L'Ami du peuple (1928)
L'Ami du peuple est un journal français qui existe durant l'entre-deux-guerres de 1928 à 1937. Il est lancé à Paris en 1928, par le parfumeur François Coty (1874-1934) qui en fait un journal d'extrême droite. Journal bon marché, à fort tirage, il se caractérise par sa xénophobie et son antisémitisme. Coty en perd la direction en décembre 1933. Le quotidien passe sous la direction de directeurs et d'investisseurs qui se succèdent et décline progressivement, jusqu'à sa disparition en 1937.
L'Ami du peuple | |
Une de L'ami du peuple du 13 mars 1934. | |
Pays | France |
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Langue | français |
Périodicité | Quotidien |
Prix au numéro | 2 sous |
Fondateur | François Coty |
Date de fondation | 2 mai 1928 |
Date du dernier numéro | 30 octobre 1937 |
Ville d’édition | Paris |
Propriétaire | Havas |
Histoire
Coty ayant remarqué que ses employés lisaient L'Humanité ; pour contrebalancer son influence communiste, il décide de lancer L’Ami du peuple[1].
Le journal est destiné à la classe moyenne et la petite bourgeoisie, aux anciens combattants et aux retraités[2] et vendu un peu moins cher que les autres journaux ; Havas, distributeur parisien exclusif, refuse alors de lui donner la publicité en dépit d’une circulation d’un million par jour, et les messageries Hachette qui détenaient le monopole de la vente des journaux dans les kiosques parisiens et dans les gares refusent de le distribuer [3]; s’ensuit un procès retentissant intenté par Havas et les 5 plus grands quotidiens parisiens parmi lesquels Le Matin, Le Journal, Le Petit Parisien et Le Petit Journal[4]. Un arrêt de la cour en date du 9 avril 1930 donne gain de cause à François Coty qui reçoit, après un arbitrage mené par André Tardieu, des dommages-intérêts et se voit reconnaître le droit de publier et distribuer son journal[5].
En dépit de cette hostilité, le succès est d’emblée considérable ; il tire à 800 000 exemplaires à la fin de 1928, le tirage atteint le million, en 1930[6].
Sa ligne éditoriale est xénophobe, antisémite et nationaliste, exaltant l’ordre, l'autorité et l'antiparlementarisme. À la suite de l'affaire Stavisky, l'affaire Hanau, l’affaire Albert Oustric, le journal dénonce le communisme, la franc-maçonnerie et un « complot financier international anti-français incarné par la finance judéo-germano-américaine, alliés pour spolier la France et déclencher la révolution »[7].
Les principaux rédacteurs sont alors Urbain Gohier, Jacques Ditte, André Chaumeix, Jacques Roujon et Flavien Brenier.
En janvier 1934, L'Ami du Peuple est racheté par l'agence Havas, Le Journal et les papeteries Darblay; Pierre Bermond devient directeur[8]. Le quotidien affirme être « l'organe officiel du Front national et de la Solidarité française »[9], dirigée par Jean Renaud, qui collabore au quotidien.
En juin 1935, le journaliste conservateur et antiparlementaire François Le Grix, directeur de La Revue hebdomadaire, ayant reçu des capitaux de Mussolini rachète le journal[10] - [8]. Le journal se présente à partir du 11 novembre 1935 comme « le journal du rassemblement national et social pour la réforme de l'État »[11]. Pierre Taittinger, dirigeant des Jeunesses patriotes, qui signe des articles depuis l'automne 1935, devient co-directeur en janvier 1936 aux côtés de Le Grix[12]. Le journal devient leur tribune même s'il publie aussi des articles de leurs alliés comme Philippe Henriot ou Jean Renaud, hostiles au Front populaire. Taittinger en prend le contrôle au printemps 1936[10].
En septembre 1936, Taittinger afferme son quotidien à Georges Mandel de façon occulte. Taittinger continue à publier des articles jusqu'en septembre 1937 tandis que des proches de Mandel comme Pierre Lafue y signent des éditoriaux à partir de fin septembre 1936[13]. Le tirage du journal est alors de deux cents à trois cent mille exemplaires. Mandel se retire en juillet 1937[8] après y avoir mené une campagne contre l'influence allemande[14], tel cet éditorial de Lafue en octobre 1936[15]. Mandel n'y signa aucun article ; il utilisa parfois le pseudonyme de Montclart, qu'il partagea avec d'autres journalistes, pour soutenir notamment une ligne favorable au renforcement du pacte franco-soviétique, que condamnait Taittinger[16].
Le journal connait des difficultés en 1937, diminue sa pagination et licencie des journalistes[17]. Son tirage n'est plus que de cent mille exemplaires[8]. Il cesse de paraitre fin , reparait durant quelques jours en octobre avec une nouvelle direction [18] puis cesse définitivement de paraitre à la fin du mois d'octobre.
Références
- (en) Roulhac Toledano et Elizabeth Coty, Francois Coty : Fragrance, Power, Money, Pelican Publishing, , 336 p. (ISBN 978-1-58980-639-9 et 1-58980-639-5, lire en ligne).
- Schor 1976, p. 1.
- Christophe Charle, Le Siècle de la presse : 1830-1939, Paris, Seuil, Media diffusion, (ISBN 9782021008593, lire en ligne).
- (en) Pierre Lazareff (trad. David Partridge, texte français pas encore numérisé), « Chapter six : The "Big Five" versus Le Quotidien and L'Ami du Peuple », dans Deadline: The Behind-the-scenes story of the last decade in France [« titre original: Dernière édition »], New York, Random House, , 369 p. (OCLC 408560, lire en ligne)
- « La fin d’un conflit de presse », Le journal, Paris,‎ (lire en ligne).
- Schor 1976.
- Laurent Joly L'Ami du peuple contre les « financiers qui mènent le monde » : la première campagne antisémite des années 1930.
- Schor 1976, p. 117.
- L'Ami du peuple, 1er novembre 1935
- Patricia Sorel, Plon: Le sens de l'histoire (1833-1962), Presses universitaires de Rennes, , p.158.
- L’Ami du peuple, 11 novembre 1935
- L'Ami du peuple,
- L’Ami du peuple, 29 septembre 1936
- Jean-Baptiste Duroselle, Politique étrangère de la France : La décadence, 1932-1919, Seuil, 1985, p. 317
- P. Lafue, "L'Allemagne le dos au mur", L'Ami du peuple, 25 octobre 1936
- Jean Philippet, Le temps des ligues, 1919-1944, Volume 4, Presses Univ. du Septentrion, 2001, Modèle:P.2180-2181
- Paris-publicité, 11 avril 1937, Ibid., 23 mai 1937
- L’Ami du peuple, 26 octobre 1937, Paris publicité, 31 octobre 1937, Ibid., 21 novembre 1937
Bibliographie
- Laurent Joly, « L'Ami du peuple contre les « financiers qui mènent le monde » : la première campagne antisémite des années 1930 », Archives Juives, nos 39-2,‎ 2e semestre 2006, p. 96-109 (lire en ligne).
- Grégoire Kauffmann, « Urbain Gohier (Degoulet-Gohier, dit) », dans Pierre-André Taguieff (dir.), L'Antisémitisme de plume 1940-1944 : études et documents, Paris, Berg international, 1999, p. 416.
- Ralph Schor, « Xénophobie et extrême-droite : l'exemple de L'Ami du Peuple (1928-1937) », Revue d'histoire moderne et contemporaine, t. 23, no 1,‎ , p. 116-144 (lire en ligne).
Liens externes
L'Ami du Peuple dans Retronews, les archives numériques des journaux de la BnF.