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Mohammed Ben Allel

Mohammed Ben Allel (né vers 1810 ou 1811 - mort le ) est une figure centrale de la résistance à la conquête de l'Algérie par la France. Descendant d'une grande famille maraboutique de Koléa, il est tué par l'armée française lors du combat de l'oued El Malah, près de la frontière marocaine, le .

Mohammed Ben Allel
Biographie
Décès
Activité

Formation

Né aux alentours de 1810, Mohammed Ben Allel appartient à la famille des Embarek, une des plus grandes familles maraboutiques d'Algérie, fondée au XVIIe siècle par Sidi Ali Embarek[1] autour de la zaouïa de Koléa. Il reçoit l'enseignement religieux de la tradition du soufisme et est éduqué par son oncle El Hadj Mahieddine Es S'ghir ben Embarek. Au côté de ce dernier, il participe en au combat de Boufarik[2], premier affrontement d'envergure contre l'armée française depuis la Prise d'Alger en . Il est ensuite capturé et gardé prisonnier à Alger pendant deux ans. Durant sa captivité, il fait la connaissance de Lamoricière, alors chef du bureau arabe de l'armée française. À la suite de la signature du traité Desmichels entre Abd el-Kader et le général Louis Alexis Desmichels, il est libéré en 1834. Mais la paix ne dure pas et Mohammed Ben Allel participe à plusieurs combats contre les Français aux côtés de son oncle dans la plaine de la Mitidja et le Titteri.

Khalifa de l'Ă©mir Abd el-Kader

Ă€ la mort de Mahieddine Es S'ghir en , qui survient quelques semaines après la signature du TraitĂ© de Tafna qui rĂ©tablit la paix, Mohammed Ben Allel devient khalifa de l'Ă©mir Abd el-Kader, dont les Français reconnaissent l'autoritĂ© sauf sur les environs d'Alger et d'Oran. Il s'installe Ă  Miliana, sa ville natale de KolĂ©a Ă©tant occupĂ©e par les Français Ă  partir de . Il administre efficacement toute la rĂ©gion centrale de l'AlgĂ©rie. Il est notamment Ă  l'origine de la construction d'une manufacture d'armes Ă  Miliana, dans laquelle il emploie plusieurs EuropĂ©ens[3], pour laquelle il fait exploiter les mines de fer du mont Zakkar. Il Ĺ“uvre Ă©galement Ă  la constitution d'une armĂ©e rĂ©gulière, dont son secrĂ©taire particulier Kaddour Ben Rouila rĂ©dige le règlement. Le , Abd el-Kader, qui s'apprĂŞte Ă  partir dans le dĂ©sert combattre la rĂ©bellion des Tidjani, Ă©crit au marĂ©chal Sylvain Charles ValĂ©e, gouverneur gĂ©nĂ©ral d'AlgĂ©rie, « Si vous avez Ă  me faire part de quelques affaires, vous pourrez vous adresser Ă  mon khalifa Mohammed ben Allel qui est en mon lieu et place Â». Durant les neuf mois d'absence d'Abd el-Kader, Ben Allel entretient une correspondance avec le marĂ©chal Sylvain Charles ValĂ©e, dont il reçoit les Ă©missaires venus demander la rĂ©vision du TraitĂ© de Tafna[4].

La reprise de la guerre

À la reprise des hostilités, en , il est à la tête de la cavalerie régulière qui dévaste les implantations françaises de la Mitidja. Mais après les défaites de Oued El Alleug () et du col de la Mouzaïa (), suivies de l'évacuation de Miliana, il se replie dans l'Ouarsenis, d'où il harcèle les colonnes françaises qui occupent la vallée du Chelif. En , il négocie avec Antoine-Adolphe Dupuch, évêque d'Alger, un important échange de prisonniers[5] qui provoque la colère du général Thomas-Robert Bugeaud[6], nouveau gouverneur général d'Algérie et partisan d'une guerre à outrance.

En 1842, le gĂ©nĂ©ral Thomas-Robert Bugeaud tente d'acheter la soumission de Mohammed Ben Allel par la rĂ©stitution de toutes ses terres, mais ce dernier rĂ©pond Ă  son offre par une lettre cinglante : « Du Djebel Dakhla Ă  l'oued Fodda, je commande, je combats, je pardonne. En Ă©change de ce pouvoir que j'exerce pour la gloire de Dieu et le service de Monseigneur le Sultan Abd el-Kader, que me proposes-tu ? Mes Etats que la poudre pourra me rendre comme elle me les a pris, de l'argent et le nom de traĂ®tre Â»[7].

