Prélude et fugue en fa dièse mineur (BWV 859)
Le Clavier bien tempéré I
Prélude et fugue n° BWV 859 Le Clavier bien tempéré, livre I (d) | |
Fa dièse mineur | |
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Voix | 4 |
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Liens externes | |
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(en) La fugue jouée et animée (bach.nau.edu) | |
Le prélude et fugue en fa dièse mineur (BWV 859) est le quatorzième couple de préludes et fugues du premier livre du Clavier bien tempéré de Jean-Sébastien Bach, compilé vers 1722.
Le prélude est dans le style d'une invention à deux voix, au caractère frais et automnal. La fugue à quatre voix, à la fois belle et sévère, est dépourvue de divertissements libres. Sa forme simple semble désigner une œuvre de jeunesse du compositeur.
Prélude
Le prélude, noté , comporte 29 mesures.
Son caractère, au sentiment contenu[1], comme celui de la fugue, est automnal, « un petit vent froid souffle à travers... »[2].
Abstraction faite des accords qui ponctuent parfois à la manière d'une basse continue (mesures 14–15, 19), le prélude est conçu comme une invention à deux voix « de superbe facture » ; Guy Sacre le considère comme « ingrat » et « inexpressif »[3]. La seconde section à partir de la mesure 12 renverse le thème.
Fugue
Caractéristiques 4 voix — , 40 mes. ⋅ fugue pathétique ⋅ 9 entrées du sujet ⋅ réponse réelle ⋅ contre-sujet, 7 entrées ⋅ 2 divertissements Procédés renversement, pédale |
La fugue à quatre voix, notée
, est longue de 41 mesures.
Le sujet calme, mais plein d'intensité[4], composé de 18 notes, s'élève du ton à la quinte puis retombe. Comme à grand peine, lentement il progresse de tierce en tierce en mouvements conjoints, d'abord en noires, puis en croches. Après un gruppetto, les notes redescendent comme si un esprit de renoncement sous-tendait la phrase[5]. Pour l'auditeur, le mètre ne sera pas clair immédiatement, car le sujet se déplace indépendamment de la barre de mesure, avec ses hémioles mesures 2 et 3, Bach s'arrêtant sur les degrés la, si do , un peu moins longtemps pour chaque. Mais mêlé avec le contre-sujet, le mètre redevient clairement perceptible[6].
La fugue est « belle et sensible »[3], « sérieuse et sévère, dépourvue de divertissements »[6] libres. Bien que d'inspiration vocale, elle n'est pas strictement dans le stile antico[6]. Elle se divise en deux sections égales de vingt mesures, avec chacune un groupe d'entrées. La seconde section voit le sujet discrètement exposé en renversement à l'alto. Lorsque le sujet est repris par le ténor, c'est la basse qui le présente en renversement (mesure 32)[7], d'une manière particulièrement parlante[8].
L'exposition reste dans le registre medium de dépassant pas le do , alors que la seconde section exploite le registre plus aigu. Tout au long de son développement, la fugue ne module jamais en majeur (le sujet reste sur la tonique et la dominante) — et sauf peut-être la mesure 28 à deux voix, reprise de la mesure 7, dans le registre aigu[9] — seul l'accord final de la cadence picarde en fa majeur, apporte après l'épreuve, son impression de libération[7]. Keller conseille de reproduire tout le long de la pièce le mordant noté par Bach seulement à la mesure trois[7].
La forme simple suggère, selon Schulenberg, que cette fugue est plutôt une œuvre de jeunesse et que la sévérité est sûrement intentionnelle[9]. Bach n'use que du procédé de renversement et d'une pédale, mais d'aucun autre, « la force principale de l'œuvre consistant plutôt dans sa beauté profondément expressive »[10].
