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Grammaire suédoise

Cet article traite plusieurs aspects de la grammaire suédoise.

La grammaire désigne ici un ensemble de rÚgles connues inconsciemment par les locuteurs d'une langue et qui permettent la création d'un nombre infini d'énoncés, acceptés au sein d'une communauté linguistique comme étant bien formés.

Traditionnellement, la grammaire limite son terrain d'analyse à la phrase. On présentera donc pas à pas les unités et les rÚgles qui permettent la construction de la phrase : aussi bien les différentes parties du discours (ou catégories de mots) reconnues par la tradition (nom, verbe, adjectif, etc.), que les rÚgles régissant la formation des groupes de mots et des phrases.

Le nom

Le suédois dispose d'une catégorie nominale bien délimitée et bien caractérisée (semblable à ce que l'on peut trouver en français et en anglais, par exemple). Parmi les traits de cette catégorie :

  • propriĂ©tĂ©s morphologiques flexionnelles : pluriel marquĂ© ;
  • propriĂ©tĂ©s distributionnelles : prĂ©sence (quasi) obligatoire de dĂ©terminant, possibilitĂ© d'Ă©pithĂštes divers (adjectifs, subordonnĂ©es) ;
  • sĂ©mantique des unitĂ©s : les trois ordres d'entitĂ©s ;
  • procĂ©dĂ©s de construction de noms : Ă  partir d'adjectifs ou de noms ;
  • procĂ©dĂ©s de construction d'autres unitĂ©s linguistiques Ă  partir des noms : phĂ©nomĂšnes de grammaticalisation (formation de pronoms), et de dĂ©rivation (formation de verbes et d'adjectifs).

Morphologie flexionnelle

Le nom suédois est variable en nombre : il dispose ainsi du singulier et du pluriel. C'est le pluriel qui est morphologiquement marqué, et il l'est par un suffixe (r ou er) ou par un changement de suffixe (a devient or). On distingue cinq catégories de noms selon la morphologie de leur pluriel :

  1. Tous les noms se terminant en -a forment leur pluriel en -or : flicka (fille) donne flickor, panna (poĂȘle) donne pannor ; noter que, si la plupart de ces noms font partie du fonds scandinave du lexique, des noms d'origine Ă©trangĂšre (notamment italienne) sont venus s'y rajouter par la suite : le pluriel suĂ©dois de pizza est pizzor, celui de geisha, geishor ;
  2. Beaucoup de noms de genre commun monosyllabiques (d'origine germanique) ou accentués sur la derniÚre syllabe (d'origine latine : direktör fait direktörer) ont leur pluriel en -er : rad (roue) donne rader, hand (main) fait hÀnder (exactement comme en allemand), ou en -r : ko (vache) fait kor ;
  3. Beaucoup de noms de genre commun accentués sur une autre syllabe font leur pluriel en -ar : pojke (garçon) fait pojkar (le hiatus ear est réduit en ar), vÄr (printemps) fait vÄrar ;
  4. Tous les noms de genre neutre se terminant par une voyelle font leur pluriel en -n : Àpple (pomme) fait Àpplen, bi (abeille) fait bin ;
  5. Tous les noms de genre neutre se terminant par une consonne sont invariables en nombre : hus (maison) fait hus, löv (feuille) fait löv.

Propriétés distributionnelles

Tout nom (ou substantif) suédois dispose d'un genre intrinsÚque. Il existe deux genres : le genre commun et le genre neutre. Le genre commun est ainsi appelé parce qu'il résulte de la fusion entre les genres masculin et féminin qui existaient auparavant (voir vieux norrois) ; ainsi, les deux tiers des substantifs suédois environ sont de genre commun, et un tiers seulement de genre neutre.

Dans la plupart des positions syntaxiques, le nom suédois est employé avec un déterminant. On considÚrera ici l'emploi des seuls articles.

