Mohamed Salah Yahiaoui
Mohamed Salah Yahiaoui, né à Ain El Khadra en 1932 et mort le 10 août 2018 à Alger, est un militaire et homme d'Etat algérien. Membre du Conseil de la Révolution sous la présidence de Houari Boumédiène, il a occupé la fonction de Coordinateur du FLN de 1977 à 1980, devenant l'homme fort du parti unique algérien. Il était un symbole du Boumediènisme[1].
Mohamed Salah Yahiaoui | |
Fonctions | |
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Responsable exécutif du FLN | |
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Membre du Conseil de la RĂ©volution | |
– | |
Biographie | |
Lieu de naissance | Ain El Khadra (Algérie) |
Date de décès | |
Lieu de décès | Alger |
Nature du décès | maladie |
Nationalité | algérien |
Parti politique | FLN |
Langue | arabe |
Religion | Islam |
Mohamed Salah Yahiaoui | |
Allégeance | Algérie |
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Arme | Armée de libération nationale (ALN) , Armée nationale populaire (ANP) |
Grade | Colonel |
Années de service | 1956 – 1977 |
Commandement | Académie militaire de Cherchell (1969-1977) , 3e région militaire (1965-1969) |
Conflits | Guerre d'Algérie, Guerre du Sahara occidental |
Biographie
De l'origine au maquis
Son père est un notable religieux membre de l'Association des oulémas musulmans algériens (AOMA) à Barika. Instituteur au début de la guerre d'indépendance[1], il monte au maquis dans l'ALN en Wilaya I en janvier 1956. Au maquis il gravit les échelons et se retrouve blessé plusieurs fois, il gagnera le surnom de « martyr vivant de la Révolution ». En 1959 il est gravement blessé et exfiltré en Tunisie, où il restera jusqu'à la fin de la guerre. Capitaine en 1962, il soutient l'EMG contre le GPRA lors de la crise de l'été 1962[2]. Après l'indépendance il reste dans l'armée.
Le militaire
Il participe au renversement du président Ben Bella par l'armée lors du coup d'État du 19 juin 1965. Il devient membre du Conseil de la Révolution instauré dans la foulée. En 1965 toujours, il est nommé chef de la 3e Région militaire alors qu'il est au grade de commandant. En décembre 1967 il manque de peu de rejoindre le colonel Tahar Z'biri dans son putsch contre le président Boumediène, il adopte finalement une attitude neutre, et contrairement à ce qu'espérait Z'biri, les troupes de la 3e Région militaire ne vinrent pas lui prêter main-forte[3].
En 1969 il est promu colonel (le plus haut grade de l'ANP à l'époque) et nommé Directeur de l'Académie interarmes de Cherchell, le « Saint-Cyr algérien ». Sa mission à la tête de la plus importante académie militaire d'Algérie consiste à former une élite militaire engagé dans l'édification du socialisme et à « algérianiser » l'instruction militaire.
Après la défaite algérienne à Amgala (27-29 janvier 1976), Yahiaoui collectait le ressentiment d’une large proportion de l’appareil politique et de l’Armée, et a convaincu Boumediène d’agir militairement contre l'agression marocaine[4]. Un rassemblement hétéroclite d'unités de combat est placé sous son commandement et lance l'offensive sur Amgala (14-15 février 1976) pour reprendre la ville. L'opération est un succès. Il quitte l'armée algérienne en 1977.
L'homme fort du FLN
Le 30 novembre 1977 il est désigné coordinateur du secrétariat général de l'appareil du FLN, devenant de facto le N°1 du FLN en l'absence de secrétaire général. Le choix d'un militaire de carrière pour ce poste paraît douteux mais semble être un gage de confiance du président envers Yahiaoui, avec qui il partage la même ligne politique et idéologique.
Sa mission est d'une part de redynamiser le parti unique, qui dans les faits est une coquille vide impuissante face à la puissante armée algérienne véritable coeur du pouvoir, et d'autre part d'organiser le IVe congrès du FLN devant faire adopter une nouvelle orientation politique et économique. Des congrès des organisations de masses rattachées au FLN (UGTA, UNJA, UNFA et ONM) sont organisés en 1978 et une nouvelle direction du parti est mise en place. Sous l'impulsion de Mohamed Salah Yahiaoui le FLN connaît un net renforcement[5] face à l'ANP.
