Les Amours de Don PerlimplĂn avec Belise en son jardin
Abdoulaye Kaloga né le 04/04/1998 à Conakry doté d’une licence en science humaine et sociale à l’Université Général Lansana Conté de Sonfonia
Historique
Conçue en premier lieu pour ĂŞtre jouĂ©e par des marionnettes, la pièce a donnĂ© lieu Ă de nombreuses Ă©bauches. Dans une lettre sans date, Lorca annonce Ă M. F. Almagro qu’il fait "une pièce de théâtre grotesque : Amours de don PerlimplĂn avec BĂ©lise en leur jardin[1]". AndrĂ© Belamich pense que cette lettre date de la fin de , tandis que Gallego Morell la situe Ă l’automne 1924, et Christopher Maurer Ă l’étĂ© 1925. Quoi qu’il en soit, la pièce est achevĂ©e en , puisque la troupe “El Caracol” la met en rĂ©pĂ©tition ; cependant, la pièce est jugĂ©e immorale et interdite par la dictature de Jose Antonio Primo de Rivera[2]. Les copies en sont saisies. Lorca la rĂ©crira de mĂ©moire pendant son voyage aux États-Unis, pendant l’étĂ© 1929. Elle est crĂ©Ă©e au théâtre en 1933 au Teatro Español de Madrid, en complĂ©ment de La Savetière prodigieuse. La pièce, qui ne sera jamais reprise du vivant de l’auteur[3], sera encore jouĂ©e au Festival du XXe siècle Ă Paris en 1952 dans des dĂ©cors et costumes d'Antoni ClavĂ©.
Personnages
Lorca indique au cours du texte certains des costumes des personnages ; nous les reproduisons ici.
- Don PerlimplĂn, en casaque verte et perruque blanche toute bouclĂ©e.
- BĂ©lise, jeune femme que PerlimplĂn Ă©pouse.
- Marcolfa (ou Marcolfe), gouvernante, en robe classique Ă rayures.
- La mère de Bélise, portant une grande perruque XVIIIe pleine d’oiseaux, du rubans et de rangées de petites perles.
- Deux lutins (en espagnol duendes), qui doivent être joués par deux enfants.
Résumé de la pièce
L'histoire est celle d'un bourgeois, Don PerlimplĂn, qui, sur les conseils de sa gouvernante Marcolfa, prend pour Ă©pouse une jeune femme volage et impudique, BĂ©lise, qui n'hĂ©site pas Ă le cocufier avec cinq hommes la nuit mĂŞme de son mariage.
La jeune femme est de plus en plus attirée par un homme mystérieux enveloppé dans une cape rouge qu’elle a vu passer sous les fenêtres de la maison.
Sur ordre de PerlimplĂn, Marcolfa remet Ă BĂ©lise un billet l’invitant Ă rejoindre le jeune homme dans le jardin. Elle s’y rend et rencontre d’abord PerlimplĂn ; celui-ci feint de comprendre qu’elle a donnĂ© rendez-vous Ă son amant et annonce qu’il va le tuer et sort son poignard. Il disparaĂ®t de scène et apparaĂ®t sur scène un homme enveloppĂ© de la cape rouge, le poignard plantĂ© dans sa poitrine. Il s’agit en fait de PerlimplĂn lui-mĂŞme. Il meurt sur scène. C’est Marcolfa qui rĂ©vèle la clef du mystère : « Nous allons maintenant l’ensevelir dans la cape rouge de jeune homme qu’il mettait pour passer sous ses propres balcons[4]. »
Genre de la pièce
Originellement conçue comme « grotesque », la pièce a beaucoup Ă©voluĂ© entre les premières Ă©bauches et la version finale. Ainsi, Ă©taient originellement prĂ©sents la Mort personnifiĂ©e, des jeunes gens, une danseuse et quatre voisines de PerlimplĂn. Ces personnages disparaissent dans la version finale, se trouvent intĂ©riorisĂ©s (la Mort), Ă©voquĂ©s (les jeunes gens, la danseuse) ou bien rĂ©duits — les quatre voisines deviennent deux lutins.
