Effectual
Effectual correspond à une rationalité qui s'oppose au mode causal ou prédictif. On parle aussi de logique effectuale ou d'effectuation.
L'Effectuation est un paradigme pragmatiste du management issu du domaine de l'entrepreneuriat Partant de la question de recherche « quel est le processus de décision des entrepreneurs ayant réussi ? », la chercheuse Saras Sarasvathy (2001)[1] apporte un éclairage nouveau quant à la manière de concevoir le processus de prise de décision de l’entrepreneur.
Les cinq principes de l'effectuation
L'effectuation regroupe cinq principes d'action :
- "Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras" : l'entrepreneur part de ses moyens disponibles pour déterminer des buts possibles;
- "Perte acceptable" : l'entrepreneur décide d'une action sur la base d'une perte acceptable plutôt que d'un gain attendu;
- "Patchwork fou" : l'entrepreneur définit ses buts avec des parties prenantes engagées dans son projet (co-création);
- "La limonade" : l'entrepreneur tire parti des surprises pour définir des nouveaux buts;
- "Pilote dans l'avion" : le futur n'est pas déterminé, il est la conséquence des actions de l'entrepreneur[2].
DĂ©marche d'utilisation du paradigme effectual
Si la logique causale ou prédictive met l’accent sur le but précis puis sur les moyens d’y arriver, la logique effectuale met l’accent sur les moyens puis sur les effets atteignables.
Tandis que le mode causal part d'un objectif et définit la problématique en tant que choix d'une trajectoire optimale pour atteindre l'objectif, le mode effectual part d'un ensemble de ressources disponibles à partir desquels il construit les objectifs possibles.
Le mode effectual est en particulier utilisé par les entrepreneurs en situation d'incertitude totale mais où l'action est encore possible. dite Knightienne (voir Frank Knight 1921).
Enjeux du paradigme effectual
Ce paradigme permet d'envisager le management non pas sur le plan initial des objectifs à atteindre. Il s’agit là d’une rupture philosophique majeure et l’abandon d’un principe déterministe basé sur le postulat « tant que je peux prédire le futur, je le contrôle » mais plutôt d’un tout autre postulat qui s’exprime par « il ne sert à rien de prédire le futur puisque je peux le contrôler » (Sarasvathy, 2008)[3].
Notes et références
- Saras D Sarasvathy (2001) "Causation and effectuation: Toward a theoretical shift from economic inevitability to entrepreneurial contingency" Academy of Management. The Academy of Management Review. Vol. 26, Iss. 2; p. 243 (21 pages)
- Saras D. Sarasvathy, Effectuation : elements of entrepreneurial expertise, Edward Elgar, (ISBN 978-1-84376-680-3, 1-84376-680-9 et 978-1-84844-572-7, OCLC 86090391, lire en ligne)
- Sarasvathy est allé à la rencontre de 27 entrepreneurs ayant connu le succès lors de la création de leur entreprise (Chiffre d’Affaires variant de US$ 200 millions à US$ 6,5 milliards). À partir d’un exercice demandant la résolution d’un problème de création d’une nouvelle entreprise, il a été mis en lumière que ces entrepreneurs ne suivaient pas du tout majoritairement une démarche prédictive mais que ces derniers avaient recours à un tout autre raisonnement. Sarasvathy a pu vérifier que la plupart du temps, l’entrepreneur ne raisonne pas selon la logique causale (ou prédictive) mais qu’il applique une autre logique qui lui est opposée et qu’elle appelle la logique effectuale. Il s’agit dans le cas de la logique effectuale de partir des moyens dont l’entrepreneur dispose et de rechercher les effets que ces moyens permettent d’atteindre. Un effet atteint devient alors un nouveau moyen, permettant d’atteindre de nouveaux effets, pouvant définir de nouveaux buts et ainsi de suite. Sarasvathy a pu constater que le ou les buts poursuivis ne sont en aucun cas précis mais déterminent davantage une finalité globale qui a du sens pour l'entrepreneur innovateur. Ainsi l’innovateur n’est pas enfermé dans un choix prédéfini mais il construit autant que découvre de nouvelles réalités qu’il lui était impossible d’envisager a priori.