Château de Cricqueville-en-Auge
Le château de Cricqueville-en-Auge est une demeure qui se dresse sur la commune française de Cricqueville-en-Auge dans le département du Calvados, en région Normandie.
Type | |
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Fondation |
XVIe siècle |
Patrimonialité |
Classé MH (, ) Inscrit MH (, ) |
Adresse |
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Coordonnées |
49° 14′ 30″ N, 0° 03′ 50″ O |
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Le château est partiellement protégé aux monuments historiques.
Localisation
Le château est situé à 150 m au nord-ouest de l'église sur la commune de Cricqueville-en-Auge, dans le département français du Calvados.
Historique
Le château actuel date du XVIe siècle. Il a été probablement construit à l'emplacement d'un château fort dont les douves ont presque entièrement disparu[1]. Aux XIIIe et XIVe siècles le fief appartenait à la famille de Silly. A la fin du XVe siècle c'est la famille de Launay, patronyme aussi orthographié Launoi, Lannoy ou Launoy[2], qui en prend possession. En 1497 le registre de la chambre des comptes présente un Guillaume de Lannoy comme étant écuyer, seigneur de Criqueville[3]. En 1540 la Recherche des élus de Lisieux[note 1] prouve que le seigneur de Cricqueville, ce même de Launay ou son héritier marié à Marguerite le Veneur, avait un ancêtre anobli en 1467[5]. Au XVIe siècle Robert de Launay, fils de Marguerite le Veneur, grande famille normande, épouse la riche héritière Marguerite Richard. Il est nommé gentilhomme de la chambre et chevalier de l'ordre Saint-Michel grâce aux services rendus sous les ordres du Lieutenant du roi Tanneguy le Veneur. C'est lui qui construit le château dont les hautes tours témoignent de son prestige et de sa richesse. Le château et le fief restent en possession de sa famille au moins jusqu'en 1668.
C'est Adrien Bence, conseiller et secrétaire du roi, seigneur du Breuil-en-Auge qui devient aussi seigneur de Cricqueville avant 1675[2]. Mort en 1696, il laisse ses biens à sa fille Jeanne Philippe, épouse de Claude de la Fond dont les descendants gardent le patronage de l'église de Cricqueville jusqu'au XVIIIe siècle [6].
Au XIXe siècle, la famille Chevallier devient propriétaire du château et de ses dépendances [7]. Jean-Baptiste Chevallier, avocat à la cour d'appel de Paris, maire de Cricqueville est aussi conseiller général de 1877 à 1883[8]. En 1889, il est démis de son mandat de maire par le gouvernement pour avoir rendu visite au Comte de Paris exilé en Angleterre. Il est aussitôt réélu à l'unanimité par le conseil municipal[9]. Le château reste propriété des Chevallier jusqu'au début des années 1930. La famille Lecoeur en fait ensuite l'acquisition[10]
Description
Un portail de plein cintre ferme l'accès à la propriété close par des murs de pierre et une ligne ininterrompue de communs. Un petit étang s'étale au sud du logis, dans ce qui était la basse cour du manoir d'origine.
Le logis
D'après les études dendrochronologiques de la charpente, une partie du château date de la fin du XVe siècle[11]. Mais comme la plupart des constructions très anciennes, le bâtiment principal a subi des transformations ; des extensions au XVIe siècle[12], et des rénovations au XVIIIe siècle[13]. La singularité du logis se situe dans le contraste entre le côté nord et le côté sud du bâtiment. La façade nord est colorée d'un damier alternant le rouge de la brique avec le blanc crème de la pierre de taille. Ses trois pavillons carrés aux très hautes toitures surplombent la façade sud recouverte d'un enduit uniforme et encadrée par deux tours octogonales plus modestes.
La face nord présente un appareil en brique et pierre de taille très usité en Normandie du XVe au XVIIe siècle et particulièrement répandu en Pays d'Auge[14]. la façade ornée d'un damier polychrome est restée dans son état d'origine du XVIe siècle. Le pavillon central, plus haut que les deux autres, contient l'escalier. Les toits à pans coupés de ces trois pavillons, comparables à ceux des châteaux de Fontaine-Henri ou de Lion-sur-Mer sont d'une hauteur remarquable mais non exceptionnelle car de nombreux châteaux, hôtels ou clochers en ont été pourvus en Normandie à la Renaissance[1]. Les damiers dessinés par l'assemblage de briques et pierres des murs de cette façade rappellent ceux de la poterne du château du Bais à Cambremer ou ceux du manoir de Querville. Entre la tour est et la tour centrale une petite galerie, ou portique dont les trois baies en plein-cintre sont ouvertes directement sur le jardin, rehausse le prestige de l'édifice[15] - [16]. Un bandeau de pierre délimite les étages. Des lucarnes à ailerons éclairent les hauts combles des tours dont les toitures en ardoise sont soulignées par des corniches portées par de grosses consoles[15]. Les fenêtres alignées horizontalement et verticalement sont hautes et étroites confèrant une austérité démentie par la vivacité des couleurs de la brique et des tuiles du corps de logis.
