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Guerre du Dhofar

La guerre du Dhofar ou rébellion du Dhofar est un conflit armé parfois assimilé à une guerre civile et qui a eu lieu au sultanat d'Oman de 1964 à 1976.

Guerre du Dhofar
Description de l'image Oman carte.png.
Informations générales
Date 1964-1976
Lieu Sultanat d'Oman
Issue Victoire gouvernementale
Commandants
Drapeau d'Oman Said ibn Taimour (jusqu'en 1970)
Drapeau d'Oman Qabus ibn SaĂŻd (Ă  partir de 1970)
Drapeau de la Jordanie Hussein
Drapeau du Royaume-Uni Colonel-Major Mike Kealy (en)
Drapeau d'Oman Ghalib Al Hanai
Forces en présence
En 1975 :
Drapeau d'Oman 3 000 Ă  4 000
3 500
Drapeau de la Jordanie 800
Drapeau du Royaume-Uni 1 000
1 800
Pertes
Drapeau du Royaume-Uni 24 tués
55 blessés
719 tués et 1404 blessés
Drapeau d'Oman 187 tués et 559 blessés
1 400 tués
2 800 blessés et prisonniers

Batailles

Historique du conflit

En 1964, une rĂ©bellion sĂ©paratiste commence dans la province de Dhofar, une rĂ©gion du Sud d'Oman comptant alors 40 000 habitants (pour un total de 750 000 Omanais), frontaliĂšre du YĂ©men, avec des conditions de vie de la population extrĂȘmement mĂ©diocres, et alors que le souverain de l'Ă©poque, SaĂŻd ibn Taimour, se conduit en despote.

La rĂ©bellion parvient Ă  avancer au cours des premiĂšres annĂ©es et encercle bientĂŽt SalĂąlah, la principale ville de la rĂ©gion. Deux congrĂšs sont organisĂ©s pour dĂ©finir les objectifs politiques du mouvement, en 1965 et en 1968. Lors du second congrĂšs, le Front de libĂ©ration du Dhofar devient le Front populaire pour la libĂ©ration d’Oman et du golfe Arabe. Le programme adoptĂ© lors de ces deux congrĂšs est fortement teintĂ© de communisme. Son objectif est de mettre en place une « rĂ©publique populaire dĂ©mocratique » et d’expulser l'armĂ©e britannique d’Oman. Le Front cherche Ă  instaurer une Constitution, Ă  abolir la loi martiale, Ă  rĂ©tablir les libertĂ©s de presse et d’expression et Ă  assurer les droits des minoritĂ©s. Sur les questions Ă©conomiques, il entend nationaliser les compagnies pĂ©troliĂšres, dĂ©velopper les industries et mettre en place une rĂ©forme agraire. Le Front appelle ainsi Ă  plus de justice sociale et affirme son soutien Ă  tous les mouvements de libĂ©rations asiatiques, africains et latino-amĂ©ricains. Des rĂ©fĂ©rences sont Ă©galement faites Ă  la lutte des Palestiniens[1]. Les rebelles ouvrent des Ă©coles auxquelles les garçons comme les filles peuvent accĂ©der (l'Ă©ducation des filles Ă©tait interdite en Oman jusqu'en 1970)[2]. Le tribalisme est combattu et les rapports sociaux tendent Ă  Ă©voluer, avec notamment une place spĂ©cifique accordĂ©e aux femmes, y compris dans la lutte armĂ©e[3].

L'armĂ©e du sultan ne parvient pas Ă  contenir les avancĂ©es du Front qui bĂ©nĂ©ficie du soutien d’une bonne partie de la population. En 1970, malgrĂ© l’intervention de la Royal Air Force britannique, les insurgĂ©s contrĂŽlent la majoritĂ© des points stratĂ©giques de la rĂ©gion. Devant cette situation critique, les Britanniques dĂ©cident de mettre un terme au rĂšgne du sultan SaĂŻd, qui est obligĂ© d’abdiquer en faveur de son fils Qabus ibn SaĂŻd lors d'un coup d’État en [1]. Le nouveau souverain met en place une politique d'amĂ©lioration des conditions socio‑économiques de son pays ainsi qu'une reconstruction de ses forces armĂ©es[4] et Ă  la formation Ă  partir de 1970 par le SAS britanniques d'unitĂ©s irrĂ©guliĂšres, les firqats, constituĂ© d'anciens rebelles[5], aidĂ© par une forte hausse des revenus de l'État Ă  la suite du choc pĂ©trolier de 1973.

