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Calcul canonique de la date de Pâques grégorienne

L'adoption, en 1582, de la réforme du calendrier julien promue par le Pape Grégoire XIII entraînait inévitablement des modifications du calcul de la date de Pâques. La suppression d'une année bissextile tous les quatre cents produisait des décalages entre le cycle solaire et le cycle lunaire qui devaient être pris en compte. De plus, les astronomes Clavius et Lilius, attachés au Pape Grégoire XIII, profitèrent de la réforme pour introduire une correction du Cycle de Méton dont on savait depuis longtemps qu'il n'était qu'une approximation. La suppression de 3 jours bissextiles tous les quatre cents ans se traduit dans le calcul de la date de Pâques par un décalage appelé métemptose. De plus, la correction du cycle de Méton conduit également à un décalage appelé proemptose.

Le calcul grégorien de la date de Pâques n'est pas une création ex nihilo mais une modification du calcul de la date de Pâques julienne. Le principe de ce calcul consiste à mettre en correspondance le cycle solaire (appelé aussi équation solaire), qui permet de calculer quels jours de l'année sont des dimanches, et le cycle lunaire (appelé aussi équation lunaire) permettant, lui, de déterminer la date des Nouvelles Lunes. Pour une année donnée, l'équation solaire est caractérisée par la Lettre dominicale qui spécifie le premier dimanche de janvier ; elle donne le moyen de calculer les jours de l'année qui sont un dimanche, en particulier en mars et avril. L'équation lunaire est caractérisée par l'épacte, c'est-à-dire l'âge de la Lune au 1er janvier ; celle-ci permet de fixer les dates des Nouvelles Lunes de l'année, en particulier pour mars et avril. À l'aide de ces termes on détermine le dimanche qui tombe immédiatement après le quatorzième jour de la Lune qui tombe ou qui suit immédiatement le . Les nouveautés apportées par le calendrier grégorien ont été reportées sur l'épacte. Des règles de saut d'épacte appliquent à l'épacte les décalages de la date de Pâques dus à la métemptose et à la proemptose.

Calcul détaillé

Références [1] - [2]:

L'épacte grégorienne

Dans le comput grégorien, l'épacte est l'âge de la Lune au 1er janvier -1. C'est-à-dire que si la dernière Nouvelle Lune de l'année précédente a lieu le , l'épacte de l'année courante vaut 0[Note 1].

Dans le calendrier julien, l'épacte résulte du Nombre d'or. Puisque le Nombre d'or ne prend que 19 valeurs différentes, il en est de même de l'épacte julienne. Celle-ci définit, par un décalage de vingt-neuf ou trente jours, les Nouvelles Lunes de chacun des douze mois de l'année. Il ne peut donc y avoir que 19 dates différentes des Nouvelles Lunes pour un mois donné. Autrement dit, dans le calendrier julien, pour chaque mois, il y a onze ou douze jours où il ne se produit jamais de Nouvelle Lune.

Afin de corriger cette bizarrerie du calendrier julien, les réformateurs, abandonnant le Nombre d'or, définissent un cycle de 29 épactes, une pour chaque jour lunaire. Une épacte supplémentaire, redoublant l'épacte 25 (notée 25 ou XXV) est introduite par le doublement de l'épacte 26 pour respecter la longueur du mois lunaire de 29 jours ½ quand le besoin s'en fait sentir[Note 2]. Ceci conduit à un nouveau calendrier lunaire perpétuel grégorien dans lequel les Nouvelles lunes se produisent tous les jours de l'année[Note 3].

Afin de ne pas bouleverser les habitudes, le nouveau calcul de l'épacte est fondé sur l'épacte julienne et l'épacte grégorienne de chaque année en résulte par des sauts d'épacte qui se cumulent.

La correction du cycle de Méton

Clavius et Lilius tentèrent, dans le calcul de la date de Pâques, de corriger non seulement l'erreur du cycle solaire[Note 4] - en supprimant trois années bissextiles séculaires sur quatre - mais de corriger aussi la dérive du cycle Méton. À l'aide des tables astronomiques en leur possession, Clavius et Lilius estimèrent à un jour tous les 312, 5 ans la dérive du cycle de Méton sur la Lune réelle . Ils reportèrent sur le calcul de l'épacte la correction du cycle solaire (métemptose) et celle du cycle de Méton (proemptose) en fixant des règles de saut d'épacte destinés à corriger en conséquence l'âge de la Lune.

