Chant choral serbe
Le chant choral serbe est pratiqué dans le cadre religieux par des chorales orthodoxes se référant à la tradition serbe.
Historique
Les premiers chants chrĂ©tiens ont Ă©tĂ© faits Ă partir des psaumes de lâAncien Testament et chantĂ©s lors de la liturgie. LâapĂŽtre Paul avait dâailleurs Ă©crit dans le Nouveau Testament : « Chantez quand vous ĂȘtes ensemble, cĂ©lĂ©brez Dieu dans les hymnes et chants spirituels ». Des hymnes sont Ă©crites au IVe siĂšcle apr. J.-C. par des poĂštes pour cĂ©lĂ©brer Dieu et les Saints lors des fĂȘtes liturgiques, dans un contexte oĂč le Christianisme sort de trois siĂšcles de persĂ©cution et est enfin acceptĂ© dans lâEmpire romain.
Le chant orthodoxe naĂźt avec la crĂ©ation du Royaume de Byzance et se distingue avec lâintroduction des mĂ©lismes, esthĂ©tique propre au chant oriental, ainsi que les chants de 8 tons qui sâinspirent du monde grec ancien et Ă lâesprit des priĂšres. Lâusage du chant dans les offices permet de maintenir lâattention et de prier de tout son ĂȘtre tout au long de la cĂ©lĂ©bration, dâune durĂ©e de deux heures. Le chant byzantin sâest dĂ©veloppĂ© dans la partie orientale de lâEurope actuelle, en GrĂšce, dĂšs les premiĂšres annĂ©es de la christianisation. Son systĂšme tonal sâest dĂ©veloppĂ© entre les IVe et VIIIe siĂšcles, en sâinspirant de la thĂ©orie musicale de la GrĂšce antique. De ces bases musicales se sont dĂ©veloppĂ©s des « canons » musicaux Ă partir desquels de multitudes mĂ©lodies ont Ă©tĂ© crĂ©Ă©es puis adaptĂ©es selon les rĂ©gions. En Serbie, lâorthodoxie sâest rĂ©pandue au XIIe siĂšcle, et le rĂ©pertoire musical grec a Ă©tĂ© transmis puis traduit en langue slave. Câest au XVe siĂšcle que les moines ont commencĂ© Ă composer de nouvelles mĂ©lodies. Les compositions serbes sont dâailleurs connues de toute la tradition musicale byzantine.
Sous la pĂ©riode ottomane qui a durĂ© prĂšs de 500 ans, les orthodoxes serbes nâont pas eu lâautorisation de copier le rĂ©pertoire de chants liturgiques et la tradition sâest alors perpĂ©tuĂ©e Ă lâoral. Pour cette raison, les chants byzantins serbes sont donc sensiblement distincts des autres traditions orthodoxes oĂč les chants Ă©taient transcrits sur des partitions et sensiblement moins modifiĂ©s que les chants transmis Ă lâoreille. Au XVIIIe siĂšcle, les liens entre la Serbie et le royaume austro-hongrois ont amenĂ© plusieurs compositeurs serbes Ă suivre des formations en Occident. Certains de ceux-ci ont transcrit sur partition des chants religieux de la liturgie serbe Ă la notation occidentale, plus largement utilisĂ©e. Ce fut le cas de lâOctoĂšque. Sous lâinfluence occidentale, le bourdon du chant byzantin a parfois Ă©tĂ© supprimĂ© des chants. Les compositeurs ont aussi intĂ©grĂ© la polyphonie Ă quatre voix sur les rĂ©pertoires populaires serbes. Câest ce qui est majoritairement chantĂ© Ă lâĂ©glise aujourdâhui. La langue a Ă©voluĂ© en passant du slavon au serbe, et mĂȘme si la liturgie a Ă©tĂ© traduite dans la langue actuelle, la plupart des chants ont Ă©tĂ© conservĂ©s en slavon, et sont traduits peu Ă peu dans la langue parlĂ©e aujourdâhui.
La Serbie est le lieu dâune rencontre culturelle entre lâOrient et lâOccident et caractĂ©rise une musique issue de ces Ă©changes : les mĂ©lodies proviennent de Byzance, et sous lâinfluence de la musique occidentale, elles ont parfois Ă©tĂ© simplifiĂ©es et les modes musicaux occidentalisĂ©s.
« CC BY-SA 3.0 FR », sur culturecommunication.gouv.fr/Mentions-legales, (consulté le )
RĂ©pertoire
Les cĂ©lĂ©brations religieuses sont composĂ©es de textes lus par les autoritĂ©s religieuses (prĂȘtres ou diacres) et des chants de la chorale. Ces chants sont des hymnes ou des psaumes. Le rĂ©pertoire est dĂ©composĂ© en livres. Les chants du dimanche sont par exemple rĂ©pertoriĂ©s dans lâOctoĂšque.
