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Seufzer eines Ungeliebten — Gegenliebe (Beethoven)

Soupir du mal-aimé — Amour réciproque

Seufzer eines Ungeliebten — Gegenliebe
WoO 118
Soupir du mal-aimé — Amour réciproque
Image illustrative de l’article Seufzer eines Ungeliebten — Gegenliebe (Beethoven)
Gottfried August Bürger, gravure de Rosmäsler, 1827.

Genre cantate
Musique Ludwig van Beethoven
Texte Gottfried August BĂĽrger
Langue originale allemand
Sources littéraires Bibliothèque d'État de Berlin
Effectif voix et piano
Durée approximative environ 6 min.
Dates de composition 1794-95

Seufzer eines Ungeliebten — Gegenliebe (Soupir du mal-aimé — Amour réciproque), WoO 118, est une cantate profane[1] pour voix et piano de Ludwig van Beethoven, composée à la fin 1794 ou en 1795 à partir de deux poèmes complémentaires du recueil Lyrische Gedichte (1789) de Gottfried August Bürger, réunis en un seul[2]. Beethoven le propose à l'éditeur Peters de Leipzig dans une lettre du [3] - [4] mais il n'est publié que de manière posthume en 1837 par Anton Diabelli[5].

L'œuvre est écrite peu après l'arrivée de Beethoven à Vienne en pour y prendre des leçons auprès de Joseph Haydn qui, lui aussi, a mis en musique le Gegenliebe (Hob. XVIIa:16). Les esquisses sont mêlées à celle d'une autre cantate, Adelaide[6]. C'est aussi la période des premières amours d'un jeune homme :

« À Vienne, aussi longtemps du moins que j'y ai vécu, Beethoven était toujours engagé dans des liaisons amoureuses, et il avait à cette époque fait des conquêtes qui auraient été fort difficiles, sinon impossible à plus d'un Adonis. — Un homme peut-il, sans avoir connu l'amour dans ses plus intimes mystères, avoir composé Adelaide, Fidelio et tant d'autres ouvrages? […] Je remarquerai encore que, autant que je le sache, tous les objets de ses passions étaient d'un rang élevé. »

— Franz Gerhard Wegeler, Notices biographiques sur Ludwig van Beethoven, p. 43-44[7].

Gegenliebe marque la première apparition de la mĂ©lodie que Beethoven utilisera dans la Fantaisie chorale opus 80 pour piano, chĹ“ur et orchestre en 1808 et qui est une prĂ©figuration de « l'Ode Ă  la joie Â» de la Neuvième symphonie[2].

Le texte

Seufzer eines Ungeliebten
Soupir du mal-aimé
Hast du nicht Liebe zugemessen
Dem Leben jeder Kreatur?
Warum bin ich allein vergessen,
Auch meine Mutter du! du Natur?
L'amour, ne l'as-tu pas accordé
À la vie de chaque créature?
Pourquoi suis-je seul, oublié
Toi aussi, mère! toi la Nature?
Wo lebte wohl in Forst und HĂĽrde,
Und wo in Luft und Meer, ein Tier,
Das nimmermehr geliebet würde? —
Geliebt wird alles auĂźer mir!
OĂą peut bien vivre, dans la forĂŞt ou la haie
Et oĂą dans les airs ou la mer, un animal
Qui plus jamais ne sera aimé? —
Tous, à part moi, sont aimés!
Wenn gleich [im Hain, auf Flur und Matten][8]
Sich Baum und Staude, Moos und Kraut
Durch Lieb' und Gegenliebe gatten;
Vermählt sich mir doch keine Braut.
Alors que dans les bosquets, à la campagne ou dans les pâturages
Arbres et arbustes, mousse et herbe
D'amour et d'amour réciproque, s'unissent
Aucune fiancée ne se marie à moi.
Mir wächst vom süßesten der Triebe
Nie Honigfrucht zur Lust heran.
Denn ach! mir mangelt Gegenliebe,
[Die Eine, nur Eine][9] gewähren kann.
Pour moi, de la plus douces des pousses[10]
Jamais ne croît la pomme d'amour[11] à savourer.
Ah! il me manque l'amour réciproque,
qu'une, une seule, peut accorder.

La première strophe du « Soupir du mal-aimĂ© Â» fonctionne un peu comme un rĂ©citatif prĂ©cĂ©dant une aria Ă  l'opĂ©ra et met en perspective le texte qui suit. Dans ce cas, notre mal-aimĂ© demande Ă  mère nature pourquoi lui seul, de tous les ĂŞtres vivants, est sans amour. Il Ă©numère ensuite, en descendant la chaĂ®ne alimentaire, des animaux de la forĂŞt, la mousse et les herbes, dans sa description des crĂ©atures qui sont aimĂ©es. Dans la dernière strophe, nous apprenons finalement la vĂ©ritable source de l'angoisse du mal-aimĂ©: l'amour rĂ©ciproque d'une personne en particulier, pas n'importe qui — Beethoven appuie ce point en modifiant le texte d'origine. Cette dernière strophe lance le Gegenlieb enchaĂ®nĂ©[12].

