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Signalement des actes de maltraitance sur les personnes handicapées en France

Le signalement des actes de maltraitance sur les personnes handicapées en France est une obligation juridique sous certaines conditions. Lorsque ces conditions sont remplies, l’absence ou le retard de signalement constitue un délit pénal.

Conditions de l'obligation de signaler

Fondements juridiques

L’obligation de signaler les actes de maltraitance sur des personnes handicapées résulte des articles 434-1 (non dénonciation de crime), 434-3 (obligation de signaler les faits portant atteinte à l’intégrité des personnes) et 226-3 (non-assistance à personne en danger) du Code pénal. A cette obligation générale s’ajoute un devoir spécifique qui ne concerne que les agents publics au sens de l’article 40 du Code de procédure pénale.

Non dénonciation de crime

Selon l’article 434–1 du Code pénal[1], toute personne ayant connaissance d'un crime :

  • dont il est encore possible de prĂ©venir ou de limiter les effets ;
  • ou dont l’auteur est susceptible de commettre de nouveaux crimes qui pourraient ĂŞtre empĂŞchĂ©s ;

a l’obligation de faire un signalement à l’autorité judiciaire ou administrative.

obligation de signaler les actes portant atteinte à l’intégrité

Selon l’article 434-3 du Code pénal[2], toute personne ayant connaissance de privations, de mauvais traitements ou d'agressions ou atteintes sexuelles infligés à un mineur ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique ou d'un état de grossesse, a l’obligation de réaliser un signalement à l’autorité judiciaire ou administrative.

Ce texte impose donc l’obligation de signaler toute atteinte à l’intégrité d’une personne handicapée.

La notion d’atteinte à l’intégrité s’entend d’une manière large, c’est-à-dire qu’elle englobe les atteintes physiques comme les atteintes psychologiques, ainsi que le prévoit l’article 222-14-3 du Code pénal[3].

Non-assistance Ă  personne en danger

Selon l’article 223-6 du Code pénal[4], toute personne pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ou pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre l'intégrité corporelle de la personne, a l’obligation de porter secours à la victime, y compris en déclenchant les secours.

Devoir de signalement propre aux agents publics

Selon l’article 40 du Code de procédure pénale[5], toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.

Traduction pratique de l’obligation

La définition concrète des conditions de l’obligation de signaler est détaillée par la jurisprudence du juge pénal[6].

Ainsi l’obligation pénale de signaler un acte de maltraitance sur une personne handicapée s’impose-t-elle :

  • lorsque la personne a Ă©tĂ© tĂ©moin direct de l’acte ;
  • ou lorsque la personne a Ă©tĂ© informĂ©e, y compris par un tĂ©moin indirect ;
  • ou lorsque la situation a conduit la personne Ă  n’avoir qu’un simple soupçon ;
  • ou lorsque la personne a eu connaissance d’une simple rumeur ou d’une rĂ©putation.

Dès lors, l’obligation de signaler s’impose :

  • Ă  toute personne certaine de la commission d’un acte de maltraitance ;
  • mais Ă©galement Ă  celle qui n’est que consciente d’une simple possibilitĂ© que cet acte ait Ă©tĂ© commis. Le fait de s’abstenir de signaler en l’absence de preuve du caractère avĂ©rĂ© de l'acte, ou de diffĂ©rer le signalement le temps de rĂ©aliser une enquĂŞte, caractĂ©rise la commission du dĂ©lit de dĂ©faut de signalement.

Répression pénale

Non dénonciation de crime

La non dĂ©nonciation d’un crime est punie de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.

Absence de signalement ou signalement tardif

L’absence de signalement ou le signalement tardif est puni :

  • dans le cas gĂ©nĂ©ral, de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende ;
  • lorsque l’atteinte a Ă©tĂ© commise sur un mineur de quinze ans, de cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende.

Non-assistance Ă  personne en danger

Les peines encourues en cas de non-assistance Ă  personne en danger sont :

  • dans le cas gĂ©nĂ©ral, de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende ;
  • dans le cas particulier oĂą l’acte de maltraitance a Ă©tĂ© commis contre un mineur de quinze ans, de sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende.

Absence ou retard de saisine du procureur de la RĂ©publique par un agent public

L’agent public qui a omis de signaler au procureur de la République, ou qui a tardé à signaler, est exposé aux peines de droit commun indiquées ci-dessus.

Exemples de situations ayant donné lieu à une condamnation pénale

La jurisprudence fournit de multiples exemples des situations concrètes dans lesquelles un défaut du signalement ou un signalement tardif sont caractérisés[7] :

  • dĂ©faut de signalement par le directeur de l’établissement, alors qu’il avait Ă©tĂ© informĂ© par un salariĂ© du tĂ©moignage d’une mineure hĂ©bergĂ©e concernant des caresses sur la joue et des baisers sur la bouche imputables Ă  un veilleur de nuit ;
  • absence de signalement par le directeur de l’établissement, qui avait eu des soupçons d’atteinte sexuelle sur des enfants, avait interrogĂ© le professionnel soupçonnĂ© d’être l’auteur et s’était contentĂ© de ses dĂ©nĂ©gations ;
  • absence de signalement par le directeur et un enseignant de l’établissement, qui avaient eu connaissance d’une fellation imposĂ©e Ă  une jeune fille, parce que les faits leur paraissaient incohĂ©rents et que l’intĂ©ressĂ©e avait la rĂ©putation d’offrir habituellement ce genre de faveur sexuelle Ă  d’autres usagers ;
  • absence de signalement par le maire, en l’absence de preuve, d’actes de violence commis dans un Ă©tablissement communal par un professionnel ;
  • absence de signalement par le directeur de l’établissement, celui-ci ayant estimĂ© que les faits n’étaient pas suffisamment graves ;
  • signalement tardif par le directeur de l’établissement qui, informĂ© de la possibilitĂ© d’une atteinte sexuelle sur un usager, avait dĂ©cidĂ© de rĂ©aliser une enquĂŞte interne en vue de se dĂ©terminer sur la nĂ©cessitĂ© de signaler ;
  • absence de signalement par un professionnel de l’établissement qui n’avait donnĂ© aucune suite au compte rendu d’un stagiaire qui faisait Ă©tat d’actes de maltraitance.

Articles connexes

Notes et références

  1. Article 434–1 du Code pénal
  2. Article 434-3 du Code pénal
  3. Article 222-14-3 du Code pénal
  4. Article 223-6 du Code pénal
  5. Article 40 du Code de procédure pénale
  6. Olivier Poinsot, Le droit des personnes accueillies ou accompagnées : les usagers dans l’action sociale et médico-sociale, Bordeaux, Leh édition, , 407 p. (ISBN 978 -2-84874-647-0, lire en ligne), p. 70-72
  7. Olivier Poinsot, op. cit., p. 71-72
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