LSE (langage)
LSE, acronyme du nom officiel Langage Symbolique d'Enseignement, est un langage de programmation, pour ordinateurs, conçu au dĂ©but des annĂ©es 1970 par une Ă©quipe de l'Ăcole supĂ©rieure d'Ă©lectricitĂ© (SupĂ©lec)[1]. Cette Ă©quipe Ă©tait composĂ©e des enseignants ingĂ©nieurs Yves Noyelle et StĂ©phane Berche, sous la direction de Jacques Hebenstreit. Ă l'instar du BASIC, le langage LSE fut initialement destinĂ©, entre autres, aux dĂ©butants en programmation[2] ; il possĂšde une syntaxe francophone. Il a fait l'objet d'une normalisation par l'AFNOR (AFNOR Z 65-020)[3] dans sa version d'origine. La mise au point et les ajustements initiaux du langage LSE furent effectuĂ©s dĂšs 1972 en mode collaboratif, entre les ingĂ©nieurs de SupĂ©lec et des enseignants du lycĂ©e Pierre-Corneille, Ă La Celle-Saint-Cloud, sur un mini-ordinateur CII Mitra 15 (premier ordinateur livrĂ© et premier lycĂ©e dotĂ©, dans le cadre de l'opĂ©ration ministĂ©rielle dite « ExpĂ©rience des 58 lycĂ©es »[4] menĂ©e entre 1972 et 1980).
Histoire
LSE est le résultat d'une évolution d'un langage plus ancien, le LSD, conçu lui aussi à Supélec[5].
Son sigle avait initialement deux significations :
- Langage symbolique d'enseignement (signification historique, officielle, conservée et toujours usuelle pour l'acronyme LSE) ;
- Langage de Sup-Ălec ;
auxquelles sont venues se joindre, parmi bien d'autres :
- Langage Simple Ă Enseigner ;
- Langage Sans Espoir...
LSE doit sa diffusion Ă son implĂ©mentation dĂ©cidĂ©e en 1972 par le MinistĂšre de l'Ăducation nationale français, dans un premier temps sur les mini-ordinateurs français CII Mitra 15 et TĂ©lĂ©mĂ©canique T1600[6] - [7] retenus pour 58 Ă©tablissements[8] de l'enseignement secondaire (opĂ©ration dite « ExpĂ©rience des 58 lycĂ©es »). Les enseignants et Ă©lĂšves intĂ©ressĂ©s s'appropriĂšrent ce langage de programmation par le biais des clubs informatiques crĂ©Ă©s dans les lycĂ©es, dĂšs 1972, lors de cette opĂ©ration expĂ©rimentale[9]. Ă partir de 1980, les micro-ordinateurs « compatibles IBM » du plan « 10 000 micro-ordinateurs »[10] (succĂ©dant Ă l'opĂ©ration des 58 lycĂ©es) furent Ă©quipĂ©s entre autres de ce langage français de programmation.
Le LSE, dans sa version native de 1972, supportait déjà les procédures sous-programmes et procédures fonctions (contrairement au BASIC)[11], aussi bien procédures internes qu'externes. Pour les applications de conception assistée par ordinateur, Le LSE connut dÚs 1972 deux évolutions adaptées au mini-ordinateur CII Mitra 15 : le LSG (Langage Symbolique Graphique) et le LST (Langage Symbolique de Tests)[5]. Plus tard, en 1983, le langage initial de programmation LSE a été révisé et modernisé (LSE-83 ou LSE-1983) par Jacques Arsac[12] : ceci pour enfin intégrer la notion de boucle explicite indispensable à toute bonne programmation structurée, et se débarrasser définitivement de son « ALLER EN » (goto). à noter, l'introduction des exceptions.
