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Charles Broche

Charles François Broche, né le à Rouen, où il est mort le , est un organiste et compositeur français.

Charles Broche
Charles Broche par Paul Dujardin d’après Eugène-Louis Charpentier.
Biographie
Naissance
Décès
(Ă  51 ans)
Rouen
Nationalité
Activités

Biographie

Né sur la paroisse de Saint-Étienne-des-Tonneliers à Rouen, Charles Broche était le fils du bedeau de cette paroisse. Les dispositions musicales du nouvel enfant de chœur se manifestèrent très nettement dès les premiers temps de son séjour à la maîtrise Saint-Evode de la cathédrale de Rouen. Ses rapides progrès et la supériorité dont il ne tarda pas à faire preuve vis-à-vis de ses camarades attirèrent l’attention de Desmazures, l’organiste de la cathédrale, qui vit là un tempérament d’artiste à développer, à conduire en pleine floraison, et il se chargea spontanément de l’entreprise. Ses leçons produisirent d’excellents résultats, et lorsqu’en 1772, Broche se prépara à quitter Rouen, à peine âgé de vingt ans, pour aller visiter la capitale, il était rompu aux plus sérieuses difficultés du jeu de l’orgue et du clavecin, et possédait une instruction musicale à l’avenant.

Arrivé à Paris, il fit la connaissance des célèbres organistes Couperin et de Nicolas Séjan, dont il reçut de précieux conseils, et par l’intermédiaire desquels il obtint une place d’organiste à Lyon. Le désir de compléter ses études de composition lui fit néanmoins bientôt abandonner ce poste pour prendre la direction de l’Italie, muni de lettres de recommandation pour divers personnages, notamment pour le sénateur Bianchi, lequel habitait Bologne. Celui-ci présenta Broche au Père Martini, dont l’école brillait alors de tout son éclat. Sous sa direction de ce maitre, Broche étudia le contrepoint et la fugue. Se faisant bientôt connaitre en exécutant dans les principales églises de ce pays de riches savantes compositions, il est appelé, après avoir subi les examens de rigueur, à siéger à côté de son maitre en se faisant recevoir membre de l’Académie philharmonique de Bologne. Après avoir ainsi couronné ses études, il parcourut ensuite l’Italie, visitant Rome et Naples, puis rentra en France, fit un nouveau séjour à Lyon, et revint enfin dans sa ville natale, après cinq ans d’absence.

Le moment était bien choisi car son ancien maitre Desmazures venant de prendre sa retraite, la place d’organiste de la cathédrale allait être mise au concours. Broche n’hésita pas à se mettre sur les rangs. Le concours eut lieu le ; malgré le talent déployé par ses adversaires, Montau et Morisset, Broche obtint l’unanimité des suffrages et fut mis en possession de l’orgue qu’avait occupé Desmazures pendant dix-neuf ans.

Ce fut lĂ  pour lui le point de dĂ©part d’une rĂ©putation sĂ©rieuse, justifiĂ©e par la valeur de l’artiste. Parmi les artistes parisiens du moment, SĂ©jan et Couperin, avec lesquels il Ă©tait demeurĂ© en relations Ă©pistolaires, le tenaient en grande estime. Ce dernier disait de Broche « qu’il Ă©crivait des doigts sur le clavier »[1]. Balbastre, l’éminent organiste et claveciniste, tant admirĂ© du public parisien, doit ĂŞtre citĂ© Ă©galement parmi les correspondants de Broche, lequel ne manqua pas de se crĂ©er aussi d’importantes relations dans le monde aristocratique. Sa rĂ©putation de virtuose ayant franchi les limites de sa ville, le duc de Bouillon devant lequel il avait si souvent improvisĂ© lui offrit, en Ă©change de ses services, une pension de 12 000 livres, que Broche, composant des motets et d’autres pièces de caractère volontiers plus bachique que religieux, ne voulut pas accepter, prĂ©fĂ©rant garder sa libertĂ© et son poste d’organiste Ă  Rouen.

Son jeu brillant et la richesse des improvisations auxquelles il aimait se livrer lui attiraient fréquemment des auditeurs du dehors. Les organistes parisiens, eux-mêmes, faisaient volontiers le voyage de Rouen pour l’entendre : « il improvisait merveilleusement dans tous les genres, et particulièrement dans le cantabile[2] ». Un jour, pour répondre à un défi que venaient de lui porter le chevalier de Saint-George et le célèbre corniste Giovanni Punto, il s’assit devant ses claviers et joua pendant cinq quarts d’heure, en improvisant sur un motif de trois notes, sans se répéter ni s’écarter de son sujet, et, ajoute-t-on, sans cesser de charmer ses auditeurs. On cite encore une certaine improvisation inspirée par la bataille de Jemmapes, et dans laquelle il fit, parait-il, des merveilles de musique imitative dans le gout de l’époque. Loin de dépenser toute sa puissance d’invention dans ces improvisations fugitives, il se livra avec assez d’ardeur à la composition pour publier successivement trois livres de sonates pour clavecin, mais il n’a fait imprimer que la moindre partie de ses compositions. Le premier fut dédié par lui au cardinal de Frankemberg, archevêque de Malines. Le deuxième livre parut en 1782, sous le titre Sonates pour le clavecin, avec accompagnement de violon, ad libitum, dédiées à S. A. S. Mgr le duc de Bouillon (Paris, Bignon). Le troisième livre, publié en 1787, est intitulé Trois sonates pour le clavecin, violon ad libitum (Paris, Boyer). Parmi les œuvres de Broche qui n’ont pas été gravées, figurent des concertos de clavecin, des trios, quatuors, cantates, etc. Son œuvre publié se réduit à des sonates, des trios, de quatuors et son morceau sur la bataille de Jemmapes. Ses canons, composés sur des paroles bachiques, étaient très prisés des amateurs ; on vantait surtout celui qui commençait par ce vers : « Buvons, amis, et vidons ce flacon. » Tous sont demeurés inédits.