La mort au combat

Lors de la prise de la smala d'Abd el-Kader par le duc d'Aumale le , toute la famille de Mohammed Ben Allel est faite prisonnière et internĂ©e sur l'ĂŽle Sainte-Marguerite au large de Cannes[8]. Il leur Ă©crit : « Pour ce qui est de me rendre près de vous chez les infidèles afin de mettre un terme Ă  votre captivitĂ©, n'y songez pas ! Vous m'avez dit d'aller a vous, et moi je vous rĂ©ponds : Oui, sans doute, rien ne nous est plus cher ici bas que les auteurs de nos jours, nos frères, nos proches, nos enfants. S'il s'agissait de vous racheter avec de l'argent ou au prix de ma vie, je le ferais ; mais me rendre chez vous, parmi les chrĂ©tiens, est une dĂ©marche que rĂ©prouve la loi de Dieu et de son prophète : ce serait les quitter tous les deux pour aller aux impies. J'espère que je ne ferai jamais pareille chose Â»[9]. RejetĂ© par la puissante armĂ©e du gĂ©nĂ©ral Thomas-Robert Bugeaud dans l'ouest de l'AlgĂ©rie, aux confins du Maroc, il trouve la mort Ă  la tĂŞte de 700 cavaliers dans le combat de l'oued El Malah, le .

Les Français, conscients de l'importance de leur victoire, font exposer sa tĂŞte Ă  Miliana et Ă  Alger pour dĂ©moraliser la rĂ©sistance de la population. « Après ce beau combat du , Abd el-Kader n'ayant plus qu'une poignĂ©e de cavaliers n'est plus que l'ombre de lui-mĂŞme. On peut regarder aujourd'hui le royaume qu'il avait fondĂ© comme dĂ©finitivement conquis Â» Ă©crit Bugeaud, devenu marĂ©chal, dans son rapport au Ministère de la guerre datĂ© du . Ă€ cet ennemi aussi redoutĂ© que respectĂ©, Bugeaud fait rendre les hommages militaires lors de son enterrement dans le mausolĂ©e familial de KolĂ©a.

Postérité

La mort de Ben Allel a un grand retentissement en Algérie et en France[10]. Des tableaux, des nouvelles[11] et des poèmes sont consacrés à Ben Allel durant tout le XIXe siècle. Au XXe siècle, son souvenir se perpétue par la tradition orale, en particulier dans les régions de Koléa et de Miliana, où un village porte son nom. En 2011, le premier livre consacré à ce personnage négligé mais incontournable de la résistance à la conquête française de l'Algérie est publié aux éditions du Tell, de Blida[12].

Lien externe

Notes et références

  1. Léon Roches « Légende des marabouts Ouled Sidi Embarek » in Léon Roches,Trente deux ans à travers l'Islam (1832-1864), Firmin Didot, Paris, 1884
  2. Robert Ageron, Le gouvernement du général Berthezène à Alger en 1831, Bouchène, Alger, 2005
  3. Colonel Scott, A journal of a residence in the esmaila of Abd el-Kader, Whitaker and Co, Londres, 1842
  4. Georges Yver, Correspondance du maréchal Valée, gouverneur général des possessions françaises dans le Nord de l'Afrique, tomes 2 et 3, Larose, Paris, 1948-1956
  5. Adrien Berbrugger, Négociations entre Mgr l'évêque et Abd el-Kader pour la libération des prisonniers, in L'Algérie historique, pittoresque et monumentale, Paris, J. Delahaye, 1843
  6. Marcel Emerit, « La lutte entre les généraux et les prêtres au début de l'Algérie française », Revue Africaine (1953), 97, pp 66-97
  7. Cité par Nicolas Changarnier, Campagnes d'Afrique (1830-1848), Berger-Levrault, Paris, 1930
  8. Xavier Yacono, « Les prisonniers de la smala d'Abd el-Kader Â», Revue de l'Occident musulman et de la MĂ©diterranĂ©e (1973), 15, p. 415-434
  9. Cité par Léon Roches, Trente deux ans à travers l'Islam (1832-1864), Firmin Didot, Paris, 1884
  10. F.M. « Episodes et souvenirs de l'Algérie. Sidi Embarek », La Revue de Paris, 1844, pp 95-145
  11. Alchamp, « Embarek le borgne », La Nouvelle revue, 1904, pp 549-566
  12. Ahmed Mebarek Ben Allel et Nicolas Chevassus-au-Louis, La tête dans un sac de cuir. La vie de Mohammed Ben Allel Sidi Embarek, mort au combat contre les Français le 11 novembre 1843, Editions du Tell, Blida, 2011
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