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Remédiation cognitive

La remédiation cognitive désigne :

  • dans le champ de la santĂ© : « la rĂ©Ă©ducation des fonctions cognitives altĂ©rĂ©es »[1] ;
  • dans le champ de la pĂ©dagogie, l'aide apportĂ©e afin de faciliter l’actualisation de ses potentialitĂ©s cognitives. Elle est alors Ă  rattacher au courant de l'Ă©ducabilitĂ© cognitive.

Définition et généralités

La remédiation cognitive est utilisée pour pallier des difficultés cognitives. Celles-ci peuvent relever :

Dans le champ de la pédagogie

  • d'une actualisation des structures logico-mathĂ©matiques sans altĂ©ration des fonctions cognitives. Dans ce cas la remĂ©diation s'adresse Ă  des jeunes ou des adultes en difficultĂ©s d'apprentissage sous l'effet de facteurs d'ordre psycho-social et environnemental, dĂ©crochage scolaire, milieu socio-Ă©conomique modeste, faible estime de soi dans la relation aux apprentissage, dĂ©privation culturelle... Elle est alors du type Programme d'Enrichissement Instrumental (PEI) ou Ateliers de Raisonnement Logique (ARL) ;
  • d'une altĂ©ration des fonctions cognitives congĂ©nitale ou dĂ©ficience intellectuelle. La remĂ©diation proposĂ©e s'inspire de la prĂ©cĂ©dente avec des approches Ă  partir d'un matĂ©riel plus concret et adaptĂ©.

Dans ces deux premiers cas elle est pratiquée par des formateurs, des enseignants, formés à ces méthodes qui peuvent être qualifiées de « psycho-pédagogiques » ;

Dans le champ de la santé

  • d'une altĂ©ration associĂ©e Ă  un trouble psychiatrique chronique ou neurodĂ©veloppemental (troubles du spectre autistique, schizophrĂ©nie, trouble schizo-affectif et trouble bipolaire). Les dĂ©ficits cognitifs se manifestent gĂ©nĂ©ralement sous la forme de troubles de l’attention, de la mĂ©moire, des fonctions exĂ©cutives (responsables de la capacitĂ© Ă  organiser ses actions et son discours), des fonctions visuospatiales, de la vitesse de traitement, de la mĂ©tacognition et/ou de la cognition sociale. Ce dernier type d'altĂ©ration cognitive, qui est associĂ© aux psychoses, empĂŞche les patients de comprendre les intentions, les dĂ©sirs et les Ă©motions d’autrui. Quels qu'ils soient, les troubles cognitifs, nuisent très fortement Ă  l'insertion socio-professionnelle des personnes qui en sont atteintes ;
  • d'une altĂ©ration consĂ©cutive Ă  des lĂ©sions cĂ©rĂ©brales ou au vieillissement.

Dans ces deux derniers cas, la remédiation cognitive est pratiquée par des professionnels du domaine de la santé: psychologues, neuropsychologues, ergothérapeutes, orthophonistes, médecins ou infirmiers spécifiquement formés. La remédiation est alors proche de l'entraînement cognitif il s'agit de maintenir la fonction des modules cognitifs altérés ou d'en compenser la faiblesse par d'autres (compensation ou vicariance). Toutefois, contrairement à la remédiation cognitive, l'entraînement cognitif est destiné aux sujets sains, sans déficit cognitif, qui souhaitent prévenir l'apparition de ces derniers. Il regroupe des techniques employées en prévention du vieillissement cognitif en dehors de toute indication médicale (Programme d’Entraînement Cérébral du Dr Kawashima, Programme d’Entraînement Cérébral Avancé du Dr Kawashima, Cognifit, Entraîneur Cérébral 1 & 2, Entraînement Cérébral Happy Neuron, Cérébrale Académie, Coach Cérébral…).

La remédiation cognitive à visée thérapeutique prend la forme d’un traitement rééducatif - pratiqué sous forme d'exercices ludiques - destiné à améliorer le fonctionnement attentionnel, mnésique, langagier, exécutif, visuospatial, métacognitif ou social. Une action indirecte sur les déficits fonctionnels affectant la vie quotidienne est attendue, ce qui peut contribuer à améliorer l'insertion sociale et professionnelle des patients traités.

Indications

Plusieurs programmes de remédiation cognitive sont disponibles en français pour les patients avec schizophrénie, dont IPT, CRT, RECOS, REHA-COM[2], MCT, ToMRemed, RC2S et Gaïa. Ils ont tous fait l'objet d'études contrôlées et chacun d'entre eux répond à des indications distinctes.