En 1975, l'armĂ©e iranienne parvient Ă  couper les lignes de ravitaillement du Front et Ă  progressivement Ă©touffer les zones rebelles par des techniques de guerre anti-guĂ©rilla. La rĂ©bellion prend fin en 1976 avec la dĂ©faite des rebelles. Outre la rĂ©ussite des opĂ©rations militaires, le sultan parvient Ă  obtenir le ralliement d'une partie de la population du Dhofar et la dĂ©mobilisation de combattants rebelles par la mise en Ɠuvre d'une politique de dĂ©veloppement Ă©conomique, de modernisation des rapports sociaux et d'amnistie des ex-rebelles[3].

Interventions extérieures

Du cĂŽtĂ© de la monarchie omanaise, l'ensemble des membres du conseil de dĂ©fense chargĂ© de diriger la guerre, Ă  l’exception du sultan Qabous, sont britanniques. L’armĂ©e omanaise Ă  commandement britannique Ă©tait principalement constituĂ©e de mercenaires baloutches pakistanais. La seule unitĂ© vĂ©ritablement arabe Ă©tait un bataillon envoyĂ© par le roi Hussein de Jordanie. Au cours de l'annĂ©e 1975, la coalition qui dĂ©fend le pouvoir du sultan rassemble ainsi un millier de Britanniques, dont l’état-major, au moins 3 500 Iraniens, 800 Jordaniens, 2 000 Ă  3 000 Baloutches pakistanais, Baloutches omanais et Omanais d’ascendance, et des conseillers israĂ©liens[3].

Le journal israĂ©lien Haaretz relĂšve en effet qu'« en 1975, les relations entre IsraĂ«l et Oman se renforcĂšrent. (
) Des conseillers militaires israĂ©liens y furent envoyĂ©s en urgence sous la coordination d’EphraĂŻm Halevy, un responsable et ultĂ©rieurement directeur du Mossad, pour aider Ă  Ă©craser la rĂ©bellion ». L’envoyĂ© spĂ©cial en Oman du Times de Londres expliqua pour sa part, en 1976 : « La plupart des fonctionnaires civils et tous les officiers de l’armĂ©e, Ă  l’exception d’un seul, que j’ai rencontrĂ©s dans le pays Ă©taient des Britanniques. Le major gĂ©nĂ©ral Perkins [commandant en chef de l’armĂ©e omanaise] lui-mĂȘme nous a assurĂ© que si la Grande-Bretagne se retirait d’Oman ce serait “une catastrophe” [
] Le service en Oman offre le trĂšs grand intĂ©rĂȘt de servir d’entraĂźnement aux officiers qui y sont dĂ©tachĂ©s. [
] C’est le seul endroit au monde oĂč vous pouvez mener une guerre comme celle-ci, une guerre de grande Ă©chelle oĂč peuvent ĂȘtre utilisĂ©es toutes les variĂ©tĂ©s d’armes[3]. »

À partir de 1970, le Royaume-Uni envoie des troupes du Special Air Service (SAS) dans le cadre d'une campagne militaire alors clandestine, appelĂ©e Operation Storm (« opĂ©ration TempĂȘte »). Celles-ci mĂšnent une combinaison d'actions militaires, civilo-militaires (notamment d'assistance mĂ©dicale auprĂšs des populations), d'information et de guerre psychologique. Les SAS encadrent notamment des unitĂ©s constituĂ©es de rebelles ralliĂ©s, les firqats, qui se distinguĂšrent lors de la bataille de Mirbat le . L'ancien commandant du SAS Tony Jeapes considĂšre que la guerre fut gagnĂ©e par le dĂ©veloppement civil, l'action militaire Ă©tant seulement un moyen d'y arriver. Cette opinion est contredite par Ken Connor, soldat du SAS vĂ©tĂ©ran du Dhofar, qui considĂšre que les combats furent l'Ă©lĂ©ment le plus important de la campagne. Selon lui, au cours de l'opĂ©ration Storm, le SAS a dĂ©plorĂ© une douzaine de tuĂ©s, soit prĂšs de 10 % de sa force de combat de l'Ă©poque, et a utilisĂ© la totalitĂ© des rĂ©serves de munitions de premiĂšre ligne de la British Army[6]. Le Royaume-Uni a Ă©galement procurĂ© au gouvernement omanais des mercenaires de l'entreprise Keenie Meenie Services (KMS) pour rĂ©primer la rĂ©bellion[7].

