AccueilđŸ‡«đŸ‡·Chercher

Histoire d'en bas

L’History from Below, autrement appelĂ©e l’« histoire d'en bas », est un courant historiographique qui raconte les Ă©vĂ©nements historiques du point de vue des gens ordinaires plutĂŽt que de celui des Ă©lites. L’"histoire d’en bas" s’est construite en rĂ©action Ă  la recherche d’une alternative Ă  « l’histoire des gens du haut » ou Ă  la « vision du grand homme ». Les origines de l’« histoire d’en bas » entrent ainsi en rĂ©action contre l’élitisme[1]. Le courant se rĂ©fĂšre d’ailleurs Ă  un terrain bien connu des historiens de gauche[2]. L’idĂ©e est de comprendre les foules[3].

En fonction du contexte, l’« histoire d’en bas » possĂšde diffĂ©rents noms. Les termes comme « l’histoire du peuple », « l’histoire de la vie de tous les jours », bien que ne relevant pas toujours de « l’histoire d’en bas », font bien partie du mĂȘme mouvement. Chacun reflĂšte la dĂ©mocratisation de l’histoire et le dĂ©sir de rendre au peuple le droit de voir leur propre histoire Ă©tudiĂ©e[4].

InfluencĂ©s par l’anthropologie culturelle et l’école des Annales, les historiens de ce courant rĂ©agissent contre l’importance accordĂ©e aux tendances sĂ©rielles et aux structures sociales. L’histoire d’en bas (ou histoire populaire) implique une rĂ©duction de l’échelle historique. Ce courant se concentre sur un Ă©vĂ©nement spectaculaire, une communautĂ© ou un individu. L’attention est notamment portĂ©e sur les personnes privĂ©es de leurs droits, les non-conformistes, les pauvres, les opprimĂ©s et d’autres groupes marginaux. La vie des gens ordinaires est apprĂ©hendĂ©e Ă  travers leurs croyances, leurs mentalitĂ©s, leurs pratiques quotidiennes, leurs valeurs, et leurs luttes. Pouvant mettre en lumiĂšre la coexistence ou les conflits entre les diffĂ©rentes couches sociales, ce type de rĂ©cit historique dĂ©montre l’importance du pouvoir d’action individuel et essaye d’attester la complexitĂ© de la fluiditĂ© identitaire et de l’expĂ©rience vĂ©cue.[5]

Origine et Ă©volution du courant

L’histoire d’en bas s’éloigne radicalement de l’historiographie traditionnelle dominante, qui se concentre depuis longtemps sur la vie des hommes d’État, la guerre, la politique et la diplomatie de haut niveau. Il existe un certain nombre d’autres influences paneuropĂ©ennes, notamment Ă  partir des pratiques littĂ©raires de LĂ©on TolstoĂŻ, Marcel Proust ou Italo Calvino, ou Ă  partir de travaux de rĂ©flexion comme ceux de Siegfried Kracauer, Erving Goffman, Pierre Bourdieu, Henri Lefebvre, Michel de Certeau, Michel Foucault ou Sigmund Freud[6]. Le courant a subi des Ă©volutions qui ont Ă©tĂ© retracĂ©es par Raphael Samuel dans un ouvrage intitulĂ© People’s history and Socialist theory (1981) oĂč il a dressĂ© une gĂ©nĂ©alogie de l’histoire d’en bas[7].

Au XIXe siĂšcle, l’écriture de l’histoire s’est Ă©loignĂ©e d’une vision centrĂ©e sur les grandes actions des Ă©lites dirigeantes[8]. Un des prĂ©curseurs est Jules Michelet avec son essai sur Le peuple et son histoire de la nation française. C'est le courant d'histoire sociale qui se dĂ©veloppe en Allemagne qui porte ce mouvement avec des Ă©tudes sur la dĂ©mographie des villes mĂ©diĂ©vales notamment.

