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Kokawa-dera engi emaki

Le Kokawa-dera engi emaki (çȉæČłćŻșçžè”·ç””ć·»), littĂ©ralement Rouleaux illustrĂ©s des lĂ©gendes du Kokawa-dera ou Rouleaux illustrĂ©s de la fondation du Kokawa-dera, est un emaki japonais datant approximativement de la fin de l’époque de Heian (XIIe siĂšcle). ComposĂ© d’un rouleau de papier, il illustre la fondation et les miracles associĂ©s au temple bouddhique Kokawa-dera de l’ancienne province de Kii (actuellement dans la prĂ©fecture de Wakayama). Les longues peintures prĂ©sentent un style simple et dĂ©pouillĂ©, typique du yamato-e (peinture de style japonais) de l’époque, tandis que les textes calligraphiĂ©s sont composĂ©s de kanji et de kana. L’Ɠuvre est classĂ©e trĂ©sor national du Japon.

Kokawa-dera engi emaki
DĂ©tail du rouleau montrant une jeune fille en pĂšlerinage montant un cheval.
Artiste
Inconnu
Date
XIIe siĂšcle
Type
Technique
Peinture et encre sur rouleau de papier
Dimensions (H Ă— L)
30,8 Ă— 1984,2 cm
Propriétaire
Kokawa-dera (d)
Localisation
En dépÎt au musée national de Kyoto (Japon)
Protection

Description

ScĂšne de vie chez le chasseur.

Apparue au Japon depuis environ le VIe siĂšcle grĂące aux Ă©changes avec l’Empire chinois, la pratique de l’emaki se diffuse largement auprĂšs de l’aristocratie Ă  l’époque de Heian : il s’agit de longs rouleaux de papier narrant au lecteur une histoire au moyen de textes et de peintures. Ces peintures narratives constituent Ă©galement un terrain fertile pour le prosĂ©lytisme bouddhique, notamment les emaki faisant le rĂ©cit de la fondation des temples ou de la vie des moines cĂ©lĂšbres. Le Kokawa-dera engi emaki s’inscrit donc dans ce contexte-lĂ , pendant l’ñge d’or de l’emaki (XIIe et XIIIe siĂšcles)[1].

Le Kokawa-dera engi emaki raconte l’origine miraculeuse du temple Kokawa-dera, fondĂ© en 770 selon la lĂ©gende, et de sa figure principale, une statue de Kannon aux mille bras (Senju Kannon). Les origines et la fondation des temples bouddhiques (engi en japonais) Ă©taient un sujet classique des emaki, souvent dans un but prosĂ©lyte afin de s’adresser au plus grand nombre[2]. L’emaki se compose d’un rouleau de papier, organisĂ© en quatre courtes sections calligraphiĂ©es et cinq longues zones de peinture, mais le dĂ©but (prĂ©cisĂ©ment la premiĂšre section calligraphiĂ©e et un morceau de la premiĂšre peinture) a brĂ»lĂ© dans un incendie et les parties restantes sont partiellement endommagĂ©es aux bordures. L’auteur et la date de crĂ©ation sont inconnus, mais le rouleau est communĂ©ment datĂ© de la fin du XIIe siĂšcle (fin de l’époque de Heian ou dĂ©but de celle de Kamakura)[3]. Les spĂ©cialistes sont divisĂ©s sur l’existence possible d’une version plus ancienne ou d’un prototype[4].

Le temple et la statue de Kannon aux mille bras.

