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Musique mauritanienne

La musique mauritanienne est, Ă  l'image des diffĂ©rentes ethnies qui composent le pays, une musique multi-culturelle, avec Ă  l'origine une forte reconnaissance de sa seule branche classique, la musique jouĂ©e par les « griots maures Â», les Iggawin[1]. Ă€ cette base s'ajoutent les deux types de musique propres aux « maures noirs Â», le medh, chants Ă  la gloire du Prophète de l’islam) et le redh, musique de danse sur fond de tam-tams[2], ainsi que les traditions musicales des ethnies noires africaines.

Bien que la musique traditionnelle soit plutôt vue comme légitime lorsqu'elle est pratiquée par les hommes, les deux personnalités sans doute les plus célèbres internationalement de nos jours sont deux femmes originaires de familles iggawin, Dimi Mint Abba et Malouma[3].

La musique traditionnelles des iggawen

Aussi appelée musique maure, elle tire ses traits de la musique du proche-Orient, dont on retrouve l'influence au travers des mode, mais elle a aussi absorbé les influences de la population du pays, et il est possible de reconnaître des emprunts berbères et africains, aussi bien dans les sonorités que dans le vocabulaire[4], bien qu'il soit difficile d'en mesurer l'ampleur[1].

Les Iggawen

Les Iggawen sont membres d'une caste de la catĂ©gorie des artisans, qui sont les seuls Ă  jouer et chanter la musique traditionnelle, de manière professionnelles. Ils appartiennent Ă  l'ethnie des Beidane, ou « maures blancs Â», et leur organisation sociale est calquĂ©e sur celles des griots mandingues.

L'apprentissage du chant, qui occupe une place centrale, se fait principalement par imitation, tandis que celui de la pratique instrumentale et de la théorie musicale est nettement plus structuré[1].

Les instruments

Les instruments classiques par excellence sont la tidinit, réservée aux hommes, et l'ardîn, réservée au femmes. La tidinit est un luth à quatre cordes, agrémenté de bruiteurs métalliques, disposés sur le manche ou autour de la caisse de résonance. Le manche est enfoncé dans la caisse de résonance, elle-même recouverte d'une peau tendue, et munie d'un chevalet. Les cordes, fixées sur la partie interne du manche, passent sur le chevalet et sont reliées à l'autre extrémité du manche par des anneaux de cuir. Les cordes sont grattées avec les ongles de la main droite, et le musicien peut utiliser son autre main pour en modifier la tension. Il souligne quelquefois le rythme, en battant la caisse de résonance avec son pouce droit[1]. Si le mot est d'origine berbère, on retrouve des variantes de cet instrument dans tout le Sahel : au Mali, au Sénégal et au Niger[5].

L'ArdĂ®n est une harpe comportant une dizaine de cordes (le nombre Ă©tant variable). Elle est faite d'une calebasse de 40 cm Ă  50 cm de diamètre, recouverte d'une peau tendue, jouant un rĂ´le de rĂ©sonateur et d'un manche, d’un mètre ou plus, qui s’enfonce dans la calebasse. Les cordes sont reliĂ©es au manche par un système spĂ©cifique de chevilles en bois, qui permettent leur rĂ©glage, et Ă  la table de percussion par un cordier qui en est solidaire[6] - [1]. Elle est utilisĂ©e le plus souvent comme instrument Ă  corde, mais sert aussi d'instrument Ă  percussion[1].

Ă€ cĂ´tĂ© de ces deux instruments classiques, les griots utilisent quelquefois des instruments plus populaires, et pour un nombre limitĂ© de sous-types musicaux. Parmi eux figure le t'bol ou « tambour des sables Â», une grosse timbale au rĂ´le social majeur, autrefois utilisĂ©e pour sonner le signal de guerre, et employĂ©e uniquement dans le mode faghou[5] - . Le daghumma, calebasse Ă©vidĂ©e Ă  ses deux extrĂ©mitĂ©s, qui sont frappĂ©es avec la main et la cuisse, produit un son assez discret, qui souvent est recouvert par celui produit par un collier mĂ©tallique fixĂ© autour de la calebasse[1]. Le rbab est une petite vielle monocorde, frottĂ©e Ă  l'aide d'un archet[5].