L’entre-deux guerres a entraĂźnĂ© de façon plus systĂ©matique l’abandon de cette focalisation sur le haut et le puissant. Les membres de l’école française des Annales, qui essayent de comprendre les mutations des sociĂ©tĂ©s et les dynamiques sociales, ont adoptĂ© une approche matĂ©rialiste et interdisciplinaire qui s’inspirait des sciences sociales. En mĂȘme temps, ils focalisent leur attention sur les masses, les mentalitĂ©s et les forces structurelles sous-jacentes, en dĂ©pit des Ă©vĂ©nements majeurs et des individus puissants[9].

Lucien Febvre est le premier Ă  avoir utilisĂ© l’expression d’« histoire d’en bas » dans un article Ă©crit en 1932 Ă  la mĂ©moire de l’historien Albert Mathiez : « Et prĂ©parons-nous Ă  soutenir, de toutes nos forces, ceux qui, reprenant en sous-Ɠuvre, patiemment, laborieusement, l’esquisse si largement enlevĂ©e jadis par JaurĂšs, nous donneront cette histoire rĂ©volutionnaire qui nous manque toujours : histoire de masses et non de vedettes ; histoire vue d’en bas et non d’en haut (
) »[10].

AprĂšs la Seconde Guerre mondiale, des historiens marxistes actifs au Royaume-Uni[11] et aux États-Unis, ont Ă©tĂ© influencĂ©s par des mĂ©thodes et des prĂ©occupations similaires. Ils se sont intĂ©ressĂ©s aux vies et aux luttes des gens ordinaires, et ont accordĂ© leur attention aux relations sociales de la base, aux formes populaires de protestation et aux activitĂ©s quotidiennes (travail, loisirs, attitudes, croyances, pratiques et comportements)[9]. Prolongeant une ligne historiographique inaugurĂ©e avec l’ouvrage de A. L. Morton, A People’s History of England (1938), les membres du groupe du parti communiste d’Angleterre ont travaillĂ© Ă  dĂ©velopper une interprĂ©tation marxiste de l’histoire anglaise. Cet ensemble de travaux vise plusieurs objectifs : inclure des acteurs subalternes, montrer l’action d’une Ă©lite d’un point de vue subalterne ainsi que montrer les rĂ©sultats Ă  un public subalterne. Le mouvement a prouvĂ© que le subalterne pouvait non seulement faire l’histoire mais aussi faire de l’historiographie[12].

Toutes les formes de l’histoire du peuple tĂ©moignent de l'hĂ©ritage intellectuel des Annales. Cependant, il s’agit en mĂȘme temps d’une rĂ©action consciente contre le travail de cette Ă©cole. L'« histoire d'en bas » s'inspire Ă©galement de l’histoire de type « science-sociale » interdisciplinaire dĂ©veloppĂ©e Ă  partir des annĂ©es 1950 et 1960 en Allemagne, en France et aux États-Unis. Les historiens, Fernand Braudel, en France, et Hans-Ulrich Wehler, en Allemagne, ont eu recours Ă  cette derniĂšre et s’appuient principalement sur des techniques et thĂ©ories sociologiques. Leurs Ă©tudes se concentrent sur des tendances globales et des sĂ©ries, sur base d’actes de naissances, de mariages, de dĂ©cĂšs, mais aussi sur des donnĂ©es chiffrĂ©es concernant les professions et les prix. De telles analyses permettent de dĂ©couvrir des rĂ©gularitĂ©s mesurables Ă  grande Ă©chelle et Ă  long terme, d’arriver Ă  des gĂ©nĂ©ralisations sur le comportement humain et de formuler des « lois » historiques. Des critiques ont Ă©tĂ© lancĂ©es par ceux qui ont Ă©tĂ© déçus de cette approche quantitative. Effectivement, elle ne prend guĂšre en compte l’agissement des gens ordinaires et rĂ©duit tous les individus Ă  l’insignifiance. L’« histoire d’en bas » a donc l’objectif de montrer comment les masses s’approprient et façonnent de larges forces et structures supra-individuelles, au lieu de simplement les renvoyer Ă  l’impuissance historique[13].

