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Cyrtarachninae

Les Cyrtarachninae sont une sous-famille d'Araneidae réunissant aujourd'hui deux tribus : les Cyrtarachnini et les Mastophorini, cette derniÚre incluant les fameuses «Araignées à bolas» (araignées chassant leurs proies en faisant tournoyer un fil de soie lesté par des «perles» visqueuses).

Distribution géographique

Leur rĂ©partition est mondiale, du continent amĂ©ricain Ă  l'Australie et l'ExtrĂȘme Orient, en passant par l'Afrique et mĂȘme l'Europe oĂč une espĂšce, Cyrtarachne ixoides (ixodoides), les reprĂ©sente en France[1] - [2].

Anatomie externe

Fig.1 - Exemples de Cyrtarachninae : aspect externe. A,Cyrtarachne ixoides - B, Cyrtarachne bufo - C, Paraplectana coccinella - D, Pasilobus sp. - E, Poecilopachys australasia - F, Mastophora sp. -G, Taczanowskia - L, Aranoethra - H, Celaenia excavata - K, Dicrostichus ou Ordgarius.

Chez la plupart des espĂšces de Cyrtarachninae, l’abdomen des femelles adultes est proportionnellement plus large que le  cĂ©phalothorax qu’il tend Ă  recouvrir en le dissimulant plus ou moins et peut ĂȘtre trĂšs Ă©talĂ© dans le sens transversal (Pasilobus) (fig.1,D). Sa forme globale et son ornementation, motifs et fond de couleurs vives, peuvent simuler certains insectes, par exemple des coccinelles (Paraplectana coccinella, Paraplectana tsushimensis)(Fig.1,C). Il peut Ă©galement ĂȘtre pourvu de tubercules ou verrucositĂ©s de tailles, formes, coloris variĂ©s (Pasilobus bufoninus, Cyrtarachne inaequalis, C.bufo, Poecilopachys australasia) (Fig.1,B,E). Le prosoma ou cĂ©phalothorax peut Ă©galement prĂ©senter des excroissances en tubercules ou cornes (Mastophora), ces derniĂšres pouvant simuler une rangĂ©e d'Ă©pines (Cladomelea debeeri) (Fig.2).

Fig.2 -Cyrtarachninae : cornes (C) de Mastophorini : Cladomelea, de profil, Ă  droite et Mastophora, de face, Ă  gauche (dessins).

Cette morphologie particuliĂšre peut favoriser le mimĂ©tisme de l'araignĂ©e avec son environnement (mimĂ©tisme batĂ©sien), en Ă©tant par exemple associĂ© Ă  une couleur d’ensemble jaune-verdĂątre fondant l'araignĂ©e dans la vĂ©gĂ©tation (Taczanowskia)(Fig.1,G), ou en permettant une ressemblance (rare) avec des insectes (Fig.1,C), avec des dĂ©bris vĂ©gĂ©taux ou des excrĂ©ments d’oiseaux tombĂ©s sur la vĂ©gĂ©tation (Celaenia, Mastophora extraordinaria: «Bird-dropping spiders» des anglo-saxons)(Fig.1,H), ou encore avec la coquille de mollusques terrestres (Cyrtarachne conica, Cyrtarachne inaequalis, Cyrtarachne bufo)(Fig.1,B).

Fig.3 - Dimorphisme sexuel volumétrique de Mastophora. F, femelle - M, mùle pygmée.

Par ailleurs, la morphologie gĂ©nĂ©rale et la coloration peuvent prĂȘter Ă  confusion avec les Gasteracanthes, comme dans le cas d’Aranoethra cambridgei dont le jaune Ă©clatant (Fig.1,L) rappelle celui de Gasteracantha remifera. Emerit[1]a d’ailleurs tentĂ© un rapprochement phylogĂ©nique audacieux entre les Cyrtarachninae, surtout mĂąles immatures de Cyrtarachne "ixodoides", et les GastĂ©racanthes, lien basĂ© sur la sigillotaxie (plaques chitinisĂ©es) de l’abdomen et ses tubercules.