L’Ɠuvre se base sur les deux parties du texte du Kokawa-dera engi (Les LĂ©gendes du Kokawa-dera). La premiĂšre partie rapporte l’histoire d’un chasseur de la province de Kii nommĂ© ƌtomo no Kujiko au VIIIe siĂšcle. Kannon aux mille bras se rĂ©vĂ©la Ă  lui plusieurs nuits de suite par une Ă©trange lumiĂšre, si bien que ƌtomo no Kujiko dĂ©cida de lui construire un temple Ă  cet endroit. Un jeune ascĂšte lui promit de sculpter une statue en sept jours pour son sanctuaire ; il s’agit de la statue de Kannon du temple Kokawa-dera. La seconde partie de la lĂ©gende relate un miracle associĂ© Ă  cette statue. Dans la lĂ©gende, un jeune moine guĂ©rit un jour la fille malade d’un riche homme par des priĂšres. Refusant l’argent proposĂ© en remerciement, il n’accepta pour toute rĂ©compense qu’un couteau et un hakama rouge, disant qu’il repartait chez lui Ă  Kokawa dans la province de Kii. Le riche homme et sa famille s’y rendirent en pĂšlerinage l’annĂ©e suivante. Remontant le cours de la riviĂšre Kokawa, ils dĂ©couvrirent le sanctuaire et l’image de Kannon aux mille bras, parĂ©e du poignard et du hakama rouge. Ils conclurent alors au miracle en comprenant que le jeune moine n’était autre que la manifestation de Kannon, et dĂ©cidĂšrent de vouer leur vie Ă  suivre la voie du bouddhisme[5] - [6] - [3].

L’emaki est classĂ© parmi les trĂ©sors nationaux du Japon et appartient toujours au temple Kokawa-dera[7].

Style et composition des peintures

ScĂšne rurale et paysage.

Le rouleau mesure 30,8 cm de hauteur pour 1 984,2 cm de long[7]. Les emaki s’inscrivent dans le style du yamato-e, c’est-Ă -dire la peinture de goĂ»t japonais qui se dĂ©veloppe durant l’époque de Heian en s’écartant des canons chinois. Ici, le Kokawa-dera engi emaki appartient au sous-genre de l’otoko-e, qui se caractĂ©rise par des peintures dynamiques Ă  la couleur lĂ©gĂšre et au rythme narratif continu, en opposition aux peintures de la cour (onna-e) plus dĂ©coratives et Ă©motionnelles[8] - [9]. Il existe peu d’autres exemples de peinture otoko-e datant du XIIe siĂšcle, tels le Shigisan engi emaki, le Ban dainagon ekotoba ou le Kibi Daijin nittƍ emaki[6]. Il est fort probable que ces Ɠuvres de la fin du XIIe soient relativement contemporaines ; Glum avance l’hypothĂšse, Ă  partir de l’analyse des styles de chaque rouleau, que le Kokawa-dera engi serait ultĂ©rieur au Kibi daijin et antĂ©rieur au Shigisan engi et au Ban dainagon[10].

Les peintures observent une composition rĂ©guliĂšre en trois plans : un avant-plan naturel (roches, arbres) servant Ă  crĂ©er la profondeur Ă  la scĂšne ; les figures et Ă©lĂ©ments de paysage (bĂątiments, routes, champs...) de l’histoire occupant tout le centre ; enfin un paysage lointain et stylisĂ© en haut du rouleau[4]. Cette composition s’inspire des canons de l’art de la Chine des Tang avec des variations typiquement japonaises. La perspective non rĂ©aliste repose classiquement sur des lignes parallĂšles et le point de vue est toujours identique, de face lĂ©gĂšrement en hauteur[11] - [12]. Les lignes et contours Ă  l’encre sont en revanche plus fins et moins libres que dans les autres Ɠuvres otoko-e[13]. Ici, le trait se caractĂ©rise par sa simplicitĂ© ; les Ă©lĂ©ments de paysage sont stylisĂ©s et employĂ©s principalement pour marquer les transitions entre scĂšnes[14]. La narration est quant Ă  elle basĂ©e sur la rĂ©pĂ©tition de scĂšnes, au fond presque inchangĂ© comme la reprĂ©sentation du temple ou de la hutte du chasseur, afin d’illustrer une succession d’évĂ©nements consĂ©cutifs[4] - [7].

Les figures prĂ©sentent ici quelques particularitĂ©s, car elles sont plus rĂ©alistes et neutres que les autres emaki de l’époque, comme les peintures de la cour trĂšs stylisĂ©es ou le Shigisan engi emaki et le Ban dainagon akotoba un peu plus expressifs et caricaturaux[15].