  • Emploi du nom au singulier
    • L'article indĂ©fini du genre commun est le mot en, antĂ©posĂ© au nom : en bil : une voiture.
    • L'article indĂ©fini du genre neutre est le mot ett, antĂ©posĂ© au nom : ett hus : une maison.
    • L'article dĂ©fini du genre commun est le suffixe -en : bilen : la voiture (ce suffixe se rĂ©duit au seul -n lorsque le substantif se termine par une voyelle : en kvinna : une femme, kvinnan : la femme).
    • L'article dĂ©fini du genre neutre est le suffixe -et : huset : la maison (de mĂȘme, ce suffixe peut se rĂ©duire au seul -t : ett Ă€pple, Ă€pplet pour la pomme).
  • Emploi du nom au pluriel
    • L'article indĂ©fini pluriel n'est pas marquĂ©. On peut considĂ©rer qu'il s'agit d'un article « zĂ©ro Â» : bilar : des voitures.
    • Pour les noms qui se terminent par -ar ou -er au pluriel indĂ©fini, l'article dĂ©fini pluriel est le suffixe -na : bilar (voitures) fait bilarna (les voitures), saker (choses) fait sakerna (les choses).
    • Pour les noms neutres qui ne se changent pas au pluriel, le suffixe est -en: hus (maison, ou maisons, car ce nom est invariable au pluriel), husen (les maisons).
    • Pour les noms qui se terminent par -(e)n au pluriel, le suffixe est -a : Ă€pplen (pommes) fait Ă€pplena (les pommes), huvuden (tĂȘtes) fait huvudena (les tĂȘtes).

Il existe d'autres déterminants (définis : possessifs, démonstratifs, etc., et indéfinis). On notera d'ailleurs plus tard que l'emploi des articles définis et indéfinis est, sur certains points précis, tout à fait différent de ce que l'on trouve notamment en français.

Certaines positions syntaxiques permettent l'emploi du nom sans dĂ©terminant. Certaines sont analogues Ă  celles que l'on trouve en français : bli lĂ€rare (devenir professeur), vara sjuksjöterska (ĂȘtre infirmiĂšre), etc. D'autres non : har du bil ? (as-tu une voiture ?).

Le genre grammatical entraßne des phénomÚnes d'accord avec les adjectifs épithÚtes, ainsi qu'avec les pronoms reprenant les groupes nominaux :

  • un groupe nominal dont le nom-tĂȘte est de genre commun sera repris par le pronom den : en hund ... den (un chien ... il) ;
  • le pronom de genre neutre est det.

Pour les noms référant à des personnes (donc y compris les noms propres de personne dont il n'a pas encore été question) on utilise des pronoms personnels de troisiÚme personne, han (il) pour le masculin, et hon (elle) pour le féminin. Depuis 1966, la pratique tend à introduire l'usage d'un pronom neutre pour désigner les personnes dont on ne connaßt pas le sexe ou dans les énoncés évoquant le futur ou une hypothÚse, il s'agit du pronom « hen ».

SĂ©mantique des noms

En suédois, les noms (comme dans toutes les langues qui ont vraiment des noms) peuvent référer à toute entité et tout phénomÚne conceptualisable, c'est-à-dire à tout objet auquel on peut penser. Du point de vue ontologique, si la réflexion en termes de concret ou abstrait est intéressante, il convient de l'affiner comme suit (cf. Lyons) :

  • noms d'entitĂ©s du premier ordre : ce sont les entitĂ©s matĂ©rielles, c'est-Ă -dire susceptibles d'ĂȘtre localisĂ©es dans l'espace. On peut distinguer (cf. article sur le nom) :
    • les noms massifs : qui renvoient Ă  des entitĂ©s matĂ©rielles dĂ©pourvues de forme intrinsĂšque (vatten : eau, luft : air, vin : vin, etc.)
    • les noms comptables : qui renvoient Ă  des entitĂ©s matĂ©rielles disposant de leur forme propre. On peut distinguer :
      • les entitĂ©s naturelles : animĂ©es (hund : chien, mĂ€nniska : ĂȘtre humain) ou inanimĂ©es (sten : pierre) ;
      • les objets fabriquĂ©s : butik (magasin), bil (voiture).

Comme dans d'autres langues, les ĂȘtres humains disposent de tout un rĂ©pertoire de noms pouvant servir Ă  les dĂ©signer :

