Une page folle
Une page folle (狂った一頁, Kurutta Ippēji ou Kurutta Ichipeiji), est un film muet japonais en noir et blanc réalisé par Teinosuke Kinugasa, sorti en 1926[1].
Titre original |
狂った一頁 Kurutta Ippēji ou Kurutta Ichipeiji |
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Réalisation | Teinosuke Kinugasa |
Scénario |
Yasunari Kawabata Teinosuke Kinugasa Bankō Sawada Minoru Inuzuka |
Acteurs principaux |
Yoshie Nakagawa |
Pays de production | Japon |
Genre | Film d'avant garde |
Durée | 70 minutes |
Sortie | 1926 |
Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution
Histoire du film
Perdu pendant 45 ans, le film est redécouvert par Kinugasa dans la cabane de son jardin en 1970 ; il l'y avait enterré durant la Seconde Guerre mondiale et l'avait oublié[2] - [3]. Le film est la création d'un groupe d'artistes d'avant-garde japonais, connu sous le nom Shinkankaku-ha (ou « école des nouvelles perceptions »), qui essaye d'aller au-delà de la représentation naturaliste habituelle[2] - [4]. Il fut considéré comme le premier film d'un courant « néo-sensationniste » mort-né, mais présente selon les spécialistes une évidente influence du cinéma expressionniste allemand[5].
Yasunari Kawabata, futur lauréat du prix Nobel de littérature en 1968, est crédité de l'idée originale dans le film. Il est souvent cité comme le scénariste du film, et une version du scénario est imprimée dans ses œuvres complètes. Cependant, on considère à présent que le scénario est le fruit d'une collaboration entre Kawabata, Kinugasa, Bankō Sawada, et Minoru Inuzuka[2].
Le film se déroule dans un asile. Bien que monté dans un maelström affolant, il raconte vaguement l'histoire du concierge de l'asile, un ancien marin. Sa femme est l'un des patients. Un jour, leur fille se présente à l'asile pour annoncer ses fiançailles à sa mère. Cela déclenche un certain nombre d'intrigues secondaires et de retours en arrière qui font découvrir l'histoire de la famille (par exemple, pourquoi la mère est malade et pourquoi la fille n'est pas au courant du travail de son père comme concierge)[6] - [7]. On apprend ainsi qu'avant d'être internée, la mère a voulu se noyer avec son bébé et que seul ce dernier est mort. Son mari, devenu concierge, tente vainement de la faire sortir de l'asile, engendrant un grand chaos dans l'asile[8]. À travers cette histoire, Kinugasa met en scène l'univers carcéral qu'il dénonce à travers les gestuelles expressionnistes des aliénés (notamment la chorégraphie avant-gardiste de la jeune femme), dans un efficace jeu de lumière.
Le film ne contient pas d'intertitres, ce qui le rend difficile à suivre pour un public moderne. Dans la copie existant aujourd'hui, il manque près d'un tiers de ce qui a été projeté dans les cinémas en 1926. Les projections des années 1920 au Japon comprenaient une narration dans la salle, assurée par un raconteur d'histoires ou benshi (弁士), ainsi qu'une musique d'accompagnement. C'est Musei Tokugawa, le célèbre benshi, qui racontait le film au cinéma Shinjuku Musashinokan à Shinjuku, Tokyo[2].
Considérée de nos jours comme un chef-d’œuvre du cinéma muet mondial[9], cette expérience cinématographique ne reçut pas le succès escompté, amenant Kinugasa à poursuivre une voie plus traditionnelle au sein de la Shōchiku (松竹)[10].
Selon Florence Tissot de la Cinémathèque française, le projet d'éditer le film en France n'a pas pu voir le jour[11], faute de temps. Le film fut néanmoins projeté à la Cinémathèque française en 1972 pour la première fois en Europe dans une version sonorisée en 16 mm[8], puis en salles en mars 1975[12]. En septembre 2017, il est de nouveau projeté à Paris, dans le cadre de L'Étrange Festival. En mars 2018, Lobster Films sort une édition DVD sous-titrée en français du film[13].