Les mùles, du moins chez les Mastophorini, sont sensiblement plus petits que les femelles (Fig.3). Il existe donc alors un dimorphisme sexuel volumétrique marqué comme chez les Argiopes et les Néphila.

Fig.4 -Celaenia excavata, cocons ovigĂšres

Industrie séricigÚne: les toiles et les modes de capture des proies

Les araignĂ©es de la sous-famille des Cyrtarachninae construisent des toiles d’une extraordinaire diversitĂ© structurale (Stowe,1986)[3] opposant les deux tribus constitutives de la sous-famille. Dans le cadre de cette industrie sĂ©ricigĂšne entre le tissage de cocons ovigĂšres globuleux (Mastophora, Celaenia)(Fig.4) ou fusiformes (Cyrtarachne ixoides, Dicrostichus magnificus)(Fig.5).

Fig.5 - Ordgarius (Dicrostichus) magnificus, femelle sur cocons ovigĂšres

Selon une premiĂšre hypothĂšse (Robinson & Robinson, 1975[4]; Eberhard1980[5]), les toiles auraient Ă©voluĂ© par rĂ©duction progressive en trois Ă©tapes qui se sont succĂ©dĂ© au fil du temps: le type Ă  fils en pont («spanning-thread webs» des anglo-saxons), le type en triangle, le type Ă  bolas et, en fin de compte, la disparition pure et simple de tout Ă©difice soyeux (Scharff & Coddington, 1997)[6].

Elle a été infirmée plus récemment par l'étude de phylogénie moléculaire ardue de Tanikawa et al. (2014)[7], puis celle de Scharff et al. (2020)[8].

Tribu des Cyrtarachnini

Les genres Cyrtarachne, Pasilobus, Poecilopachys et Paraplectana tissent des toiles orbiculaires trĂšs modifiĂ©es car pourvues d’un petit nombre de radii et de fils visqueux largement espacĂ©s Ă  disposition non spiralĂ©e, nommĂ©s en anglais ‘spanning-threads”, soit “fils en pont”, (Clyne, 1973[9]; Chigira,1978[10]; Robinson, 1980[11]; Shinkai, 1992). Leur construction « laborieuse » a Ă©tĂ© dĂ©crite en dĂ©tails par Stowe (1986)[3], d’aprĂšs diffĂ©rents auteurs dont s’inspirent Ă©galement les dessins joints.

Fig.6 - Cyrtarachne bufo, toile. M, moyeu - P, fil gluant en pont - R, radius - S, secteur. Schéma d'aprÚs Suginaga.

La toile des Cyrtarachne exotiques se compose d’une charpente de forme variable, en triangle ou en polygone plus complexe, de radii divergeant à partir d’un moyeu subcentral et de fils en pont pouvant former des cercles complets au travers des secteurs (Fig.6).

Fig.7- Cyrtarachne ixoides, toile. C, charpente - M, moyeu - P, fil gluant en pont - Pd, fil gluant détaché à une extrémité - R, radius - S, secteur. Schéma d'aprÚs Olin.

Elle peut atteindre 1 m de diamĂštre.

La toile de notre espĂšce indigĂšne Cyrtarachne ixoides Ă©tudiĂ©e en dĂ©tail par Olin (2013) dans les Landes se rencontre souvent entre deux buissons ou herbes hautes, Ă  une hauteur de 1 Ă  2 m, plus rarement jusqu’à 3 ou 4 m dans un arbre. Cet Ă©difice, mieux visible quand il est emperlĂ© de rosĂ©e matinale, se compose d’une charpente en cadre rectangulaire, s’attachant  typiquement Ă  quatre supports, et d’un ensemble de 8 Ă  10 radii convergeant vers un moyeu (Fig.7,8)

Fig.7 - Cyrtarachne ixoides: toile fixée dans la végétation. Fils gluants, les uns fixés en "pont" aux deux bouts et les autres pendants aprÚs un impact

renforcĂ© de soie plus dense et, dans les secteurs, de fils en pont trĂšs gluants, sans disposition spiralĂ©e. Ces fils de capture forment, de profil, des arceaux sous la toile lorsqu’ils sont rattachĂ©s Ă  deux rayons successifs par leurs extrĂ©mitĂ©s ou pendent verticalement, lorsque l’une de ces derniĂšres s’est rompue, spontanĂ©ment ou sous l’impact d’une proie volante (Fig.7).

