Accueil🇫🇷Chercher

Avulsion (hydrologie)

L'avulsion, ou transgression de rivière, est l'abandon d'un lit de rivière au profit d'un nouveau tracé. Cela désigne également par ce biais la « force subite par laquelle un fleuve ou une rivière enlève une partie considérable et reconnaissable d'un champ riverain et la porte vers un champ inférieur ou sur la rive opposée »[1]. Cela peut survenir à la suite d'un effondrement provoquant de nouvelles pentes[2].

Exemple d'avulsion.
Traces laissées par les méandres successifs issus des phénomènes d'aggradation/avulsion dans la vaste plaine alluviale du Río Negro (fleuve argentin) (photo prise par un astronaute à partir de la station spatiale.
L'avulsion est Ă©galement très active dans les grands deltas sĂ©dimentaires issus du dĂ©pĂ´t des particules apportĂ©es par le panache d'un grand fleuve turbide (Mississippi sur cette image). Les chenaux qui se forment dans les sĂ©diments instables et lĂ©gers se dĂ©forment et se dĂ©placent sous l'effet combinĂ© des marĂ©es et de l'aggradation et de l'avulsion sur leurs berges et « terres Â» Ă©mergĂ©es. Des sĂ©diments pĂ©nètrent dans l'ocĂ©an par le delta du Mississippi, ils sont responsables de la construction du delta et lui permettent d'avancer dans la mer. Tandis qu'il s'Ă©tend plus au large, la pente des bras diminue et son lit subira une transgression.

Ce phĂ©nomène correspond souvent Ă  une reprise d'alluvions. Par exemple, lors de la formation des mĂ©andres, de tresses dans un cours d'eau en mĂ©andres et/ou « en tresses Â», ou lors de la formation d’îlots ou d'embâcles, ou encore Ă  la suite des travaux de barrages des familles de castors, les alluvions bloquent un bras qui devient alors un bras-mort, la rivière ayant formĂ© un autre passage.

Les grands phĂ©nomènes d'avulsion Ă©taient plus frĂ©quents aux temps prĂ©historiques et on en connaĂ®t beaucoup de tĂ©moignages palĂ©ohydrologiques[3]. Ils sont devenus rares dans les pays qui ont fortement amĂ©nagĂ© leur système fluvial, mais en France il peut notamment ĂŞtre observĂ© sur la Loire[4], pour cette raison souvent qualifiĂ©e de « dernier fleuve sauvage Â».

Causes

Les avulsions se produisent principalement lors de crues, qui brisent les berges du lit. Cela peut parfois arriver lors d'un effondrement, par exemple lors de l'affaissement de la plaine d'Alsace, le Rhin a modifié son cheminement.

Les avulsions se produisent en particulier dans des zones à débit lent, où l'eau peut brusquement sortir de son lit si le courant ou les sédiments augmentent[5] - [6].

Deux paramètres liés à l’activité humaine augmentent le risque d’avulsion : les modifications des terrains proches des cours d’eau (favorisant la production de sédiments) et l'élévation du niveau de la mer due au dérèglement climatique[5] - [6].

Enjeux

Ce phénomène de « transfert de masses »[7] est l'un de ceux qui expliquent la géomorphologie des zones alluviales. Il participe de la dynamique normale et naturelle d'un cours d'eau de plaine, et semble être la cause la plus courante de formation de styles de cours d'eau à anabranches (l'avulsion creuse des brèches dans les berges et autres levées, excave de nouveaux chenaux en plaine alluviale et en rouvre d'anciens qui étaient abandonnés[8]).

On cherche à modéliser le phénomène pour mieux en anticiper les effets géotechniques, fonciers ou sur la sécurité publique[4] ; il est profitable à la biodiversité mais :

  • il peut ĂŞtre accĂ©lĂ©rĂ© ou exacerbĂ© par l'artificialisation des berges ou du cours d'eau, ou par le creusement de gravières dans le lit ; il est alors source d'inondations ou de dĂ©gâts pour lesquels la part des causes humaines et naturelles est parfois difficile Ă  dĂ©terminer[9] ;
  • il peut ĂŞtre freinĂ© ou bloquĂ© par l'artificialisation de berges (bĂ©ton, palplanche) ;
  • il peut poser des problèmes complexes de propriĂ©tĂ© foncière (quand un propriĂ©taire perd du terrain (Ă©rosion) tandis qu'un autre situĂ© sur l'autre rive ou plus en aval en gagne (accrĂ©tion).

L'avulsion peut être sous-marine, avec alors un rôle plus important de la troisième dimension (la profondeur) lors des transferts sédimentaires qui sont par exemple de type plateau-pente-grands fonds marins[10]. En bordure du plateau continental, ou d'île volcanique ou de certaines structures coralliennes une avulsion brutale peut être à l'origine de tsunamis, voire d'un mégatsunami, tels ceux de Storegga par exemple.

La gestion douce des cours d'eau nécessite de conserver des espaces de liberté au cours alluvial des rivières et des fleuves, ce qui est parfois compliqué, pour des raisons de propriété foncière ou à cause des constructions implantées dans le lit majeur[11].

Notes et références

  1. Dictionnaire Larousse.
  2. Rudy Slingerland et Norman D. Smith, « Necessary conditions for a meandering-river avulsion », Geology, vol. 26, no 5,‎ , p. 435–438 (DOI 10.1130/0091-7613(1998)026<0435:NCFAMR>2.3.CO;2, Bibcode 1998Geo....26..435S, lire en ligne).
  3. Leveau, P. « PalĂ©ohydrologie holocène dans la basse vallĂ©e du RhĂ´ne, d’Orange Ă  la mer Â» in : Bravard JP & Magny M (Dir)., Histoire des rivières et des lacs de Lascaux Ă  nos jours. Errance, Paris, pp 251-258.
  4. Weill, P., Cojan, I., Ors, F., & Rivoirard, J. (2012). Modélisation des hétérogénéités sédimentaires dans les plaines alluviales de rivières méandriformes. Morphodynamique et transport solide en rivière: du terrain aux modèles-Livre des résumés..
  5. Hugo Ruher, « Comment le changement climatique va provoquer plus d’inondations par les fleuves », Le temps,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  6. (en) Sam Brooke, Austin Chadwick, Jose Silvestre, Michael Lamb, Douglas Edmonds et Vamsi Ganti, « Where rivers jump course », Science,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  7. Bernal Carrera, I. C. (2009). Contrôle géodynamique des transferts de masses entre une chaîne et son piémont: exemples du mégacône du Napo-Pastaza (Équateur-Pérou) (Thèse) (résumé).
  8. Jerolmack, D. J., & Paola, C. (2007). Complexity in a cellular model of river avulsion. Geomorphology, 91(3), 259-270 ().
  9. Peters JJ () Les crues exceptionnelles: un risque naturel ou un désastre causé par l’Homme, PDF, 18 pages, .
  10. Berné, S., & Loubrieu, B. (1999). Canyons et processus sédimentaires récents sur la marge occidentale du golfe du Lion. Premiers résultats de la campagne Calmar. Comptes Rendus de l'Académie des Sciences-Series IIA-Earth and Planetary Science, 328(7), 471-477.
  11. Fort M & Oge F (2009) Espace de liberté et gestion douce : deux concepts naturalistes complémentaires dans la lutte contre les inondations. Le cas de l'Ognon. Colloque international (16-21 nov 2009) Risques naturels en Méditerranée Occidentale, Ec CNRS, PDF, 7 pp.

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.