne[3]. Celle-ci est néanmoins fermée par le régime fasciste italien. Avant l' Italie fasciste de Mussolini, Leda Rafanelli sort avec le futur leader des chemises noires; chose qu'elle niera par la suite du fait des contradictions inhérentes entre son anarchisme et le régime mussolinien [3]. Elle écrit ensuite pour des journaux comme La Blouse et La Donna Libertaria. Elle commence en parallèle une œuvre d'écrivain, comme romancière et poétesse.

Elle affiche son opposition à la Première Guerre mondiale et maintient ses positions antimilitaristes. Elle poursuit ses activités politiques pendant et après la guerre jusqu'à ce que le régime de Mussolini l'arrête et interdise sa maison d'édition et les journaux pour lesquels elle travaillait.

Après la Seconde Guerre mondiale, elle écrit pour le journal Umanità Nova et se consacre à son œuvre littéraire ainsi qu'à la calligraphie arabe.

Amour pour la culture arabo-musulmane

Au cours de son voyage au Caire, elle se convertit à l'islam qu'elle pratiquera tout au long de sa vie[4]. Sa conversion résulte d'une fascination pour le monde arabo-musulman. Ses premières années de pratique restent en conséquence très peu rigoureuses ; cela changera par la suite devenant de plus en plus rigoriste[5]. Par delà l'islam, elle incorpore dans sa vie spirituelle d'autres spiritualités animistes ou plus localisées. D'après l'universitaire Antonella Mauri, Leda Rafanelli fut très silencieuse au sujet de sa pratique religieuse du fait de l'apparente contradiction avec ses opinions anarchistes[N 2][5].

Elle porte également un grand intérêt pour la Kabbale Juive et les textes sacrés hindouistes[1].

Opinions anarchistes, féministes, anticolonialistes avec la femme amoureuse de l'Afrique

Leda Rafanelli renie l'occident moderne le considérant comme une mauvaise chose dans sa globalité. Elle en rejette le capitalisme et le modernisme. Ces deux objets sont liés du seul fait que le capitalisme repose sur l'innovation et donc sur l'apologie d'un progrès imaginaire mais concrètement recherché[6]. De la même manière elle rejette les idéaux anarchistes occidentaux tel que les apports intellectuels de la Révolution française, l'esprit anti-religieux, le rationnel et le cartésianisme [1].

Cela fait dire à Antonella Mauri que sa conversion à l'islam résulte davantage d'un rejet de l'occident et donc de la culture judéo-chrétienne que d'une véritable conviction musulmane[7]. Néanmoins cette conversion prend sens de plus en plus, Rafanelli devenant plus rigoriste, ce qui se manifeste jusque dans ses habitudes et l'habillement. En effet, en Italie, elle s'habille à la manière orientale ce qui est un indicateur de son adoption acritique de la culture arabo-musulmane[7]. Elle s'identifie alors entièrement aux populations colonisées, ce qui l'amène a inventer volontairement de fausses histoires tel qu'un grand-père Gitan arabe ou une aventure avec un Ethiopien appelé Taamrat Emmanuel [8].

Ses premiers écrits en tant que femme féministe sont assez commun puisqu'elle utilise des héroïnes libérées et émancipées. Néanmoins avec le développement de son intérêt pour les colonisés son discours féministe évolue[9]. Rafanelli construit une dualité manichéenne entre un occident avili par le modernisme et une société arabophone plus brute, moins moderne et de ce fait bien meilleur. Elle reprend ici les idées du contrat social de Jean-Jacques Rousseau en déterminant une société idéale pré-moderne. Le problème est que cette idéalisation sans nuance de la société arabe l'amène à stéréotyper ses personnages et ses figures ainsi qu'à reprendre une partie du discours colonialiste qui vise à dire que ces sociétés colonisés le sont par le manque de civilisation[9].