Fig.8 - Pasilobus sp., toile. C, charpente - M, moyeu - P, fil gluant en pont - R, radius - S, secteur. L' araignée hale un LépidoptÚre (L) avec le fil en pont qu'a détaché cette proie. Schéma d'aprÚs Robinson & Robinson.

La toile de Pasilobus, longue d’environ 50 cm, a une charpente triangulaire, un moyeu totalement excentrĂ© Ă  l’apex, un unique radius axial et, de ce fait, seulement deux secteurs traversĂ©s par quelques fils en pont (Fig.8). L’ AraignĂ©e Pasilobus sp., Ă©tudiĂ©e en Nouvelle GuinĂ©e (Morobe District) par les Robinson  (Robinson & Robinson, 1975)[12], construit cet Ă©difice de nuit sur les arbustes et les petits arbres. Plus ou moins horizontal, cet Ă©difice a une charpente triangulaire divisĂ©e en deux moitiĂ©s par un fil mĂ©dian tendu de l’angle apical au milieu de la base, ainsi divisĂ©e. De ce fil axial pendent de 4 Ă  11 paires de fils en “pont” largement espacĂ©s. Seuls constituants adhĂ©sifs de la toile, ils sont visqueux dans une partie seulement de leur longueur, solidement fixĂ©s au seul niveau de leur jonction avec le fil mĂ©dian mais, en revanche, sont facilement rompus Ă  leur insertion sur le fil de charpente latĂ©ral ("low‐shear joint"). La toile de Paraplectana, telle que P. tsushimensis (Chigira,1978), d’un diamĂštre moyen de 70 cm, a une charpente plus ou moins incomplĂšte, un moyeu trĂšs excentrĂ©, 4 Ă  7 radii et des fils en pont dans les secteurs plus ou moins ouverts qu’ils dĂ©limitent (Fig.9).

Fig.10 - Poecilopachys australasia, toile. C, charpente - M, moyeu - P, fil gluant en pont - R, radius - S, secteur. Schéma d'aprÚs Clyne.

La toile de Poecilopachys australasia (Clyne,1973), d’environ 80 cm de diamĂštre, montre Ă©galement une charpente triangulaire, mais il s’y inscrit une Ă©bauche d’orbe Ă  moyeu excentrique, 7 Ă  12 radii, une dizaine de secteurs  et jusqu’à un maximum de 13 fils en pont dans ces derniers (Fig.10).

Fig.9 -Paraplectana tsushimensis, toile. C, charpente - M, moyeu - P, fil gluant en pont - Pd, fil gluant détaché à une extrémité - R, radius - S, secteur. Schéma d'aprÚs Chigira

Lorsqu’un insecte vient Ă  heurter un fil en pont de ces toiles, l’une des extrĂ©mitĂ©s de ce fil, dite «joint de cisaillement» (“low-shear joint”) se libĂšre du radius, tandis que l’autre lui reste fermement attachĂ©e (Cyrtarachne Arita, 1963; Poecilopachys Clyne, 1973; Paraplectana Chigira, 1978; Pasilobus Robinson, 1980; Cyrtarachne Shinkai, 1992)(Fig.8). Cette caractĂ©ristique diffĂ©rencie nettement les fils en pont  des spires de toiles orbiculaires habituelles qui sont attachĂ©s fermement aux radii et ne s’en dĂ©tachent point par rupture. Le caractĂšre gluant du fil en pont est liĂ© aux gouttelettes visqueuses qui y sont fixĂ©es et retiennent la proie jusqu’à ce que l’ araignĂ©e la hale vers elle (Fig.4).

