Le Marchand, le Gentilhomme, le Pâtre et le Fils de roi
Le Marchand, le Gentilhomme, le Pâtre et le Fils de roi est la quinzième fable du livre X[1] de Jean de La Fontaine situé dans le second recueil des Fables de La Fontaine, édité pour la première fois en 1678.
Le Marchand, le Gentilhomme, le Pâtre et le Fils de roi | |
Le Marchand, le Gentilhomme, le Pâtre et le Fils de roi | |
Auteur | Jean de La Fontaine |
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Pays | France |
Genre | Fable |
Éditeur | Desaint & Saillant |
Lieu de parution | Paris |
Date de parution | 1755-1759 |
Illustrateur | Jean-Baptiste Oudry, (Gravure de William Wynne Ryland) |
Chronologie | |
Texte
Quatre chercheurs de nouveaux mondes,
Presque nus échappés à la fureur des ondes,
Un Trafiquant, un Noble, un Pâtre, un Fils de Roi,
RĂ©duits au sort de BĂ©lisaire[N 1],
Demandaient aux passants de quoi
Pouvoir soulager leur misère.
De raconter quel sort les avait assemblés,
Quoique sous divers points tous quatre ils fussent nés,
C'est un récit de longue haleine.
Ils s'assirent enfin au bord d'une fontaine :
LĂ le conseil se tint entre les pauvres gens.
Le prince s'Ă©tendit sur le malheur des grands.
Le pâtre fut d'avis qu'éloignant la pensée
De leur aventure passée,
Chacun fît de son mieux et s'appliquât au soin
De pourvoir au commun besoin.
La plainte, ajouta-t-il, guérit-elle son homme ?
Travaillons : c'est de quoi nous mener jusqu'Ă Rome.
Un Pâtre ainsi parler ! Ainsi parler ; croit-on
Que le Ciel n'ait donné qu'aux têtes couronnées
De l'esprit et de la raison ;
Et que de tout berger, comme de tout mouton,
Les connaissances soient bornées ?
L'avis de celui-ci fut d'abord trouvé bon
Par les trois échoués aux bords de l'Amérique.
L'un, c'était le marchand, savait l'arithmétique :
À tant par mois, dit-il, j'en donnerai leçon.
J'enseignerai la politique,
Reprit le Fils de Roi. Le Noble poursuivit :
Moi, je sais le blason ; j'en veux tenir Ă©cole :
Comme si, devers l'Inde[N 2], on eût eu dans l'esprit
La sotte vanité de ce jargon frivole.
Le Pâtre dit : Amis, vous parlez bien ; mais quoi,
Le mois a trente jours ; jusqu'à cette échéance
Jeûnerons-nous, par votre foi ?
Vous me donnez une espérance
Belle, mais éloignée ; et cependant j'ai faim.
Qui pourvoira de nous au dîner de demain ?
Ou plutĂ´t sur quelle assurance
Fondez-vous, dites-moi, le souper d'aujourd'hui ?
Avant tout autre, c'est celui
Dont il s'agit : votre science
Est courte là -dessus ; ma main y suppléera.
À ces mots, le Pâtre s'en va
Dans un bois : il y fit des fagots dont la vente,
Pendant cette journée et pendant la suivante,
Empêcha qu'un long jeûne à la fin ne fit tant
Qu'ils allassent lĂ -bas[N 3] exercer leur talent.
Je conclus de cette aventure
Qu'il ne faut pas tant d'art pour conserver ses jours
Et grâce aux dons de la nature,
La main est le plus sûr et le plus prompt secours.
— Jean de La Fontaine, Fables de La Fontaine, Le Marchand, le Gentilhomme, le Pâtre et le Fils de roi, texte établi par Jean-Pierre Collinet, Fables, contes et nouvelles, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1991, p. 421
Notes
- Général romain d'Orient, qui ayant commandé les armées de l'Empereur et perdu les bonnes grâces de son maître, tomba dans un tel point de misère qu'il demandait l'aumône sur les grands chemins.
- On appelait encore l'Amérique : Indes occidentales.
- Dans l'autre monde.
Références
- « Le Marchand, le Gentilhomme, le Pâtre et le Fils de Roi », sur www.lafontaine.net (consulté le )
Liens externes
- Le Marchand, le Gentilhomme, le Pâtre et le Fils de roi, Musée Jean-de-La-Fontaine à Château-Thierry.