Fédération estudiantine et scolaire de Côte d'Ivoire
La Fédération estudiantine et scolaire de Côte d'Ivoire (FESCI ou Fesci) est une association ivoirienne d'élèves et étudiants.
Histoire
La FESCI est créée dans les années 1990[1] - [2]. Il s'agissait pour les étudiants, conduits par Martial Joseph Ahipeaud, le premier secrétaire général de leur organisation, de lutter pour réclamer certains droits qui ne leur étaient pas reconnus sous le régime du parti unique, le Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI)[3] - [2]. Le syndicat est historiquement proche de ce qui était alors le principal parti d'opposition, le Front populaire ivoirien (FPI)[4]. Au début de son existence, la FESCI soutient la démocratisation du pays qui abandonne peu à peu le régime du parti unique. Mais pour lutter et se défendre contre le régime du PDCI, les Fescistes s'entraînent et se structurent de manière quasi-militaire. Cette culture militaire va rester ancrée dans le fonctionnement de la FESCI[2] - [5] - [6]. Pendant la lutte démocratique des années 1990, Charles Blé Goudé est régulièrement arrêté par les autorités[5].
Sous le régime du président Gbagbo
En 2000, avant même que Laurent Gbagbo parvienne au pouvoir, éclate la « guerre des machettes » entre des étudiants issus de deux branches rivales de la Fesci, qui se battent pour le contrôle des campus. Une tendance soutient Laurent Gbagbo et l'autre est proche d'Alassane Ouattara. Chaque tendance investit un secrétaire général différent l'année suivante, Jean-Yves Dibopieu (Gbagbo) pour l’une et Paul Gueï (Ouattara) pour l’autre, tandis que les affrontements se poursuivent et culminent au mois d'avril 2001[7] - [2] - [5]. La faction pro-Gbagbo l'emporte[5].
Dans les années 2000, la FESCI opère comme une véritable milice pro-Gbagbo qui recrute ses troupes dans les collèges et lycées[4], et une mafia rackettant en milieu étudiant[8] - [5].
En 2007, une enquête sur un crime perpétré contre un étudiant sur le campus de l'université de Cocody par un groupe d'étudiants membres de la FESCI, a valu à son auteur, André Silver Konan, le prix spécial Norbert Zongo du journalisme d'investigation.
Un certain nombre de Fescistes intègre l'administration d'État (police, gendarmerie, justice…) en négociant avec le pouvoir qui cherche à limiter leur capacité de nuisance, en particulier la violence dont ils sont capables[2]. L'intégration de Fescistes dans l'administration d'État continue sous Ouattara[2]. Certains Fescistes débutent ensuite une carrière politique (Blé Goudé, Soro, Ahipeaud…)[5].
Exactions
- En 2004, le lycée international Jean-Mermoz, un des symboles de la présence française en Côte d'Ivoire, est détruit de fond en comble par des membres de la FESCI venant des cités et du campus de l'université Félix-Houphouët-Boigny proche de l'établissement[9], à la suite de la destruction de l'aviation militaire ivoirienne en représailles du bombardement de Bouaké.
- En mai 2007, elle saccage des bureaux de la Ligue des droits de l'homme[4].
Sous le régime du président Ouattara
Le , la FESCI appelle ses membres à déposer les armes et participer à « la réconciliation et la reconstruction » voulue par le président Alassane Ouattara[10] - [5].
En , à la suite de grèves estudiantines ayant donné lieu à des violences, la FESCI, comme tous les syndicats étudiants du pays, est suspendu[11].
La FESCI renait toutefois mais doit faire face à de nouveaux syndicats estudiantins aidés par le gouvernement et est contraint de ne pas se faire trop remarquer de crainte d'être ciblé par le régime. La FESCI ne s'exprime donc plus sur les sujets de politique nationale se cantonnant à son rôle de syndicat étudiant[2].
La FESCI continue toutefois ses pratiques qualifiées de « mafieuses » sur les campus ivoiriens[5].