Durant la RĂ©volution, il embrassa la thĂ©ophilanthropie, culte d’origine privĂ©e soutenu, pour assoir l’esprit rĂ©publicain, par le Directoire, notamment par le directeur La RĂ©vellière-LĂ©peaux, et dirigea les chĹ“urs et la musique des offices dirigĂ©s par l’imprimeur Guilbert Ă  Saint-Patrice. En tant que compositeur, Charles Broche fut un des premiers Ă  adopter le piano-forte en France. On se souvient Ă©galement de lui comme du premier maitre de Boieldieu, mĂŞme si la plupart des biographes de ce dernier ne paraissent avoir retenu de la personnalitĂ© artistique de virtuose, d’improvisateur fĂ©cond et de savant musicien de Broche pour ne retenir que ses habitudes d’intempĂ©rance et ses procĂ©dĂ©s brutaux envers son Ă©lève[3]. Il eut nĂ©anmoins le temps, avant sa fin prĂ©maturĂ©e, de voir le succès de son Ă©lève, dont il fut ravi. Il se permit, Ă  l’occasion du succès de la Fille coupable () et de Rosalie et Mirza en 1795, reprĂ©sentĂ©es Ă  Rouen, un calembour, disant qu’il trouvait le jeune musicien « très habile en fugues Â», pour avoir fait jouer ces deux opĂ©ras, Ă  Rouen, après son escapade Ă  Paris[4]. MalgrĂ© son gout prononcĂ© pour la dive bouteille et le fait qu’il se soit montrĂ© un des fidèles habituĂ©s de la taverne du Chaudron, oĂą l’on chantait ses canons bachiques, après sa fin prĂ©maturĂ©e, le secrĂ©taire de correspondance de la SociĂ©tĂ© libre d'Ă©mulation de Rouen, Louis-Robert de Saint-Victor, s’empressa d’écrire un article nĂ©crologique sur lui tandis que la SociĂ©tĂ© chargeait l’un de ses membres, Vincent Guilbert, de rĂ©diger une note dĂ©taillĂ©e sur sa vie et ses travaux de Broche, laquelle notice fut lue dans une des sĂ©ances. Plus tard, le portrait du musicien fut placĂ© dans la grande salle de l’HĂ´tel-de-Ville de Rouen.

Notes et références

  1. Dans une lettre qu’il lui adressait en octobre 1782, il écrivait : « J’ai eu bien du plaisir, il y a quinze jours, de rencontrer quelqu’un à Versailles. C’est M. Platel, superbe basse-taille de la chapelle, qui arrivait de Rouen, encore plein du plaisir qu’il venait de gouter avec vous. il m’avait parlé d’un inviolata que vous avez touché pour lui. Où étais-je ? »
  2. Louis-Robert de Saint-Victor, Notice chronologique sur Broche, organiste de la cathédrale de Rouen.
  3. Arthur Pougin, Boieldieu, sa vie, ses œuvres, son caractère, sa correspondance : Édition ornée d’un portrait de Boieldieu, etc., Paris, .
  4. Jules Édouard Bouteiller, Boieldieu à Rouen, Rouen, Giroux & Fourey, 1875, 2e éd., 102 p., in-8 ° (lire en ligne), p. 7.

Bibliographie

Références

  • Emma Chuppin de Germigny, État de la musique en Normandie, depuis le IXe siècle jusqu’à nos jours, Caen, Pagny, 1837.
  • Pierre-Jean-Michel Fallouard, Les Musiciens normands : esquisse biographique comprenant les noms des artistes musiciens les plus cĂ©lèbres nĂ©s en Normandie du XIe au XIXe siècle, Honfleur, Baudre, 1857.
  • Jules Carlez, Notices sur quelques musiciens rouennais, Caen, F. Le Blanc-Hardel, 1885.
  • Romain Amand Collette, Notice historique sur les orgues et les organistes de la cathĂ©drale de Rouen, Caen, Cagniard, 1885.
  • Georges Favre, « Un organiste de la cathĂ©drale de Rouen : Charles Broche (1752-1803) Â», Revue de musicologie, 1937.
  • Vincent Guilbert, MĂ©moires biographiques et littĂ©raires, Rouen, Mari, 1812.
  • Vincent Guilbert, Notice historique sur le citoyen Broche, lue par le citoyen Guilbert, dans la sĂ©ance du 15 frimaire an XII, de la SociĂ©tĂ© libre d’émulation pour le progrès des sciences, des lettres et des arts, Rouen, [S.n.] an XII.
  • Pierre de Moucheron, Les musiciens normands, Alençon, Herpin, 1894, 40 p., 24 cm.
  • Louis-Robert de Saint-Victor, Notice chronologique sur Broche, organiste de la cathĂ©drale de Rouen.

Sources

  • ThĂ©odore-Éloi Lebreton, Biographie normande : recueil de notices biographiques et bibliographiques sur les personnages cĂ©lèbres nĂ©s en Normandie et sur ceux qui se sont seulement distinguĂ©s par leurs actions et par leurs Ă©crits, Rouen, Le Brument, 1857-1861, 549 p. (lire en ligne), p. 232.

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