Lemme local de LovĂĄsz
Le lemme local de LovĂĄsz (parfois abrĂ©gĂ© LLL) est un rĂ©sultat de thĂ©orie des probabilitĂ©s discrĂštes, dĂ» Ă LĂĄszlĂł LovĂĄsz et Paul ErdĆs. Il gĂ©nĂ©ralise le fait que la probabilitĂ© que des Ă©vĂ©nements indĂ©pendants arrivent en mĂȘme temps est Ă©gale au produit des probabilitĂ©s de ces Ă©vĂ©nements. Il existe plusieurs versions de ce rĂ©sultat. Le lemme local est utilisĂ© dans plusieurs domaines, notamment en combinatoire et en informatique thĂ©orique. Dans ces domaines il est parfois Ă©noncĂ© informellement de la maniĂšre suivante : Ă©tant donnĂ© un ensemble de mauvais Ă©vĂ©nements, n'ayant pas de grande dĂ©pendances les uns avec les autres, il est possible d'Ă©viter tous ces Ă©vĂ©nements Ă la fois.
Introduction
Le lemme local peut ĂȘtre vu comme une version de la mĂ©thode probabiliste. Cette technique de combinatoire permet de montrer que certains objets existent en montrant que selon certaines constructions alĂ©atoires la probabilitĂ© de crĂ©er un tel objet est non nul.
Par exemple, Ă©tant donnĂ© une famille d'Ă©vĂ©nements indĂ©pendants, de probabilitĂ©s strictement infĂ©rieures Ă 1, la probabilitĂ© qu'aucun d'eux n'apparaissent est non nulle. Le lemme local peut permettre d'obtenir le mĂȘme rĂ©sultat, si chaque Ă©vĂ©nement n'est dĂ©pendant que d'un nombre bornĂ© d'autres Ă©vĂ©nements.
DĂ©finitions
Dans la suite, on note les événements , dans un espace de probabilité quelconque.
Les dĂ©pendances entre ces Ă©vĂ©nements peuvent ĂȘtre reprĂ©sentĂ©es par un graphe non orientĂ© G=(V,E), appelĂ© graphe des dĂ©pendances, dĂ©fini par :
- chaque nĆud reprĂ©sente un Ă©vĂ©nement,
- une arĂȘte (u,v) appartient au graphe si et seulement si les Ă©vĂ©nements et sont dĂ©pendants.
ĂnoncĂ©s
On donne d'abord l'énoncé général, puis la forme symétrique qui en est un corollaire, plus facilement utilisable[1].
Cas général
S'il existe une famille de réels de [0,1] tel que pour tout i :
Alors :
Cas symétrique
Si pour tout i, , si chaque Ă©vĂ©nement ne dĂ©pend que d'au plus d autres Ă©vĂ©nements, i.e si le graphe de dĂ©pendances est de degrĂ© maximum d, et si , oĂč e est la base du logarithme naturel, alors .
Applications
Domaines d'application
Le lemme local a été utilisé dans de nombreux domaines de la combinatoire, notamment la théorie des graphes extrémaux, la théorie de Ramsey[2] et la théorie des graphes aléatoires[3], ainsi qu'en informatique théorique, notamment pour un cas particulier du problÚme SAT, pour des algorithmes de routage[4] - [5] et pour des problÚmes de coloration[6].
Exemple du problĂšme k-SAT
Le problĂšme SAT, consiste, Ă©tant donnĂ© une formule logique sous forme normale conjonctive, de savoir s'il existe une assignation des variables telle que la formule est vraie, c'est-Ă -dire Ă dĂ©cider la satisfiablilitĂ© de la formule. On fait deux hypothĂšses : il y a au plus k littĂ©raux par clause (c'est le problĂšme k-SAT) et chaque littĂ©ral nâapparaĂźt que dans au plus clauses. Alors le lemme permet de dire que la formule est satisfiable[7]. En effet, si les valeurs des variables sont prises au hasard, alors les Ă©vĂ©nements « la clause numĂ©ro i est satisfaite » satisfont les hypothĂšses du lemme symĂ©trique avec et .
Historique
Le lemme local a Ă©tĂ© publiĂ© dans l'article ErdĆs et LovĂĄsz 1975 avec une hypothĂšse plus forte : . Il fut amĂ©liorĂ© pour obtenir les bornes donnĂ©es ici. Les premiĂšres preuves du lemme Ă©taient non-constructives, mais une preuve constructive a Ă©tĂ© trouvĂ©e autour de 2010, par Robin A. Moser et GĂĄbor Tardos[8] - [9]. Cette derniĂšre preuve a aussi des consĂ©quences algorithmiques, on parle d'ailleurs de lemme local de LovĂĄsz algorithmique (en). La mĂ©thode utilisĂ©e est appelĂ©e compression de l'entropie (en).
Notes et références
- Ces formes de l'énoncé sont issues de Motwani et Raghavan 1995 ; d'autres formes existent.
- L'un des premiers articles utilisant le lemme le fait pour donner une borne infĂ©rieure sur les nombres de Ramsey : Joel Spencer, « Asymptotic lower bounds for Ramsey functions », Discrete Mathematics, vol. 20,â , p. 69-76
- Cette liste d'applications est issue de Motwani et Raghavan 1995.
- Voir un exemple dans Regamey 2012, section 5.
- L'article original est : Frank Thomson Leighton, Bruce M. Maggs et Satish Rao, « Packet Routing and Job-Shop Scheduling in O(Congestion + Dilation) Steps », Combinatorica, vol. 14, no 2,â , p. 167-186.
- Par exemple l'article : Daniel Marx et Marcus Schaefer, « The complexity of nonrepetitive coloring », Discrete Applied Mathematics, vol. 157, no 1,â , p. 13-18.
- Motwani et Raghavan 1995.
- Robin A. Moser et GĂĄbor Tardos, « A constructive proof of the general lovĂĄsz local lemma », Journal of the ACM, vol. 57, no 2,â
- Un post sur cette preuve : (en) Terence Tao, « Moserâs entropy compression argument », sur terrytao.wordpress.com, (consultĂ© le ).
Bibliographie
- (en) Paul ErdĆs et LĂĄszlĂł LovĂĄsz, « Problems and results on 3-chromatic hypergraphs and some related questions », dans Infinite and Finite Sets (to Paul ErdĆs on his 60th birthday), vol. II, (lire en ligne), p. 609â627
- (en) Rajeev Motwani et Prabhakar Raghavan, Randomized Algorithms, Cambridge, New York et Melbourne, Cambridge University Press, (réimpr. 1997, 2000), 1re éd., 476 p. (ISBN 978-0-521-47465-8, lire en ligne), chap. 5.5 (« The Lovåsz local lemma »), p. 115-120
- Samuel Regamey, MĂ©thode probabiliste et Lemme local de LovĂĄsz (Rapport de projet), EPFL, (lire en ligne)