En , une enquête de l'ONG Citoyennes pour la promotion et la défense des droits des enfants, femmes et minorités (CPDEFM) révèle de nombreux cas de violences à caractère sexuel à l'université Félix-Houphouët-Boigny, et dénonce l'inaction des autorités (de l'université comme de l'État). Des membres de la FESCI (aussi nommés FESCIstes) sont accusés dans environ 40 % des cas[12] - [13].
Siège
Le siège de la Fesci, un petit pavillon peint en violet et blanc, est situé au sommet d'une colline, derrière des immeubles de résidences universitaires, sur l'immense campus de l'université de Cocody. Il est surnommé le « Pentagone »[4].
Liste des secrétaires généraux
- Laurent Alexis Koné (21-)
- Martial Joseph Ahipeaud (-)
- Eugène Kouadio Djué (1993-1994)
- Jean Blé Guirao De Badéa (1994-1995)
- Guillaume Kigbafori Soro (surnommé général Bogota) (1995-1998), devenu chef de la rébellion des Forces nouvelles (FN)
- Charles Blé Goudé (surnommé général Gbapê) (1998-2001), devenu chef des Jeunes patriotes et ministre de la Jeunesse de Laurent Gbagbo
- Jean-Yves Dibopieu (surnommé le Pieu) (2001-2003)
- Serge Kuyo (surnommé général Terrain) (2003-2005)
- Serge Koffi (surnommé Sroukou Trinmin Trinmin) (2005-2007)
- Augustin Mian (surnommé général Maniconco) (2007-2014)
- Assi Fulgence Assi (surnommé le Gozinango) (2014-2019)
- Allah Saint Clair (2019-)[14] (surnommé Général Makélélé)[2]
Anciens membres notables
- Sidiki Konaté, un des membres fondateurs de la FESCI
- Michel Gbagbo, fils de Laurent Gbagbo
- Damana Pickass
- Souleymane Kamagaté Koné alias Soul to Soul
- Yayoro Karamoko, ancien président des Jeunes du RDR
Notes et références
- « Actes de barbarie répétés FESCI, la milice estudiantine de Gbagbo », Le Patriote No. 2290 23,
- Matthieu Vendrely, « Côte d'Ivoire : la Fesci, 30 ans de syndicalisme étudiant entre violences et pratiques mafieuses » , sur tv5monde.com, (consulté le )
- Des "généraux" sans étoile mais plein d'ambition - article de Jeune Afrique publié le
- Anne Khady Sé, « La Fesci, un syndicat étudiant qui fait peur », sur Slate Afrique, (consulté le )
- Youenn Gourlay et Marine Jeannin, « La Fesci, le syndicat étudiant qui fait la loi dans les universités ivoiriennes », Le Monde, (lire en ligne)
- « : La violence estudiantine, l'impunite et la crise en Cote d'Ivoire: La structure et la culture organisationnelle de la FESCI », sur www.hrw.org (consulté le )
- Olivia Marsaud, « La guerre des machettes endeuille l'université d'Abidjan », sur Afrik.com, (consulté le )
- Fesci, syndicat ou mafia ? - article de Jeune Afrique publié le .
- Abidjan, « fatiguée-fatiguée » Jeune Afrique. Consulté le .
- Le Figaro.fr, Appel à déposer les armes et à la réconciliation
- « Côte d'Ivoire: tous les syndicats étudiants suspendus », rfi.fr, .
- « Enquête qualitative sur les violences à caractère sexuel (VACS) en milieu universitaire ivoirien : Cas du harcèlement sexuel à l’Université Felix Houphouët Boigny », Citoyennes pour la promotion et la défense des droits des enfants, femmes et minorités,
- François Hume-Ferkatadji, « Côte d'Ivoire: des cas de violences sexuelles dénoncés à l'université Félix Houphouët-Boigny », Radio France internationale,
- RFI, « Côte d'Ivoire: Allah Saint-Clair élu nouveau secrétaire général de la Fesci », sur RFI, RFI, (consulté le ).
Voir aussi
Articles connexes
- Association générale des élèves et étudiants de Côte d’Ivoire, syndicat opposé à la FESCI