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Kurrent

La Deutsche Kurrentschrift ou Kurrent, « Ă©criture cursive allemande Â», est une Ă©criture utilisĂ©e en Allemagne et dans les pays de culture germanique jusqu’au milieu du XXe siècle. L’étymologie est le latin currere, « courir Â», qui a Ă©galement donnĂ© le français « cursive Â». C’est la forme manuscrite des diverses formes de gothique allemande ou Fraktur utilisĂ©es par l’imprimerie. Bien qu’on l’oppose Ă  l’écriture latine, c’est aussi une forme d’écriture latine, avec ses spĂ©cificitĂ©s propres.

Spécimen de Kurrentschrift (1865), alphabet complet et ligatures
Schein und sein, manuscrit de Wilhelm Busch
Dernière écriture en Sütterlin dans un cahier d’écolière, Alsace, février 1942

Histoire

L’écriture Ă©volue depuis les origines en fonction de multiples critères qui dĂ©terminent des « styles Â» nationaux et rĂ©gionaux. L’apparition de l’écriture gothique est marquĂ©e par l’importance des verticales, le resserrement gĂ©nĂ©ral, la brisure des courbes Ă©voquant les arcs brisĂ©s de l’architecture. En Allemagne le terme dĂ©signant Ă  la fois ce type d’écriture et la typographie correspondante est gebrochene Schriften (« Ă©critures brisĂ©es Â»). La typographie la plus reprĂ©sentative de ce style est la Textura, Ă©galement reprĂ©sentĂ© par des formes moins anguleuses comme la Schwabacher. Dans d’autres pays europĂ©ens, les gothiques Ă©voluent lentement vers des formes plus arrondies (Rotunda), avant de disparaĂ®tre, remplacĂ©es Ă  la Renaissance par les Ă©critures humanistiques. L’Allemagne conserve la gothique, et l’écriture cursive Ă©volue parallèlement. La Kurrent trouve sa forme dĂ©finitive au XIXe siècle.

Elle se distingue des Ă©critures europĂ©ennes par son aspect anguleux et le ductus de certaines lettres qui diffère totalement de celui des Ă©critures latines. On continue d’utiliser plusieurs formes de « s Â» : le « s long Â» (forme initiale ou mĂ©diale) qui remplace le « s Â» antique (qui n'est gardĂ© qu'en position finale ou en capitale) et le Eszett « Ăź Â» qui est la ligature d’un s long Es et d’un z zett (simplifiĂ© pour se rapprocher d'un s antique liĂ© au premier s long), lequel est aussi parfois employĂ© aussi en tant que capitale (bien que normalement pas utilisĂ© en initiale et donc sans valeur de majuscule, il sert au lieu d'un digramme de lettres capitales pour l'inscription monumentale ou l'emphase et le titrage ; cette ligature minuscule ou capitale, utilisĂ©e habituellement en position finale d'un morphème non suivi de particule ou accord en suffixe , Ă©vite aussi certaines ambiguĂŻtĂ©s Ă  la lecture de mots allemands frĂ©quemment composĂ©s par agglutination en facilitant la sĂ©paration sĂ©mantique des morphèmes).

Pourtant certaines lettres de la Kurrent restent difficiles Ă  distinguer pour le lecteur (dont le « c Â» et le « e Â», ou le « n Â» et le digramme « cc Â» ou encore la transcription minuscule de l'umlaut joint après une voyelle capitale et non en position diacritique au-dessus de la voyelle) sans une grande attention portĂ©e lors de leur tracĂ© manuscrit (par une nette distinctions de largeur du glyphe et la position verticale d'attachement de certains traits internes) et l'Ă©criture est peu adaptĂ©e Ă  l'imprimerie pour les textes en petits caractères : le lecteur restitue les distinctions par la globalitĂ© du mot transcrit et son contexte dans la phrase et par sa connaissance de la langue, mais Ă©crire de façon manuscrite demande un effort important d'apprentissage et les transcriptions, bien que jointives, ne sont pas aussi rapides qu'avec d'autres styles jointifs manuscrits et ce temps passĂ© entre en concurrence avec celui nĂ©cessaire pour l'apprentissage de la lecture et de la langue elle-mĂŞme (aussi bien an plan lexical et sĂ©mantique que syntaxique et grammatical ou stylistique) et l'usage de l'Ă©criture pour d'autres matières.

Au XXe siècle, l’enseignement de la Kurrent est remplacĂ© par celui de la SĂĽtterlin, mise au point en 1911 par le Prussien Ludwig SĂĽtterlin. Il n’y a pas de changements radicaux, mais l’écriture est plus simple (droite alors que la Kurrent Ă©tait très inclinĂ©e et mieux adaptĂ©e au tracĂ© Ă  la plume en main droite), plus aĂ©rĂ©e et donc plus lisible. L’enseignement de la SĂĽtterlin, lĂ©gèrement modifiĂ©e et appelĂ©e Deutsche Volksschrift (« Ă©criture populaire allemande Â») est officiel en 1935.

En 1941, un dĂ©cret de Martin Bormann dĂ©cide l’abandon de l’écriture gothique pour l’écriture latine. Le texte de Bormann prohibe explicitement les Schwabacher Judenlettern (« lettres juives Schwabacher Â»), assertion qui ne repose Ă©videmment sur aucune rĂ©alitĂ© historique, mais qui clĂ´t un dĂ©bat commencĂ© au dĂ©but du XIXe siècle entre tenants de l’écriture gothique germanique et de l’écriture latine, appelĂ©e Antiqua. Hitler lui-mĂŞme, dès 1934, dans ses rĂŞves d’hĂ©gĂ©monie europĂ©enne, avait annoncĂ© qu’il faudrait nĂ©cessairement revenir Ă  l’écriture latine[1].

À partir de 1941, la deutsche Normalschrift, sur un tracé établi par Ludwig Sütterlin, est désormais enseignée dans les écoles. La Sütterlin continue d’être enseignée à titre de seconde écriture, et pour permettre la lecture des documents anciens. La Kurrent est également enseignée jusqu'en 1952 comme écriture calligraphique.

Le D majuscule a été conservé depuis les débuts de l’imprimerie comme signe conventionnel de correction typographique, le deleatur (suppression de lettres ou de mots).

Spécimen de Kurrentschrift (2021) par Kaushik Carlini

Répartition géographique

La Kurrent fut employée en Allemagne et dans sa zone d’influence (Autriche, Suisse, Tchéquie), mais aussi en Scandinavie. En Norvège et au Danemark le gotisk håndskrift a été utilisé pour l'apprentissage de l'écriture jusqu’en 1860 et 1875, avant d'être remplacé par la graphie dite latinsk skrift ou style anglais, les marchands Danois et Norvégiens ayant depuis des siècles associé cette écriture cursive différente de la leur à celle de leurs partenaires anglais. Les deux graphies ont été utilisées jusque vers 1920, parallèlement avec l'apparition de formes hybrides.

Notes

Bibliographie

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