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Classique (dans les arts)

Un classique est un artiste ou une œuvre d'art qui fait autorité dans son domaine, qui est devenu une référence. Il ne faut pas confondre ce sens avec l'emploi du mot comme adjectif en référence à une période artistique précise, comme le classicisme en littérature française ou la musique classique, ou à une époque historique, comme l'époque classique en Grèce antique. On parle des classiques de la littérature, de la peinture ou de la musique, mais aussi, le terme s'étant étendu aux arts plus récents, des classiques du cinéma, de la bande dessinée, etc.

La notion de classique est proche, mais distincte, de celle de chef-d'Ĺ“uvre. Les deux notions mettent en jeu la question de la postĂ©ritĂ© d'une Ĺ“uvre, mais ont des connotations diffĂ©rentes. Le terme de chef-d'Ĺ“uvre met l'accent sur le degrĂ© d'achèvement d'une Ĺ“uvre en elle-mĂŞme ou par rapport aux autres Ĺ“uvres d'un artiste, et met en jeu la notion de maĂ®trise de l'artiste, ou bien, dans une perspective romantique, son inspiration, voire son gĂ©nie. La notion de classique, en revanche, se rĂ©fère de manière plus large Ă  la rĂ©ception de l'Ĺ“uvre, Ă  la reconnaissance durable qu'elle obtient au sein de la sociĂ©tĂ© qui la reçoit, et Ă  l'importance qu'elle prend dans la culture dont elle fait partie. La notion de classique se prĂŞte donc davantage Ă  une approche du phĂ©nomène artistique relevant de l'histoire de l'art et de la sociologie. Elle est aussi en rapport Ă©troit avec l'Ă©ducation, car une dĂ©finition possible du classique est ce qui s'enseigne en classe : les programmes scolaires transmettent et Ă©tudient les classiques. Les Ĺ“uvres reconnues comme classiques constituent ainsi une « culture classique Â» ou « scolaire Â», que l'on peut distinguer de la culture populaire, de la contreculture, de l'underground, etc.

En ce sens, la notion de classique est liĂ©e Ă  la dĂ©finition mĂŞme de ce qui relève ou non d'un art donnĂ© : ainsi une Ĺ“uvre littĂ©raire dont la qualitĂ© ne fait pas l'unanimitĂ© pourra, selon les lecteurs et les critiques, relever ou non de la littĂ©rature. La dĂ©finition d'un corpus des Ĺ“uvres classiques, en particulier dans l'Ă©laboration des programmes scolaires, pose ainsi le problème de la pertinence de la critique d'art (sa capacitĂ© ou incapacitĂ© Ă  « reconnaĂ®tre Â» une Ĺ“uvre importante Ă  sa crĂ©ation) et de l'universalisme ou du relativisme des critères esthĂ©tiques selon les Ă©poques.

Critères et problèmes dans la définition des classiques

Plusieurs approches sont possibles :

  • Une approche relevant du jugement esthĂ©tique : les classiques sont les « meilleures » Ĺ“uvres et les « meilleurs Â» auteurs, les plus importants, par opposition avec les Ĺ“uvres et auteurs « mineurs Â». Cette approche pose le problème du choix des critères esthĂ©tiques permettant de juger de la qualitĂ© d'une Ĺ“uvre ou de l'importance d'un auteur.
  • Une approche d'histoire de l'art : les classiques sont les Ĺ“uvres dont le temps a consacrĂ© la qualitĂ© et l'autoritĂ©. Les classiques sont alors ce qui constitue la tradition, ce que l'on a jugĂ© important de conserver. Une Ĺ“uvre ne devient donc un classique qu'au fil de l'histoire de sa rĂ©ception par les gĂ©nĂ©rations successives, au fur et Ă  mesure qu'elle passe Ă  la postĂ©ritĂ© et suscite ou non un intĂ©rĂŞt durable. Cette approche a l'inconvĂ©nient de rendre impossible tout jugement sur le caractère classique des Ĺ“uvres rĂ©centes.
  • Une approche d'histoire de l'Ă©ducation : les classiques sont les Ĺ“uvres que l'on enseigne Ă  l'Ă©cole, qui font partie des programmes scolaires. Par exemple, en Grèce antique, dès l'Ă©poque classique, on enseignait Homère aux jeunes gens.
  • Une approche sociologique : les classiques constitueraient une culture propre Ă  une catĂ©gorie sociale donnĂ©e (ou, dans une perspective marxiste, Ă  une classe sociale donnĂ©e) d'une population.
  • Une approche institutionnelle : les classiques sont les artistes et les Ĺ“uvres qui ont obtenu des rĂ©compenses dans leur domaine (puisqu'il en existe pour tous les arts, en littĂ©rature, en théâtre, au cinĂ©ma, etc.).

Ces approches sont complémentaires, dans la mesure où aucune ne suffit à englober tous les aspects de la notion.

La dĂ©finition de ce qu'est un classique pose Ă©galement des problèmes d'Ă©chelle. Un classique est rĂ©putĂ© atteindre Ă  l'universalitĂ©, mais, dans le mĂŞme temps, on considère gĂ©nĂ©ralement les classiques comme les reprĂ©sentants par excellence d'une culture donnĂ©e. Cela pose donc la question de savoir si l'on doit raisonner en termes de langue, de peuple ou de nation (voire de rĂ©gion), de civilisation (il y aurait par exemple des classiques occidentaux — le « Western Canon Â» anglo-saxon[1] — et des classiques orientaux, asiatiques, africains[2], etc.), ou mĂŞme Ă  l'Ă©chelle mondiale. Alors que, pour certains espaces culturels, l’identitĂ© des classiques semblent Ă©vidente, elle peut en revanche poser problème dans certains cas[3]. En dehors des enjeux politiques de ces classements, la notion d'Ĺ“uvres classiques se rĂ©fère Ă  la notion de patrimoine culturel.

Notes et références

  1. Voir l'article anglais en:Western Canon et par exemple le livre de Harold Bloom, The Western Canon : The Books and School of the Ages, New York, Harcourt Brace & Company, 1994.
  2. Christiane Ndiaye, « De l’écrit à l’oral : la transformation des classiques du roman africain », Études françaises, vol. 37, no 2,‎ , p. 45-61 (lire en ligne)
  3. Par exemple, selon Kom Ambroise, la littérature africaine serait « une littérature qui a du mal à s’instituer et à élaborer des canons qui lui soient propres » (Kom Ambroise, « La littérature africaine et les paramètres du canon », Études françaises, vol. 37, no 2,‎ , p. 33-44 (lire en ligne)).

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

  • Sainte-Beuve, « Qu'est-ce qu'un classique ? Â» (article), 1850.
  • T. S. Eliot, « What is a Classic ? Â» (article), 1944.
  • Italo Calvino, Pourquoi lire les classiques (PerchĂ© leggere i classici), 1991.
  • Antoine Compagnon, « La valeur Â», in Le DĂ©mon de la thĂ©orie. LittĂ©rature et sens commun, Seuil, 1998.
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