  • rĂ©fĂ©rence Ă  l'ĂȘtre : Ă  l'Ăąge (tonĂ„ring : personne de 10 Ă  19 ans, tjej : jeune fille, kille : jeune homme, barn : enfant), au sexe (kvinna : femme, man : homme [au sens du latin vir]), Ă  diverses qualitĂ©s intellectuelles (dĂ„re : crĂ©tin) ;
  • rĂ©fĂ©rence au faire : Ă  la profession (skĂ„despelare : acteur), Ă  la fonction (ombud : dĂ©putĂ©), Ă  diverses activitĂ©s passagĂšres (cyklist : cycliste) ;
  • rĂ©fĂ©rence Ă  diverses relations (noms syncatĂ©gorĂ©matiques) : notamment les relations familiales comme bror (frĂšre), syster (sƓur), relations spatiales comme granne (voisin), relations sociales comme president (prĂ©sident).
  • noms d'entitĂ©s du second ordre : ce sont les noms des entitĂ©s qui ne sont pas matĂ©rielles, mais qui sont localisables (et bornĂ©es) dans le temps et dans l'espace ; on accepte plus ou moins ces diverses appellations : Ă©vĂ©nements, Ă©ventualitĂ©s :
    • noms gĂ©nĂ©raux : hĂ€ndelse (Ă©vĂ©nement), handling (action), etc.
    • noms spĂ©cifiques : mordförsök (tentative de meurtre), arbetsskada (accident du travail), etc.
  • noms d'entitĂ©s du troisiĂšme ordre : ce sont les entitĂ©s qui ne sont ni matĂ©rielles ni localisables dans le temps ou l'espace, des concepts. Par exemple : demokrati (dĂ©mocratie), geografi (gĂ©ographie), skönhet (beautĂ©), etc.

Procédés de construction de noms

On retrouve en suédois le procédé de suffixation commun à d'autres langues germaniques. Plusieurs suffixes servent en effet à dériver des noms :

  • Ă  partir de verbes :
    • -else : permet de former le nom d'entitĂ© du second ordre Ă  partir du verbe dĂ©notant le mĂȘme procĂšs : le verbe hĂ€nda (se produire) donne hĂ€ndelse (Ă©vĂ©nement) ;
    • -ing : le verbe Ă€lska (aimer) donne Ă€lskling (ĂȘtre aimĂ© ; chĂ©ri[e]) ;
    • -are : permet de former un nom d'agent Ă  partir d'un verbe (författa : rĂ©diger donne författare : auteur) ;
  • ou Ă  partir d'adjectifs :
    • -het (cf. allemand -heit) : permet de former un nom de propriĂ©tĂ© (entitĂ© du troisiĂšme ordre) Ă  partir d'un adjectif qualificatif : l'adjectif skön (beau) donne skönhet (beautĂ©), snabb (rapide) donne snabbhet (vitesse).

Procédés de création de mots à partir de noms

  • PhĂ©nomĂšnes de grammaticalisation

Comme dans d'autres langues européennes (le meilleur exemple étant sans doute l'anglais), une poignée de noms généraux servent à former des pronoms. Ainsi : ett ting (une chose) forme nÄgonting (quelque chose).

  • DĂ©rivation morphologique
  • Formation de mots composĂ©s

Comme dans les autres langues germaniques, le suédois permet de former des mots composés en accolant plusieurs morphÚmes lexicaux (notamment, nominaux) ou grammaticaux. Prenons l'exemple de Äterupplivningsförsök (tentative de réanimation). On peut l'analyser comme suit :

  1. -liv- (radical du verbe leva : vivre)
  2. -upp+liv- (la particule upp- permet de former uppleva : vivre quelque chose)
  3. Äter+uppliv- (la particulier Äter qui dénote le retour à un état antérieur forme Äteruppleva : réanimer)
  4. Äteruppliv+ning (formation du nom d'entité du second ordre par suffixation : le fait de réanimer).
  5. Par ailleurs, le nom sök (recherche) forme, à l'aide de la particule för, le nom försök (tentative).
  6. les deux noms Äteruppliv+ning et försök sont alors soudés par l'intermédiaire d'un -s- de génitif (qui apparaßt dans certaines circonstances pas forcément prédictibles), et dans un ordre déterminant/déterminé, pour former Äterupplivningsförsök.

Il faut noter que cette formation de mots composés par synthÚse remplace en suédois (comme en allemand et dans les autres langues germaniques) l'expansion du nom par un adjectif relationnel (voire par un groupe prépositionnel) telle qu'on la connaßt en français. Voici quelques exemples autour du nom suédois EU (UE, Union européenne) en comparaison avec l'adjectif français européen :

  • val (Ă©lection) forme EU-val (Ă©lection europĂ©enne) ;
  • kommission (commission) forme EU-kommissionen (la Commission europĂ©enne) ;
  • upplysning (information) forme EU-upplysningen (l'information sur l'UE).