Les règles du saut d'épacte

Outre les sauts d'épactes séculaires, selon que l'année séculaire est bissextile ou non, il faut prendre en compte les sauts d'épacte destinés à corriger le cycle de Méton. La combinaison des contraintes liées au cycle solaire, d'une part, au cycle de Méton, d'autre part, conduit aux règles de saut d'épacte suivantes :

  1. à chaque année séculaire non bissextile, on retranche un jour à l'épacte (opération appelée métemptose) ;
  2. on ajoute un jour à l'épacte lors de l'année séculaire qui se produit tous les 300 ans (opération appelée proemptose) ;
  3. après avoir effectué 7 fois l'opération 2, on attend 400 ans avant de recommencer les cycles de proemptose.

L'étape 1 concerne la correction du cycle solaire. Elle est indépendante des étapes 2 et 3 qui concernent la correction du cycle de Méton. Ces deux dernières étapes reviennent à répartir huit additions d'un jour à l'épacte sur un cycle de 25 siècles (7 ×300 + 400 = 2500). L'addition à l'épacte de 8 jours sur 25 siècles est équivalente, en moyenne, à ajouter à l'épacte (8 / 2500 =) 1 jour tous les 312,5 ans, c'est-à-dire à corriger avec une très bonne approximation la dérive du Cycle de Méton telle qu'elle était évaluée à l'époque.

La dernière addition à l'épacte par proemptose a eu lieu en 1800. La prochaine aura lieu en 2100[3].

Méthode de calcul de l'épacte grégorienne

Voici un algorithme permettant de déterminer l'épacte grégorienne pour l'année A :

c = QUOTIENT (A / 100)
Épacte = RESTE ((11 × RESTE (A / 19) + 8 - c + QUOTIENT (c / 4) + QUOTIENT ((8 × c + 13) / 25)) / 30)
Si Épacte = 25 et que le nombre d'or N = RESTE(Année /19) > 10, alors Épacte = 26.

La lettre dominicale grégorienne

La lettre dominicale grégorienne diffère de la lettre dominicale julienne car il faut tenir compte des années séculaires non bissextiles. La méthode suivante permet de déterminer la lettre dominicale grégorienne selon l'année A :

L = 7 - RESTE [ (A + QUOTIENT [ A / 4 ] + QUOTIENT [ A / 400 ] - QUOTIENT [ A / 100] + 6) / 7 ]
avec L = 1 : A ; L = 2 : B, etc.

Date de Pâques grégorienne

À l'aide de l'épacte et de la Lettre dominicale calculées aux deux chapitres précédents, on détermine la date de Pâques grégorienne à l'aide de la table suivante[Note 5] :

Date des Pâques grégoriennes
Lettre dominicale
Épacte ABCDEFG
0 16A17A18A19A20A14A15A
1 16A17A18A19A13A14A15A
2 16A17A18A12A13A14A15A
3 16A17A11A12A13A14A15A
4 16A10A11A12A13A14A15A
5 9A10A11A12A13A14A15A
6 9A10A11A12A13A14A8A
7 9A10A11A12A13A7A8A
8 9A10A11A12A6A7A8A
9 9A10A11A5A6A7A8A
10 9A10A4A5A6A7A8A
11 9A3A4A5A6A7A8A
12 2A3A4A5A6A7A8A
13 2A3A4A5A6A7A1A
14 2A3A4A5A6A31M1A
15 2A3A4A5A30M31M1A
16 2A3A4A29M30M31M1A
17 2A3A28M29M30M31M1A
18 2A27M28M29M30M31M1A
19 26M27M28M29M30M31M1A
20 26M27M28M29M30M31M25M
21 26M27M28M29M30M24M25M
22 26M27M28M29M23M24M25M
23 26M27M28M22M23M24M25M
24 23A24A25A19A20A21A22A
25 23A24A25A19A20A21A22A
26 23A24A18A19A20A21A22A
27 23A17A18A19A20A21A22A
28 16A17A18A19A20A21A22A
29 16A17A18A19A20A21A15A

