Congrès internationaux des orientalistes
Les Congrès internationaux des orientalistes sont des manifestations scientifiques internationales organisées de la fin du XIXe siècle à 1973, et réunissant la communauté savante des orientalistes (linguistes, philologues, archéologues, etc.), dans un contexte marqué à la fois par l'internationalisation et par l'impérialisme des savoirs occidentaux sur l'Orient.
Le grand rendez-vous mondial des orientalistes
L'idée de réunir à Paris la communauté savante des orientalistes revient à Léon de Rosny (1837-1914), ethnologue spécialiste du Japon, professeur à l'Ecole spéciale des langues orientales et président de la Société d'ethnographie de Paris, laquelle est responsable de l'organisation de l'événement. Initialement consacré aux études japonaises, le projet de Congrès est vite élargi aux autres champs des études orientales face à l'intérêt croissant de la communauté savante mondiale (études égyptiennes, assyriologiques, sémitiques, indiennes, iraniennes et dravidiennes, néo-helléniques et arméniennes, tartares, indochinoises et océaniennes)[1].
Réuni à Paris du 1er au 11 septembre 1873, à la Sorbonne, le Congrès attire 1064 inscrits issus de plus de vingt pays et qui, pour la plupart, échangeaient peu et ne se connaissaient que par la circulation de leurs œuvres. Parmi eux, notamment : l'égyptologue Samuel Birch, l'indianiste Emile Burnouf, le linguiste Alexandre Chodzko, le collectionneur Henri Cernuschi, l'égyptologue Karl Richard Lepsius, l'égyptologue Gaston Maspéro, l'assyriologue Jules Oppert, la philosophe Clémence Royer (traductrice française de Charles Darwin), ou encore Pierre-Gustave Roze, ancien gouverneur de Cochinchine[2].
Le Congrès est un succès : il crée des liens entre les participants qui décident d'organiser une seconde édition l'année suivante à Londres (une vingtaine de Congrès du même type ont ainsi lieu avant la Première Guerre mondiale, tous en Europe et une session à Alger en 1905) ; il contribue à institutionnaliser les études orientales (la Société des études japonaises, chinoises et tartares est ainsi créée dans la foulée, en novembre 1873) ; il renforce enfin la position de Léon de Rosny et de la Société d'ethnographie dans le champ scientifique face à la Société d'anthropologie de Paris[3].
Entre 1889 et 1894, les succès des Congrès conduisirent à un divorce au sein de la communauté orientaliste, certains participants, proche de la culture scientifique allemande et scandinave, souhaitant en rester à une approche académique de l'orientalisme, tandis que d'autres, plus proche de la tradition savante française, souhaitant continuer d'inclure les pratiques orientalistes amateurs. Deux congrès différents se tinrent ainsi à Londres, conformément à ces deux conceptions, l'un en 1891 et l'autre en 1892, avant une réunification de la communauté deux ans plus tard à Genève[1].
Liste des Congrès internationaux des orientalistes (1873-1973)
Dates des Congrès | Lieu des Congrès |
1873 | Paris |
1874 | Londres |
1876 | Saint-PĂ©tersbourg |
1878 | Florence |
1881 | Berlin |
1883 | Leiden |
1886 | Vienne |
1889 | Stockholm et Christiania |
1891 | Londres |
1892 | Londres |
1894 | Genève |
1897 | Paris |
1899 | Rome |
1902 | Hambourg |
1905 | Alger |
1908 | Copenhague |
1912 | Athènes |
1928 | Oxford |
1931 | Leiden |
1935 | Rome |
1938 | Bruxelles |
1948 | Paris |
1951 | Istanbul |
1954 | Cambridge |
1957 | Munich |
1960 | Moscou |
1964 | New Delhi |
1967 | Ann Arbor |
1971 | Canberra |
1973 | Paris |
Bibliographie
- Bénédicte Fabre-Muller, Pierre Leboulleux et Philippe Rothstein (dir.), Léon de Rosny (1837-1914) : de l'Orient à l'Amérique, Presses universitaires du Septentrion, 2014, p. 115-120.
- Pascale Rabault-Feuerhahn, "La science la robe au vent. Les congrès internationaux des orientalistes et la disciplinarisation des études orientales", dans Jean-Louis Chiss, Dan Savatovski (dir.), La Disciplinarisation de la linguistique. Histoire et épistémologie, Histoire épistémologie langage, n°5, 2012.
- Pascale Rabault-Feuerhahn, "Les grandes assises de l’orientalisme. La question interculturelle dans les congrès internationaux des orientalistes (1873-1912). La fabrique internationale de la science", Revue germanique internationale, n°12, 2010, p. 47-67.
- Julien Duchâteau, Une création scientifique française. Le Premier Congrès international des Orientalistes, Paris, Éditeurs Maisonneur et Cie, 1875.
Notes et références
- Pascale Rabault-Feuerhahn, « Les grandes assises de l’orientalisme. La question interculturelle dans les congrès internationaux des orientalistes (1873-1912). La fabrique internationale de la science », Revue germanique internationale, n°12,‎ , p. 47-67 (lire en ligne)
- Bénédicte Fabre-Muller, Pierre Leboulleux et Philippe Rothstein (dir.), Léon de Rosny (1837-1914) : de l'Orient à l'Amérique, Presses universitaires du Septentrion, , p. 115-120
- « Léon de Rosny et le Congrès international des orientalistes », L'Illustration, n°1559,‎ (lire en ligne)