Dans les l'enseignement supérieur, des initiatives, travaux, projets et réalisations également menés avec le Langage Symbolique d'Enseignement sont mentionnés, parmi lesquels :
- L'enseignement du LSE en université : furent concernés les étudiants en lettres et sciences humaines, au centre de calcul universitaire de Nancy Lorraine, en 1974[13] ;
- Le logiciel CARTO, un préambule aux travaux du projet cartographique de données statistiques PHILCARTO : le logiciel CARTO fut écrit en LSE sur mini-ordinateur CII Mitra 15, au centre de calcul de l'université de Paris X - Nanterre, en 1979[14] ;
- Les deux logiciels MODUL et COMBI, un prĂ©ambule aux travaux du projet IMAGIX : ils Ă©taient Ă©crits en LSE sur mini-ordinateur TĂ©lĂ©mĂ©canique T1600, sur lequel Ă©taient reliĂ©s des terminaux graphiques Tektronix[15]. Ce projet fut menĂ© en 1982[16] au centre d'Ă©tudes et de recherches architecturales, organisme subordonnĂ© Ă la direction de l'architecture du ministĂšre de l'Ăquipement lors des annĂ©es 1980.
Cela n'a pas empĂȘchĂ© le langage LSE de sombrer dans l'oubli Ă la suite de l'abandon de ce langage de programmation, sur dĂ©cision du MinistĂšre de l'Ăducation nationale, dans les annĂ©es 1990. Cependant, il existe toujours une petite communautĂ© d'utilisateurs du LSE, d'autant que ce langage a fait l'objet d'une rĂ©vision proposĂ©e par Luc Goulet (LSE-2000), rĂ©vision qui reprend en bonne partie les propositions de 1983 et inclut des amĂ©liorations. Cette modification ajoute au langage une programmation encore plus structurĂ©e, de nouveaux types, de nouveaux opĂ©rateurs comme NI, ET QUE, OU QUE et SELON-DANS-SINON et de nouvelles structures de contrĂŽle comme ĂVALUER et SELON. Elle ajoute Ă©galement la prise en charge de la programmation orientĂ©e objet. Un wikilivre dĂ©crit la proposition LSE-2000 et un site officiel pour la proposition existe Portail LSE. Par ailleurs, dĂšs 1972, divers ouvrages ont Ă©tĂ© publiĂ©s sur le langage français de programmation LSE[17] - [18] - [19] - [20] - [21] - [22] - [23] - [24] - [25] - [26] - [27] - [28] au fil de ses diffĂ©rentes Ă©volutions.
Justification politique
Les ambitions pédagogiques annoncées pour ce langage français de programmation visaient également à défendre le rÎle culturel de la France dans le monde, comme le montre le texte suivant[29], remis au ministÚre en 1982 par l'EPI (association Enseignement Public et Informatique, réunissant des enseignants utilisateurs de l'informatique dans les différentes disciplines et des enseignants de la discipline informatique) :
« Le LSE doit ĂȘtre, pour l'instant, conservĂ©.
Il est totalement maĂźtrisĂ© dans son Ă©volution par les enseignants eux-mĂȘmes. Il est apte, par sa normalisation actuelle comme par ses dĂ©veloppements en cours (graphique) Ă rĂ©pondre aux besoins dans tous les ordres d'enseignement. Il peut ĂȘtre amĂ©liorĂ© (Bulletin no 26, p. 14). Son vocabulaire et sa syntaxe française constituent un argument dĂ©cisif dĂšs lors que l'introduction de l'informatique est rĂ©alisĂ©e dans les collĂšges, les Ă©coles et la formation permanente. Il est urgent de se prĂ©occuper d'installer le LSE sur les micro-ordinateurs français destinĂ©s au grand public. (L'EPI a pris des contacts avec la CAMIF et THOMSON Ă ce sujet).
Ainsi la France est en mesure de fournir un modĂšle complet d'introduction de l'informatique dans l'Ă©ducation. Ce modĂšle peut ĂȘtre un des Ă©lĂ©ments permettant de retrouver le rĂŽle culturel qu'elle a perdu dans de nombreux pays (des versions du LSE en espagnol et en anglais existent dĂ©jĂ ). »
Un article développant ces problématiques est paru en novembre 2015 dans le bulletin 1024 n°7 de la Société Informatique de France[2].
Exemples de programme
LSE a fait le choix d'utiliser des majuscules, caractÚres présents sur les téléimprimeurs Teletype ASR-33. Le langage REXX d'IBM fera en 1979 le choix inverse pour des raisons de lisibilité.
