Moteur Ericsson
Le moteur Ericsson est un moteur à combustion externe suivant le cycle thermodynamique d'Ericsson. Il est anciennement connu sous le nom de moteur à air chaud[1]. Le fonctionnement de ce moteur thermique nécessite une source chaude et une source froide externes au contact d'échangeurs. Les soupapes présentes contrôlent l'écoulement du fluide de travail (en phase gazeuse) entre deux chambres : le compresseur et le détendeur.
De performances théoriques identiques au moteur Stirling, les technologies de production du XXIe siècle s'inspirent largement de ce moteur. Elles associent notamment de nouveaux développements pour réduire les émissions de polluants ou agir sur la consommation d'énergie par la valorisation de chaleur fatale industrielle, soutenant ainsi la démarche d'efficacité énergétique.
Historique
John Ericsson est à l'origine de plusieurs types de moteurs, dont plusieurs à apport de chaleur externe. Plus de neuf variantes (à cycles de Joule, Stirling, Diesel...) sont référencées par certains auteurs[2], mais seul un moteur réalise le cycle d'Ericsson.
Différents moteurs Ericsson
M1833
Breveté par John Ericsson en 1833 (brevet anglais no 6409/1833[3]), ce moteur a été produit en un seul exemplaire, d'une puissance 3,7 kW (5 ch) à 55 tours par minute[4]. La pression en sortie de compresseur et dans l'échangeur chaud est de 3,7 atmosphères. Celle en sortie de détendeur et d'échangeur froid s'élève à une atmosphère. La température en entrée du cylindre de détente est de 525 °C, pour une sortie de 276 °C et une sortie de cylindre de compression à 153 °C.
Le rendement du M1833 se situe entre 5 et 10 % (8,7 % selon Ivo Kolin[2]).
L'évolution des températures permet de constater une élévation en sortie du cylindre de compression et un refroidissement en sortie du cylindre de détente, ce qui indique une évolution adiabatique et, donc, la réalisation d'un cycle de Joule.
Ce moteur ne semble pas avoir survécu.
M1851/M1853
La première représentation connue du moteur est publiée, en 1851, dans l'Appleton’s mechanics' magazine and engineers' journal, qui décrit le brevet déposé par John Ericsson et portant sur un moteur calorique[5]. La deuxième représentation du moteur est attribuée à William Johnson pour The Imperial Cyclopaedia of Machinery, en 1853. Compte tenu de la qualité de cette gravure et de sa disponibilité, plusieurs sources auraient été enclines à considérer l'année 1853 comme étant celle de l'apparition du moteur.
Il semblerait que deux exemplaires aient été réalisés (un sur le sol américain, aux États-Unis et un testé en France), ainsi qu'une version multi-cylindres pour le navire Ericsson[6]. Le moteur testé en France a produit 2 à 3 kW entre 30 et 50 tours par minute. Ses dimensions étaient plus importantes que celles du M1833, en raison de la présence d'un cylindre de détente de diamètre 1 504 mm et de compression de 1 240 mm avec course identique de 230 mm.
Les températures dans la machine sont les suivantes :
- le cylindre de compression est à l'admission 85,5 °C et en sortie 146,4 °C ;
- le foyer est à 343 °C ;
- le cylindre de détente est à l'admission 244 °C et en sortie 311,4 °C.
La pression dans le moteur est de 1,4 à 1,65 atmosphère en sortie de compresseur, dans le réservoir et à l'admission. Le rendement minimum du M1851 est calculé comme étant de 2,45 %.
Aucun des moteurs ne semble avoir survécu.
Le cycle thermodynamique décrit par le fluide utilisé dans le M1851 est appelé le cycle d'Ericsson[7].
Autres moteurs, M1858, Stirling/Ericsson
Plusieurs autres représentations de moteurs sont attribuées à John Ericsson, cependant la rareté des gravures d'époques ne permet aucunement d'attester de la paternité réelle de ces machines. De plus, dans ses mémoires, ce dernier ne livre aucun détail sur ses machines, certainement inquiet de dévoiler des informations à ses concurrents. Cette partie est encore réduite dans ses mémoires, éclipsée par le succès d'autres réalisations majeures, telles que son navire USS Monitor, premier cuirassier, ainsi que par des travaux de sa fin de vie sur le rayonnement et sa détermination.
