Cycle géologique
Les roches sont le résultat d'un cycle de transformations assez compliqué, nommé cycle géologique, cycle géochimique ou cycle des roches. En effet, c'est à ce cycle que nous devons la composition de la croûte terrestre et du manteau supérieur.
Les composantes principales de ce cycle sont indiquées sur le schéma illustré dans le diagramme ci-contre.
Description
1 = magma ;
2 = cristallisation ;
3 = roches magmatiques ;
4 = météorisation et érosion ;
5 = sédimentation ;
6 = sédiments & roches sédimentaires ;
7 = métamorphisme ;
8 = roches métamorphiques ;
9 = fusion.
On estime que la croûte dans son ensemble se compose d'environ 94 % en volume de roches qui semblent provenir de la cristallisation d'un matériau fondu, appelé magma[1]. Ces roches sont appelées roches magmatiques. Vu leur importance, un point d'entrée logique dans le cycle géologique se trouve en bas de la figure, où un magma se solidifie — le plus souvent par cristallisation, parfois par vitrification — pour former une roche ignée. L'étape suivante du cycle consiste dans la remontée, souvent très lente, parfois rapide, de cette roche ignée vers la surface, où elle se trouve alors exposée à différents processus géologiques qui l'érodent et qui la transportent sous forme de grains de tailles diverses vers des bassins de sédimentation[2] (mers épicontinentales ou lacs), pour s'y retrouver finalement sous forme de sédiments. Sous l'effet de leur propre poids, ainsi que par des réactions chimiques entre grains en présence d'eau qui assurent une certaine cimentation (processus regroupés sous le vocable général de diagenèse), les sédiments se consolident et deviennent des roches compactes appelées roches sédimentaires. On estime que la croûte se compose actuellement de près de 6 % de telles roches.
À cause de la mobilité des couches externes de la Terre, autrement dit, à cause des mouvements des plaques lithosphériques, les roches sédimentaires ne restent généralement pas en place au fond d'une mer ou d'un océan très longtemps, à l'échelle géologique qui compte en dizaines et centaines de millions d'années. Parfois, des couches horizontales ou subhorizontales de roches sédimentaires émergent par eustasie[3] et sont accrétées, c'est-à -dire englobées, à la croûte continentale, mais le plus souvent elles participent à des processus tectoniques qui les plissent ou qui les cassent, et qui les érigent en chaînes de montagnes. Ces dernières sont érodées à leur tour, et leurs débris sont transportés vers de nouveaux bassins de sédimentation. D'autres fois, au cours des temps géologiques, des processus tectoniques enfouissent les roches sédimentaires à des profondeurs appréciables sous la surface, notamment à l'intérieur de chaînes de montagnes. Ces roches sédimentaires sont alors soumises à des pressions et des températures élevées, et subissent à leur tour une transformation importante dans leur forme et leurs propriétés physiques, tout en conservant généralement la même composition chimique globale. Elles deviennent ainsi des roches métamorphiques.
Les divers phénomènes à la base de cette transformation sont regroupés sous le vocable de métamorphisme[4]. On observe les roches métamorphiques sur l'emplacement d'anciennes chaînes de montagnes érodées ou pénéplanées, notamment sous forme d'ardoises et plus généralement de schistes. Leur abondance totale dans la croûte est estimée à un peu moins de 1 %. Toutefois, la plupart des roches métamorphiques ne sont jamais exposées en surface, mais retournent vers les grandes profondeurs pour devenir du magma recyclé (phénomène d'anatexie), bouclant ainsi le cycle géologique.