La façade sud se transforme au XVIIIe siècle. La famille Bence entreprend des modifications qui donnent au château un aspect plus contemporain de cette époque[17]. Un crépi recouvre la façade sud dont le rez-de-chaussée était originellement semblable à celle de la façade nord. L'étage était à pans de bois en léger encorbellement. Des fenêtres à deux vantaux ont été ouvertes dans les deux niveaux[13]. Les quatre lucarnes de pierre percées dans le toit en ardoise encadrent un fronton triangulaire à l'aplomb de la porte d'entrée[12]. Les tours octogonales postées de chaque côté sont de même hauteur que le corps de logis et sont pareillement couvertes d'ardoises.
A l'intérieur
Les éléments les plus remarquables sont les quatre cheminées monumentales à manteau plat et corniche saillante dont les pourtours sont abondamment décorés de motifs floraux, de godrons, de torsades et de palmettes. Les piedroits de deux de ces cheminées sont ornés de cariatides d'inspiration exotique avec leurs coiffures garnies de plumes et de perles qui connurent une grande vogue au XVIe siècle grâce aux voyages des navigateurs normands vers l'Amérique du Sud . La cheminée du rez-de-chaussée porte la date 1584 ainsi que les armes de Robert de Launay et de son épouse Marguerite Richard.
Les communs
Les communs ont été restaurés à diverses époques, mais le pressoir et son grenier à pommes accessible par un escalier extérieur a gardé une structure à pans de bois. La bergerie, l'écurie, les étables ne sont plus utilisées pour abriter des animaux. Le colombier octogonal mentionné dans un procès-verbal du 20 février 1793 a disparu[17].
Protection aux monuments historiques
Au titre des monuments historiques[18] :
- le château, à l'exclusion des parties classées, est inscrit par arrêté du ;
- les façades, à l'exclusion de la façade postérieure, et les toitures correspondantes sont classées par arrêté du ;
- les façades et les toitures des communs sont inscrites par arrêté du ;
- les quatre cheminées du XVIe siècle (l'une au rez-de-chaussée adossée au mur pignon est et les trois autres à l'étage) sont classées par arrêté du .
Notes et références
Notes
- La reconnaissance de noblesse dûment justifiée par les lettres accordées par le roi, donnait droit à l'exemption fiscale[4].
Références
- Lescroart 2000, p. 173.
- Henri Pellerin, « Le château de Cricqueville-en-Auge », Le Pays d'Auge, no 8,‎ , p. 5.
- Gilles-André de la Roque de la Lontière, Histoire généalogique de la maison d'Harcourt, t. 2, Paris, S. Cramoisy, (lire en ligne), p. 1549.
- Katia Béguin, « Le droit fiscal d’Ancien Régime : les dynamiques de la fiscalité, du privilège et de la dette », Grief, no 1,‎ , p. 161 à 171, par.14 (lire en ligne, consulté le ).
- Jacques de Cahaignes(1548-1620), Eloge des citoyens de la ville de Caen : Traduction d'un curieux, Caen, Leblanc-Hardel, (lire en ligne), p. 368.
- Jean Marie Thiébaud, « LES INTENDANTS DE FRANCHE-COMTÉ DE 1674 À LA RÉVOLUTION », Éditions de l'Harmattan,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- Henri le Court, La Normandie monumentale et pittoresque,Calvados, partie 2, (lire en ligne), p. 62.
- « Annuaire du Calvados », sur Archives du Calvados, (consulté le ), p. 193, média 105.
- « Une leçon au gouvernement », Courrier de Tarn et Garonne,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- « Cricqueville-en-Auge », sur Normandie, Pays-d'Auge tourisme (consulté le ).
- Jean Bergeret, « Cheminées, Cricqueville-château fin XVIe siècle », Le Pays d'Auge, no 5,‎ , p. 25-26.
- « château de Cricqueville en Auge, 2018-2019 », sur Cegele Architecture, agence spécialisée dans la réhabilitation et conservation de monuments historiques (consulté le ).
- Lescroart 2000, p. 174-175.
- Couzy 1974, p. 118.
- Couzy 1974, p. 126.
- jean Guillaume, « La galerie dans le château français : place et fonction », Revue de l'art, no 102,‎ , p. 32 (lire en ligne, consulté le ).
- Couzy 1974, p. 138.
- « Château », sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.
Annexes
Bibliographie
- Arcisse de Caumont, Statistique monumentale du Calvados, t. 4 : Arrondissement de Pont-l'Évêque, Caen, Hardel, (lire en ligne), p. 107-110
- Yves Lescroart, Régis Faucon (photos), Manoirs du Pays d'Auge, Éditions Place des Victoires, (ISBN 2844590233), p. 173 à 177
- Hélène Couzy, « Les châteaux de Criqueville et de Victot et l'architecture polychrome en Normandie », Congrès archéologique de France,‎ , p. 118 à 138 (lire en ligne, consulté le ).>