Fiche technique
- Titre français : Une page folle
- Titre original : 狂った一頁 (Kurutta ippēji)
- Titre international : A Page of Madness
- Réalisateur : Teinosuke Kinugasa
- Scénario : Yasunari Kawabata, Teinosuke Kinugasa, Minoru Inuzuka et Bankō Sawada
- Adaptation : Yasunari Kawabata
- Photographie : Kōhei Sugiyama
- Conception du projet : Shigemasa Abe
- Sociétés de production : Kinugasa Productions, Shin Kankaku-ha Eiga Renmei Productions, National Film Art
- Producteur délégué : Teinosuke Kinugasa
- Directeurs artistiques : Kasaku Hayashi et Chiyo Ozaki
- Assistants réalisateurs : Eiichi Koishi et Masami Osugi
- Générique : Kiyoshi Takeda
- Musique : Vadim Sher et François Lasserre (lors d'un ciné-concert le 23 avril 2013)[14]
- Ventes internationales : George Eastman House
- Support de projection : 35 mm
- Format : noir et blanc ; Format 1,37:1[15]
- Durée : 70 minutes
- Date de sortie :
Distribution
- Masao Inoue : le concierge de l'asile
- Yoshie Nakagawa : la femme du concierge
- Ayako Iijima (ja) : la fille du concierge
- Hiroshi Nemoto : le jeune homme
- Misao Seki : médecin
- Minoru Takase : homme fou A
- Kyosuke Takamatsu : homme fou B
- Tetsu Tsuboi : homme fou C
- Eiko Minami (en) : danseuse
- Shintarō Takiguchi : le garçon
Notes et références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « A Page of Madness » (voir la liste des auteurs).
- Festival international du film de La Rochelle, « Une page folle », sur archives.festival-larochelle.org,
- (en) Aaron Gerow, A Page of Madness : Cinema and Modernity in 1920s Japan, Ann Arbor, Center for Japanese Studies, University of Michigan, , 130 p. (ISBN 978-1-929280-51-3)
- Max Tessier, Images du cinéma japonais, Paris, Henri Veyrier, , p. 27 (Tessier évoque un bac à riz dans le grenier de Kinugasa)
- William O. Gardner, « New Perceptions: Kinugasa Teinosuke's Films and Japanese Modernism », Cinema Journal, vol. 43, no 3, , p. 59–78
- Max Tessier (dir.), Cinéma et littérature au Japon, Paris, Éditions du Centre Georges Pompidou, , p. 12
- « Une page folle (par Laure Favret) », sur 3 continents (consulté le )
- Tadao Sato, Le cinéma japonais (tome 1), Paris, Centre Pompidou, , p. 125-127
- « Une avant-garde au Japon : « une page folle ». Kurutta Tchipeiji de Kinugasa Teinosure, 1926 », sur Institut Jean Vigo (consulté le )
- « Une page folle (par Laure Favret) » (consulté le )
- Max Tessier,, Images du cinéma japonais, op. cit., p. 27
- « Florence Tissot - Une page folle », sur Cinéma du réel (consulté le )
- La Revue du Cinéma : La Saison cinématographique 75 (Longs métrages sortis en France du 1 juillet 1974 au 30 juin 1975), UFOLEIS (no 299), , 432 p., p. 375
- « Une page folle », sur http://catalogue.bnf.fr, (consulté le )
- « Une page folle (dossier, PDF) », sur Dard'Art (consulté le )
- « Une page folle », sur 3 continents (consulté le )
- (ja) Une page folle sur la Japanese Movie Database
Voir aussi
Bibliographie
- William O. Gardner, « New Perceptions: Kinugasa Teinosuke's Films and Japanese Modernism », Cinema Journal, vol. 43, no 3, , p. 59–78
- (en) Aaron Gerow, A Page of Madness : Cinema and Modernity in 1920s Japan, Ann Arbor, Center for Japanese Studies, University of Michigan, , 130 p. (ISBN 978-1-929280-51-3)
- (en) Mariann Lewinsky, Eine verrückte Seite : Stummfilm und filmische Avantgarde in Japan, Chronos, , 441 p. (ISBN 3-905312-28-X)
- Tadao Sato, Le cinéma japonais, Paris, Éditions du Centre Pompidou, 1997, 2 tomes.
- Max Tessier, Images du cinéma japonais, Paris, Henri Veyrier, 1981.
- Max Tessier (sous la dir.), Cinéma et littérature au Japon, de l'ère Meiji à nos jours, Paris, Éditions du Centre Pompidou, 1986.
Articles connexes
Liens externes
- Ressources relatives à l'audiovisuel :
- Cinémathèque québécoise
- (en) AllMovie
- (en) IMDb
- (en) LUMIERE
- (de) OFDb
- (en) Rotten Tomatoes
- (mul) The Movie Database
- BBC review feature
- Jasper Sharp, « A Page of Madness », www.midnighteye.com, (consulté le )
- Une page folle, entrée de l'encyclopédie Larousse
- Une page folle, une page majeure du cinéma japonais (par Yann K., 9 juillet 2002), Cinémasie (consulté le 22 décembre 2014)
- Théâtre de Nîmes, Une page folle (L'expérience japonaise, du 24 au 28 avril 2007)