On trouve cependant, plus ou moins exceptionnellement, des adjectifs relationnels, comme ces adjectifs de nationalité qui viennent désigner des langues : en svensk bibelöversÀttning (une traduction de la Bible en suédois).

L'adjectif

L'adjectif en suédois s'accorde avec le nom qu'il accompagne. Sa désinence aussi change selon que le nom est défini ou indéfini.

Adjectif à la forme indéfinie

  • En vacker sjö : Un beau lac
  • Ett vackert hav : Une belle mer
  • Vackra sjöar : Des beaux lacs
  • Vackra hav : Des belles mers

Adjectif à la forme définie

  • Den vackra sjön : Le beau lac
  • Det vackra havet : La belle mer
  • De vackra sjöarna : Les beaux lacs
  • De vackra haven : Les belles mers

On notera qu'à la forme définie il y a une triple indication de la définition du mot par l'ajout d'un article avant l'adjectif.

Le déterminant

Le déterminant reçoit la marque du genre et du nombre du nom.

Article défini

L'article défini est postposé et enclitique (soudé au mot). Dans sonen (le fils), la finale -en est un déterminant ajouté à la racine du nom, son.

Lorsque s'ajoute un adjectif, l'article défini réclame un double déterminant, à savoir un article antéposé et un article postposé. Den favorita sonen : le fils préféré.

Article indéfini

L'article indéfini est séparé et antéposé comme en français. Elle a un fils préféré : Hon har en favorit son.

Déterminants démonstratifs

Deux formes de déterminants démonstratifs coexistent.

  • Les formes simples denna (commun singulier), detta (neutre singulier) et dessa (commun et neutre pluriel). Dessa hus Ă€r toma : ces maisons sont vides.
  • Les formes plus complexes avec hĂ€r et dĂ€r (correspondant dans la forme Ă  -ci et -lĂ  en français) : den hĂ€r (commun singulier), det hĂ€r (neutre singulier), de hĂ€r (commun et neutre pluriel sujet), dem hĂ€r (commun et neutre pluriel objet). Elles appellent un double dĂ©terminant, avec article postposĂ©. Jag vill se dem hĂ€r bilderna : je veux voir ces images.

La formation du groupe nominal

Comme précisé plus haut, si le nom est précédé d'un article défini ou d'un déterminant démonstratif avec hÀr ou dÀr, l'incorporation d'un adjectif épithÚte au groupe nominal oblige à avoir un double déterminant.

Dans les autres cas, les plus simples, l'ordre est le suivant : déterminant, adjectif, nom. Mon vieux chien : min gamla hund.

Les substituts du groupe nominal : le pronom

FrançaisPronom sujetPronom objetPronom possessif (réel/neutre/pluriel)
JeJagMigMin/Mitt/Mina
TuDuDigDin/Ditt/Dina
IlHanHonomHans
ElleHonHenneHennes
Ce (RĂ©el)DenDenDess
Ce (Neutre)DetDetDess
NousViOssVĂ„r/VĂ„rt/VĂ„ra
VousNiErEr/Ert/Era
Ils/Elles/CesDeDemDeras
RĂ©flexif–SigSin/Sitt/Sina