Version erronée du moteur de 1851
En 1899, dans son livre Machines à vapeur et machines thermiques diverses, J. Dejust intègre une gravure du moteur d'Ericsson avec un régénérateur utilisé après les soupapes[8]. Cette version semble n'avoir jamais existé et résulterait d'une confusion entre les machines de Stirling et d'Ericsson.
M1858
Le , John Ericsson obtient le brevet d'une nouvelle machine, dont la fumée est utilisée à l'intérieur du moteur. Il s'agit ici du premier véritable succès commercial d'un moteur par John Ericsson. La fabrication s'étend aux États-Unis[9] et au Canada (par exemple Charles Pierson) et apparaît sous licence dans plusieurs pays européens (Allemagne, Royaume-Uni...). Plus de 3 000 exemplaires seront produits. Quelques machines ont survécu et sont encore visibles dans des musées (Cnam de Paris, Deutsches Museum[10] ou dans des collections privées).
Moteur Ă cylindre Stirling
À partir de 1878, John Ericsson s'intéresse à une solution utilisant un cycle de Stirling avec un déplaceur et élabore un nouveau moteur, en partenariat avec la DeLameter Iron Works, puis la Rider-Ericsson Engine Company. Ce moteur rencontre également le succès, sa production est établie aux États-Unis jusqu'au début de la Première Guerre mondiale. De tous les moteurs à cycle Stirling conçus, il s'agit de la version la plus commune, bien que rare car centenaire ; certains brocanteurs spécialisés dans les moteurs anciens en proposent encore à la vente.
Caractéristiques
Ses caractéristiques majeures sont : un cycle circulaire non alternatif du gaz ; un échangeur de chaleur à contre-flux ; la possibilité de stocker une différence de pression interne, pour démarrer seul, contrairement au moteur Stirling[11].
Fonctionnement
Quatre temps structurent le fonctionnement du moteur[12] :
- Aspiration de l'air frais et Ă©vacuation de l'air chaud ;
- Mise en pression de l'air frais à température constante ;
- Chauffage de l'air frais ;
- Augmentation de la pression et activation du piston grâce à l'air chauffé.
Puis, le cycle recommence.
Développements actuels & travaux précédents
Depuis le début du XXIe siècle, le moteur Ericsson fait l'objet de nouveaux développements, principalement en France.
En février 2022, la société française ANANKÉ met en route son premier démonstrateur au sein de l'usine de Cristel[13]. Il s'agit d'un moteur Ericsson sous forme de module de cogénération[14], qui transforme la chaleur fatale industrielle à haute température (supérieure à 450 °C) en chaleur utile et en air comprimé ou électricité.
Plusieurs thèses ont été réalisées au sein du LaTEP de Pau sur des démonstrateurs de machines Ericsson à cycle de Joule[15] - [16] - [17] - [18]. Quelques publications de l'institut FEMSTO-ST en 2015[19] - [20], 2017[21] et 2019[22], complètent le travail de recherche déjà mené.
En 2008, la société Assystem développe un moteur Ericsson dans le cadre du projet IndEHo[23]. Le , elle obtient via Brice Bryon, un brevet pour une machine thermique à cylindrée variable permettant de combiner le fonctionnement en cycles de Joule ou d'Ericsson[24].
En , dans le cadre du mois des métiers de l'énergie dans le territoire de Belfort, le département énergie du laboratoire Femto-st, partenaire dans le projet Assystem, dévoile un moteur développé par ses étudiants[25] - [26] - [27] - [28].
Notes et références
- « Principes », sur moteurericsson.com (consulté le ).
- (en) Ivo Kolin, The Evolution of the Heat Engine, Moriya Pr, coll., 1988 (ISBN 0965245527).
- (en) Stirling engine design manual, 2nd edition [PDF], NASA.
- « Description du moteur Ericsson de 1833 », sur hotairengines.org.
- (en) Daniel Appleton, « Ericson's patent caloric engine » [« Brevet d'un moteur calorique par Ericsson »], Appleton's mechanics' magazine and engineers' journal,‎ , p. 590-594 (lire en ligne [PDF], consulté le ).
- « Description du moteur Ericsson de 1851 », sur hotairengines.org
- « Théorie », sur moteurericsson.com (consulté le ).
