Equitan
Equitan est un lai breton écrit par Marie de France dans le cours du XIIe siècle. C'est le deuxième du recueil des Lais de Marie de France. Il est composé de 310 octosyllabes, ce qui en fait un lai intermédiaire dans le recueil, ne se classant ni parmi les plus courts, ni parmi les plus longs.
Auteur | |
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Date de création |
XIIe siècle |
Types |
C'est un des tout premiers écrits par Marie de France, et probablement le premier[1].
Résumé
Equitan est roi des « Nauns ». Il tombe amoureux de la femme de son sénéchal, qui rapidement devient sa maîtresse ; cet adultère est synonyme de félonie du roi envers son sénéchal, décrit comme bon et loyal. Equitan n'ayant pas d'enfant pour prolonger sa lignée, ses vassaux l'encouragent à se marier ; les amants planifient la mort du sénéchal, en lui préparant un bain d'eau bouillante où ils devaient l'inviter. Le sénéchal entre au moment de la préparation et comprend l'adultère : le roi, surpris, se jette dans l'eau en oubliant qu'elle est bouillante, et le sénéchal y jette ensuite sa femme.
« Equitan, Sire de Nauns »
Les noms propres « Equitan » et « Nauns » ont amené à des suppositions très diverses de la part de la critique.
Philippe Walter propose deux étymologies d'Equitan : de equites, issu du terme eques latin signifiant « cavalier », ce qui s'appuie sur la caractérisation de curteis qui « maintint chevalerie » dans les premiers vers du lai (v. 11 et 16) ; du latin aequitas, signifiant « équité, justice », puisqu'au vers 12 le roi est qualifié de « jostis », que Walter traduit par « juge souverain »[2]. Bernard Sergent note néanmoins qu'au vu de son histoire, ces étymologies ne pourraient fonctionner que par antiphrase[3].
Le terme de « Nauns » a également porté à débat. La plupart des traducteurs traduisent par « de Nantes » ou « des Nantais »[4]. Cependant, une variante du manuscrit S (BnF (Mss.), Français 1104), donnant « Aquitan, Sire des Nains » a incité Maurice Delbouille à voir en lui un seigneur des nains (Aquitan est en effet le nom d'un chevalier nain dans Tristan et Iseut)[5]. Bernard Sergent rejette cependant cette idée, puisqu'il n'est fait aucune autre mention de ce caractère de nain dans le reste du lai[3].
Analyse
Equitan n'est pas un lai merveilleux mais un lai où le fait raconté est purement humain, comme Milun et Le Fresne[6].
Comme les autres lais de Marie de France, l'histoire est située dans un passé lointain, marqué par l'adverbe « jadis » du vers 11. Cette apparente antiquité permet ici, selon Ernest Hoepffner, de justifier l'apparente invraisemblance du récit[7].
Réception
Ce lai est le moins considéré par la critique. Jeanne Wathelet-Willem affirme ainsi qu'il « frise le mauvais goût, mais aussi l'invraisemblable ... Comment le sénéchal n'aurait-il pas remarqué que l'eau était bouillante ? Comment, d'autre part, le bain était-il encore suffisamment chaud pour tuer le roi, puisqu'un certain temps s'est écoulé depuis le moment où on l'a apporté »[8].
Bibliographie
- Éditions
- Marie de France, Lais de Marie de France, transposés en français moderne par Paul Truffau, Paris, L'Edition de l'Art,
- Marie de France, Lais de Marie de France, Paris, Honoré Champion, édition de Jean Rychner, .
- Marie de France, Lais, Paris, Garnier Flammarion, édition de Laurence Harf-Lancner, .
- Marie de France, Lais, Paris, édition de Philippe Walter, Gallimard, , p. 93-111. .
- Marie de France, Lais de Marie de France, Paris, édition de Françoise Morvan, Actes Sud, coll. Babel,
- Lais, Paris, édition de Nathalie Koble et Mireille Séguy, Champion Classiques, , p. 241-265.
- Philippe Walter (dir. et édition critique) (édition bilingue), Lais du Moyen Âge, Paris, Gallimard, coll. « Pléiade », , p. 50-65.
- Ouvrages
- Emil Schiött, L'Amour et les amoureux dans les lais de Marie de France, Lund, Thèse, (Lire en ligne).
- Edgard Sienaard, Les lais de Marie de France : du conte merveilleux à la nouvelle psychologique, Genève, Champion, .
- P. Menard, Les lais de Marie de France, contes d’amours et d’aventures du Moyen Âge, Paris, Littératures Modernes, .
- Laurence Harf-Lancner, Les fées au Moyen Âge, Paris, Champion,
- G. S. Burgess, The Lais of Marie de France. Text and context, Manchester,
- Bernard Sergent, L'origine celtique des Lais de Marie de France, Genève, Droz, . [9].
- Articles
- Joseph Bédier, « Les Lais de Marie de France », Revue des Deux Mondes, no 107, .
- Lucien Foulet, « Marie de France et les lais Bretons », ZRPh, no 29, 1905. p. 19-56 et 293-322.
- Ernest Hoepffner, « La tradition manuscrite des lais de Marie de France », Neophilologus, no 12, .
- Leo Spitzer, « Marie de France Dichterin von Problemmärchen », Zeitschrift für romanische Philologie, no 50, .
- Ernest Hoepffner, « La géographie et l'histoire dans les Lais de Marie de France », Romania, no 56, , p. 1-32. (Lien web).
- Ernest Hoepffner, « Pour la chronologie des Lais de Marie de France », Romania, no 59, , p. 351-370.
- Jeanne Wathelet-Willem, « Equitan dans l'œuvre de Marie de France », Arthurian Literature in the Middle Age, dir. Roger Sherman Loomis, Oxford, , p. 325-345. .
- Maurice Delbouille, « Le nom et le personnage d'Equitan », Le Moyen Age, no 69, , p. 315-333. .
- H. Ferguson, « Folklore in the Lais of Marie de France », Romanic Review, no 57, .
- R.N.Illingworth, « La chronologie des lais de Marie de France », Romania, no 87, .
- Jean Frappier, « Une Édition nouvelle des Lais de Marie de France », Romance Philology, no XXII,
- J. Flori, « Seigneurie, noblesse et chevalerie dans les lais de Marie de France », Romania, no 108, .
- D. M. Faust, « Women Narrators in the Lais of Marie de France », Women in French Litterature, Saragora, .
Annexes
Références
- Hoepffner 1933, cité par Sergent 2014, p. 70
- Walter 2000, p. 441
- Sergent 2014, p. 68
- Sergent 2014, p. 67-68
- Delbouille 1963, p. 321-323
- Hoepffner 1930, p. 3
- Hoepffner 1930, p. 4
- Wathelet 1959, p. 329-329
- White-Le Goff, Myriam, « Bernard Sergent, L’origine celtique des Lais de Marie de France », Cahiers de recherches médiévales et humanistes. Journal of medieval and humanistic studies, (ISSN 2115-6360, lire en ligne, consulté le ).