Cette façon de décrire la culture arabe résulte de deux choses : la première est qu'elle utilise cela pour incriminer une société européenne qu'elle trouve détestable et ainsi lui donner le reflet inverse[10]; la seconde est qu'elle n'a probablement pas conscience des nuances et de toutes les critiques qui peuvent lui être adressées, au même titre que ce qu'elle fait à l'Europe. Cette absence de conscience critique est liée selon Mauri au fait qu'il est très difficile voire impossible en ne grandissant pas dans la société arabophone de comprendre toutes les violences inhérentes à ladite société. Ses amies en Egypte lui ont brossé un portrait heureux de leurs familles, pourtant il existait des violences du monde patriarcal[11]. Cela l'amène à défendre une partie des violences faites aux femmes[12].

Elle est donc une femme foncièrement anticolonialiste, néanmoins, sa faible éducation et son fanatisme l'empêchent de ne pas reproduire ou créer des stéréotypes à l'endroit de la femme colonisée, en atteste la façon qu'elle a de décrire les Libyennes : « femmes sensuelles, indolentes, soumises, superstitieuses et impulsives »[12]. Aussi, et à partir de la même manière de penser que les Européens colonisateurs, Leda Rafanelli dénie la possibilité d'un métissage entre européens et africains; cette union engendrerait un déséquilibre. Alors que la bibliothèque coloniale[N 3] pense que c'est l'Africain ou l'Asiatique qui amènerait le désordre, chez l'Italienne anarchiste, c'est l'Européen[13].

Publications

Ouvrages

  • Seme Nuovo (1908) [3]
  • Bozzetti sociali (1910)[3]
  • Incantamento (1921)[3]
  • Donne e femmine (1922)[3]
  • L'oasi (1929)[3]

Revues

  • La Rivolta (1910)[3]
  • La Libertà (1913-1914)[3]

Notes et références

Notes

  1. Expression issue de Pier Carlos Massini, définissant tant la femme vagabonde que la femme en perpétuelle évolution intellectuelle; voir [1].
  2. Cf. le célèbre slogan anarchiste : « Ni Dieu, Ni Maître ».
  3. Terme inventé par Mudimbé pour décrire tous les écrits colonialistes qui construisent l'image de l'autre colonisé.

Références

  1. Mauri 2011, p. 182.
  2. Mauri 2011, p. 177.
  3. Mauri 2011, p. 178.
  4. Gaetano Manfredonia, Histoire mondiale de l'anarchie, Paris/Issy-les-Moulineaux, Textuel et Arte éditions, , 287 p. (ISBN 978-2-84597-495-1), p. 66
  5. Mauri 2011, p. 180.
  6. Joseph Schumpeter, Histoire de l'analyse économique, Paris, Gallimard, .
  7. Mauri 2011, p. 183.
  8. Mauri 2011, p. 184.
  9. Mauri 2011, p. 186.
  10. Mauri 2011, p. 187.
  11. Mauri 2011, p. 189.
  12. Mauri 2011, p. 190.
  13. Mauri 2011, p. 195.

Annexes

Ouvrages

  • (it) Alberto Ciampi, Eda Rafanelli-Carlo Carrà, un romanzo : arte e politica di un incontro ormai celebre!, Centro internazionale della grafica, .
  • Antonella Mauri, Isabelle Felici et Jean-Charles Vegliante, « Entre colonialisme et métissage culturel : Leda Rafanelli, anarchiste et musulmane », dans Oublier les colonies - Contacts culturels hérités du fait colonial, Paris, Mare & Martin, , p. 177-195.

Bande dessinée

  • (it) Dessins de Sara Colaone, scénario de Francesco Satta et Luca de Santis, Leda : che solo amore e luce ha per confine, Rome, Coconino press, 2016
  • Leda Rafanelli, la gitane anarchiste, de Sara Colaone, Francesco Satta et Luca De Santis, éditions Steinkis, 2018.

Notices

Articles connexes

Liens externes

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