C’est principalement grĂące Ă  E. P. Thompson, le doyen des historiens marxistes autocritiques associĂ©s Ă  la Nouvelle Gauche britannique[6], que l’expression d’« histoire d'en bas » a vu le jour. Il a en effet eu recours Ă  ce terme dans son article publiĂ© le dans le Times Literary Supplement[14]. GrĂące Ă  son expression Ă©levĂ©e Ă  la pointe de l’historiographie Ă  partir des annĂ©es 1970 et Ă  son travail pionnier (The Making of the English Working Class) ayant mis l’accent sur les conditions, la culture et les pratiques quotidiennes de ces individus[6], certains chercheurs le considĂšrent comme Ă©tant le pĂšre du courant. D’autres ont une perspective plus englobante et considĂšrent le British communist party, rejoint par Thompson, George RudĂ© et Rodney Hilton, comme source du mouvement[15].

Les sensibilitĂ©s politiques des praticiens ont Ă©tĂ© (rĂ©)formĂ©es Ă  partir des annĂ©es 1970, une pĂ©riode d’inertie politique et de stagnation Ă©conomique qui a marquĂ© la fin des Trente Glorieuses en Europe. Cette pĂ©riode a remis en question l’idĂ©ologie de base et les prĂ©misses scientifiques du marxisme[13]. Une nouvelle rĂ©ticence Ă  la modernitĂ©, au progrĂšs et au capitalisme Ă©merge et aide Ă  expliquer pourquoi tant d’études micro-historiques pionniĂšres ont examinĂ© les communautĂ©s et les mentalitĂ©s au dĂ©but de la pĂ©riode moderne[6].

L’éventail des sujets jugĂ©s dignes d’investigations historiographiques s’est donc Ă©largi durant les annĂ©es 1970 et 1980. L’« histoire d’en bas » s’est rĂ©pandue aux États-Unis et au Royaume-Uni, mais c’est principalement en Allemagne et en Italie qu’elle a pris de nouvelles formes[6]. Des variations de l’histoire populaire ont donc Ă©mergĂ© : l’Alltagsgeschichte en Allemagne (l’histoire de la vie quotidienne) et la micro-histoire en Italie et en France. La micro-histoire se concentre sur l’« unique » et le spectaculaire pour arriver Ă  l’expĂ©rience vĂ©cue, alors que l’Alltagsgeschichte tente de reconstruire les relations sociales et les transactions quotidiennes en se basant sur des actes largement inconscients, routiniers et rĂ©pĂ©titifs[6]. Cependant, les deux mouvements partagent un certain nombre de caractĂ©ristiques essentielles. Leurs praticiens se concentrent sur les expĂ©riences qualitatives, quotidiennes et vĂ©cues des gens ordinaires et exclus des rĂ©cits historiques et mettent ensuite en lumiĂšre leurs actions, pratiques, habitudes, valeurs, ainsi que leurs croyances, sentiments et mentalitĂ©s[9].

À partir des annĂ©es 1980, des historiens se sont interrogĂ©s sur la nature de ce courant provoquant des dĂ©bats thĂ©oriques et polĂ©miques. Par exemple, l’historien T. Hitchcock s’intĂ©resse Ă  mieux dĂ©finir la notion d’« histoire d’en bas ». Il explique qu’il s’agit d’une Ă©tude sur les rĂ©sistances Ă  la « disciplinarisation » et Ă  la capacitĂ© de construction de l’ordre social dont les pauvres font preuve. Dans les annĂ©es 1990, James Sharpe et Victoria Heftler s’interrogent Ă©galement sur la nature du concept. Le sociologue Mark Hailwood tente aussi de dĂ©finir ce qu’englobe le terme « en bas »[16] - [17]. En tant que sous-domaine de la recherche historique, l’« histoire d’en bas » a donc suscitĂ© un grand intĂ©rĂȘt chez les chercheurs indiens et sud-amĂ©ricains ainsi qu’en Europe et en AmĂ©rique du Nord[18].

Si dans les annĂ©es 1980, le courant historiographique a joui d’une Ă©norme popularitĂ©, Ă  la fin de la dĂ©cennie suivante le courant historiographique a Ă©tĂ© Ă©clipsĂ© par une nouvelle histoire culturelle (New cultural history), en vogue aux États-Unis[19]. Certains estiment d’ailleurs que l’« histoire d’en bas » s’est Ă©loignĂ© de sa dimension Ă©mancipatrice vis-Ă -vis des Ă©lites[20]. NĂ©anmoins, il serait erronĂ© de dĂ©clarer que l’histoire d’en bas est Ă©teinte : puisque nombreux sont les historiens europĂ©ens et amĂ©ricains Ă  poursuivre leurs travaux avec cette ligne de pensĂ©e[19].