Enfin, plus récemment, avec le mouvement d'internationalisation et de modernisation de la musique traditionnelle, il n'est pas rare de voir la guitare sèche venir remplacer la tidinit[5].

Les modes et les voies

Il existe 4 modes reprĂ©sentant autant de tendances Ă©motionnelles : karr, la joie, utilisĂ© pour les chants de louanges, faghou[7], la bile, utilisĂ© pour les chants guerriers ou pour exprimer le courage, la fiertĂ©, siguim, la sensibilitĂ©, utilisĂ© pour exprimer les sentiments, et beigi[8], qui reflète la tristesse, la nostalgie ou la souffrance [5]. Chacun de ces modes se dĂ©cline au sein d'une « voie Â» ou « couleur Â», qui sont au nombre de trois : le-khal (noire), le-biadh (blanche) et zrag (tachetĂ©e). Le chant rĂ©pond Ă  une forme d'unitĂ© par proximitĂ©, et Ă  un nombre limitĂ© d'enchaĂ®nements possibles au sein d'une mĂŞme voie très codifiĂ©s[9].

Ces modes définissent l'octave choisi pour régler l'instrument, mais s'éloignent des modes connus en Occident : ainsi « il existe par exemple, dans le mode karr, des hauteurs sonores situées à plus d'une octave par rapport ai pôle modal le plus grave, qui n'ont apparemment jamais d'homologue (par réduction d'octave) dans le registre inférieur[9]. »

Musiciens

Malgré la rareté des musiciennes en Mauritanie, Dimi Mint Abba. Les parents de Dimi étaient tous deux musiciens (sa mère est une joueuse de ardîn, émériteet son père est notamment l'auteur de l'ancien hymne national mauritanien [10]), et elle a commencé à jouer à un âge précoce. Sa carrière professionnelle a débuté en 1976 lorsqu'elle a participé au concours Oum-Kalsoum à Tunis. Deux autres musiciennes importantes sont Malouma, qui est aussi une femme politique et une militante sociale, et Tahra Mint Hembara[11].

Notes et références

  1. Charles Duvelle, Amnon Shiloah, « MUSICALES (TRADITIONS) - Musiques de l'Islam », Encyclopædia Universalis, consulté le 17 décembre 2015. en ligne
  2. Abderrahmane NgaĂŻde, « Musique et danse chez les Haratin de Mauritanie : Conscience identitaire et/ou dissidence culturelle ? Â», Afrika Zamani, Nos. 15 et 16, 2007–2008, p=.1–25 en ligne
  3. Catherine Taine-Cheikh Les chansons de Malouma, entre tradition, world music et engagement politique, inL. Bettini et P. La Spisa. Au-delà de l'arabe standard. Moyen arabe et arabe mixte dans les sources médiévales, modernes et contemporaines, Dipartimento di Linguistica, Università di Firenze, pp.337-362, 2013, Quaderni di Semistica n° 28 (2012)
  4. Tolia Nikiprowetzky, « The Music of Mauritania Â» , Journal of the International Folk Music Council, Vol. 14 (1962), p. 53-55,{{DOI:|10.2307/835559}}, extrait en ligne
  5. Catherine Belvaude, La Mauritanie, collection MĂ©ridiens - peules et pays du monde, Ă©ditions Khartala, 1994, (ISBN 2-86537-220-0) p. 163-166
  6. Ardîn sur la médiathèque de la Cité de la musique
  7. Faghouou vagho selon les graphies.
  8. Ces mêmes modes sont respectivement appelés karr, vagho, seinima et beigi par Tran Van Khê
  9. Tran Van Khê, « Modes musicaux », Encyclopædia Universalis, consulté le 18 décembre 2015. extraits en ligne
  10. la musique de l'ancien hymne mauritanien a été composée par Tolia Nikiprowetzky et ses paroles sont un poème de Baba Ould Cheikh Sidiya
  11. (en) Simon Broughton, Mark Ellingham, et Richard Trillo, World Music: Africa, Europe and the Middle East, Rough Guides, (lire en ligne), « Mauritanie », p. 566

Lien externe


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