À la mort de Boumediène le 27 décembre 1978, le candidat potentiel à la succession du défunt président est pressenti au sein du Conseil de la Révolution, deux hommes se démarquent : Abdelaziz Bouteflika et Mohamed Salah Yahiaoui[6].
Le premier est perçu comme chef de file d'un « courant bourgeois », un libéral favorable à l'ouverture sur l'Occident. Bouteflika est soutenu par une part importante des haut cadres de l'État. Le second est perçu comme un conservateur religieux, un panarabiste, fidèle à la ligne socialiste. Yahiaoui bénéficie du soutien des apparatchik du FLN, du courant arabo-islamique, des organisations de masses (les travailleurs et la jeunesse notamment) et de certains haut officiers de l'armée. L'ANP va finalement trancher et imposer son candidat : le colonel Chadli Bendjedid, chef de la 2e Région militaire depuis 1964 et membre du Conseil de la Révolution[6].
Selon Rachid Benyelles les militaires reprochaient à Yahiaoui son « aversion pour les cadres francophones, ses idées baathistes et son gauchisme de circonstance »[7].
Mise à l'écart et disgrâce
Après l'élection de Chadli Bendjedid à la présidence le 9 février 1979, Yahiaoui conserve sa position de responsable exécutif du parti bien que Chadli se soit octroyé le poste de SG du FLN. En mai 1980 il perd son poste de coordinateur au profit de Mohamed Chérif Mesaâdia. le 2 juillet 1981 il est exclu du Bureau politique du FLN avec Abdelaziz Bouteflika. D'après Daniel Junqua son départ de cette haute instance marque le terme d'un long processus qui a consacré leur effacement progressif, tandis que s'affirmait au contraire l'autorité du président[8], Chadli Bendjedid. Mohamed Salah Yahiaoui perd donc toutes ses fonctions officielles.
Il revient sur la scène politique lorsqu'il signe « la déclaration des 18 » en octobre 1988, un document élaboré par d'anciennes figures de l'ère Boumediène et des personnalités historiques de la guerre de libération, qui fustigeait l'usage de la torture lors des émeutes d'octobre 1988, le pouvoir autocratique du président Chadli et l'état déplorable de la situation politique et économique.
En 1991 il fait son retour au comité central du FLN. Pendant la décennie noire il reste discret, bien qu'il soit partisan du dialogue entre l'Etat et les islamistes, en témoignent ses contacts avec Abassi Madani et les autres chefs de l'ex-FIS, dans le but de parvenir à une solution politique à la crise.
Mort
Mohamed Salah Yahiaoui décède le 10 août 2018 à l'hôpital militaire d'Aïn Naâdja d'Alger, des suites d'une longue maladie[9]. Il avait suivi des soins en Jordanie peu avant de mourir.
Galerie
- Le président Boumediène accompagné du colonel Yahiaoui.
Notes et références
- « Mohamed Salah Yahiaoui, mort d’un symbole du « Boumediénisme » », sur TSA, (consulté le ).
- Gilbert Meynier, Histoire intérieure du FLN, 1954-1962,
- Tahar Z'Biri, Un demi-siècle de combat, Memoires d'un chef d'état-major algérien,
- Akram, « Top Secret! Amgala mon amour! », sur MENADEFENSE, (consulté le )
- Bernard Cubertafond, « L'Algérie du président Chadli », Politique étrangère, vol. 46, no 1,‎ , p. 151–162 (DOI 10.3406/polit.1981.3048, lire en ligne, consulté le )
- Naoufel Brahimi El-Mili, France-Algérie : 50 ans d'histoires secrètes: 1962-1992 Tome 1,
- Rachid Benyelles, Dans les arcanes du pouvoir, mémoires (1962-1999),
- Daniel Junqua, « L'exclusion du bureau politique du F.L.N. de MM. Bouteflika et Yahiaoui marque le vrai début de l'" après-Boumediène " »
- Casbah Tribune, « Décès de Mohamed Salah Yahiaoui, l’homme qui devait être président de la République en 1979 », sur Casbah Tribune, (consulté le )