MĂ©thodologie

Ce type d’histoire tombe habituellement dans une des deux catĂ©gories : l’épisodique et le systĂ©matique. Le premier type, tend Ă  recourir Ă  une description dense ainsi qu’à adopter une approche narrative. Il se concentre sur un Ă©vĂ©nement ou un Ă©pisode unique et spectaculaire impliquant habituellement une personne ou un petit groupe d’individus. L’autre type reconstruit assidĂ»ment, au sein d’une petite communautĂ©, la toile complexe des relations sociales familiales et extrafamiliales[9].

Les spĂ©cialistes du courant rĂ©duisent l’échelle de leur recherche historique, en la confinant Ă  un seul individu, une petite communautĂ© ou un Ă©vĂ©nement mĂ©connu. C’est une histoire qui est locale et prend pour sujet la rĂ©gion, la commune ou la paroisse. Dans le cas de la ville, on s’intĂ©resse Ă  la morphologie de chaque quartier, banlieue, rue ou mĂȘme maison individuelle. La force des mĂ©thodes de l’« histoire d’en bas » se trouve dans l’investigation profonde du micro-niveau[21] - [9].

Ce type d’histoire implique une Ă©tude intensive du matĂ©riel documentaire disponible et fait l’objet d’une analyse minutieuse. S’immergeant dans des sources apparemment banales liĂ©es Ă  des thĂšmes divers (la famille, les relations de genre, les loisirs et la culture populaire), les adeptes recherchent et tentent de comprendre la signification des multiples signes, indices et symptĂŽmes. Les chercheurs ont la certitude que recourir Ă  une observation microscopique va permettre de distinguer des phĂ©nomĂšnes rĂ©vĂ©lateurs invisibles Ă  partir d’une analyse conventionnelle prenant une vue globale[9].

L’anthropologie culturelle a eu une forte influence sur le champ de l’histoire quotidienne. À l’image des ethnographes, les historiens tentent de s’immerger dans la vie quotidienne de ceux qu’ils Ă©tudient. À l’aide de documents Ă©crits et d’autres sources, ils essayent de dĂ©couvrir et analyser les gestes rĂ©pĂ©titifs et routiniers qui, selon eux, rĂ©vĂšlent les formes sous-jacentes et dominantes de la culture donnĂ©e[6].

Beaucoup de personnes pensent que « l’histoire d’en bas » est impossible Ă  entreprendre pour les pĂ©riodes antĂ©rieures Ă  la RĂ©volution française en raison d’une bureaucratie peu dĂ©veloppĂ©e et d’une absence relative des classes laborieuses au sein des sources. Cependant, l’« histoire d’en bas » peut s’appliquer Ă  toutes les pĂ©riodes historiques en trouvant des alternatives au niveau des sources. Il suffit de questionner diffĂ©remment ces derniĂšres[22]. L'« histoire d’en bas » plutĂŽt que « d’en haut » appelle donc Ă  de nouvelles mĂ©thodes et sources, ou bien Ă  la rĂ©interprĂ©tation radicale des matĂ©riaux traditionnels[8].

Il faut Ă©galement placer un Ă©vĂ©nement social dans son contexte culturel complet, de sorte qu’il puisse ĂȘtre Ă©tudiĂ© sur un plan analytique plutĂŽt que descriptif. Il existe aussi la difficultĂ© de reprĂ©senter et faire comprendre aux lecteurs les diffĂ©rences culturelles de l’époque, tout en rĂ©ussissant Ă  traduire cela en un concept, une rĂ©alitĂ© sociale ou culturelle[23].