Les bouteilles de biĂšre
1*CHANSON DES 99 BOUTEILLES DE BIERE 2*PASCAL BOURGUIGNON, <PJB@INFORMATIMAGO.COM>, 2003 10 FAIRE 20 POUR Nâ99 PAS -1 JUSQUA 1 20 &STROF(N) 30 AFFICHER['IL EST TEMPS DââALLER AU MAGASIN.',/] 40 TERMINER 100 PROCEDURE &STROF(N) LOCAL S1,S0;CHAINE S1,S0;S1â"S";S0â"S" 110 SI N=2 ALORS S0â"" SINON SI N=1 ALORS DEBUT S1â"";S0â"" FIN 120 AFFICHER[U,' BOUTEILLE',U,' DE BIERE SUR LE MUR.',/]N,S1 130 AFFICHER[U,' BOUTEILLE',U,' DE BIERE.',/]N,S1 140 AFFICHER['EN PRENDRE UNE, LA FAIRE PASSER.',/] 150 AFFICHER[U,' BOUTEILLE',U,' DE BIERE SUR LE MUR.',2/]N-1,S0 160 RETOUR
Anagramme récursive
Exemple extrait du papier de Jacques Arsac sur LSE83[12] :
1 CHAINE A,B,BP 5 FAIRE 10 AFFICHER 'A = ' ;LIRE A ; SI A=ââ ALORS FINI IS 11 AFFICHER 'B = ' ;LIRE B ; BP â B 12 15 R SI LGR(A) # LGR(B) ALORS .FAUX. SINON &ANAG(A,B) IS 20 SI R ALORS AFFICHER A, 'EST ANAGRAMME DE ',BP 21 SINON AFFICHER A, 'NââEST PAS ANAGRAMME DE 1, BP 22 IS 25 BOUCLER 29 30 TERMINER 31 50 FONCTION &ANAG(U,V) LOCAL J {lgr(u)=lgr(v)} 51 SI U=' ' ALORS RESULTAT .VRAI. IS 52 SI J = 0 ALORS RESULTAT .FAUX. IS 54 RESULTAT &ANAG(SCH(U,2, ' '),MCH(V,J,l, ' ')) 55 __SUB_LEVEL_SECTION_4__amp;ANAG 99 $
Exemple LSE2000
(* ** MĂTHODE D'EUCLIDE POUR TROUVER LE PLUS GRAND DIVISEUR COMMUN D'UN ** NUMĂRATEUR ET D'UN DĂNOMINATEUR. ** L. Goulet 2010 *) PROCĂDURE &PGDC(ENTIER U, ENTIER V) : ENTIER LOCAL U, V ENTIER T TANT QUE U > 0 FAIRE SI U< V ALORS TâU UâV VâT FIN SI U â U - V BOUCLER RĂSULTAT V FIN PROCĂDURE PROCĂDURE &DEMO(ENTIER U, ENTIER V) LOCAL U, V AFFICHER ['Le PGDC de ',U,'/',U,' est ',U,/] U, V, &PGDC(U,V) FIN PROCĂDURE &DEMO(9,12)
Références
- [Paru initialement dans le bulletin de l'EPI Association, n° 6, dĂ©cembre 1973] Jacques Hebenstreit et Yves Noyelle, « Un langage symbolique destinĂ© Ă l'enseignement : LSE », Revue de l'EPI Association, Association Enseignement public & informatique (EPI),â (lire en ligne, consultĂ© le )
- Jacques BaudĂ©, « Le systĂšme LSE », « 1024 » : bulletin de la SociĂ©tĂ© informatique de France, SociĂ©tĂ© informatique de France,â , p. 41-56 (DOI 10.48556/SIF.1024.7.41, lire en ligne [PDF], consultĂ© le )
- AFNOR Z 65-020, « Bulletin de l'EPI», Bulletin de l'EPI Asso, no 50, , p. 235-238 ;
- Jacques BaudĂ©, « LâexpĂ©rience des « 58 lycĂ©es » », « 1024 » : bulletin de la SociĂ©tĂ© informatique de France, SociĂ©tĂ© informatique de France, no 4,â , p. 105-115 (DOI 10.48556/SIF.1024.4.105, lire en ligne [PDF], consultĂ© le )
- Yves Noyelle, « La saga du LSE et de sa famille, LSD/LSG/LST », Bulletin de l'EPI, no 54, , p. 216â233 ; extrait des actes du colloque sur l'histoire de l'informatique en France (Grenoble, 3-), Philippe Chatelin (dir.), ENSIMAG, 1988, vol. 2, 428 p. (ISBN 2-950288-70-7) (Ă©d. complĂšte) (ISBN 2-950288-72-3) (vol. 2).