Les chants sont souvent divisĂ©s en « tons » ou « modes ». Dans la plupart des cas, chaque semaine a un ton particulier. Certains livres proposent des chants pour les fĂȘtes religieuses fixes. Dans une annĂ©e chrĂ©tienne serbe, les livres sont alternĂ©s en fonction des diffĂ©rents temps religieux.
Tradition byzantine slave
La tradition byzantine veut que les chants ne soient chantĂ©s que dâune seule voix, accompagnĂ©e dâun bourdon[1]. Ce sont des chants traditionnels dont la musique est encore Ă©crite selon la mĂ©thode orientale. Cette mĂ©thode permet au chanteur dâadapter un peu la mĂ©lodie selon sa volontĂ©, cela permet une interprĂ©tation assez libre. Il existe un certain nombre de mĂ©lodies sur lesquelles vont venir se coller plusieurs textes. Le chanteur doit donc connaitre les mĂ©lodies, pour ensuite y adapter des textes diffĂ©rents. Ceci est une particularitĂ© du chant serbe que les autres pays orthodoxes, notamment la Russie ou la GrĂšce, ne pratiquent pas.
Polyphonie
La polyphonie est Ă©galement prĂ©sente dans les chorales serbes. Plusieurs voix chantent ensemble un rĂ©pertoire plus rĂ©cent et moderne. Lorsque la Serbie se rapprocha de lâAutriche-Hongrie au XIXe siĂšcle, beaucoup de compositeurs serbes y vinrent Ă©tudier la musique occidentale et adaptĂšrent leurs chants traditionnels selon ces nouveaux codes[2].
Câest ce type de chant qui est actuellement majoritairement pratiquĂ© dans lâĂglise orthodoxe serbe.
Pratique du chant choral serbe en France
Le chant choral serbe Ă Paris *
| |
Domaine | Pratiques rituelles |
---|---|
Lieu d'inventaire | Ăle-de-France Paris 18e arrondissement de Paris |
* Descriptif officiel MinistĂšre de la Culture (France) | |
La pratique du chant choral serbe est inscrite Ă lâInventaire du patrimoine culturel immatĂ©riel en France[3] car elle est exercĂ©e, notamment Ă Paris, dans les communautĂ©s orthodoxes françaises. Les chorales, en particulier celle de la communautĂ© de Saint-Sava, se rĂ©unissent souvent les dimanches matin pour chanter ensemble la liturgie Ă partir de rĂ©pertoires orthodoxes de diffĂ©rents pays pratiquant cette religion. Le chant orthodoxe se pratique « a cappella ».
Historique
La chorale Saint-SimĂ©on a Ă©tĂ© fondĂ©e en 2000. Elle regroupe actuellement une quinzaine de membres en majoritĂ© dâorigine serbe. On y retrouve toutefois quelques chanteurs dâorigine française et gĂ©orgienne. La chorale a dĂ©jĂ enregistrĂ© un album de chants religieux quâelle avait vendu Ă 3000 exemplaires. Elle enregistre actuellement un second album, qui rĂ©pondra au souhait de plusieurs dâĂ©couter de la musique sacrĂ©e en dehors de la liturgie et servira aussi de cartes de visite pour les concerts quâelle offre Ă lâoccasion dans dâautres Ă©glises. Cela permettra Ă ceux qui sâintĂ©ressent Ă la culture serbe et/ou Ă lâorthodoxie de sây introduire. La chorale se rĂ©unit pour la liturgie du dimanche. Dans dâautres Ă©glises, certaines chorales chantent aussi les samedis matin ou encore Ă lâoccasion des vĂȘpres le soir. Ce nâest pas le cas Ă lâĂ©glise Saint-Sava. Quelques Ă©tudiants en thĂ©ologie Ă lâInstitut Saint-Serge, dont certains sont aussi membres de la chorale Saint-SimĂ©on dâailleurs, participent aux vĂȘpres du samedi soir et favorisent lâintĂ©gration du chant byzantin qui est plus difficile Ă apprendre et Ă maĂźtriser. Les vĂȘpres constituent une occasion de chanter un rĂ©pertoire plus traditionnel Ă lâĂ©glise Saint-Sava.
« CC BY-SA 3.0 FR », sur culturecommunication.gouv.fr/Mentions-legales, (consulté le )
Description de la chorale Saint-Siméon
La chorale Saint-SimĂ©on, nommĂ©e en lâhonneur du pĂšre de saint Sava, regroupe une quinzaine de membres qui se rĂ©unissent les dimanches matin pour chanter et cĂ©lĂ©brer la liturgie. DirigĂ©e par Nana Peradze, dâorigine gĂ©orgienne, la chorale chante un rĂ©pertoire liturgique des traditions orthodoxes de diffĂ©rents pays. En gĂ©nĂ©ral, les chants sont en slavon, mais on introduit de plus en plus au rĂ©pertoire des piĂšces en dâautres langues, dont certaines en français.