Pronoms démonstratifs, interrogatifs et relatifs

Y compris certains mots non considérés comme des pronoms
  • den hĂ€r, det hĂ€r, de hĂ€r : ceci, ces (qualifiant les noms dĂ©finis).
  • den dĂ€r, det dĂ€r, de dĂ€r : cela, ces (qualifiant les noms dĂ©finis).
  • denna/denne/detta/dessa : ceci, ces (qualifiant les noms indĂ©finis).
  • som : que, qui, lequel, laquelle, lesquels, lesquelles (Ă  proprement parler, une conjonction de subordination plutĂŽt qu'un pronom,som est utilisĂ© comme pronom relatif aussi souvent que possible en suĂ©dois).
  • vem : qui (exclusivement interrogatif)
  • vilken/vilket/vilka : lequel, laquelle, lesquels, lesquelles, qui, que
  • vad : que, quoi
  • vems : Ă  qui (interrogatif)
  • vars : Ă  qui (relatif)
  • nĂ€r : oĂč (temps), quand
  • dĂ„ : quand (relatif)
  • hĂ€r, dĂ€r, var : ici, lĂ , oĂč (aussi dans de nombreuses combinaisons comme varifrĂ„n, « d'oĂč Â», ou dĂ€rav, « de cela Â»).
  • hit, dit, vart : en ceci, en cela, en quoi
  • vem som helst, vilket som helst, vad som helst, nĂ€r som helst, var som helst : n'importe qui, n'importe quel(les), n'importe quoi, n'importe quand, n'importe oĂč, etc.
  • hĂ€dan, dĂ€dan, vadan, sedan1 : de lĂ , d'oĂč (temps), depuis (les contractions hĂ€n et sen sont communes. Les formes pleines apparaissent comme un peu archaĂŻques, sauf pour sedan).
  • nĂ„gon/nĂ„got/nĂ„gra, souvent contractĂ©es en nĂ„n/nĂ„t/nĂ„ra: quelques-uns(unes) / certain(s), un peu ; quelqu'un / quiconque, quelque chose/n'importe quoi
  • ingen/inget/inga2 : aucun ; personne, rien
  • annan/annat/andra : autre, d'autre
  • nĂ„gonstans, ingenstans, annanstans, överallt : quelque part/partout, nulle part, ailleurs; (plus formel:nĂ„gonstĂ€des, ingenstĂ€des, annorstĂ€des, allestĂ€des)
  • nĂ„gorlunda, ingalunda, annorlunda : en quelque sorte / de toute façon, en aucune façon, autrement
  • nĂ„gonting, ingenting, allting : quelque chose, rien, tout


Exemples :
  • Han var ledsen nĂ€r huset brĂ€ndes upp : Il Ă©tait triste quand la maison fut brĂ»lĂ©e.
  • Det var den dag dĂ„ min dotter föddes : C'Ă©tait le jour oĂč est nĂ©e ma fille.
  • Staden dĂ€r jag bodde : La ville oĂč je vivais.

Le verbe

La catégorie des verbes est, en suédois, bien délimitée et bien caractérisée (similaire à ce que l'on peut trouver, par exemple, en français) et similaire en bien des points à ce que l'on trouve dans d'autres langues germaniques, l'anglais notamment. Parmi les traits de cette catégorie :

  • propriĂ©tĂ©s morphologiques flexionnelles : le verbe suĂ©dois dispose d'une conjugaison Ă  plusieurs temps ; celle-ci s'est cependant considĂ©rablement simplifiĂ©e, de telle sorte que le verbe ne varie plus en personne (c'est-Ă -dire qu'il n'existe qu'une seule forme par temps) ;
  • propriĂ©tĂ©s distributionnelles : le verbe, dans ses formes conjuguĂ©es, apparaĂźt comme le « pivot » de la phrase, au sens oĂč la description de ses actants et de ses complĂ©ments fournit une description syntaxique de l'ensemble de la phrase ;
  • sĂ©mantique des unitĂ©s : le verbe est toujours syncatĂ©gorĂ©matique ; souvent, il renvoie Ă  une relation entre diffĂ©rentes entitĂ©s susceptible de varier dans le temps ;
  • procĂ©dĂ©s de construction de verbes : Ă  partir d'adjectifs, de noms, ou de verbes ;
  • procĂ©dĂ©s de construction d'autres unitĂ©s linguistiques Ă  partir des verbes : dĂ©rivation (formation de noms et d'adjectifs).

Morphologie flexionnelle : la conjugaison

Le verbe suédois dispose souvent de deux conjugaisons : une en -r (de sens actif), l'autre en -s (en général de sens passif). Dans les faits, on rencontre trois possibilités :

  1. verbes ayant les deux conjugaisons : comme le verbe voir : son infinitif actif est se, son infinitif passif est ses ; avec le pronom sujet jag (je), on forme au présent actif jag ser (je vois) et au présent passif jag ses (je suis vu).
  2. verbes ayant seulement la conjugaison en -r, comme le verbe dormir : son infinitif est sova et, au présent, il forme sover.
  3. verbes rares ayant seulement la conjugaison en -s (dits déponents, cf. Verbe déponent), comme respirer : son infinitif présent est andas, et le présent est jag andas (je respire). La forme *jag andar n'existe pas.

