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Brûlage pastoral

Le brûlage pastoral, appelé improprement « écobuage », est une technique d’entretien et de régénération des pâturages utilisant le feu courant sur un espace défini durant la période de repos végétatif (fin automne, hiver, début printemps selon le climat). Il concerne uniquement la partie aérienne de la végétation.

Indication temporelle des termes associés à la technique

Photos d'un brulage pastoral dans la vallée de beaudéan, en février 2020

L’usage du feu a précédé puis accompagné le pastoralisme depuis son apparition. Sa désignation, par contre, semble subir un grand flottement terminologique. On ne connaît pas de réelle dénomination de cette technique dans les langues vernaculaires (du vocabulaire existe mais n’est pas spécifique à cette technique. Par exemple, le verbe « uscler » dans la langue occitane: brûler associé à l’ « usclade » désignant l’espace brûlé, ou l’opération de brûlage…) Depuis la deuxième moitié du XIXe siècle, un glissement sémantique d’origine administrative a consacré le terme « écobuage » pour désigner l’emploi du feu à vocation pastorale. Aujourd’hui, la pratique du brûlage pastoral est généralement appelée écobuage. Bien qu’impropre puisque le terme d'écobuage désigne historiquement une technique de feu couvert (et non de feu courant), ce terme est très souvent utilisé par les éleveurs et l’administration. Ceci pose souvent un problème de confusion avec les autres types d’ « écobuages» que sont les feux de jardin en tas ou les brûlages de broussailles des fossés[1].

Indication géographique de la technique

Cette technique se pratique dans les zones pastorales.

Ses applications

Objectifs pastoraux de la technique

Le brûlage pastoral participe à l’entretien et au maintien des espaces pastoraux, il vise à :

  • ContrĂ´ler les « refus » (la strate herbacĂ©e sèche ou morte) et la strate arbustive envahissante
  • Renouveler et diversifier les ressources pastorales (herbes et arbustes) dans le temps et dans l’espace.
  • Favoriser l’accessibilitĂ© Ă  la ressource pastorale, son appĂ©tence et sa prĂ©cocitĂ©
  • ContrĂ´ler les parasites externes (ex : tiques) des troupeaux

Autres effets/intérêts de la technique sur le territoire (externalités)

  • RĂ©duire, s'il est bien contrĂ´lĂ©, les risques naturels (incendies par la rĂ©duction de biomasse combustible, avalanches stabilisation du manteau neigeux par la rĂ©duction du couvert vĂ©gĂ©tal et combinaison avec le pâturage, …)
  • « Nettoyer » au meilleur rapport coĂ»t/efficacitĂ©
  • Contribuer Ă  l’ouverture et au maintien des paysages pastoraux ainsi qu’à la prĂ©servation des habitats d'espèces associĂ©s Ă  ces milieux ouverts (cf. bibliographie), comme certains rapaces (aigle bottĂ©...)

Praticiens

Éleveurs, qu’ils soient propriétaires ou ayants droit par bail, par convention pluriannuelle de pâturage, par accord verbal ou par droit d’usage ; ou leurs prestataires.

Mode opératoire

DĂ©cision

La décision d’intervenir sur le milieu dépend du projet d’exploitation de l’éleveur sur l’espace qu’il utilise. Elle intègre donc à la fois la gestion pastorale et les conditions du milieu.

Espace/temps d’intervention

La fréquence et la surface de brûlage est très variable : de 1 à 20 ans et de quelques hectares à plusieurs dizaines d’hectares (⇒ peut dépasser la centaine d’hectares) La fréquence se raisonne, là encore, selon la dynamique de végétation du milieu et sa gestion : plus on attend, plus les coûts de réalisation, les risques et les impacts sur le milieu sont importants.

Les conditions de réalisation

Combinaison d’une végétation sèche et d’un milieu humide

  1. Végétation sèche et inflammable, en repos végétatif
  2. Sol humide
  3. aérologie favorable
  4. Conditions générales hivernales, moindre sensibilité au feu des abords, par exemple en présence de neige.

La conduite du brûlage pastoral repose sur l’art de conjuguer :

  1. une connaissance fine du terrain

Le choix du moment opportun où les conditions du milieu sont optimales (ex : présence de neige aux abords, vent, humidité, …) Elle nécessite de ce fait des déplacements préalables sur place.

