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Le Bouffon Calabacillas (VĂ©lasquez, Madrid)

Le Bouffon Calabacillas ou Le Bouffon aux calebasses (en espagnol : El bufĂłn Calabacillas) est un portrait de Diego VelĂĄzquez. C’est une huile sur toile reprĂ©sentant un bouffon, « homme de plaisir » ou truand de la cour de Philippe IV d'Espagne. La toile est conservĂ©e au musĂ©e du Prado depuis sa crĂ©ation en 1819.

Le Bouffon Calabacillas
Le Bouffon aux calebasses
Artiste
Date
Type
Technique
Dimensions (H Ă— L)
106,5 Ă— 82,5 cm
No d’inventaire
P001205
Localisation

Histoire

Il pourrait s’agir d’un des « Quattro rettrattos de diferentes Sujettos y enanos Originales de Uelazquez »[1] qui sont mentionnĂ©s dans la premiĂšre piĂšce de la Tour de la Parada dans l’inventaire de 1701[2]. D’aprĂšs LĂłpez-Rey, ce serait Ă©galement celui citĂ© dans l’inventaire de 1747, sans mention de peintre, comme un « cadre d’un nain riant » et de dimensions lĂ©gĂšrement supĂ©rieures.

En 1722, la toile est indiquĂ©e comme provenant de la Tour de la Parada. Elle fut inventoriĂ©e au palais royal de Madrid sous le numĂ©ro 1012, en compagnie de trois autres nains de VelĂĄzquez – Francisco Lezcano, Diego de Acedo et SebastiĂĄn de Morra – il est dĂ©crit comme un portrait de « bouffon avec un petit col Ă  la flamande » aux dimensions actuelles[3]. L’inventaire de 1789 du mĂȘme palais le localise dans une « piĂšce Ă  manger » avec SebastiĂĄn de Morra ; pour la premiĂšre fois figure le nom de « Bobo de Coria » (l’imbĂ©cile de Coria)[4], expression qui, mĂȘme sans fondement, fut maintenue dans les inventaires suivants. En 1819, la toile intĂšgre le musĂ©e du Prado, toujours sous ce nom.

Le surnom « aux Calebasses » fut donnĂ© par Cruzada Villaamil en 1885. Il est liĂ© Ă  la prĂ©sence de ces cucurbitacĂ©es des deux cĂŽtĂ©s du bouffon. La toile fut admise sous ce nom dans le catalogue du Prado de 1910 oĂč il Ă©tait prĂ©cisĂ© « accompagnĂ© d’une calebasse[5] ».

Un «Juan aux Calebasses», appelĂ© Ă©galement « Calabacillas » et « le bigleux », est documentĂ© en 1630 comme faisant partie du service du Cardinal et Infant Ferdinand d’Autriche, puis Ă  partir de 1632, Ă  la cour de Philippe IV d'Espagne. Il devait ĂȘtre un bouffon d’excellente rĂ©putation par les soldes Ă©levĂ©s qu’il recevait et par les services auxquels il avait droit (chariot, mule, et bĂȘtes de somme)[6]. D’aprĂšs la documentation conservĂ©e, VelĂĄzquez le peignit Ă  deux reprises. La seconde toile pourrait ĂȘtre Le Bouffon Calabacillas (1626-1633) (musĂ©e d’Art de Cleveland), bien que ce soit discutĂ© par la critique Ă  cause de l’aspect bien plus juvĂ©nile de cette derniĂšre toile par rapport au portrait du Prado.

Sa mort, en 1639, fixe une date limite pour la rĂ©alisation de cette toile, bien que par le passĂ©, des critiques lui attribuĂšrent des dates postĂ©rieures en se basant sur la technique trĂšs avancĂ©e pour le cou, les poings, le schĂ©matisme des mains et le flou du visage avec lesquels VelĂĄzquez accentue l’inquiĂ©tante vision du difforme. Une date peu antĂ©rieure Ă  1639 serait cependant admissible par sa proximitĂ© avec d’autres bouffons peints pour la Tour de la Parada bien que les autres soient des toiles de plein air. Ce nain se trouve enfermĂ© dans une petite chambre nue et sans perspective, dans un espace clos par une tache marron informe sur sa droite[7].

Description et caractéristiques techniques

Le bouffon louche, semble assis dans une posture incommode sur de petites pierres, les jambes repliĂ©es et croisĂ©es. Il se frotte les mains. Il est vĂȘtu d’un vĂȘtement vert avec des manches longues avec au niveau des poignets et du cou de la dentelle. Devant il tient un verre ou un petit baril de vin, une calebasse sur le cĂŽtĂ©. Elle est peinte au-dessus d’une jarre antĂ©rieure avec ses anses. Enfin, il y a Ă  sa droite une gourde dorĂ©e qui fut frĂ©quemment interprĂ©tĂ©e comme une autre calebasse pour forcer l’identification du personnage anonyme. Dans les anciens inventaires la toile figurait sous le titre « le bouffon Juan Calebasse »[5]. Diego Angulo ĂĂ±iguez signala que Velasquez dans sa composition avait pu se servir d’une gravure d’Albrecht DĂŒrer titrĂ©e El desesperado (Le dĂ©sespĂ©rĂ©) et qui, d’aprĂšs Alfonso E. PĂ©rez SĂĄnchez, exclut le caractĂšre « surprenant » de la toile. Il insiste au contraire sur l’élaboration de la conception qui pourrait occulter des intentions allĂ©goriques inconnues[5].