Dans le cas de Pasilobus, lorsqu’un Insecte heurte un «pont» en volant(Fig. 8), ce dernier se rompt et pend au-dessous de la toile, attachant  ainsi au fil mĂ©dian la proie qui continue Ă  voler en tournoyant et finit par s’immobiliser. L’araignĂ©e se prĂ©cipite vers l’attache le long du fil axial, hale le fil en “pont” et mord enfin l’ insecte engluĂ© sur ce dernier (Robinson)[4].

Tribu des Mastophorini : araignées à bolas

Apparemment bien diffĂ©rente est l’industrie sĂ©ricigĂšne des genres Mastophora (AmĂ©rique), Cladomelea et Acantharachne (Afrique), Ordgarius ou Dicrostichus (Australie) dont la toile captrice est rĂ©duite Ă  un « bola », fil terminĂ© ou garni par une ou plusieurs masses visqueuses alors superposĂ©es que l’araignĂ©e femelle fait tourner au bout de l’une de ses pattes lorsque s’approche, de nuit, une proie volante (Eberhard, 1980[5]; Shinkai and Shinkai, 2002[13]; Blackledge et al., 2011[14]). Chacun de ces genres diffĂšre des autres par sa tactique de manipulation du bola, tenu avec une patte qui le projette vers la proie parvenue Ă  portĂ©e : patte I chez Mastophora et Agatostichus, patte II chez Dicrostichus (Longman1922 ; Mac.Keown,1952) avec tournoiement Ă  l'approche de la victime et patte III chez Cladomelea oĂč la rotation est permanente (Akerman, 1923).

Tribu des Mastophorini : araignées sans bolas

A l’extrĂȘme, les araignĂ©es femelles de deux autres genres de la mĂȘme tribu, Celaenia et Taczanowskia (AmĂ©rique) ne tissent aucun piĂšge et capturent directement avec leurs pattes Ă©tendues (McKeown, 1952; Eberhard, 1981; Forster and Forster, 1999).

Points communs

Fig.10 - Mastophora cornigera, bola (fil seul visible) et proie

Suspension de la proie

En fait, bien que les structures des piÚges diffÚrent grandement, il existe des similitudes frappantes entre une proie suspendue à un fil en pont rompu et ballant et celle qui a été prise à la « volée » avec un bola.

Fig.11 - Cyrtarachninae : toiles. 1,Cyrtarachne,sp - 2, Pasilobus - 3, Mastophora.sp.

Adhésivité

L’adhĂ©sivitĂ© des gouttelettes de fils en pont et du globule de bola est extrĂȘme. Cependant, chez Cyrtarachne, elle dĂ©croĂźtrait en quelques heures jusqu’à devenir nulle (Cartan et Miyashita, 2000)[15], sauf dans des conditions de forte humiditĂ© oĂč elle reste Ă©levĂ©e (Baba et al., 2014)[16]. Il en serait de mĂȘme pour les â€œĂ©normes” globules de bolas qui diminuent trĂšs sensiblement de taille en seulement 90 minutes (Eberhard, 1980)[5], rĂ©duction d’adhĂ©sivitĂ© non observĂ©e dans les toiles orbiculaires des autres Araneidae.

Attraction des proies par mimétisme chimique agressif phéromonal

Les “Bolas spiders” ont un autre caractĂšre unique dans le fait que leurs femelles adultes attirent exclusivement des LĂ©pidoptĂšres nocturnes, tous mĂąles, en Ă©mettant une substance chimique volatile vĂ©hiculĂ©e par l’air (Stowe et al., 1987;Yeargan, 1994)[17] - [18] selon un mĂ©canisme connu comme mimĂ©tisme sexuel phĂ©romonal. En revanche, les mĂąles et les juvĂ©niles n’attirent pas des LĂ©pidoptĂšres mais des DiptĂšres Psychodidae, Ă©galement mĂąles (Yeargan and Quate,1996,1997)[19] - [20].