  1. le bon mode opératoire … pour répondre aux objectifs pastoraux, garantir la sécurité et gérer l’impact sur le milieu.
  2. la mobilisation des moyens ad hoc (humains, matériels)

Préparation du chantier

Selon le territoire, une préparation du chantier peut être nécessaire en amont (débroussaillage, entretien des sentiers, …).

RĂ©alisation du chantier

  1. conduire le feu : l’éleveur utilise pour cela des outils et techniques de direction (notamment à l’allumage), d’accélération (pente, vent), de freinage (contre pente, contre vent, batte à feu, seau pompe, …)
  2. s’appuyer pour contenir le feu : l’éleveur utilise des éléments du milieu (chemin, cours d’eau, culture, névé, crête, rupture de pente…) ou des pare-feux réalisés pour le chantier afin de cantonner le feu dans l’espace à brûler. Les éléments d’appuis sont utilisés différemment en fonction de la conduite du front de flamme choisie et des conditions naturelles du jour.
  3. surveiller et s’adapter: l’éleveur est attentif à toutes modifications des conditions et à la bonne évolution de l’opération jusqu’à l’extinction, afin de réajuster sa stratégie.

Ainsi le brûlage pastoral demeure une technique de pilotage qui nécessite une grande attention pour gérer les aléas et saisir les opportunités. Elle nécessite donc expérience et connaissance du milieu.

Outils disponibles pour le pilotage du feu

Pour le pilotage du feu, les outils d’allumage, de contrôle et d'extinction du feu sont souvent les mêmes. Les éleveurs utilisent selon les pratiques locales le briquet, le flambeau et récemment la drip torch, la branche de résineux, le rameau de genêt, la pelle, le râteau, la fourche, etc. sont aussi bien des outils. Parfois des moyens en eau sont utilisés comme le seau pompe, la motopompe, voire le petit véhicule porteur d’eau type 4x4.

Textes législatifs et réglementaires

Textes fondateurs

Le cadre général de l’emploi du feu est fixé dans la partie législative du Code forestier, au Livre I « dispositions communes à tous les bois et forêts », Titre III « Défense et lutte contre les incendies de forêt», dont l’article L131-1 définit ceci : "Il est défendu à toute personne autre que le propriétaire de terrains, boisés ou non, ou autre que les *occupants* de ces terrains du chef de leur propriétaire, de porter ou d'allumer du feu sur ces terrains et jusqu'à une distance de 200 mètres des bois et forêts ainsi que des terrains assimilés soumis aux dispositions de l'article L. 131-4."

Dispositions départementales

Arrêtés préfectoraux régissant l’emploi du feu et l’incinération des végétaux.

Organisation

La pratique des brûlages pastoraux nécessitent une déclaration auprès des services compétents de l’administration départementale (généralement la préfecture, ou la mairie) selon la procédure décrite dans l’arrêté préfectoral du département. Afin de mieux conseiller et organiser les chantiers, certains départements ont choisi de mettre en place des commissions de concertation pluridisciplinaire (collectivités, SDIS, éleveurs, chasseurs, forestiers, gestionnaires d’espaces naturels, force de l’ordre, …) appelées CLE (commissions locales d’écobuage) dont le rôle est de fournir un avis sur les chantiers déclarés et permettre une organisation concertée des chantiers.

Les techniques avec lesquelles le mot est confondu

  • Ă©cobuage (dans sa dĂ©finition historique et agricole du terme)
  • brĂ»lage dirigĂ© de dĂ©fense forestière contre les incendies (DFCI) rĂ©alisĂ© par des Ă©quipes d'intervention institutionnelles : pompiers/SDIS, etc.
  • brĂ»lage agricole (gĂ©nĂ©ralement brĂ»lage des rĂ©sidus de culture)
  • culture sur brĂ»lis (n’existant pas en France)
  • feu de jardin ou brĂ»lage de rĂ©sidu vert, parfois aussi appelĂ© Ă©cobuage

Synonymes ou variantes

Des toponymes (ex : usclade, cramade) évoquent bien l’emploi du feu sur des parcelles souvent localisées en versant sud, mais sans qu’on puisse y affirmer l’emploi du brûlage pastoral.