La remédiation cognitive est également indiquée chez les enfants souffrant de troubles de l'attention avec hyperactivité, chez les personnes présentant un déficit intellectuel modéré, chez les cérébrolésés et chez les sujets âgés atteints de pathologies démentielles en début d'évolution[1].

La remédiation cognitive est uniquement employée pour tous les patients dont l’état clinique est stable, chez les patients aptes à s'investir activement dans une prise en charge. Les patients doivent, de plus, être à même de pouvoir se concentrer (motivation ; intensité de l'attention) pendant des séances de quelques dizaines de minutes.

Objectifs

L'objectif d'une telle prise en charge Ă©tant d'aider Ă  une plus grande autonomie du patient dans sa vie sociale comme sa vie professionnelle.

Il est bon de faciliter au patient la prise de choix d'objectifs, qui lui est personnel, axés sur des situations de sa vie quotidienne avant le début de la prise en charge par les acteurs neutres par rapport aux choix personnel du patient pour rester cohérent comme objectif pour sa remédiation cognitive.

Principe

Avant la prise en charge, il est nécessaire, d'avoir évalué précisément la cognition des patients avant de leur proposer de bénéficier d'un programme de remédiation cognitive. Il faudra en effet :

  • cibler les domaines cognitifs dĂ©ficitaires ;
  • connaĂ®tre la nature de ces dĂ©ficits.

La prise en charge s'articule autour de 2 techniques principales.

  • L'une consiste Ă  entraĂ®ner ces fonctions cĂ©rĂ©brales au moyen d'exercices rĂ©pĂ©tĂ©s, permettant de travailler spĂ©cifiquement le ou les niveaux dĂ©ficitaires d'une fonction cognitive. (Par exemple, entraĂ®nement Ă  l'encodage d'une information par la rĂ©pĂ©tition des donnĂ©es). On parle alors de restauration de la fonction dĂ©ficitaire.
  • L'autre consiste Ă  procĂ©der Ă  la rĂ©Ă©ducation en s'appuyant sur les fonctionnements cognitifs prĂ©servĂ©s. Dans ce cas, le patient est encouragĂ© Ă  dĂ©velopper des stratĂ©gies pour traiter l'information. Par exemple, on propose de mĂ©moriser une liste de course en utilisant une image mentale constituĂ©e des diffĂ©rents ingrĂ©dients.

Place dans l’arsenal thérapeutique

La remédiation cognitive n’est pas destinée à remplacer des traitements médicamenteux ou certaines psychothérapie mais à compléter leurs effets. En effet, ces trois formes de traitement agissent à des niveaux différents ne se recouvrant pas. Les médicaments psychotropes agissent en effet sur certains récepteurs cérébraux et la psychothérapie agit sur les représentations du patient, alors que la remédiation cognitive agit sur le traitement de l’information. En pratique, ces différentes approches thérapeutiques peuvent - et doivent généralement - être associés. L’amélioration cognitive est obtenue en entraînant directement les fonctions déficitaires ou en développant celles qui sont préservées à travers des mécanismes de compensation.

La remédiation cognitive est une technique simple d’utilisation. Son introduction la plus précoce possible dans le traitement d’un patient ayant une altération cognitive est souhaitable. Elle sera d’autant plus utile que son utilité aura été comprise par le patient. Il est donc nécessaire de l’associer à des mesures psychoéducatives destinées à faire prendre conscience au patient de son déficit cognitif comme de la possibilité de bénéficier de la remédiation.

Efficacité

La remédiation cognitive a fait l’objet de nombreuses études contrôlées. Trois méta-analyses attestent de son efficacité dans la schizophrénie[3] - [4] - [5].

D'un autre point de vue, pour la schizophrénie, la remédiation cognitive est bénéfique en termes de compétences sociales, de réinsertion. L’utilisation de la remédiation est donc recommandée, elle devrait maintenant faire partie du programme de soins de tout patient souffrant de schizophrénie présentant un déficit cognitif. Son utilisation dans d'autres pathologies est prometteuse mais reste à valider.