Le répertoire des chants
Les priĂšres dominicales sont regroupĂ©es dans lâOctoĂšque, « ĐŸŃĐŒĐŸĐłĐ»Đ°ŃĐœĐžĐș », un livre qui prĂ©sente des textes rĂ©citĂ©s et chantĂ©s qui sont divisĂ©s en « 8 tons », ou « 8 modes » mĂ©lodiques du plain-chant chez les Orthodoxes. Les mĂ©lodies se ressemblent sensiblement entre les 1er et 5e tons ; entre les 2e et 6e tons ; les 3e et 7e tons, ainsi que les 4e et 8e tons. Dans ces parties fixes de la liturgie, les priĂšres de chacun des tons sont les mĂȘmes ; seules les mĂ©lodies changent. Chaque semaine a son propre ton, et on passe Ă un nouveau ton le samedi soir avec les Vigiles. Chaque jour est dĂ©diĂ© Ă un Saint ou au Christ : par exemple, le lundi est consacrĂ© aux Anges, le mardi Ă saint Jean-Baptiste, le mercredi et le vendredi Ă la passion du Christ, ces jours Ă©tant dâailleurs des jours de carĂȘme, le jeudi aux apĂŽtres et Ă saint Nicolas, le samedi pour les dĂ©funts (tous les saints) et le dimanche Ă la rĂ©surrection. Les priĂšres chantĂ©es se trouvant dans l'OctoĂšque sont dĂ©diĂ©es Ă ces saints.
Dâautres livres rassemblent les chants pour les fĂȘtes fixes : les fidĂšles ont recours au Livre des MĂ©nĂ©es, « ĐŒĐžĐœĐ”Ń Â» ou Livre des 12 temps, pour toutes les fĂȘtes du cycle pascal annuel, ainsi quâau Triode, « ŃŃĐžĐŸĐŽ », pour la pĂ©riode de carĂȘme prĂ©cĂ©dant PĂąques et le Pentecostaire pour la pĂ©riode entre PĂąques et la PentecĂŽte. De plus, il existe un rĂ©pertoire diversifiĂ© de chants, Ă©crits par diffĂ©rents compositeurs, associĂ©s Ă certaines fĂȘtes fixes comme NoĂ«l, par exemple. Au cours du cycle liturgique annuel, on alterne les livres selon les temps religieux. On retrouve aussi dans ces diffĂ©rents livres un systĂšme de huit tons musicaux pour ces chants, mais sauf coĂŻncidence, ils ne correspondent pas aux 8 tons de l'OctoĂšque.
« CC BY-SA 3.0 FR », sur culturecommunication.gouv.fr/Mentions-legales, (consulté le )
Apprentissage et transmission
Ătant donnĂ© quâune partie des membres de la chorale Saint-SimĂ©on ne sait lire la musique, on enseigne les chants liturgiques Ă lâoreille, voix par voix. Les deux voix de femmes sont les sopranos et altos, et les deux voix dâhommes sont les tĂ©nors et les basses. Ce sont les chants polyphoniques qui sont pratiquĂ©s dans la chorale, car la tradition byzantine est moins facile Ă maĂźtriser. Alors que le rĂ©pertoire du chant polyphonique est Ă©crit Ă la notation occidentale, celui du chant byzantin est transmis de façon orale. Certains membres de lâĂ©glise ont Ă©tĂ© initiĂ©s Ă cette façon de « tisser » les psaumes sur les mĂ©lodies tout jeunes en chantant dans la chorale de leur Ă©glise alors quâils vivaient en Serbie. Aujourdâhui, le chant choral, dont le chant byzantin et sa notation particuliĂšre, est enseignĂ© Ă lâInstitut Saint-Serge dans le cadre dâun sĂ©minaire, mais on y apprend la tradition russe oĂč cette particularitĂ© du « tissage » musical est moins prĂ©sente. Certains Ă©tudiants souhaitent chanter avec des membres de lâĂ©glise et profitent donc des vigiles du samedi soir pour les initier au rĂ©pertoire byzantin. Depuis un an, ils offrent des cours en petits groupes aux intĂ©ressĂ©s une heure avant les vigiles. De plus en plus de personnes de la chorale sây intĂ©ressent , dâailleurs.
« CC BY-SA 3.0 FR », sur culturecommunication.gouv.fr/Mentions-legales, (consulté le )
Références
- Chant choral serbe, fiche dâinventaire du patrimoine culturel immatĂ©riel, 2010, p.2
- Centre culturel de Serbie
- Fiche dâinventaire du « Chant choral Serbe » au patrimoine culturel immatĂ©riel français, sur culturecommunication.gouv.fr (consultĂ©e le 28 octobre 2015)