Huit dangers se dressent devant le chercheur :

  1. Il est important de ne pas politiser l'histoire en magnifiant l'importance du peuple, ou plus particuliÚrement des groupes opprimés[24] - [25].
  2. Il s’agit d’éviter le piĂšge de l’idĂ©ologie. Beaucoup de critiques suggĂšrent que le courant a une approche marxiste[26].
  3. Il ne faut pas tomber dans une histoire locale isolée et anecdotique[27].
  4. Il ne faut pas cloisonner l’« histoire d'en bas » afin de ne pas risquer de fragmenter l'Ă©criture historique[28].
  5. Une autre critique sévÚre concerne la crainte que les sources, les personnes et les événements soient interprétés par des historiens adeptes de cette mouvance de façon anachronique[29].
  6. Il est important de ne pas donner une tournure romanesque au passĂ© et de ne pas s’attacher Ă  des dĂ©tails pittoresques ou cĂ©lĂ©brant les petites gens comme des hĂ©ros[29].
  7. Un autre danger est d’utiliser des sources laissĂ©es par les riches et puissants pour Ă©tudier la vie des pauvres et des opprimĂ©s[6].
  8. Pour la plupart des lieux et des pĂ©riodes, on observe une distribution inĂ©gale de l'alphabĂ©tisation et des loisirs en faveur d’un groupe de classes privilĂ©giĂ©es. Les subordonnĂ©s ont eu besoin de susciter l'intĂ©rĂȘt de leurs supĂ©rieurs pour se frayer un chemin dans les archives, et cet « intĂ©rĂȘt » a Ă©tĂ© stimulĂ© de maniĂšre nĂ©cessairement structurĂ©e. L'historien de gauche, comme l'État, s'intĂ©resse particuliĂšrement Ă  ceux qui dĂ©fient et rĂ©sistent aux impositions[30].

Il importe Ă©galement de garder Ă  l’esprit que l’« histoire d’en bas » n’est pas une discipline sĂ©parĂ©e et qu’elle ne peut survivre sans rĂ©fĂ©rence Ă  l’« histoire d’en haut » puisque ni la structure sociale plus large, ni les actions des Ă©lites ne peuvent ĂȘtre ignorĂ©es[31].

Apports du mouvement

L’intĂ©rĂȘt et la valeur de ces Ă©tudes sont multiples. En premier lieu, elles dĂ©montrent que les gens du peuple ne sont pas simplement de passifs objets de « l’histoire » ou les victimes de grandes forces amorphes et impersonnelles. Ils prouvent que tous ont un pouvoir d’action individuel et qu’ils sont les sujets actifs de leur propre vie[32].

Ce courant historiographique aide aussi Ă  former une identitĂ© en Ă©crivant une histoire plus « populaire » et montre qu’elle n’est pas reprĂ©sentĂ©e que par la monarchie, les gĂ©nĂ©raux ou premiers ministres[33]. Certains adeptes de l’« histoire d’en bas » soulignent combien il est important de se libĂ©rer de tous types de liens qu’ils soient coloniaux, nationaux, patriarcaux, etc.[34] Dans cet Ă©tat d’esprit, il apparait que ce courant peut apporter d’importantes contributions aux politiques d’émancipation[35].

Une grande attention est donc accordĂ©e Ă  leur capacitĂ© Ă  rĂ©sister aux formes hĂ©gĂ©moniques de domination et de contrĂŽle. Cette focalisation sur des individus ordinaires et sur les affaires d’adaptation est importante car elle rĂ©vĂšle de façon Ă©clatante la multiplicitĂ© et l’extrĂȘme complexitĂ© de l’expĂ©rience vĂ©cue et ses dimensions plus subjectives dans les situations concrĂštes de la vie[36].

L’« histoire d’en bas » a favorisĂ© l’évaluation de femmes et d’hommes qui semblaient perdus dans le passĂ©, dont l’expĂ©rience vĂ©cue Ă©tait considĂ©rĂ©e par les chercheurs comme n’étant d’aucun intĂ©rĂȘt : par exemple, la vie et les pensĂ©es des paysans prĂ©modernes ou le dĂ©veloppement de la classe ouvriĂšre. L’« histoire d’en bas » a donc permis de rĂ©aliser une histoire sur des sujets divers et variĂ©s : l’histoire du crime, la vie familiale paysanne, la culture et la religion populaire, etc.[37] - [33] DerriĂšre l’« histoire d’en bas », il y a un effort pour humaniser l’histoire[11]. C’est aussi la promesse d’une nouvelle perspective sur notre passĂ©[38].