A l’extrĂȘme, les AraignĂ©es femelles de deux autres genres de la mĂȘme sous-famille, Celaenia et Taczanowskia (AmĂ©rique) ne tissent aucun piĂšge et capturent directement leurs proies, toujours des LĂ©pidoptĂšres nocturnes mĂąles (Stowe, 1986)[3], avec leurs pattes Ă©tendues (McKeown, 1952; Eberhard, 1981; Forster and Forster, 1999). Ici encore, un mimĂ©tisme chimique agressif phĂ©romonal doit  ĂȘtre utilisĂ© par ces AraignĂ©es, d’autant plus que, lorsqu’elles sont jeunes, leurs proies consistent aussi en Psychodidae  (Forster and Forster, 1999).

Support anatomique

La structure ou, à l'inverse, l'absence de piÚge, et l'attraction des proies trouvent une explication logique révélée par la seule histologie de l'opisthosoma, débité en coupes sériées (C.H) respectivement dans les glandes séricigÚnes et dans l'existence d'un organe particulier remarquable, le tissu folliculaire endocrinoïde abdominal (Fig.12,13), tel que Lopez l'a décrit pour la premiÚre fois chez les Mastophora.[21]

Il l'a retrouvé ensuite, toujours par étude histologique chez Celaenia, membre des Mastophorini (Fig.14), et Poecilopachys, une représentante des Cyrtarachnini (Fig.15)[22].

Fig.13 - Mastophora cornigera, femelle : glande séricigÚne agrégée (Ag) avec son canal excréteur (C) et tissu endocrinoide (E). (A.Lopez,C.H.)
Fig.12 - Mastophora cornigera, femelle : glandes séricigÚnes agrégées (Ag) et tissu endocrinoide (E). (A.Lopez,C.H.)

Le mĂȘme auteur (1998) a montrĂ© que les glandes Ă  soie agrĂ©gĂ©es sont absentes lorsque l'araignĂ©e Mastophorine Celaenia qui ne construit aucune toile et n'Ă©labore pas de glue. L'absence de cette catĂ©gorie de glandes sĂ©ricigĂšne est d'ailleurs une caractĂ©ristique d'autres Araneidae (Cyrtophora, Mecynogea)[23] dont la toile de capture est dĂ©pourvue de tout matĂ©riel gluant dans son orbe modifiĂ©e.

En revanche, les agrégées sont particuliÚrement bien développées dans les genres (Mastophora,Poecilopachys) qui produisent quantité de matériel gluant (Fig.12,13,15).

Histoire phylogénétique

Elle est ardue et a débuté avec le travail original de Simon (1892)[24].

Les Cyrtarachninae constituent  un groupe sous-familial d’araignĂ©es dans la famille des Araneidae (araignĂ©es dites «à toile orbiculaire»). Ce groupe a Ă©tĂ© traitĂ© de diffĂ©rentes maniĂšres, au prix de remaniements oiseux.

Fig.14 - Celaenia excavata, femelle : tissu folliculaire endocrinoĂŻde (E) et glandes Ă  soie tubuliformes (T) (A.Lopez,C.H.)
Fig.15 - Poecilopachys australasia femelle: tissu folliculaire endocrinoïde (E) et glandes à soie agrégées (Ag.) (A.Lopez,C.H.)

Il est apparu initialement sous le nom de Cyrtarachneae (Simon, 1892)[24] incluant 5 genres, Ă  savoir Paraplectana, Aranoethra, Pasilobus, Cyrtarachne et Poecilopachys. En cette occasion, Simon crĂ©a aussi le groupe des Glyptocranieae, incluant les genres Agatostichus (reconnu encore par Gertsch en 1955 mais aujourd’hui rattachĂ© Ă  Mastophora), Glyptocranium (traitĂ© de mĂȘme), Cladomelea et Ordgarius (ex Dicrostichus)(Eberhard,1982). De mĂȘme, il plaça deux genres, Celaenia and Taczanowskia dans le groupe des Celaenieae. Les trois groupes ainsi crĂ©Ă©s, Cyrtarachneae, Mastophoreae, Celaenieae, furent traitĂ©s comme des tribus, Ă  savoir les Cyrtarachnini, Mastophorini and Celaeniini.