Le chah Mohamad Reza Pahlavi justifia son intervention en Oman par la nĂ©cessitĂ© de dĂ©fendre le dĂ©troit d’Ormuz : « Imaginez que ces sauvages s’emparent de l’autre rive du dĂ©troit d’Ormuz, Ă  l’entrĂ©e du golfe Persique. Notre vie dĂ©pend de cela. Et ces gens qui luttent contre le sultan sont des sauvages. Il se pourrait mĂȘme qu’ils soient pires que des communistes »[3]. Des troupes iraniennes seront maintenues dans le pays aprĂšs la fin de la guerre mais seront retirĂ©es aprĂšs la rĂ©volution iranienne[3].

Les insurgĂ©s sont soutenus principalement par le YĂ©men du Sud. L'aide soviĂ©tique, nĂ©gligeable au dĂ©part, fut progressivement augmentĂ©e, jusqu’à la fourniture en 1975 de lanceurs de missiles antiaĂ©riens individuels SAM 7[3]. La Chine et l'Égypte[1] ont Ă©galement apportĂ© une aide aux rebelles. Des combattants irakiens viendront aussi prĂȘter main-forte aux insurgĂ©s[1].

Bilan humain

Selon des sources iraniennes, durant ce conflit, l'armĂ©e omanaise dĂ©plore 187 tuĂ©s au combat et 559 blessĂ©s, les forces armĂ©es britanniques comptent 24 tuĂ©s et 55 blessĂ©s. Ce sont les forces armĂ©es iraniennes qui subirent les pertes les plus importantes : 719 tuĂ©s et 1 404 blessĂ©s[8] (dont 5 pilotes et membres d'Ă©quipage de la force aĂ©rienne tuĂ©s et 18 blessĂ©s, un F-4D Phantom II fut perdu en 1975[9]). Les insurgĂ©s ont eu 1 400 tuĂ©s Ă  dĂ©plorer et 2 800 blessĂ©s et prisonniers.

Le chah d'Iran relativisa cependant l'importance des pertes subies par son armĂ©e : « Je crois que cela a Ă©tĂ© un succĂšs Ă©clatant [plutĂŽt qu’un Ă©chec]. Justement parce que, bien qu’ayant subi des pertes, chaque jour le moral de nos soldats augmentait. Et, d’ailleurs, l’ennemi non plus n’y a pas Ă©chappĂ©, lui aussi a subi des pertes. Et, de toute façon, une armĂ©e, c’est fait pour cela pour tuer et, Ă  la rigueur, pour se faire tuer. Surtout dans un terrain pareil »[3].

Filmographie

Killer Elite, un film d'action américano-australien réalisé par Gary McKendry, sorti en 2011.

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Calvin H. Allen, Jr. et W. Lynn Rigsbee, « The Dhofar war and Omani military and security development Â», dans Oman under Qaboos: from coup to constitution, 1970-1996, Portland, OR, Frank Cass, London, 2000, 251 p. (ISBN 0-7146-5001-3).
  • GĂ©rard Laliberte, La guĂ©rilla au Dhofar ou, Le mouvement de libĂ©ration dans le Golfe arabe, UniversitĂ© Paris 1, 1971, 161 p. (mĂ©moire d'Ă©tudes supĂ©rieures de science politique).
  • (en) Abdel Takriti, Monsoon revolution : republicans, sultans, and empires in Oman, 1965-1976, Oxford, Oxford University Press, (ISBN 978-0-199-67443-5 et 978-0-198-78317-6, lire en ligne).

Articles connexes

Notes et références

  1. « Guerre du Dhofar (1964-1976) », Les clefs du Moyen-Orient,‎ (lire en ligne)
  2. (en) Khalfan al-Badwawi and Phil Miller, « Britain mourns its favourite Middle Eastern dictator », sur Daily Maverick,
  3. Marc Pellas, « Oman. Comment le chah d'Iran a sauvé le régime - Une page d'histoire oubliée », sur Orient XXI,
  4. (en)[PDF] British Army Field Manual, Volume 1 Part 10, Countering Insurgency, Army Code 71876, octobre 2009, p. 95 Ă  99.
  5. « Théorie du combat hybride », sur lavoiedelepee.blogspot.com (consulté le ).
  6. (en) Ken Connor, Ghost Force: The Secret History Of the SAS, Orion Books Ltd., Londres, 1999 (ISBN 0-75282-697-2 et 978-0-75282-697-4) (Ă©dition originale Weidenfeld & Nicolson, 1998) p. 257-260.
  7. (en) Phil Miller, « ‘The benefits of doing nothing at all’: Why Britain is unlikely to support a ban on Russian mercenaries », sur Daily Maverick,
  8. (en) « Oman (and Dhofar) 1952-1979 », sur www.acig.org, (version du 4 mars 2016 sur Internet Archive)
  9. (en) « F4 », sur http://www.iiaf.net/ (consulté le ).

Liens externes

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