Chercheurs représentatifs du courant

Bibliographie

Ouvrages, articles et contributions

  • Bahl Vinay, « What Went Wrong with “History from Below” » dans Economic and Political Weekly, vol. 38, n° 2, , pp. 135-146.
  • Brecher Jeremy, History From Below: How To Uncover And Tell The Story Of Your Community, Association, Or Union, New Haven, Commonwork Pamphlets, 1988.
  • Cerutti Simona, « Who is below ? E. P. Thompson, historien des sociĂ©tĂ©s modernes : une relecture », dans Annales. Histoire, Sciences Sociales, vol. 70, n° 4, 2015, pp. 931-956.
  • Chesneaux Jean, « Histoire par en haut et histoire par en bas. Les masses populaires en histoire », dans Chesneaux Jean (Ă©d.), Du passĂ©, faisons table rase?, Paris, La DĂ©couverte, 1976, pp. 138-147 (Petite collection MaspĂ©ro).
  • Dworkin Dennis, Cultural Marxism in Post War Britain: History, the New Left and the Origins of Cultural Studies, Durham, Duke University Press, 1997.
  • Heftler Victoria, « The Future of the Subaltern Past: Toward a Cosmopolitan "History from Below" », dans left history : an interdisciplinary journal of historical inquiry and debate, vol. 5, n°1, 1997, pp. 65-83.
  • Hobsbawn Eric « History from below. Some reflections », dans Krantz Frederick (ed.), History from Below. Studies in Popular Protest and Popular Ideology in Honour of George RudĂ©, MontrĂ©al, Concordia University, 1985, pp. 63-75.
  • Kaye H.J., The British Marxist Historian: an introductory analysis, New York, Polity Press, 1984.
  • Port Andrew, « History from Below, the History of Everyday Life, and Microhistory », dans The International Encyclopedia of the Social and Behavioral Sciences, 2e Ă©d., vol. 11, Amsterdam, Elsevier, 2015, pp. 108-113.
  • Émilien Ruiz, « L'histoire populaire : label Ă©ditorial ou nouvelle forme d’écriture du social ? », Le Mouvement social, nos 269-270 « Écrire autrement ? L'histoire sociale en quĂȘte de publics »,‎ octobre 2019 - mars 2020, p. 185-230 (DOI 10.3917/lms.269.0185).
  • Simona Cerutti, « Who is below ? E. P. Tompson, historien des sociĂ©tĂ©s modernes : une relecture », Annales. Histoire, sciences sociales, no 4 (70e annĂ©e),‎ , p. 931-956 (lire en ligne).
  • Scribner Bob, « History from below », dans History of European Ideas, vol. 12, n° 4, 1990, p. 559.
  • Sharpe Jim, « History from below », dans Burke Peter (Ă©d.), New Perspectives on Historical Writing, Cambridge, Polity Press, 1991, pp. 24-41.
  • Thompson Edward P., « History from Below », dans Times Literary Supplement, n° 3345, , pp. 279–280.

Exemples d'ouvrages illustrant le courant

  • Amez Benoit, 14-18 : vie et survie dans les tranchĂ©es belges, Waterloo, Jourdan, 2013.
  • Buton Philippe, Buttner Olivier et Hastings Michel (Ă©d.), La guerre froide vue d'en bas, Paris, CNRS Ă©ditions, 2014.
  • Debruyne Emmanuel et Van Ypersele Laurence, Je serai fusillĂ© demain. Les derniĂšres lettres des patriotes belges et français fusillĂ©s par l'occupant. 1914-1918, Bruxelles, Racine, 2011.
  • Farge Arlette, Vivre dans la rue Ă  Paris au XVIIIe siĂšcle, Paris, Gallimard, 1979.
  • Figes Orlando, A People's Tragedy: The Russian Revolution: 1891-1924, Londres, Penguin Books, 1998.
  • Hitchcock Tim, Down and Out in Eighteenth-Century London, Londres, Hambledon and London, 2004.
  • Hobsbawm Eric, Primitive Rebels: Studies in Archaic Forms of Social Movement in the 19th Century, New York, W. W. Norton & Company, 1965.
  • Huard Raymond. « Histoire intellectuelle et histoire par en bas : les candidatures ouvriĂšres de la RĂ©volution Ă  1870 », dans Romantisme, vol. 135, n° 1, 2007, pp. 23-35.
  • Kranz Frederick, History from below: French and English Popular Protest, 1600‑1800, Oxford, Basil Blackwell, 1988.