Infinitif, radical et groupes

La forme des verbes figurant dans le dictionnaire est l'infinitif. Cet infinitif se termine toujours par une voyelle, a en écrasante majorité (e ou o dans les quelques verbes du groupe 3). La forme qui permet de conjuguer le verbe s'appelle le radical. La relation entre le radical et l'infinitif permet de distinguer quatre groupes de verbes :

-InfinitifRadicalRĂšgle
Groupe 1arbetaarbetaRadical identique Ă  l'infinitif (en a)
Groupe 2behövabehövInfinitif en a, radical obtenu en enlevant ce a(verbes faibles)
Groupe 3boboRadical identique à l'infinitif (terminé par une autre voyelle que a)
Groupe 4finnafinnInfinitif en a, radical obtenu en enlevant ce a (verbes forts)

La différence entre les verbes des groupes 2 (faibles) et 4 (forts) apparaßt dans la construction du prétérit, du supin, et du participe passé. On dit forts les verbes du groupe 4 parce que leur radical change de voyelle à ces formes.

Notons que, dans un certain nombre de positions syntaxiques, l'infinitif a besoin, pour ĂȘtre employĂ©, d'ĂȘtre prĂ©cĂ©dĂ© de la particule att (cf. en anglais to, et en allemand zu).

La conjugaison en suĂ©dois est relativement simple : toutes les personnes ont la mĂȘme terminaison pour un mĂȘme temps.

Le radical est semblable à l'impératif.

Présent

Chaque groupe dispose de sa propre conjugaison :

  • Groupe 1 (infinitif semblable au radical, et terminĂ© en -a) : La forme du prĂ©sent s'obtient en rajoutant un -r Ă  ce radical ; ainsi, arbeta (travailler, professionnellement) fait au prĂ©sent arbetar ;
  • Le groupe 2 (verbes faibles dont l'infinitif se termine en -a, mais dont le radical ne contient pas ce -a) : La conjugaison du prĂ©sent se fait en rajoutant -er Ă  ce radical ; ainsi, sova (dormir), dont le radical est sov fait au prĂ©sent sover ;
  • Le groupe 3 (verbes courts dont l'infinitif est terminĂ© par une voyelle autre que le a) : la forme du prĂ©sent s'obtient en rajoutant un -r Ă  ce radical ; ainsi, bo (habiter) fait au prĂ©sent bor ;
  • Le groupe 4 (verbes forts dont l'infinitif se termine en -a, mais dont le radical ne contient pas ce -a) : La conjugaison du prĂ©sent se fait en rajoutant -er Ă  ce radical ; ainsi, finna (trouver), dont le radical est finn fait au prĂ©sent finner.


-InfinitifImpératifPrésentPrétéritSupinParticipe passéParticipe présentFrançais'
Groupe 1att frÄgafrÄgafrÄgarfrÄgadefrÄgatfrÄgadfrÄgandePoser (une question)
Groupe 2att behövabehövbehöverbehövdebehövtbehövdbehövandeAvoir besoin de
Groupe 3att trotrotrortroddetrotttroddtroendecroire
Groupe 4att finnafinnfinnerfannfunnitfunnenfinnandetrouver

Le supin sert à former les temps composés du passé. Le participe passé sert à former les adjectifs dérivés du verbe.

Conjugaison en -s

La conjugaison en -s est entiĂšrement parallĂšle Ă  la conjugaison en -r, pour les verbes pour lesquels elle existe.

-InfinitifImpératifPrésentPrétéritSupinParticipe passéParticipe présentFrançais
Groupe 1att frĂ„gasfrĂ„gasfrĂ„gasfrĂ„gadesfrĂ„gatsfrĂ„gadsfrĂ„gandes(Question) Être posĂ©e
Groupe 2att behövasbehövasbehövsbehövdesbehövtsbehövdsbehövandesÊtre nĂ©cessaire
Groupe 3att trostrostrostroddestrottstroddstroendesĂȘtre cru
Groupe 4att finnasfinnsfinnsfannsfunnitsfunnensfinnandesĂȘtre trouvĂ©

Propriétés distributionnelles : schémas de valence verbale

Lorsqu'il est conjugué, le verbe a besoin de certains groupes dont la nature et la disposition sont prescrites par le verbe. On distingue traditionnellement le sujet et les compléments directs et indirects du verbe.

Sujet

Comme vu plus haut, le verbe suédois ne s'accorde pas avec son sujet, ce qui pourrait rendre cette notion caduque. C'est pourquoi le sujet est défini en suédois comme étant le groupe nominal auquel on peut substituer un pronom de la forme jag (je), du (tu), han (il), hon (elle), vi (nous), ni (vous pluriel), de (ils/elles).