Notes et références

  1. Pierre Laporte
  2. « Logiciel de réhabilitation cognitive Rehacom par Hasomed », sur ndmedics.fr (consulté le ).
  3. (en) Roder V, Mueller DR, Mueser KT, Brenner HD. « Integated Psychological Therapy (IPT) for schizophrenia : Is it effective? » Schizophr Bull. 2006;32:S81-S93. PMID 16916888
  4. (en) McGurk SR, Twamley EW, Sitzer DI, McHugo GJ, Mueser KT. « A meta-analysis of cognitive remediation in schizophrenia » Am J Psychiatry 2007;164:1791-1802. PMID 18056233
  5. (en) Wykes T, Huddy V, Cellard C, McGurk S, Czobor P. « A meta-analysis of cognitive remediation for schizophrenia: methodology and effect sizes » American Journal of Psychiatry 2011;168:472-485. PMID 21406461

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Livres

  • N. Franck, La schizophrĂ©nie, Odile Jacob, Paris, 2006
  • N. Franck, EntraĂ®nez et prĂ©servez votre cerveau, Odile Jacob, Paris, 2013
  • N. Franck, Cognition sociale et schizophrĂ©nie, Elsevier-Masson, Paris, 2014
  • N. Franck, RemĂ©diation cognitive, deuxième Ă©dition, Elsevier-Masson, Paris, 2017
  • N. Franck, TraitĂ© de rĂ©habilitation psychosociale, Elsevier-Masson, Paris, 2018
  • V. Pomini, L. Neiss, H. Brenner, B. Hodel, V. Roder, ThĂ©rapies psychologiques des schizophrĂ©nies, Mardaga Ă©diteurs, Sprimont, 1998
  • A. Prouteau (sous la direction de) Neuropsychologie clinique de la schizophrĂ©nie, Dunod, Paris, 2011
  • P. Vianin, P. Sarrasin-Bruchez, R. Bircher, L. Jaugey, Programme de remĂ©diation cognitive pour patients prĂ©sentant une schizophrĂ©nie ou un trouble associĂ©. Manuel du thĂ©rapeute. Socrate Éditions Promarex, Charleroi, 2007
  • P. Vianin, La remĂ©diation cognitive dans la schizophrĂ©nie. Le programme RECOS, Mardaga Ă©diteurs, Sprimont, 2013

Articles

  • (fr) « Des jeux contre la schizophrĂ©nie ? » Cerveau et psycho n°33 p.64
  • (en) Brenner HD, Hodel B, Genner R, Roder V, Corrigan PW. « Biological and cognitive vulnerability factors in schizophrenia: implications for treatment » British Journal of Psychiatry 1992;161(suppl.):154-163.
  • Briand C, BĂ©langer R, Hamel V, Nicole L, Stip E, Reinharz D, Lalonde P, Lesage A. « Implantation multi-site du programme Integrated Psychological Treatment (IPT) pour les personnes atteintes de schizophrĂ©nie et dĂ©veloppement d'une version renouvelĂ©e » SantĂ© mentale au QuĂ©bec 2005;30:73-95.
  • Cochet A, Saoud M, Gabriele S, Broallier V, El Asmar C, Dalery J, d’Amato T. « Impact de la remĂ©diation cognitive dans la schizophrĂ©nie sur les stratĂ©gies de rĂ©solution de problèmes et l'autonomie sociale : utilisation du logiciel Rehacom » L’EncĂ©phale 2006;32:189-195.
  • (en) Demily C, Franck N. « Cognitive remediation: a promising tool for the treatment of schizophrenia » Expert Review in Neurotherapeutics 2008;8: 1029-1036.
  • (en) Favrod J, Vianin P, Pomini V, Mast FW. « A first step toward cognitive remediation of voices : a case study » Cogn Behav Ther. 2006;35:159-163.
  • (en) Kayser N, Sarfati Y, Besche C, Hardy-Bayle MC. « Elaboration of a rehabilitation method based on a pathogenetic hypothesis of « theory of mind » impairment in schizophrenia » Neuropsychol Rehabil. 2006;16:83-95.
  • (en) Khazaal Y, Favrod J, Libbrecht J, Finot SC, Azoulay S, Benzakin L, Oury-Delamotte M, Follack C, Pomini V. « A card game for the treatment of delusional ideas : A naturalistic pilot trial » BMC Psychiatry 2006;6:48.
  • (en) McGurk SR, Mueser KT, DeRosa TJ, Wolfe R. « Work, recovery, and comorbidity in schizophrenia: a randomized controlled trial of cognitive remediation » Schizophrenia Bulletin 2009;35:319-335.
  • (en) Medalia A, Choi J. « Cognitive remediation in schizophrenia » Neuropsychological Review 2009 Sep;19(3):353-64.
  • Sablier J, Stip E, Franck N. « RemĂ©diation cognitive et assistants cognitifs numĂ©riques dans la schizophrĂ©nie : Ă©tat de l’art » L'EncĂ©phale 2009;35:160-167.
  • Vianin P. « RemĂ©diation cognitive de la schizophrĂ©nie. PrĂ©sentation du programme Recos » Ann MĂ©d Psychol. 2007;165:200-205.
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