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Fenja et Menja

Fenja (peut-ĂȘtre « habitante des marais »[1] - [2]) et Menja (Ă©tymologie incertaine) sont deux gĂ©antes de la mythologie nordique. Elles apparaissent dans le GrĂłttasöngr, un poĂšme souvent considĂ©rĂ© comme faisant partie de l’Edda poĂ©tique bien que prĂ©servĂ© uniquement dans l’Edda de Snorri Sturluson (SkĂĄldskaparmĂĄl, 43), oĂč il est prĂ©cĂ©dĂ© d'un rĂ©cit en prose destinĂ© Ă  expliquer pourquoi l'or peut ĂȘtre dĂ©signĂ© par la kenning « farine de Fróði ».

Fenja et Menja

Le roi lĂ©gendaire de Danemark Fróði possĂ©dait un moulin du nom de GrĂłtti, capable de moudre tout ce qu'on lui demandait, mais ses meules Ă©taient si grandes que nul n'Ă©tait capable de les faire tourner, jusqu'Ă  ce que le roi achĂšte en SuĂšde deux servantes grandes et fortes, Fenja et Menja. Il leur fit moudre de l'or, la paix et la prospĂ©ritĂ©, ne leur laissant aucun moment de repos. Tout en travaillant, elles dĂ©clamĂšrent le chant appelĂ© GrĂłttasöngr (« Chant de GrĂłtti »). Elles y Ă©voquent leur origine - elles sont filles des gĂ©ants Idi et Aurnir - leur force et leurs exploits au combat, puis, dĂ©plorant leur condition, elles annoncent la chute de Fróði. Elles moulurent en effet une armĂ©e dirigĂ©e par un dĂ©nommĂ© MĂœsingr, qui tua Fróði et emmena le moulin et les gĂ©antes sur son bateau. Il leur demanda de moudre du sel, ce qu'elles firent jusqu'Ă  faire couler le bateau. Un tourbillon se crĂ©a quand la mer s'engouffra dans le trou de la meule. Ce naufrage explique que la mer soit salĂ©e.

Les noms de Fenja et Menja se retrouvent dans des kenningar dĂ©signant l'or : « farine de Fenja » (Fenju meldr), dans l’*Øxarflokkr d'Einarr SkĂșlason (en) (6) et dans une lausavĂ­sa de Þórmóðr kolbrĂșnarskĂĄld, « travail de Fenja » (Fenju forverk), dans le BjarkamĂĄl en fornu (4), etc.

Fenja et Menja sont Ă©voquĂ©es par Monique Wittig : « Amantes cĂ©lĂšbres, ces deux gĂ©antes de l’ñge de bronze vivaient et travaillaient ensemble en Scandinavie. Elles faisaient tourner une monstrueuse meule Ă  moulin dont la pierre Ă©tait de la taille d’une montagne. Fenja et Menja se protĂ©geaient l’une l’autre contre le froid polaire, la nuit. Elles se tenaient si Ă©troitement serrĂ©es qu’on dit encore "ĂȘtre comme Fenja et Menja" Â»[3].

Pour RĂ©gis Boyer, le rythme lent et les rĂ©pĂ©titions du rĂ©cit (« Nous moulons, nous moulons ») lui donnent pour origine possible un chant de travail ou d’esclaves[4].

Elles apparaissent dans l'avant dernier chapitre chapitre : "Un moulin appelĂ© grotte" du roman de Johannes V. Jensen, La Chute du Roi. Leur apparition annonce la mort du personnage principal, Mykkel Thorgersen. Jensen donne aux esclaves et au moulin une symbolique cosmique. Elles moulent en effet le monde et tous les ĂȘtres qui le composent, le temps qui passe, la mort, la naissance et le renouveau.

Notes

  1. Rudolf Simek, Dictionnaire de la mythologie germano-scandinave, trad. de l'allemand par Patrick Guelpa, Paris, Porte-Glaive, 1996, Vol. 1 (Patrimoine de l'Europe), Trad. de Lexikon der germanischen Mythologie (ISBN 2-906468-37-1)
  2. Andy Orchard, Cassell's dictionary of Norse myth and legend, London : Cassell, 2002. (Cassell reference). PremiĂšre Ă©dition : 1997. (ISBN 0-304-36385-5)
  3. Monique Wittig, Brouillon pour un dictionnaire des amantes, Grasset, 1975, p. 95
  4. RĂ©gis Boyer, HĂ©ros et Dieux du Nord : Guide iconographique, Flammarion, coll. « Tout l’Art », , 192 p. (ISBN 2-08-012274-6), « Fenja et Menja », p. 51-52
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