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Cantoniste

Les cantonistes (russe : кантонисты kantonisty) désignent, dès 1721, les fils de conscrits de l’armée russe, engagés eux-mêmes pour une durée de vingt-cinq ans et éduqués dans les « écoles cantonales » (russe : кантонистские школы kantonistskie skoly) en préparation de leur service militaire. Mais à partir de 1827, les minorités ethniques - et particulièrement les Juifs - sont contraints d'y enrôler leurs enfants mâles dès l'enfance, qui sont envoyés loin de leurs provinces natales afin ce faisant, de les convertir au christianisme orthodoxe. Le système cantoniste est aboli en 1857.

Cantoniste.

Présentation

À partir de 1827, un décret oblige les minorités ethniques à y enrôler leurs enfants, à l’âge de douze ans. Le décret est appliqué avec un zèle particulier aux Juifs et aux Karaïtes[1]. Coupés de leurs familles et du judaïsme, ils sont soumis à des pressions intenses en vue de les convertir au christianisme orthodoxe.

L'article 219 du tome XV du Code pénal de l'Empire stipulait que les mineurs orthodoxes dont les parents ou tuteurs les ont autorisés à accomplir des cérémonies religieuses juives ou hérétiques devaient être envoyés, pour ceux aptes, dans les bataillons de cantonistes[2] ; par exemple, un oukaze du incorpora les Subbotniks mineurs à ces corps[3].

Historique

(en)Herzel Yankel Tsam, enrôlé à l'armée à l'âge de 17 ans, promu seulement capitaine après 41 années de service mais sans jamais pouvoir s'élever au-delà ; l'un des très rares officiers juifs de l'Empire russe du XIXe siècle qui ne se convertirent jamais au christianisme malgré les pressions.

Le terme de « cantoniste » est à l’origine appliqué aux fils des militaires de carrière russes, éduqués de 1805 à 1827 dans des « écoles cantonales » pour leur futur service militaire. Cependant, à la date du , un statut contraint les enfants juifs mâles à effectuer leur service militaire à partir de l’âge de douze ans - dans la pratique, les enfants juifs sont souvent enrôlés dès l'âge de huit ou neuf ans[4] - et à être placés dans les écoles cantonales de provinces éloignées pour leur formation militaire[5]. « Cantoniste » ne désigne désormais plus qu’eux.

Les fils des soldats juifs sont, à cette époque, considérés comme propriété du gouvernement. Durant le règne de Nicolas Ier, le gouvernement met un zèle particulier à leur appliquer ce statut car il est plus facile de les convertir au christianisme orthodoxe que leurs aînés dont les principes religieux sont mieux établis. La meilleure méthode est de les éloigner de leur lieu de naissance (ceux de Kiev sont envoyés à Perm, ceux de Brest à Nijni-Novgorod, etc.) et de les soumettre à une intense propagande missionnaire de la part des officiers de l’armée. Des témoins oculaires rapportent en outre les mauvais traitements dont les cantonistes sont victimes[Note 1].

S’agissant d’une mesure antisémite d’État, les plaintes sont sans effet. Cependant, les méthodes employées pour forcer les Juifs à se convertir sont critiquées à travers l’Europe. Pressé par l’opinion publique internationale, Alexandre II abolit le système cantoniste en 1857, à la suite de la défaite russe dans la guerre de Crimée[6] - [7].

Statistiques

Recrues juives, de 1843 à 1854 : 29 115[8].

Année Nombre de recrues
1843 1 490
1844 1 428
1845 1 476
1846 1 332
1847 1 597
1848 2 265
1849 2 612
1850 2 445
1851 3 674
1852 3 351
1853 3 904
1854 3 611

Notes et références

Notes

  1. Le philosophe et publiciste Alexandre Herzen confia ainsi avoir vu un convoi de cantonistes dont le conducteur dit que le tiers avait péri en chemin, et que la moitié des survivants n'arriverait pas vivante à destination.

Références

  1. Shaul Stampfer, « Review of Karaite Separatism in Nineteenth-Century Russia: Joseph Solomon Lutski's Epistle of Israel's Deliverance », The Russian Review, vol. 54, no 4, , p. 628–630 (ISSN 0036-0341, DOI 10.2307/131633, lire en ligne, consulté le )
  2. Fircks, 1863, p. 204
  3. Fircks, 1863, p. 220
  4. (en) Tzvi Rabinowicz, The world of Hasidism, (ISBN 0-87677-005-7 et 978-0-87677-005-4, OCLC 92896, lire en ligne), p. 132
  5. (en) Thomas E. Sawyer, Jewish Minority in the Soviet Union, Folkestone, Dawson Publishing, , 1re éd., 375 p. (ISBN 978-0-7129-0888-7), p. 105-106
  6. « CANTONISTS - JewishEncyclopedia.com », sur www.jewishencyclopedia.com (consulté le )
  7. « Cantonists | Encyclopedia.com », sur www.encyclopedia.com (consulté le )
  8. (ru) Кантонисты (Cantonists) article in the Electronic Jewish Encyclopedia, based on the Shorter Jewish Encyclopedia. Jerusalem, 1976-2005: the Society for Research on Jewish Communities in cooperation with the Hebrew University of Jerusalem

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Simon Dubnow, The Newest History of the Jewish People, 1789-1914 Vol. 2 (Russian ed. (ISBN 5-93273-105-2)) p. 141-149, 306-308
  • CANTONISTS, by Herman Rosenthal at Jewish Encyclopedia, 1901-1906
  • Benjamin Nathans, Beyond the Pale: The Jewish encounter with late imperial Russia (University of California Press, Berkeley, CA. 2002). p. 26-38
  • (en) Yohanan Petrovsky-Stern, Drafted into Modernity: Jews in the Russian Army (1827-1917) (Stanford University Press, 2007-8)
  • (en) Larry Domnitch, The Cantonists: The Jewish Children's Army of the Tsar (Devora Publishing, 2004). (ISBN 1-930143-85-0)
  • Theodor von Fircks, Études sur l'avenir de la Russie, vol. 7 : La tolérance et le schisme religieux en Russie, Bruxelles, Behr, , 435 p. (lire en ligne)
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