- Association pour un conservatoire de l'informatique et de la télématique, « Collection ACONIT, les mini-ordinateurs français Télémécanique T1600 et CII Mitra 15 », sur db.aconit.org (consulté le )
- Daniel Caous et Jacques BaudĂ©, « Les mini-ordinateurs « Ăducation nationale » de la dĂ©cennie 1970 », « 1024 » : bulletin de la SociĂ©tĂ© informatique de France, SociĂ©tĂ© informatique de France,â , p. 41-48 (DOI 10.48556/SIF.1024.19.41, lire en ligne [PDF], consultĂ© le )
- EPI Association, « Liste des 58 lycées », sur epi.asso.fr, Enseignement public et informatique, (consulté le )
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- [Paragraphe « Enseignement de l'informatique », sous-paragraphe « Le temps des pionniers »] Monique Grandbastien, « Enseignement de l'informatique et informatique dans l'enseignement, 50 ans dĂ©jĂ ! », EPInet : la revue Ă©lectronique de l'EPI Association, Association Enseignement public & informatique (EPI), no 232,â (ISSN 2429-3067, lire en ligne, consultĂ© le )
- Philippe Waniez, « Philcarto : histoire de vie dâun logiciel de cartographie », Cybergeo, Cybergeo,â , [La dĂ©cennie 1975-1985, paragraphe 8], article no 497 (DOI 10.4000/cybergeo.23076, lire en ligne, consultĂ© le )
- CĂ©cile Welker, La fabrique de « nouvelles images »LâĂ©mergence des images de synthĂšse en France dans la crĂ©ation audiovisuelle (1968-1989) : LâĂ©mergence des images de synthĂšse en France dans la crĂ©ation audiovisuelle, vol. 1 (ThĂšse de doctorat en Arts et sciences de lâart), Paris, UniversitĂ© Sorbonne Nouvelle - Paris 3 - Ăcole Doctorale 267 Arts et MĂ©dias - Institut de Recherche sur le CinĂ©ma et lâAudiovisuel, (HAL tel-01488940, lire en ligne), p. 57, 125
- [Centre d'Informatique et de Méthodologie en Architecture - Histoire, alinéa 1982] « CIMA - Histoire de la 3D », sur siggraph.org (consulté le )
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- Alain Thomazo, LSE Programmer en français, Paris, Scodel, coll. « Un fil d'ariane enseignement », , 66 p. (ISBN 2-901001-16-5)
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- Odette Arsac-Mondou, Christiane Bourgeois-Camescasse et Mireille Gourtay, Pour aller plus loin en programmation, Ăditions Cedic / Fernand Nathan, , 135 p. (ISBN 2-7124-0317-7)
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- Collectif AmĂ©dĂ©e Ducrin, Programmation 2/2 : de l'algorithme au programme BASIC - PASCAL - LSE, Ăditions Dunod, coll. « Dunod informatique », , 257 p. (ISBN 2-04-015672-0)
- Henri-Claude Herbert, Lire L.S.E. graphique, Ăditions Cedic / Nathan, , 143 p. (ISBN 2-7124-0579-X)
- EPI Association, « Participation EPI au « schĂ©ma directeur » », Bulletin de l'EPI, Association Enseignement public & informatique (EPI), no 28,â , p. 036 (lire en ligne, consultĂ© le )
Liens externes
- « Le systÚme LSE » [PDF], sur Société Informatique de France
- « LSE 83 » [PDF], sur EPI
- « La saga du LSE et de sa famille » [PDF], sur HAL
Voir aussi
- BASIC 1.0
- Plan informatique pour tous
- Linotte, langage de programmation en français