La pièce porte le sous-titre gĂ©nĂ©rique d’aleluya erĂłtico. Les aleluyas Ă©taient originellement des estampes distribuĂ©es par l’Église, portant un dessin commentĂ© par un distique, et le mot “allĂ©luia”. Par la suite, les aleluyas devinrent Ă©galement profanes. Le personnage mĂŞme de don PerlimplĂn est le protagoniste de plusieurs aleluyas, mais Lorca n’en retient en fait que le nom, et le transforme radicalement — ces transformations faisant Ă©cho Ă celles que subit la pièce au fur et Ă mesure des Ă©bauches.
Le mot aleluya est traduit par André Belamich en “estampe”, et par Jean Camp en “imagerie”.
Musique
Il y a dans Les Amours de Don PerlimplĂn de nombreuses interventions musicales. Il s’agit soit de chansons (voix de BĂ©lise dans le prologue, chanson de PerlimplĂn au premier tableau, scène III, sĂ©rĂ©nade au troisième tableau, scène II), soit de musique qui parvient Ă la scène (dans le prologue « on entend un piano », Ă la scène II du premier tableau, « Douce musique de rĂŞve, des flĂ»tes rĂ©sonnent », outre plusieurs interventions de carillon, en particulier Ă la fin de la pièce).
Par ailleurs, une pianiste, Pura Lago, interprétait à la création, en 1933, cinq sonates de Domenico Scarlatti[5].
Voir aussi
- Margarita Ucelay, spécialiste de cette œuvre[6].
Bibliographie
Il n’existe, à notre connaissance, que deux traductions françaises de cette pièce qui soient régulièrement citées. Nous indiquons à chaque fois le titre adopté par le traducteur. Une troisième traduction datant de 1944 et faite par Jean-Marie Soutou et publiée à Lyon aux Editions L'Arbalète en 1944 avec un tirage de 700 exempaires est quasiment introuvable
Traduction
- Federico GarcĂa Lorca, Ĺ’uvres complètes II, Ă©dition Ă©tablie par AndrĂ© Belamich, Gallimard, « La PlĂ©iade », 1990, Les Amours de Don Perlimplin avec BĂ©lise en leur jardin, p. 301 Ă 324. La traduction d’AndrĂ© Belamich reprise dans ce volume date de 1955.
- Amour de Don Perlimplin avec Belise en son jardin, adaptation française de Jean Camp, publiée d’abord par la Librairie théâtrale (collection « Éducation et théâtre », 1954) et repris dans L'Avant scène, no 154, 1957.
- Amours de Perlimplin & de Bélise dans leur jardin. Alleluia érotique en trois tableaux et un prologue. Traduction Jean-Marie Soutou. À Lyon, Editions L'Arbalète. 1944
Études
- Isabelle Cabrol, « Amor de Don PerlimplĂn con Belisa en su jardĂn ou la rĂ©Ă©criture avant-gardiste d’une aleluya populaire », Marge(s) Pandora no 9, 2009, Textes rĂ©unis par Christine Marguet et Marie Salgues, DĂ©partement d’Études Hispaniques et Hispano-AmĂ©ricaines, UniversitĂ© Paris 8, p. 179-198.
- Francis Ferguson, « Don Perlimplin: Lorca's Theatre-Poetry », The Kenyon Revue, vol. XVII, Summer 1955, p. 337-348.
- Emilio Perai Vega, « Morir y matar amando: Amor de don PerlimplĂn con Belisa en su jardĂn », Arbor CLXXVII, 699-700 (Marzo-Abril 2004), p. 691-702.
Notes et références
- Notice d’AndrĂ© Belamich, dans Federico GarcĂa Lorca, Ĺ’uvres complètes II, Ă©dition Ă©tablie par AndrĂ© Belamich, Gallimard, « La PlĂ©iade », 1990, p. 1016.
- René Solis, « Lorca, sans poudre de Perlimplin », Libération, 25 mars 1997, lire en ligne, (page consultée le 10 mai 2011)
- André Belamich, op. cit., p. 1017.
- Traduction d’André Belamich, op. cit., p. 323.
- Isabelle Cabrol, « Amor de Don PerlimplĂn con Belisa en su jardĂn ou la rĂ©Ă©criture avant-gardiste d’une aleluya populaire », p. 186.
- (es) « Margarita Ucelay y el exilio femenino », sur Crónica Global