Décrit de la sorte, ce cycle paraît simple même si les divers processus qui interviennent peuvent paraître fort compliqués dans leurs détails. Malheureusement, en y regardant de plus près, de nombreuses complications du cycle lui-même se présentent par le fait que diverses étapes peuvent être court-circuitées, à tel point que le cycle peut éventuellement être parcouru à certains endroits en sens contraire de celui envisagé ci-dessus. Nous avons par exemple indiqué sur le diagramme l'un de ces embranchements possibles parcourus en sens contraire : des roches ignées peuvent être réenfouies et refondre, redevenant ainsi du magma qui possède le cas échéant une composition différente du magma primitif. De même, on peut très bien envisager le passage de roches sédimentaires directement vers le stade de magma, sans passer par le stade intermédiaire de roches métamorphiques, ainsi que l'altération météoritique, l'érosion et le transport de roches métamorphiques dont les grains se déposent sous forme de sédiments avant de redevenir des roches sédimentaires. Il est même possible que certaines roches ignées, en particulier les granites, proviennent en partie d'un recyclage de roches sédimentaires, même si ce débat n'est pas clos. En effet, certains auteurs font remarquer que les granites, classés pourtant parmi les roches ignées, ne peuvent pas directement provenir d'un magma à cause de leur important degré de différenciation qui indiquerait nécessairement l'intervention d'un processus de sédimentation et non pas la naissance à partir d'un matériau fondu. Néanmoins, pour l'essentiel, le parcours du cycle géologique est bien celui que nous avons indiqué plus haut.
Notes et références
- On appelle magmas des poches de roches fondues qui se trouvent enfouies sous terre et ne sont pas en contact avec l'atmosphère. Les magmas qui s'épanchent en surface s'appellent des laves.
- Ces bassins ou cuves de sédimentation étaient appelés, jusque dans les années 1980, des géosynclinaux lorsque le volume y accumulé de sédiments et/ou de roches sédimentaires provenant des débris d'altération de roches ignées ou d'autres roches sédimentaires et métamorphiques, est très important. Le terme géosynclinal a tendance à disparaître de plus en plus du vocabulaire géologique, et l'on parle plutôt de marge continentale.
- Le terme eustasie (ou eustatisme), du grec eu = bien et stasis = immobilité, équilibre, a été forgé en 1888 par le géologue autrichien Eduard Suess pour désigner le changement d'ensemble du niveau des mers. Cette notion a été introduite pour rendre compte de transgressions ou de régressions contemporaines sur tous les plateaux continentaux. Diverses explications ont été proposées, parmi lesquelles on retiendra ici la formation ou la fusion des calottes glaciaires, ce qui modifie le volume de l'eau des océans (glacio-eustatisme).
- Le métamorphisme est la transformation d'une roche à l'état solide du fait d'une élévation de température et/ou de pression, avec cristallisation de nouveaux minéraux, dits néoformés, et acquisition de textures et structures particulières, sous l'influence de conditions physiques et/ou chimiques différentes de celles ayant présidé à la formation de la roche originelle. En fait, les limites entre diagenèse et métamorphisme sont assez floues. La diagenèse est l'ensemble des processus qui affectent un dépôt sédimentaire et le transforment progressivement en roches sédimentaires solides, phénomène appelé aussi lapidification ou lithification. La diagenèse commence dès le dépôt du sédiment. Les roches sédimentaires déjà constituées peuvent, en dehors du métamorphisme proprement dit, encore subir des phénomènes épigénétiques (ou métasomatiques), et les limites entre ces phénomènes et la diagenèse sont également peu définies. Dans les sédiments sous-aquatiques, marins surtout, les modalités sont variées car elles dépendent, entre autres, de la nature chimique du sédiment, de sa granulométrie, du taux de sédimentation contrôlant l'enfouissement. Les processus importants peuvent se décrire comme suit :
- Dans les premiers décimètres, ou éventuellement dans les premiers mètres (la question reste ouverte), il y a diagenèse biochimique due aux organismes vivants et surtout aux bactéries. Cela rend le milieu plus acide et plus réducteur. On désigne aussi cette zone superficielle comme celle de la syndiagenèse.
- Au-delà , la diagenèse physico-chimique (parfois nommée épidiagenèse), qui augmente avec le temps et la profondeur, est marquée par une compaction du sédiment avec perte d'eau, augmentation de la densité, multiplication des points de contact entre les grains, par une augmentation de la température ambiante due à l'enfouissement favorisant les réactions chimiques, et finalement par une multiplication de réactions chimiques variées et complexes, avec dissolution possible des grains à leurs points de contact, et recristallisation à partir des solutions ainsi obtenues dans les espaces intergranulaires.
Voir aussi
Bibliographie
- A. Foucault & Raul Dumitras (1984). Dictionnaire de géologie (2e éd.), Masson, Paris (ISBN 2-225-80248-3)