- « Machines à vapeur et machines thermiques diverses / par J. Dejust,... », sur Gallica, (consulté le ).
- (en) Ericsson's Caloric Engine, Toronto, , 21 p. (lire en ligne).
- (en) « Hot-Air Machine by John Ericsson, 1860 » [archive du ], Deutsches Museum.
- « Le moteur d'ERICSSON, un moyen de valorisation de l'énergie thermique à réhabiliter ? », sur cat.inist.fr, Institut de l'information scientifique et technique (consulté le ).
- Les principes de fonctionnement du moteur Ericsson, sur moteurairchaud.com
- Nathan Mann, « La pépite Ananké va valoriser la chaleur fatale chez Cristel », L'Usine Nouvelle,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- Nathan Mann, « Comment Ananké ressuscite un moteur bicentenaire pour récupérer la chaleur fatale », L'Usine nouvelle,‎ (lire en ligne , consulté le ).
- https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00110117/document
- Tardieu Alaphilippe, Muriel, « Recherche d'un nouveau procédé de conversion thermodynamique de l'énergie solaire, en vue de son application à la cogénération de petite puissance. » [livre], sur theses.fr, Pau, (consulté le ).
- Abdou Touré, Étude théorique et expérimentale d'un moteur Ericsson à cycle de Joule pour conversion thermodynamique de l'énergie solaire ou pour micro-cogénération., (lire en ligne).
- Frédéric Lontsi, « Modélisation dynamique des moteurs thermiques alternatifs à apport de chaleur externe à cycle de Joule : (Moteurs Ericsson) » [livre], sur theses.fr, Pau, (consulté le ).
- Doubs, M., Layes, G., Nika, P., Lanzetta, F., Gavignet, E., Ranc, P., Mille, M., et Bryon, B., « Experimental study of the use of metal bellows as an Ericsson Engine Expansion Chamber », International Conference on Efficiency, Cost, Optimization, Simulation, and Environmental Impact Of Energy Systems., page 9, Pau, France,‎ .
- Ranc, P., Deffeuillier, M., Lanzetta, F., et Doubs, M., « Étude numérique et expérimentale des échanges thermiques au sein d’un échangeur de moteur Ericsson soumis à des écoulements pulsés », Congrès Français de Mécanique, page 10, Lyon, France,‎
- Ranc, P., Lanzetta, F., Gavignet, E., et Layes, G., « Étude expérimentale transitoire de capteurs de pression soumis à un écoulement pulsé carré en fonction de la longueur de piquage », XIIIe Colloque interuniversitaire franco-québécois sur la thermique des systèmes, LUSAC Saint-Lô, France,‎ .
- Pierre Ranc, Contribution au développement d’un moteur à apport de chaleur externe à soufflets métalliques. Étude théorique, conception, réalisation et caractérisation expérimentale (thèse de doctorat), .
- « assystem.com/fr/marches/projet… »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?).
- « Directorypatent.com », sur directorypatent.com.
- Karine FRELIN Propos recueillis par K.F., « Enseignement supérieur - 130 lycéens à l’UFR-STGI hier dans le cadre de l’opération Watt Else », L'Est républicain,‎ (lire en ligne).
- Karine FRELIN, « Sciences de l'ingénieur », L'Est républicain,‎ (lire en ligne).
- http://www.biomasse-territoire.info/menus-horizontaux/projets/enerbiom.html
- http://events.femto-st.fr/sites/femto-st.fr.Journees-Cogeneration/files/content/pdf/20014-08_Creyx_Micro-cogeneration_bois_Ericsson.pdf
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- Muriel Alaphilippe, Sébastien Bonnet, Pascal Stouffs, « Les moteurs « à air chaud » au service du développement durable », Journée SFT « Optimisation énergétique des moteurs thermiques: nouveaux défis », Société française de thermique,‎ (lire en ligne [PDF], consulté le )). Comparaison entre les moteurs Ericson et Stirling, accompagnée de schémas.
- Mathieu Doubs, « Projet Indeho : Système de micro-cogénération à cylindrée variable », Journée µCogénération, Cnam, Paris, Assystem et institut FEMTO-ST,‎ (lire en ligne [PDF], consulté le ). Comporte une présentation des différents moteurs d'Ericsson.