Les dĂ©nominations ont ensuite variĂ©, la plus large, celle des Cyrtarachninae sensu lato (s.l.), renfermait les trois groupes originaux de Simon[24], y compris, bien qu’à priori incongrues dans cette place, les araignĂ©es Ă  bolas (tribu des Mastophoreae de Mello-LeitĂŁo,1931)[25]. Emerit (1978) considĂ©ra Ă  tort les deux premiers Excavata comme des sous-familles, les Cyrtarachninae et les Mastophorinae. Plus tard, Eberhard (1980, 1982)[5] - [26]dans des Ă©tudes comportementales montra que les trois groupes de Simon partageaient bien des caractĂ©ristiques communes et pouvaient ĂȘtre rĂ©unis.

Plus rĂ©cemment (1997), une analyse phylogĂ©nĂ©tique de la famille  des Araneidae a Ă©tĂ© publiĂ©e par Scharff & Coddington[6]. Ces auteurs ont inclus les divers genres de deux des groupes de Simon, Cyrtarachneae et Mastophoreae, les considĂ©rant comme monophylĂ©tiques, donc Ă©troitement apparentĂ©s («sisters») et les combinant dans la  sous-famille des Cyrtarachninae, en excluant toutefois la totalitĂ© des Celaenieae. Ils soulignent que la sous-famille a une biologie assez cohĂ©rente, une tendance marquĂ©e Ă  la rĂ©duction de la toile et une Ă©volution compensatrice du mimĂ©tisme chimique agressif.

Plus prĂšs de nous encore, Tanikawa et al. (2014)[7] par une Ă©tude de phylogĂ©nie moleculaire ardue, puis Scharff  & a. (2020)[8] ont infirmĂ© cette conception qui ne s’accorde pas avec les relations Ă©volutives dĂ©duites antĂ©rieurement. D’une part, les AraignĂ©es Ă  toiles triangulaires (Pasilobus) doivent rester incluses dans le groupe confectionnant des “ spanning-thread webs », sous l’étiquette de « clade C ». D’autre part, les espĂšces utilisant des bolas et celles qui ne construisent aucun piĂšge forment un groupe monophylĂ©tique complĂštement sĂ©parĂ© du prĂ©cĂ©dent en tant que « clade B » descendant d’un ancĂȘtre commun (Tanikawa et al.).

Il se pourrait enfin que, selon une conception de A.Lopez, à confirmer ou non par des recherches histologiques ultérieures, seules valables en ce genre de détection, il existe un lien anatomique original (synapomorphie), caractÚre dérivé, entre tous les représentants des Cyrtarachninae: l'existence d'un tissu endocrinoïde abdominal, démontrée dans deux genres de Mastophorini (Mastophora, Celaenia)(Fig.14) et jusqu'ici un seul (Poecilopachys) chez les Cyrtarachnini (Fig.15) à explorer globalement sur le plan de l'anatomie interne.

Biogéographie

La richesse en araignées à bolas est la plus élevée dans le Nouveau Monde, avec 51 espÚces de Mastophora, incluant Agatostichus, contre une seule espÚce connue de Cyrtarachne.

En Afrique, les araignées à bolas ne sont représentées que par les genres Cladomelea et Acantharachne.

En Asie sensu lato, il n’y  aurait en revanche que 11 espĂšces du genre australien Ordgarius ou Dicrostichus contrastant avec la richesse en «  "spanning-thread web spiders» connues seulement (Platnick, 2014) dans cette partie du monde. Parmi elles, 43 espĂšces de Cyrtarachne.

Cela suggĂšre une origine amĂ©ricaine du clade Ă  bolas ou sans toile, et une origine asiatique du clade Ă  fils en pont («spanning threads»). La diversification de l’ancĂȘtre commun en ces deux clades peut ĂȘtre survenue en association avec leur division gĂ©ographique.

Les détails de la phylogéographie restent à préciser.

Bibliographie

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Notes & références

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