Historiographie

Vénération de la statue de Kannon.

Miroir de la sociĂ©tĂ©, les emaki constituent une source importante d’information sur la civilisation et l’histoire mĂ©diĂ©vale du Japon[16]. Ici, l’Ɠuvre illustre avec prĂ©cision la vie quotidienne des Japonais au tout dĂ©but de l’époque de Kamakura, peignant petites gens et guerriers locaux. Tout comme le Shigisan engi emaki, le Kokawa-dera engi emaki ne montre pas la vie Ă  la cour, mais la vie hors du palais, autre trait caractĂ©ristique des Ɠuvres de genre otoko-e. Une Ă©tude de l’UniversitĂ© de Kanagawa prĂ©sente en dĂ©tail des Ă©lĂ©ments de vie quotidienne illustrĂ©s par les cinq peintures du rouleau, Ă  propos des rĂ©sidences, des vĂȘtements, des activitĂ©s et travaux, des voyages, des aliments, des amĂ©nagements comme les ponts, ou encore du temple[3].

Annexes

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

  • (en) Peter Glum, The Ban Dainagon ekotoba, the Kibi Daijin nittƍ emaki, and the NenjĆ« gyƍji emaki : a reassessment of the evidence for the work of Tokiwa Mitsunaga embodied in two Japanese narrative scroll paintings of the twelfth century, and one presumably close copy, universitĂ© de New York, , 474 p. (thĂšse)
  • Elise Grilli (trad. Marcel Requien), Rouleaux peints japonais, Arthaud, , 56 p.
  • Seiichi Iwao et HervĂ© Benhamou, Dictionnaire historique du Japon, vol. 2, Maisonneuve & Larose, (ISBN 2-7068-1632-5)
  • (en) Hideo Okudaira (trad. Elizabeth Ten Grotenhuis), Narrative picture scrolls, vol. 5, Weatherhill, coll. « Arts of Japan », , 151 p. (ISBN 978-0-8348-2710-3)
  • (en) Keizo Shibusawa et al., « Kokawa-dera engi emaki », dans Pictopedia of Everyday Life in Medieval Japan compiled from picture scrolls, universitĂ© de Kanagawa, (lire en ligne)
  • (ja) Tetsuo Sƍga, æ—„æœŹç””ć·ç‰©ć…šé›†. 珏5ć·, çȉæČłćŻș瞁蔷甔,ć‰ć‚™ć€§è‡Łć…„ć”ç””, vol. 5, Tƍkyƍ, Kadokawa Shoten, coll. « Nihon emakimono zenshĆ« »,‎

Notes et références

  1. Christine Shimizu, L’art japonais, Flammarion, coll. « Tout l’art », , 448 p. (ISBN 978-2-08-013701-2), p. 193
  2. Christine Shimizu, op. cit., 2001, p. 237
  3. (en) Keizo Shibusawa et al., « Kokawa-dera engi emaki », dans Pictopedia of Everyday Life in Medieval Japan compiled from picture scrolls, université de Kanagawa, (lire en ligne)
  4. Glum 1981, p. 325-326
  5. Okudaira 1973, p. 123-127
  6. Iwao et Benhamou 2002, tome 1, p. 1576
  7. (ja)(en) « Kokawadera engi emaki », musée national de Kyoto (consulté le )
  8. Okudaira 1973, p. 64-70
  9. (en) Sherman E. Lee, Michael R. Cunningham et James T. E. Ulak, Reflections of reality in Japanese art, Cleveland Museum of Art, (ISBN 978-0-910386-70-8), p. 43
  10. Glum 1981, p. 334
  11. Glum 1981, p. 328-329
  12. Grilli 1962, p. 7-8
  13. Glum 1981, p. 333
  14. (en) Laura Warantz Allen, The Art of Persuasion : Narrative Structure, Imagery and Meaning in the Saigyƍ Monogatari Emaki, universitĂ© de Californie Ă  Berkeley, , p. 225 (thĂšse d’histoire de l’art)
  15. Glum 1981, p. 331-332
  16. Okudaira 1973, p. 81-82
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