Voir aussi

Bibliographie

  • Association Française de Pastoralisme, 1998, BrĂ»lages dirigĂ©s. Pastum no 51-52, AFP - RĂ©seau des Ă©quipes de brĂ»lage dirigĂ©, 1998, 121 p.
  • FAERBER, J. et NOVOA C. (2009) : Le brĂ»lage dirigĂ© : un outil pour la gestion pastorale et environnementale des landes pyrĂ©nĂ©ennes ? 2es rencontres scientifiques du PNR des PyrĂ©nĂ©es ariĂ©geoises : Élevage et gestion des milieux, 23-24 oct. 2009. Actes de colloque sur CD-Rom.
  • FAERBER, J. (2009) : Le feu pastoral en Ariège : Ă©volution de la pratique et impact sur les landes Ă  GenĂŞt Ă  balai et Fougère–aigle. Communication prĂ©sentĂ©e aux XXes Rencontres des Ă©quipes de brĂ»lage dirigĂ©, Tarascon, 10-. Actes de colloque, p. 31-35 et CD-Rom.
  • FAERBER, J., LAMBERT B. et PARIS A. (2005)- Les effets du BrĂ»lage DirigĂ© sur les landes Ă  Callune dans les PyrĂ©nĂ©es Orientales et centrales. Communication prĂ©sentĂ©e aux XVIe rencontres des Équipes de brĂ»lage dirigĂ©, Prats de Mollo, 25-, Actes des rencontres : INRA, Doc. PIF 2005-10, p. 35 et CD-Rom.
  • FAERBER, J. (1995): Le feu contre la friche. Dynamiques des milieux, maĂ®trise du feu et gestion de l'environnement dans les PyrĂ©nĂ©es centrales et occidentales. Thèse de doctorat en GĂ©ographie, UniversitĂ© de Toulouse II, , 363 p., annexes.
  • MÉTAILIÉ Jean-Paul, 1981, Le feu pastoral dans les PyrĂ©nĂ©es centrales, Paris, Ed. CNRS.
  • MÉTAILIÉ Jean-Paul, 2009, « Temps et espaces du feu dans les PyrĂ©nĂ©es du NĂ©olithique au XXIe siècle », XXe Rencontres des Équipes de BrĂ»lage DirigĂ©, Cardère Ă©diteur : 16-19.
  • RĂ©seau BrĂ»lage DirigĂ© 2009. XXe rencontres des Ă©quipes de brĂ»lage dirigĂ©. Tarascon-sur-Ariège, Ariège, 10 au , 80p.+CDRom. http://www.cardere.fr/doc/BD20.pdf?PHPSESSID=9f8a71e5604355978f4d05121c6097b9
  • RIBET Nadine, 2011, « Des plantes pour "donner le biais" au feu : de la fĂ©rule promĂ©thĂ©enne au trubiscu sarde », in Actes du 9e SĂ©minaire d’ethnobotanique de Salagon, MusĂ©e dĂ©partemental ethnologique de Haute-Provence, Salagon, Forcalquier, C’est-Ă -Dire Éditions : 81-104.
  • RIBET Nadine, 2011, « Enjeux de connaissance et de reconnaissance des compĂ©tences techniques du brĂ»lage Ă  feu courant », in ForĂŞt MĂ©diterranĂ©enne, t. XXXII, no 3 : 277-290.
  • RIBET Nadine, 2007, « La maĂ®trise du feu : un travail "en creux" pour façonner les paysages », in Woronoff Denis (dir.), Travail et paysages, Paris, Éditions du CTHS, Actes du 127e Congrès du CTHS « Le travail et les hommes », Nancy 15- : 167-198. http://www.ecoanthropologie.cnrs.fr/pdf/Ribet_Trav-Paysa.pdf
  • RIBET Nadine, 2009, Les parcours du feu. Techniques de brĂ»lage Ă  feu courant et socialisation de la nature dans les Monts d’Auvergne et les PyrĂ©nĂ©es centrales, Thèse en anthropologie sociale et ethnologie (ss la dir. de F. Weber), EHESS-Paris, Bourse de Thèse Environnement de la RĂ©gion Auvergne. Mention « très honorable avec fĂ©licitations » : 649 p. (+ Fascicule iconographique, 100 p. + Annexes textes & documents, 120 p.).

Notes et références

  1. Nadine Ribet, Vincent Bontems, Danièle Escudié et Eric Rigolot, Feu. Ami ou ennemi ?, Dunod, , p. 80
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