Émigration intérieure
L'expression d'émigration intérieure (« Innere Emigration ») désigne l'attitude de résistance passive d'intellectuels, d'écrivains ou d'artistes allemands sous le régime nazi. « On désigne généralement [par ces termes] l'attitude qui consista à rester en Allemagne tout en prenant ses distances à l'égard du national-socialisme et en refusant d'illustrer son idéologie par quelque œuvre que ce soit »[1].
Par extension, l'expression peut désigner un état d'acceptation consciente et délibérée de sa propre impuissance à régler les problèmes de société, et l'abstention totale à laquelle on se résout, sans pour autant quitter son pays natal.
C'est Frank Thiess qui, en 1946, à la suite du refus de Thomas Mann de rentrer en Allemagne, et de déclarations accusant les écrivains n'ayant pas choisi l'exil pendant la Seconde Guerre mondiale de complicité, a élaboré cette notion d'émigration intérieure en expliquant que ces écrivains dont il a fait partie « ont trouvé en eux une résistance de l'esprit […] à partir de laquelle doit être construite la nouvelle Allemagne ». Cette notion multiforme a donné lieu à des controverses et à de nombreuses études.
Quelques « émigrants intérieurs »
- Otto Alscher
- Werner Bergengruen
- Gottfried Benn
- Hans Blüher
- Hans Carossa
- Otto Dix
- Christian Dell
- Hans Heinrich Ehrler
- Werner Finck
- Wilhelm Furtwängler
- Gertrud Fussenegger
- Karl Amadeus Hartmann
- Ricarda Huch
- Ernst Jünger
- Erich Kästner
- Volker Lachmann
- Oskar Loerke
- Jeanne Mammen
- Friedrich Meinecke
- Erika Mitterer
- Walter von Molo
- Friedrich Reck-Malleczewen
- Richard Riemerschmid
- Reinhold Schneider
- Frank Thiess
- Ernst Wiechert
- Hermann Weller
Bibliographie
- (en) Nancy Thuleen, « Criticism, Complaint, and Controversy: Thomas Mann and the Proponents of Inner Emigration »
- (de) Ralf Schnell, « Literarische Innere Emigration », in Dichtung in finsteren Zeiten. Deutsche Literatur und Faschismus, Rororo, Hamburg, 1998, S. 120–160
- (fr) Hans Manfred Bock, « Histoire et historiographie des intellectuels en Allemagne », in Michel Trebitsch, Marie-Christine Granjon (dir.), Pour une histoire comparée des intellectuels, Paris, Complexe, 1998, p. 96 sqq. Aperçu Google Books
- (fr) Valerie Robert, Partir ou rester ?: les intellectuels allemands devant l'exil 1933-1939, Presses Sorbonne Nouvelle, 2001.
Notes et références
- Lionel Richard, Le nazisme et la culture, éditions Complexe, 2006, p. 133.