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Servitude (droit français)

La servitude (du latin servitium) est un droit réel immobilier consistant en une charge imposée sur un immeuble, qualifié de fonds servant, pour l'usage et l'utilité d'un autre immeuble, qualifié de fonds dominant. Considérée comme une limite au droit de propriété, la servitude permet d'améliorer l'utilité économique d'un bien par l'affectation à son service d'un autre bien.

Deux grandes espèces existent :

Une partie de la doctrine débat de la qualification de servitude pour celles d’utilité publique, faute de l'existence d'un fonds dominant[3]. La jurisprudence consacre de son côté clairement la qualification de servitude aux servitudes d'utilité publique[4].

Les caractères de la servitude

Les servitudes sont accessoires, perpétuelles, exclusives et indivisibles[5].

Le caractère accessoire

Les servitudes sont attachées aux fonds auxquels elles profitent. La servitude est indissociable du fonds dominant. Contrairement à d'autres droits réels comme l'usage ou l'usufruit qui sont attachés aux personnes, la servitude se transmet en même temps que le fonds. Elles ne sauraient donc être cédées ou hypothéquées individuellement.

Le caractère perpétuel

La servitude épouse le caractère perpétuel de la propriété du fonds dominant.Toutefois, cette affirmation doit être relativisée dans la mesure où il est possible de prévoir des servitudes temporaires par exemple.

L'exclusivité

Selon un arrêt de la troisième chambre civile de la cour de Cassation rendu le (3e civ., , 97-22255), « une servitude ne peut être constituée par un droit exclusif interdisant au propriétaire du fonds servant toute jouissance de sa propriété ». Une servitude constituée au profit exclusif du fonds dominant est interdite.

L'indivisibilité

L'indivisibilité de la servitude signifie que la servitude grève l'ensemble du fonds servant et profite à l'ensemble des fonds dominants. Lorsque le fonds dominant ou servant est divisé, la servitude profite à toutes les parties du fonds divisé

Classification

On distingue entre les servitudes légales (celles qui sont prévues dans la loi), les servitudes judiciaires (celles qui ont été construites par les juges) et les servitudes établies « par le fait de l'homme ».

Les servitudes légales

Les servitudes légales désignent les limitations par la loi du droit de propriété. Leur constitution et leur assiette d'exercice sont prévues par la loi. On distingue entre les servitudes légales d'utilités publiques et les servitudes légales d'utilité privée.

Les servitudes légales d'utilités publiques sont celles qui imposent une charge de plein droit sur un immeuble au profit d'une personne morale publique. Limitation administrative au droit de propriété, elles peuvent aboutir :

  • soit Ă  certaines interdictions ou limitations Ă  l’exercice par les propriĂ©taires de leur droit de construire, et plus gĂ©nĂ©ralement le droit d’occuper ou d’utiliser le sol ;
  • soit Ă  supporter l’exĂ©cution de travaux ou l’installation de certains ouvrages, par exemple pour l’établissement des lignes de tĂ©lĂ©communications ou le transport d’énergie Ă©lectrique ;
  • soit, mais plus rarement, Ă  imposer certaines obligations de faire Ă  la charge des propriĂ©taires (travaux d’entretien ou de rĂ©paration, etc.)

Les servitudes légales d'utilité privée sont celles qui imposent de plein droit une charge sur un immeuble au profit d'un autre immeuble. Le Code civil a posé quelques servitudes de voisinage afin de faciliter la coexistence entre personnes privées. On peut citer :

  • l’écoulement des eaux : un propriĂ©taire doit Ă©tablir ses toits de manière que les eaux pluviales s’écoulent sur son terrain ou sur la voie publique et non sur le fonds du voisin ;
  • le respect des distances : pour ne pas gĂŞner son voisin, il convient de garder des distances. Fort de ce principe, le Code civil a posĂ© des règles prĂ©cises quant aux distances Ă  respecter pour planter, construire, ou faire des ouvertures. Les dispositions du Code civil sont aujourd'hui très peu utilisĂ©es. Le Code de l’urbanisme et de l’environnement a très largement supplĂ©Ă© les dispositions du Code civil ;
  • le passage en cas d’enclave : les articles 682 Ă  685-1 du Code civil permettent au propriĂ©taire dont le fonds est enclavĂ© de rĂ©clamer le passage, Ă  charge d’une indemnitĂ© proportionnĂ©e au dommage qu’il peut occasionner, sur le fonds de ses voisins.

Les servitudes judiciaires

Les servitudes judiciaires sont celles d'origine jurisprudentielle. Elles visent à régler les litiges où la loi ou le contrat ne prévoient rien. Ce sont des servitudes de « cour commune ». On distingue principalement entre les servitudes de tour d'échelle, les servitudes non aedificandi et les servitudes non altius aedificandi.

La servitude de tour d'échelle permet de résoudre la situation où un propriétaire d'un fonds se situe en limite de propriété et qu'il a besoin d'empiéter sur le fonds du voisin afin de réaliser des travaux. Sauf stipulation contractuelle, cette servitude n'existe pas de plein droit et doit être formulée devant le juge. Le juge veillera strictement à ce que cette servitude soit absolument nécessaire, à ce que l'assiette de la servitude soit le plus réduit possible et, enfin, à ce qu'une indemnité soit prévue.

La servitude non aedificandi désigne l'interdiction faite par le juge d'édifier une construction sur un fonds. Les motivation d'une telle interdiction sont multiples. On peut par exemple citer le risque de déstabilisation du terrain.

La servitude non altius aedificandi désigne enfin l'interdiction faite par le juge de surélever un immeuble.

Les servitudes du fait de l'homme

Les servitudes du fait de l'homme désignent celles qui naissent de l'intervention de l'homme. Depuis l'entrée en vigueur du code général de la propriété des personnes publiques, le domaine public peut supporter des servitudes conventionnelles[6].

Si l'accord des propriétaires suffit pour la créer (principe du consensualisme), il est nécessaire de recourir à un acte authentique, c’est-à-dire un acte notarié, pour que la servitude soit publiée à la Conservation des hypothèques et devienne ainsi opposable aux propriétaires successifs du fonds servant.

Les servitudes établies « par le fait de l'homme » peuvent être :

  • par titre ou conventionnelles. Ă€ noter que les servitudes conventionnelles peuvent aisĂ©ment consister en des servitudes non altius aedificandi par exemple ;
  • acquises par usucapion, si elles sont continues et apparentes ;
  • par destination du père de famille (implicite).

Il existe par ailleurs de nombreuses servitudes classées selon leur mode d’exercice continu ou discontinu.

  • Les servitudes continues sont celles dont l’usage est ou peut ĂŞtre continuel sans avoir besoin du fait actuel de l’homme (art. 688 alinĂ©a 2 du code civil[7]).

Exemple : une vue…

  • Les servitudes discontinues sont celles qui ont besoin du fait actuel de l’homme pour ĂŞtre exercĂ©es (art. 688 alinĂ©a 3 du code civil[7]).

Exemples : droit de passage, droit de puisage, canalisation d'eau usée (cass civ ch3 ).

Notes et références

  1. 637.
  2. 710.
  3. William Dross, Droit des biens, LGDJ, coll. Domat droit privé, 4e éd., , n°71 p. 69
  4. Cass. 1ère civ., 30 avril 1963, Bull. civ. I, n°239
  5. Jamel Djoudi, Servitudes, RĂ©pertoire du droit immobilier, Dalloz.
  6. Article L.2122-4 du CG3P.
  7. 688.

Voir aussi

Articles connexes

Lien externe

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