L'exposition est exceptionnellement longue, irrégulière[10] : l'entrée de l'alto étant suivie d'un sorte de codetta et entre celle de la basse et du soprano (mesure 15), d'une espèce de pont de quatre mesures :
Le contre-sujet prend la forme d'un « motif des soupirs », avec ses notes répétées, très souvent employé par Bach. On le retrouve notamment dans le lamento BWV 992, Caprice sur le départ de son frère bien-aimé, le choral pour orgue O Lamm Gottes, unschuldig (BWV 656) et dans le chœur Oh ! homme pleure ton grand péché de la Passion selon Matthieu[5]. Ces soupirs d'une infinie tristesse[4] accompagnent également le renversement du sujet, et semblent même usurper sa place[10].
Relations
Le prélude et la fugue ont des affinités thématiques.
Postérité
Emmanuel Alois Förster (1748–1823) a réalisé un arrangement pour quatuor à cordes de la fugue, interprété notamment par le Quatuor Emerson[11].
Théodore Dubois en a réalisé une version pour piano à quatre mains[12], publiée en 1914.
Bibliographie
- (en) Hugo Riemann (trad. de l'allemand par John South Shedlock), Analysis of J.S. Bach's Wohltemperirtes clavier [« Katechismus der fugen-komposition »], vol. 1, Londres / New York, Augener & Co. / G. Schirmer, (1re éd. 1890 (de)), 208 p. (lire en ligne)
- (en) Cecil Gray, Forty-Eight Preludes and Fugues of J.S .Bach, Oxford University Press, , 148 p. (OCLC 603425933, lire en ligne [PDF]), p. 53–55.
- Hermann Keller, Le clavier bien tempéré de Johann Sebastian Bach : l'œuvre, l'interprétation, Paris, Bordas, coll. « Études », (1re éd. 1965(de)), 233 p. (OCLC 373521522, présentation en ligne, lire en ligne [PDF]), p. 98–102.
- Roland de Candé, Jean-Sébastien Bach, Paris, Seuil, , 493 p. (ISBN 2-02-008505-4, OCLC 319750728, BNF 34763585).
- François-René Tranchefort (dir.), Guide de la musique de piano et de clavecin, Paris, Fayard, coll. « Les Indispensables de la musique », , 867 p. (ISBN 978-2-213-01639-9, OCLC 17967083, lire en ligne), p. 30.
- Guy Sacre, La musique pour piano : dictionnaire des compositeurs et des œuvres, vol. I (A-I), Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », , 2998 p. (ISBN 2-221-05017-7), p. 205–206.
- Robert Levin (clavecin, clavicorde, orgue et piano-forte) (trad. Anne Paris-Glaser), « Bach, Clavier bien tempéré, livre I : BWV 846-849 », Hänssler Edition Bachakademie, vol. (102 à) 117, 2000 (OCLC 705291495).
- (en) David Ledbetter, Bach’s Well-tempered Clavier : the 48 Preludes and Fugues, New Haven/London, Yale University Press, , 414 p. (ISBN 0-300-09707-7, OCLC 5559558992), p. 209–212.
- (en) David Schulenberg, The keyboard music of J.S. Bach, New York, Routledge, , viii–535 (ISBN 0-415-97399-6, OCLC 63472907, lire en ligne), p. 199–238.
Notes et références
- Keller 1973, p. 99–100.
- Gray 1938, p. 53.
- Sacre 1998, p. 205.
- Tranchefort 1987, p. 30.
- Keller 1973, p. 100.
- Schulenberg 2006, p. 227.
- Keller 1973, p. 101.
- Sacre 1998, p. 206.
- Schulenberg 2006, p. 228.
- Gray 1938, p. 55.
- (OCLC 920354122)
- [lire en ligne]
Article connexe
Liens externes
- Jean-Sébastien Bach, « Le clavier bien tempéré », vol. I, partitions libres sur l’International Music Score Library Project.
- Prélude et fugue en fa-dièse mineur
- (en) La fugue en fa dièse mineur sur bach.nau.edu