Tous les verbes ont besoin d'un sujet exprimé syntaxiquement (hormis à l'impératif). On distingue :

  • les verbes personnels, dont le sujet renvoie Ă  une entitĂ© ; en suĂ©dois (comme en français), le rĂŽle sĂ©mantique du sujet n'est marquĂ© en aucune façon :
    • le sujet peut ĂȘtre l'agent : köra (conduire) : jag kör (je conduis) ;
    • le sujet peut ĂȘtre le siĂšge : dö (mourir) : jag dör (je meurs) ;
    • le sujet peut ĂȘtre la cause : drabba (toucher) : olyckan drabbade dem (l'accident les a touchĂ©s) ;
    • etc.
  • les verbes impersonnels, dont le sujet, purement grammatical, ne renvoie Ă  rien ; ce sujet est le pronom de 3e personne det (il impersonnel français) ; il s'agit en majeure partie :
    • de verbes mĂ©tĂ©orologiques : regna, pleuvoir (det regnar : il pleut), snöa, neiger (det snöar : il neige) ;
    • de verbes d'Ă©vĂ©nements : comme hĂ€nda, se produire (det hĂ€nder att : il arrive que), intrĂ€ffa (avoir lieu).

Dans la phrase affirmative, le sujet est antéposé au verbe (sauf l'exception qui fait du suédois une langue strictement V2, voir plus bas). Dans la phrase interrogative, le verbe est antéposé au sujet.

COD

Certains verbes ont besoin d'un complĂ©ment d'objet direct, c'est-Ă -dire d'un groupe nominal qu'on ne peut supprimer sans changer le sens du verbe. En gĂ©nĂ©ral le COD est postposĂ© au verbe, mais il peut ĂȘtre antĂ©posĂ©.

  • Elle a averti son chef immĂ©diatement : hon varnade sin chef omedelbart. En changeant l'ordre des mots dans la mĂȘme phrase, on peut Ă©crire Sin chef varnade hon omedelbart, ce qu'on pourrait traduire par : C'est son chef qu'elle a averti immĂ©diatement.

Là encore, le rÎle sémantique de ces compléments n'est pas marqué.

COI

Le complément d'objet indirect n'est pas toujours introduit par une préposition. Il peut précéder ou suivre le COD.

  • J'ai donnĂ© un bonbon Ă  mon chat peut ainsi se dire Jag gav min katt en godis aussi bien que Jag gav en godis till min katt voire Till min katt gav jag en godis, selon la nuance souhaitĂ©e.

Compléments circonstanciels

Ils se placent oĂč l'on souhaite dans la phrase, Ă  condition de laisser ensemble le sujet, le verbe et le complĂ©ment.

  • Hier j'ai vu Anna Ă  Stockholm peut se dire I gĂ„r sĂ„g jag Anna i Stockholm, I Stockholm sĂ„g jag Anna i gĂ„r, Jag sag Anna i Stockholm i gĂ„r, voire I gĂ„r i Stockholm sĂ„g jag Anna.

SĂ©mantique des verbes

Le verbe renvoie toujours à une entité syncatégorématique (cf. syncatégorématicité), c'est-à-dire une entité qui n'existe pas de maniÚre autonome : elle a toujours besoin d'une autre entité pour qu'on puisse la comprendre. Les entités syncatégorématiques ne sont en aucun cas réservées aux verbes, par exemple :

  • une explosion : il s'agit toujours de l'explosion de quelque chose, ou de quelque chose qui explose (en français comme en suĂ©dois), ce qu'on retrouve dans les constructions syntaxiques : les noms (français : explosion, suĂ©dois : explosion) ont besoin d'un complĂ©ment (français : explosion de ..., suĂ©dois : explosion av...'), et les verbes ont besoin d'un sujet (français : quelque chose explose, suĂ©dois : nĂ„gonting exploderar) ;
  • une classification : lĂ  encore, que l'on rĂ©fĂšre Ă  ce processus par un nom ou par verbe, il y a toujours besoin de savoir qui classe et qu'est-ce qu'il classe : les verbes français (classer) et suĂ©dois (sortera) ont besoin d'un sujet et d'un complĂ©ment : jag sorterar mina fotografier (je classe mes photos).

Cette relation est susceptible de varier dans le temps, ce qui fait qu'on répartit souvent assez avantageusement les verbes selon leur aspect et aktionsart (Vendler, Vetters, etc.)