Gegenliebe
Amour donné[13]
WĂĽĂźt' ich, wĂĽĂźt' ich, daĂź du mich
Lieb und wert ein biĂźchen hieltest,
Und von dem, was ich fĂĽr dich,
Nur ein Hundertteilchen fĂĽhltest;
Si je savais que tu m'aimais
et m'accordais un peu de valeur,
et si de ce que je ressens pour toi,
tu en ressentais ne serait-ce qu'un centième ;
DaĂź dein Dank hĂĽbsch meinem GruĂź
Halben Wegs entgegen käme,
Und dein Mund den WechselkuĂź
Gerne gäb' und wiedernähme:
si tes remerciements Ă  mon salut
venaient seulement Ă  mi-chemin,
et ta bouche rendait le baiser
de bon cœur et en acceptait encore :
Dann, o Himmel, auĂźer sich,
WĂĽrde ganz mein Herz zerlodern!
Leib und Leben könnt' ich dich
Nicht vergebens lassen fodern! —
Alors, Ă´ ciel, hors de lui,
tout mon cœur s'enflammerait !
Le corps et la vie je ne peux pas
les laisser te demander pour rien !
Gegengunst erhöhet Gunst,
Liebe nähret Gegenliebe,
Und entflammt zu Feuersbrunst,
Was ein AschenfĂĽnkchen bliebe.
L'affection donnée accroît l'affection,
l'amour donné nourrit l'amour
et enflamme une tempĂŞte de feu,
là où seules des cendres brûleraient.

Gegenliebe est la rêverie du mal-aimé sur ce que serait la vie si l'objet de son affection répondait à son amour. Si seulement elle se souciait de lui, ne fût-ce que cent fois moins que lui pour elle, son cœur s'enflammerait, car l'amour réciproque augmente l'amour en retour[12].

La musique

Soupir d'un mal-aimĂ© — Amour rĂ©ciproque est un rĂ©citatif et aria en deux parties dans lequel Beethoven reflète le contenu Ă©motionnel contrastĂ© des deux poèmes par des tonalitĂ©s, des tempos et des mesures contrastĂ©es. La forme sonate domine l'Ĺ“uvre. La première strophe du Soupir d'un mal-aimĂ© est en style rĂ©citatif en ut mineur, le piano ponctuant par des accords sur la dominante de mi bĂ©mol majeur. Le passage au piano qui suit introduit l'aria enchaĂ®nĂ©e en mi bĂ©mol majeur, le relatif majeur d’ut mineur. Les deux lieds sont enchaĂ®nĂ©s par un passage au piano et une rĂ©pĂ©tition hĂ©sitante : « WĂĽsst ich Â», les paroles qui ouvrent le « Gegenlieb Â»[12].

Thème A du lied Gegenliebe. L'analogie avec le thème de la joie de la Neuvième symphonie est déjà frappante.

Structurellement, Gegenlieb est inhabituel : les trois premières strophes suivent le modèle A—B—A, tandis que la dernière strophe est contraste et Ă©volue vers la dominante. La structure entière est rĂ©pĂ©tĂ©e deux fois, un passage de modulations au piano et de nouvelles rĂ©pĂ©titions de « WĂĽsst ich Â» fournissent un lien. Toutefois, la musique de la strophe finale n'Ă©volue pas Ă  la dominante, mais est redirigĂ©e vers la tonique d’ut majeur[14] - [12].

Bien qu'en progression par rapport aux lieder de la période de Bonn, Seufzer eines Ungeliebten — Gegenliebe ne montre pas l'indépendance relative du piano et des parties vocales qui sera évidente dans les lieder plus tardifs de Beethoven : tels que Der Kuss, opus 128 et An die ferne Geliebte, opus 98[12].

Notes et références

  1. Le terme cantate — et non Lied — est ici employé car Beethoven rassemble deux poèmes et développe deux atmosphères différentes dans une œuvre musicale continue.
  2. Jean Massin et Brigitte Massin, Ludwig van Beethoven, Fayard, 1967, p. 597.
  3. Lettre du 5 juin 1822 Ă  Carl Friedrich Peters.
  4. Ludwig Van Beethoven (trad. de l'allemand), Les lettres de Beethoven : L'intégrale de la correspondance 1787-1827, préface de René Koering (traduction d'après l'allemand par Jean Chuzeville, suivant l'édition anglaise établie en 1960 par Emily Anderson, Arles, Actes Sud, coll. « Beaux Arts », , 1737 p. (ISBN 978-2-7427-9192-7), p. 1048
  5. Fac-similé de l'édition originale.
  6. Alexander Wheelock Thayer, Life of Beethoven, Princeton University Press, p. 166.
  7. Franz Gerhard Wegeler,Ferdinand Ries, Biographische Notizen über Ludwig van Beethoven, K. Bädeker, Coblence, 1838, 164 p. lire en ligne
  8. Texte original :"in Hain und Wiesenmatten".
  9. Texte original : "Die Eine nur".
  10. Jeux de mot: der Trieb signifie d'abord penchant ou pulsion; en botanique, pousse ou rejeton.
  11. Littéralement: fruit à miel.
  12. (en) , Description par John Palmer. sur AllMusic ().
  13. Traduction de Guy Laffaille.
  14. D’ut mineur à ut majeur, d'une atmosphère sombre à la lumière, procédé repris dans la Cinquième symphonie et dans la Fantaisie chorale.

Liens externes

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