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Albert Steinberger

Le colonel Albert Barnes Steinberger, né le et mort le dans le Massachusetts[1] - [2], est un Américain devenu le premier Premier ministre des Samoa-Occidentales en 1875, dans un contexte de rivalités coloniales autour de l'archipel.

Albert Steinberger
Illustration.
Fonctions
Premier ministre des Samoa-Occidentales
–
Monarque Malietoa Laupepa
Prédécesseur Poste créé
Successeur Faumuina Mulinu'u II (indirectement)
Biographie
Nom de naissance Albert Barnes Steinberger
Date de naissance
Date de dĂ©cès (Ă  53 ans)
Nationalité américaine
Parti politique aucun
Premiers ministres des Samoa-Occidentales

Biographie

Né d'un père médecin, il est le sixième de neuf enfants, et grandit en Pennsylvanie. À l'âge de 18 ans, il s'installe dans le Colorado, où il se lance brièvement en politique et écrit des pièces de théâtre. Au début des années 1860 il revient sur la côte est, et vit à New York. Il se marie en 1867, mais son épouse décède quatre ans plus tard, après une longue maladie[2].

Au dĂ©but des annĂ©es 1870, les AmĂ©ricains ont des intĂ©rĂŞts commerciaux dans l'archipel des Samoa, alors composĂ© de chefferies autochtones distinctes et parfois rivales. Les intĂ©rĂŞts commerciaux britanniques et allemands y sont Ă©galement prĂ©sents. Un gouvernement national samoan existe, constituĂ© de deux rois conjoints, et d'une assemblĂ©e bicamĂ©rale reprĂ©sentant les diffĂ©rents districts du pays. Malietoa Laupepa et Tupua Pulepule, issus des plus grandes lignĂ©es de l'aristocratie traditionnelle, sont les deux rois[3]. En 1873, le PrĂ©sident amĂ©ricain Ulysses S. Grant envoie Steinberger comme Ă©missaire aux Samoa, pour le reprĂ©senter auprès des chefs, et pour dresser un rapport sur la situation dans les Ă®les. Steinberger apparaĂ®t comme un choix surprenant ; c'est une figure « obscure Â», aux origines incertaines. Il se prĂ©sente comme un « colonel Â», mais rien n'atteste qu'il soit rĂ©ellement titulaire d'un tel grade, bien qu'il ait travaillĂ© un temps dans la trĂ©sorerie de l'ArmĂ©e de terre des États-Unis[2]. Il passe trois mois aux Samoa, puis se rend Ă  Hambourg nĂ©gocier avec les Allemands pour la mise en place d'un gouvernement samoan sensible aux intĂ©rĂŞts commerciaux amĂ©ricains et allemands. De retour aux Samoa en 1874 sur un navire de la US Navy, il parvient Ă  convier un grand rassemblement de 8 000 chefs, oĂą a lieu un Ă©change formel de cadeaux entre Samoans et AmĂ©ricains. Steinberger suggère aux chefs l'idĂ©e d'un protectorat amĂ©ricain sur l'archipel, indiquant que cela permettrait de prĂ©server l'autonomie samoane face Ă  toute puissance Ă©trangère. Il n'obtient toutefois pas l'accord du gouvernement amĂ©ricain pour cette proposition[3] - [4].

Steinberger devient « Ă©normĂ©ment influent et populaire Â» auprès des autoritĂ©s samoanes[3]. Dès 1873, fait rĂ©diger au gouvernement une nouvelle constitution, censĂ©e promouvoir une stabilitĂ© favorable aux intĂ©rĂŞts des investisseurs Ă©trangers. Au lieu d'une monarchie conjointe, les plus grands chefs alterneraient dĂ©sormais sur le trĂ´ne, Malietoa Laupepa exerçant seul jusqu'Ă  sa mort les fonctions de roi. Le parlement est rĂ©organisĂ©, comprenant dĂ©sormais une « chambre des nobles Â» (choisis par les diffĂ©rents districts du pays, et formellement nommĂ©s membres par le roi) et une « chambre des reprĂ©sentants Â» (Ă©lus). Chaque district est dotĂ© d'un gouverneur, responsable devant le roi. Le , il obtient d'ĂŞtre nommĂ© par le roi au tout nouveau poste de Premier ministre, Ă  l'âge de tout juste trente-quatre ans[3] - [1]. Dans l'ensemble, les Samoans autochtones sont très satisfaits de ces mesures, et du gouvernement que mène Steinberger ; il apparaĂ®t comme le garant de leur indĂ©pendance politique[4] - [2].

Très vite, Steinberger exerce un « pouvoir quasi-absolu Â» sur l'archipel[1]. Il mĂ©contente la minoritĂ© de colons en insistant que les lois adoptĂ©es par le parlement autochtone s'appliquent Ă  tous les rĂ©sidents du pays, le parlement ayant restreint la vente d'alcool[3]. Les consuls amĂ©ricain et britannique aux Samoa, S.S. Foster et S.F. Williams, le soupçonnent d'ĂŞtre devenu essentiellement un agent au service des Allemands. Ayant obtenu l'assurance que le gouvernement amĂ©ricain ne soutient pas Steinberger, les consuls du Royaume-Uni et des États-Unis obtiennent du roi Laupepa, le , qu'il limoge son Premier ministre et ordonne sa dĂ©portation. Il est dĂ©portĂ© aux Fidji, territoire britannique, et ne revoit jamais les Samoa[3] - [1] - [2].

Son limogeage a des répercussions importantes. Pour avoir agi ainsi de leur propre initiative, les consuls du Royaume-Uni et des États-Unis sont eux-mêmes limogés par leurs gouvernements respectifs[3]. Le Parlement samoan, furieux que le roi ait ainsi cédé à une pression étrangère, destitue Laupepa, sans nommer de nouveau monarque dans l'immédiat ; il n'y a pas non plus de nouveau Premier ministre pour remplacer Steinberger[3]. Laupepa organise alors un gouvernement rival. Durant les deux décennies qui suivent, le pays est marqué par l'instabilité, d'autant que les Britanniques, les Américains et les Allemands soutiennent parfois des factions différentes. Ces tensions aboutissent, à terme, au traité tripartite de 1899. Les Samoa sont alors scindées entre une colonie allemande et une colonie américaine (tandis que Washington et Berlin cèdent des îles aux Britanniques dans d'autres parties du Pacifique)[3].

L'historien samoan Malama Meleisea estime que Steinberger a permis de consolider un gouvernement samoan dans une période difficile (même s'il s'agit finalement d'un échec), mais que ses accords secrets avec des compagnies et planteurs allemands en font un premier ministre jamais pleinement dévoué aux intérêts des Samoans[3].

Références

  1. (en) Robert D. Craig, Historical Dictionary of Polynesia, Scarecrow Press, 2010, (ISBN 1461659388), pp.261-262
  2. (en) Stephen Statis, "Albert B. Steinberger: President Grant's Man in Samoa", Hawaiian Journal of History, n°16, 1982, p.87-88 et 99
  3. (en) Malama Meleisea, Lagaga: A Short History of Western Samoa, Apia, Université du Pacifique Sud, 1987, (ISBN 982-02-0029-6), pp.83-85
  4. (en) Peter J. Hempenstall & Noel Rutherford, Protest and Dissent in the Colonial Pacific, Université du Pacifique Sud, 1984, (ISBN 9820200865), pp.21-22

Voir aussi

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