Procédés de construction des verbes

Le suédois dispose de suffixes permettant de construire des verbes :

  • Ă  partir d'adjectifs : le suffixe -na permet de dĂ©river d'un adjectif Adj un verbe signifiant devenir Adj : drunkna (se noyer) ;
  • Ă  partir de noms : depuis assez rĂ©cemment en suĂ©dois (voir SuĂ©dois), on peut former des verbes en rajoutant la terminaison -a Ă  des noms : bil (voiture) donne bila (voyager en voiture) ;

Procédés de création de mots à partir de verbes

L'une des possibilités est l'utilisation du suffixe -ning.

  • FĂ€sta : fixer, attacher ; fĂ€stning : fixation, attache.

L'adverbe

Généralement, l'adverbe formé à partir d'un adjectif se forme en y ajoutant -t.

  • Snabb : rapide ; snabbt : rapidement.

Parmi les exceptions, nÀstan (presque) est de la famille de nÀst (proche).

Comme dans les autres langues, de trÚs nombreux adverbes ne proviennent pas d'un adjectif, et ils peuvent prendre des formes trÚs diverses (exemples d'adverbes fréquents : nu : maintenant ; mycket : beaucoup ; igen : encore ; etc.).

La formation de la phrase simple

L'élément central de la phrase simple est le verbe qui, avec ses éventuels compléments (groupes nominaux, prépositionnels ou équivalents), forme le groupe verbal. Le verbe suédois conjugué (c'est-à-dire employé à l'indicatif) est toujours employé avec un sujet (groupe nominal ou équivalent), sauf à l'impératif.

Sujet grammatical

Comme vu plus haut, le verbe suédois ne s'accorde pour ainsi dire pas avec son sujet, ce qui pourrait rendre cette notion caduque. C'est pourquoi le sujet est défini en suédois comme étant le groupe nominal auquel on peut substituer un pronom de la forme jag, du, han/hon/hen ; vi, ni, de.

En suĂ©dois (Ă  l'image de l'allemand), dans les phrases affirmatives, le sujet est antĂ©posĂ© au verbe, sauf exception. L'exception est Ă  analyser de la maniĂšre suivante : on dit plutĂŽt que, quoi qu'il arrive, le verbe occupe la deuxiĂšme position dans la phrase. (S'il est en tĂȘte de phrase, gĂ©nĂ©ralement cela signifie une phrase interrogative ou un verbe Ă  l'impĂ©ratif). La premiĂšre place peut ĂȘtre occupĂ©e par le sujet. Si c'est par un complĂ©ment circonstanciel, le sujet vient se poser non pas en deuxiĂšme, mais en troisiĂšme position, derriĂšre le verbe :

  • ordre sujet-verbe intransitif : han dog (il mourut/est mort) ;
  • ordre sujet-verbe intransitif-complĂ©ment circonstanciel : han dog igĂ„r (il mourut/est mort hier) ;
  • ordre complĂ©ment circonstanciel-verbe-sujet : i gĂ„r dog han (hier, il mourut/est mort).

On remarquera incidemment que, dans le dernier cas, il est interdit de placer une virgule entre le circonstanciel et le verbe.

Dans le cas d'un verbe transitif, le sujet postposé suit immédiatement le verbe, et précÚde les compléments d'objet : i gÄr lÀste jag tidningen (hier, j'ai lu le journal).

Complément d'objet direct

Certains verbes, dits transitifs, nécessitent la présence d'un groupe nominal qui leur est postposé.

Choix de la nature des termes Ă  employer

Le suĂ©dois, en tant que langue endocentrique, aura tendance Ă  prĂ©fĂ©rer les verbes, lĂ  oĂč les langues exocentriques (le français notamment) privilĂ©giera les noms.

Soit cet exemple :

  • efter att de första svenska grammatikorna blivit skrivna.

Le suĂ©dois emploie le verbe skriva (Ă©crire) au passif (blivit skrivna), lĂ  oĂč le français prĂ©fĂ©rera le substantif Ă©criture :

  • aprĂšs l'Ă©criture des premiĂšres grammaires suĂ©doises.

Les verbes ont tendance Ă  ĂȘtre conjuguĂ©s lĂ  oĂč en français ils resteraient Ă  l'infinitif.

  • Tack för att ni kommit i dag (littĂ©ralement : Merci pour [le fait] que vous soyez venus aujourd'hui ; se dit en français : Merci d'ĂȘtre venus aujourd'hui).

Voir aussi

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