Notes et références

  1. MacRaild Donald M. et Black Jeremy, Studying History, 3e Ă©d., Basingstoke, Palgrave Macmillan, p. 111 (Palgrave Study Skills).
  2. Heftler Victoria, « The Future of the Subaltern Past: Toward a Cosmopolitan 'History from Below’ » dans Left history : an interdisciplinary journal of historical inquiry and debate, vol. 5, n° 1, 1997, p. 65.
  3. MacRaild Donald M. et Black Jeremy, op. cit., p. 113.
  4. MacRaild Donald M. et Black Jeremy, op. cit., p. 111. 
  5. Port Andrew, « History from Below, the History of Everyday Life, and Microhistory », dans The International Encyclopedia of the Social and Behavioral Sciences, 2e Ă©d., vol. 11, Amsterdam, Elsevier, 2015, p. 108.
  6. Port Andrew, op. cit., p. 110.
  7. Bhattacharya Sabyasachi, « History from Below », dans Social Scientist, vol. 11, n° 4, 1983, p. 5.
  8. MacRaild Donald M. et Black Jeremy, op. cit., p. 111.
  9. Port Andrew, op. cit., p. 108.
  10. Febvre Lucien, « Albert Mathiez : un tempĂ©rament, une Ă©ducation », dans Annales d'histoire Ă©conomique et sociale, n° 18, 1932, p. 576.
  11. Bhattacharya Sabyasachi, op. cit., p. 4.
  12. Heftler Victoria, op. cit., p. 67.
  13. Port Andrew, op. cit., p. 109.
  14. Thompson Edward Palmer, « History from Below », dans Times Literary Supplement, n° 3345, 7 avril 1966, pp. 279–280.
  15. Cerutti Simona, « “Who is below?”. E. P. Thompson, historien des sociĂ©tĂ©s modernes : une relecture », dans Annales. Histoire, Sciences Sociales, vol. 70, n° 4, 2015, pp. 932-933.
  16. Heftler Victoria, op. cit., p. 65
  17. Cerutti Simona, op. cit., pp. 932-933.
  18. MacRaild Donald M. et Black Jeremy, op. cit., p. 111. 
  19. Port Andrew, op. cit., p. 112.
  20. Bahl Vinay, « What Went Wrong with ‘History from Below’ », dans Economic and Political Weekly, vol. 38, n° 2, 2003, p. 135.
  21. Bhattacharya Sabyasachi, op. cit., p. 14
  22. Sharpe James, « History from below », dans Burke Peter (éd.), New Perspectives on Historical Writing, Cambridge, Polity Press, 1991, p. 28.
  23. Sharpe James, op. cit., p. 35.
  24. Sharpe James, op. cit., p. 34
  25. Bahl Vinay, op. cit., p. 143.
  26. MacRaild Donald M. et Black Jeremy, op. cit., pp. 113-114.
  27. Sharpe James, op. cit., p. 34.
  28. Sharpe James, op. cit., p. 33.
  29. Port Andrew, op. cit., p. 111.
  30. Heftler Victoria, op. cit., p. 74.
  31. MacRaild Donald M. et Black Jeremy, op. cit., p. 114.
  32. Port Andrew, op. cit., p. 108.
  33. Sharpe James, op. cit., p. 37.
  34. Bahl Vinay, op. cit., p. 138.
  35. Heftler Victoria, op. cit., p. 79.
  36. Port Andrew, op. cit., pp. 108-109.
  37. MacRaild Donald M. et Black Jeremy, op. cit., p. 111
  38. Bhattacharya Sabyasachi, op. cit., p. 15.
Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplĂ©mentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimĂ©dias.