Application : date des Pâques grégoriennes pour l'année 2006

  • Calcul de l'épacte
La formule du calcul de l'épacte grégorienne (voir le paragraphe Méthode de calcul de l'épacte grégorienne ci-dessus) donne pour 2006 :
c = QUOTIENT [2006 / 100] = 20
Épacte = RESTE [ (11 × RESTE [ 2006 / 19 ] + 8 - 20 + QUOTIENT [ 20 / 4 ] + QUOTIENT [ (8 × 20 + 13) / 25 ]) / 30 ]
Épacte = 0
Épacte étant différente de 25, aucune vérification ne s'impose. (Sinon si RESTE [ Année / 19 ] est >10, prendre Épacte = 26).
  • Calcul de la Lettre dominicale
La formule de calcul de la Lettre dominicale (voir le paragraphe La lettre dominicale grégorienne ci-dessus) donne pour 2006 :
L = 7 - RESTE [ (2006 + QUOTIENT [ 2006 / 4 ] + QUOTIENT [ 2006 / 400 ] - QUOTIENT [ 2006 / 100] + 6) / 7 ]
L = 1 → A
  • Détermination de la date de Pâques grégorienne
On peut vérifier que les valeurs de l'épacte et de la Lettre dominicale calculées ci-dessus sont bien celles qui figurent dans le calendrier pour 2006 publié en tête de cet article. En se référant au tableau des dates de Pâques grégoriennes en fonction de l'épacte et de la Lettre dominicale publié ci-dessus on trouve :
Date de Pâques grégorienne pour 2006 : .

Notes et références

Notes

  1. Dans le comput julien, l'épacte peut prendre les valeurs de 1 à 19.
  2. Toutefois, cela n'a pas d'incidence directe sur le calcul de la date de Pâques : il est équivalent de considérer que les épactes 25 ou XXV sont identiques à l'épacte 26. Dans la suite, où l'on n'examine que le seul calcul de la date de Pâques, on confond les épactes 25 ou XXV avec l'épacte 26.
  3. Ce calendrier n'est pas reproduit dans cet article car il ne sert pas directement au calcul de la date de Pâques grégorienne. Pour plus de détails, voir : Jean Lefort, op. cit.
  4. Dans le calendrier julien, l'adjonction d'un jour tous les quatre ans est équivalent à considérer une année moyenne de 365 jours + ¼, c'est-à-dire 365,25 jours, ce qui est trop long. La calendrier grégorien corrige cette erreur en supprimant trois années bissextiles tous les quatre cents ans, lors des années séculaires non bissextiles, ce qui correspond à une année de longueur moyenne 365 jours + 1/4 -3/400, soit en moyenne, 365,2425 jours, ne s'écartant de l'année tropique que de trois dix-millièmes.
  5. Quelques années sont particulières, avec l'épacte doublée XXV et la lettre dominicale C. Pâques est alors le 18 avril comme indiqué dans la table ci-dessous pour l'épacte XXV et non pas le 25 avril que l'on obtiendrait avec l'épacte 25 (vérifié ponctuellement sur site IMCCE et exhaustivement par l'algorithme de Meeus). Il s'agit, depuis la réforme grégorienne, des années suivantes : 1954, 2049, 2106, 3165, 3260, 3317… Le Nombre d'or permet de distinguer les épactes 25 et XXV ; pour ces dernières on pourrait aussi bien prendre Épacte = 26.

Références

  1. Jean Lefort, La saga des calendriers : ou le frisson millénariste, Paris, Belin (http://www.editions-belin.com/ Site des Éditions Belin), coll. « Pour la Science », , 192 p. (ISBN 2-84245-003-5)
  2. Jean-Paul Parisot et Françoise Suagher, Calendriers et chronologie, Paris, Masson (http://www.elsevier-masson.fr// Site des Éditions Masson), , 211 p. (ISBN 2-225-85225-1)
  3. Pour plus de détails, voir Jean Lefort, op. cit. pp. 140-145.

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