Le caractĂšre fortement rĂ©aliste du geste, cependant, affirme le caractĂšre vĂ©ridique de la toile. Qui que soit le personnage, il avait de clairs symptĂŽmes de retards mentaux qui sont analysĂ©s par le peintre. La pose dĂ©sinvolte contraste avec le sourire vide, l’isolement, le geste presque autiste des mains et la position du bouffon, rĂ©fugiĂ© dans un coin d’une piĂšce vide comme l’écrivit Fernando MarĂ­as[8].

Le portrait fut peint rapidement, avec des couches de couleurs quasi transparentes. Velasquez utilisa de grandes quantitĂ©s d’agglutinants. Les repentir (peinture)s sont bien visibles sur la tĂȘte et la calebasse situĂ©e Ă  gauche. Ils furent faits pendant que VelĂĄzquez peignait et avec les mĂȘmes pigments. Les coups de pinceaux sont trĂšs lĂ©gers et avec peu de pĂąte sur toute la superficie de la toile. Il arrive Ă  rendre le flou du visage en frottant le pinceau avec trĂšs peu de matiĂšre sur un modelĂ© existant, obscurcissant ou Ă©claircissant certaines zones. Le cou et les poings furent Ă©galement peints avec des coups de pinceau fins et apparemment dĂ©plumĂ©s sur un vĂȘtement dĂ©jĂ  terminĂ©. Par ses Ă©volutions techniques, les « Calebasses » seraient le dernier des bouffons de la Tour de la Parada Ă  ĂȘtre peint. VelĂĄzquez utilisa une technique similaire mais plus rapide que pour les autres toiles, comme le montrerait la base obscure de la prĂ©paration, intĂ©grĂ©e par moments comme Ă©lĂ©ment de fond. Cette base est la mĂȘme que celle utilisĂ©e dans le portrait du bouffon don Diego de Acedo mais sans les carnations roses ajoutĂ©es aux autres toiles de la Tour de la Parada[9]. Ces toiles sont faites durant une dĂ©cennie, 1630, particuliĂšrement prolifique de VelĂĄzquez avant qu’il ne soit pris par ses fonctions Ă  la cour.

Références

  1. Quatre portraits sur différents sujets et nains originaux de Vélasquez
  2. Corpus velazqueño, p. 561.
  3. LĂłpez-Rey, p. 208.
  4. Corpus velazqueño, p. 667.
  5. Catålogo de la exposición El retrato espannéel (A. E. Pérez Sånchez), p. 345.
  6. Catålogo de la exposición El Palacio del rey planeta, 2005, (J. Álvarez Lopera), p. 88.
  7. Brown, 1986, p. 148.
  8. MarĂ­as, 1999, p. 149.
  9. Garrido, 1992, pp. 506-507.

Bibliographie

  • Jonathan Brown, VelĂĄzquez. Pintor y cortesano, Madrid, Alianza Editorial, , 322 p. (ISBN 84-206-9031-7)
  • « VelĂĄzquez », Catalogue de l'exposition, Madrid, MusĂ©e National du Prado,‎ (ISBN 84-87317-01-4)
  • « El Palacio del Rey Planeta. Felipe IV y el Buen Retiro », Catalogue de l'exposition, Madrid, MusĂ©e National du Prado,‎ (ISBN 84-8480-081-4)
  • « El retrato espannĂ©el del Greco a Picasso », Catalogue de l'exposition, Madrid, MusĂ©e National du Prado,‎ (ISBN 84-8480-066-0)
  • (es) J. M. Pita Andrade (dir.), Corpus velazqueño. Documentos y textos, vol. II, Madrid, Ministerio de educaciĂłn, cultura y deporte, DirecciĂłn general de bellas artes y bienes culturales, , 964 p. (ISBN 84-369-3347-8)
  • Carmen Garrido PĂ©rez, VelĂĄzquez, tĂ©cnica y evoluciĂłn, Madrid, MusĂ©e National du Prado, (ISBN 84-87317-16-2)
  • (en) JosĂ© LĂłpez-Rey, VelĂĄzquez. Catalogue raisonnĂ©, vol. II, Cologne, Taschen Wildenstein Institute, , 328 p. (ISBN 3-8228-8731-5)
  • (es) Fernando MarĂ­as Franco, VelĂĄzquez. Pintor y criado del rey., Madrid, Nerea, , 247 p. (ISBN 84-89569-33-9)

Liens externes

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